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Nous avons remarqué que les manisobas dont l'écorce était la plus foncée étaient aussi ceux produisant le plus de gomme.

La tige s'élève verticalement : elle peut atteindre 8 à 10 mètres à la naissance des branches et 40 centimètres de diamètre à la base; elle se ramifie en deux, trois ou quatre branches. Cellesci se divisent à leur tour en rameaux venant se terminer presque sur un même plan horizontal, de façon à former une sorte d'ombelle (fig. 1).

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Les feuilles (fig 2) sont multilobées (5 lobes) et, phénomène rare, au Brésil, elles sont caduques elles jaunissent et tombent au commencement de la saison chaude, c'est-à-dire fin septembre. Les bourgeons réap

Alors qu'en France c'est en hiver que les arbres sont dépouillés de leur verdure, au contraire, au Brésil, c'est pendant l'été que les manisobas perdent leurs feuilles. La chaleur continue, comme le froid continu, produit donc un effet semblable sur l'arrêt de la végétation.

Disons-le en passant, si, en général, les plantes, au Brésil, conservent, par une sécheresse prolongée, leur éternelle verdure, alors qu'on pourrait creuser très profondément sans trouver trace d'humidité, c'est qu'elles vivent alors surtout par leurs feuilles. Pendant les nuits tropicales, une rosée abondante se dépose sur les feuilles et est absorbée par elles.

Les nouvelles feuilles du manisoba poussent, comme nous l'avons déjà dit, vers la fin de février. Les fleurs apparaissent bientôt à leur tour et donnent des fruits dont la maturité est complète à peu près au moment de la chute des feuilles. Les fleurs apétales ont un calice à 5 lobes, plus courts dans les fleurs mâles que dans les fleurs femelles.

Le fruit est une capsule à trois lobes, il présente six lignes rougeâtres, trois dans les sillons séparant les lobes et trois autres au milieu des lobes (fig. 3). Au moment de la maturité, l'enveloppe

s'ouvre suivant les lignes rouges et éclate avec un bruit assez fort, projetant les graines tout autour de l'arbre à une distance parfois très grande.

La graine (fig. 4), très ressemblante à celle du ricin, comme aspect et comme grosseur, présente une coque extrêmement dure.

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Vaisseaux laticifères. Ce sont les vaisseaux contenant le lait ou latex d'où l'on extrait le caoutchouc brut. Ces vaisseaux se trouvent surtout à la partie interne de l'écorce.

L'écorce, chez le manisoba, est peu épaisse. Elle comprend un fin épiderme ressemblant, comme nous l'avons dit, à celui du cerisier. Cet épiderme peut d'ailleurs être enlevé sans nuire à l'arbre et il repousse parfaitement.

En dessous de l'épiderme est un tissu cortical externe vert, puis vient la zone laticifère proprement dite.

Les vaisseaux gummifères donnent des ramifications répandues un peu partout dans l'écorce et à travers l'endoderme, jusque dans la moelle.

Le pétiole des feuilles est également riche en vaisseaux laticifères et au coussinet les ramifications de ces canaux sont particulièrement nombreuses.

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Habitats du Manisoba. Le manisoba, comme les autres plantes gummifères, prospère surtout dans la zone tropicale. Le climat y est régulier, la température variant de + 20° C à + 42° C et la moyenne des pluies annuelles est d'environ 2 mètres.

Il est difficile de déterminer entre quelles latitudes, nord et sud, on peut planter avec succès le manisoba. On sait qu'indépendamment de la latitude, beaucoup d'influences agissent sur le climat d'un pays.

Telles sont l'altitude, le voisinage des montagnes, de la mer, les courants aériens et sous-marins.

Comme exemple de plantation de manisobas, nous citerons celle de l'usine Brazileiro » dont nous avons déjà dit quelques mots dans l'Avant-propos.

A cette usine, la température maximum varie entre + 37° C et 39° C. Dans les nuits d'hiver (saison des pluies), elle peut s'abaisser à 18° C.

Les pluies ont lieu de mai en août et les plus fortes sont en juin. L'usine est située à 60 kilomètres environ de Maceio, capitale de l'état d'Alagoas, à 9o environ de latitude sud.

II

CULTURE DU MANISOBA

Si, comme nous l'avons dit précédemment, le manisoba peut pousser sur des hauteurs rocailleuses et incultes, et résister à une très forte sécheresse, il ne faut pas en déduire pour cela qu'il convient de rechercher spécialement de pareils terrains pour établir sa plantation.

D'une manière générale, aussi bien pour le manisoba que pour toute autre plante, sous un climat approprié, plus les terrains seront riches en humus et seront dans de bonnes conditions au point de vue de l'humidité, plus la végétation sera rapide :

Les terres, par trop marécageuses, à moins de faire des travaux d'irrigation, ne conviennent pas au manisoba. Le latex serait trop aqueux et donnerait un faible rendement en gomme. D'un autre côté, la récolte du caoutchouc pourrait présenter de sérieuses difficultés, au moment du saignage.

