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nommé d'office pour la partie, et que l'expert nommé de la part de l'administration s'excuse, l'administration ne peut se borner à nommer un autre expert et à suivre l'effet du jugement obtenu; elle doit reprendre les poursuites depuis le principe; car elle doit mettre la partie adverse à même de proposer ses moyens de récusation contre le nouvel expert nommé, s'il y a lieu, et d'un autre côté, elle doit avoir nommé son expert avant que la partie puisse être tenue à nommer le sien (La Haye, Cour sup., 6 juin 1828).

370. Pour la rédaction et le dépôt de leur rapport, les experts se conformeront aux prescriptions des art. 317 à 319, c. pr. civ.

Le procès-verbal d'expertise sera rapporté, au plus tard, dans le mois qui suit la remise qui aura été faite aux experts de l'ordonnance du tribunal, ou un mois après la nomination par le tribunal, d'un tiers-expert (L. de frim. an VII, art. 18, § 5 et 31 mai 1824, art. 22).

En déterminant un délai pour le dépôt du rapport des experts dans les expertises en matière d'enregistrement, la loi fiscale n'a attaché aucune sanction à cette prescription; en conséquence, l'inobservation de ce délai ne peut avoir aucune influence sur la validité de l'opération (V. dans ce sens, Versailles, 6 août 1840; Alençon, 31 mai et 5 juill. 1842; Seine, 15 janv. 1870, D. P., 75, 1, 115).

371. En cas de partage d'opinions entre les experts, dit l'art. 22 de la loi du 31 mai 1824, le même tribunal, c'est-à-dire celui dans le ressort duquel le bien est situé, leur adjoindra un tiers-expert (1).

(1) En cas de désaccord, la dissidence est suffisamment constatée par la déclaration contenue dans le procès-verbal (Charleroi, 9 mars 1861, J., n° 8784). V. DALLOZ, no 4825).

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Pour les formalités en ce qui concerne cette nomination, V. Circ. P. B., 8 oct. 1828, art. 18 et 19.

Après l'adjonction du tiers-expert, c'est une nouvelle opération qui commence et le rapport peut, s'il ne doit, être dressé en commun.

Aucune disposition des lois spéciales n'oblige le tiersexpert, nommé dans le cas de discord des deux premiers experts, à adopter l'estimation de l'un ou de l'autre. Les juges ne peuvent, par conséquent, annuler l'estimation du tiers-expert sous prétexte qu'au lieu d'énoncer son opinion personnelle sur la valeur des immeubles à expertiser, il aurait dù se ranger à l'une de celles exprimées par les deux experts qu'il était appelé à départager (Décret 25 janv. 1807; Cass. 18 août 1823; Dict. de l'enr. Vo Expertise, no 99).

372. Les juges sont-ils liés par le résultat de l'expertise faite conformément à l'art. 17 de la loi de frim. an VII? Attendu, répond un arrêt de la Cour de Cassation de France, du 7 nov. 1859 (D. P., 59, 1, 499), que, si en matière ordinaire, la loi permet aux juges de s'écarter de l'avis des experts ou de ne suivre que l'avis isolé de l'un deux, il n'en