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Dans un jardin, à l'usine « Brazileiro », c'est-à-dire dans une bonne terre, convenablement remuée, nous avons obtenu deux manisobas qui au bout de trois ans avaient 15 centimètres de diamètre à la base. Pendant le même laps de temps les manisobas des plantations, c'est-à-dire cultivés dans un terrain moins riche et avec moins de soins, n'avaient eux en moyenne que 7 centimètres.

Donc, colons, choisissez, pour votre plantation, des terrains fer

tiles et pas trop humides. Mais soyez bien persuadés que plus la terre sera travaillée, plus les soins que vous donnerez à votre culture seront grands, plus aussi le succès sera certain et rapide. Surtout, ne perdez jamais patience, le résultat attendu arrive souvent au moment où on désespère le plus.

Une plantation de manisobas rapporte des bénéfices, au plus tard, au bout de dix ans. Si vous croyez ne pas avoir assez d'opiniâtreté pour attendre jusque là, employez une partie de vos capitaux et de votre labeur à cultiver des plantes, produisant plus rapidement une récolte lucrative. Tout cela est évidemment aussi bien une affaire de capitaux que de persévérance.

Dans ce qui va suivre, nous dirons comment on plante le Manisoba au Brésil.

La culture comprend, pour ce cas particulier, comme pour tous les autres cas, trois phases consécutives:

1o Préparation du terrain (défrichage);

2o Plantation proprement dite;

3o Soins donnés à la plantation (nettoyage).

1° Défrichage.

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On peut avoir affaire à un terrain déjà travaillé en vue de la culture d'une autre plante et qu'on a laissé en repos. Il est alors couvert d'une végétation plus ou moins développée (Matta ou capoeiro), ou bien l'on doit s'occuper d'une portion de forêt vierge (Matto grosso).

Le défrichage consiste à abattre les arbres, arbustes, lianes, herbes, en un mot toute la végétation extérieure sans s'occuper des racines. Les instruments employés sont la hache (Machado) pour les gros arbres et la foice pour le reste.

La foice (fig. 5) est une sorte de serpe avec un manche d'environ un mètre. L'ouvrier s'en sert des deux mains, et, frappant obliquement à droite et à gauche, il rase, pour ainsi dire, la terre de sa végétation.

Les gros arbres sont coupés à un mètre du sol environ, au moyen de la hache. Le reste du tronc et les racines pourrissent par le temps. Ces arbres sont employés comme bois de charpente et de menuiserie, ou comme traverses de chemins de fer. Les grosses bran

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ches et les troncs de peu de grosseur sont coupés en tronçons de un mètre et mis de côté pour servir de combustible soit dans les usages domestiques, soit dans les usines.

Pour se débarrasser des menues branches, lianes et herbes, laissées sur le sol, on emploie un moyen très expéditif et très commun, en Amérique on les place en tas, quand elles sont sèches, et on y met le feu. L'incendie du brasier se propage sur toute la surface du sol et brûle toutes les herbes qui ont échappé à la foice. Pour circonscrire le feu dans le terrain défriché, on a eu soin, tout d'abord, de le séparer des terres avoisinantes, par un petit sentier de terre dénudée fait au moyen de la houe (enchada) (procédé employé, en Europe, pour arrêter le feu dans les forêts). Au moment de l'incendie, il est cependant nécessaire de placer des sentinelles de distance en distance, sur le pourtour du terrain à brûler. Ces sentinelles sont armées, les unes de foices, les autres de branchages.

Si par hasard le feu venait à gagner les bois voisins ou les plantations voisines, ou bien était mis par des étincelles, les ouvriers l'éteindraient vite en frappant la partie incendiée de leurs rameaux ou de leurs foices.

Une fois le terrain brûlé et suffisamment refroidi, on ramasse tous les débris qui ont échappé au feu (les femmes et les enfants sont ordinairement employés à ce travail), et on les brûle de nou

veau.

Le terrain est ainsi préparé pour recevoir la plante.

Au Brésil, comme ailleurs, les ouvriers se payent à la journée ou à la tâche. Le salaire dépend des régions et subit la loi de l'offre et de la demande. Pendant ces dernières années, dans l'état d'Alagoas, la journée de dix heures se payait 1.000 reiss, le change moyen était de 800 (cela fait, en monnaie française, 1 fr. 25).

Pour les grandes exploitations, le travail à la tâche est préférable parce qu'il demande moins de surveillance. Les nègres, indiens et mulâtres ne font preuve d'activité que lorsqu'on est constamment sur leur dos.

Pour le défrichage, comme pour tous les travaux des champs, le travail à la tâche est déterminé comme il suit on donne à l'ouvrier une certaine superficie de terrain à travailler, c'est ce qu'on appelle un conta. Le prix du conta correspond au salaire de l'ouvrier travaillant à la journée et sa mesure se fait au moyen de la vara.

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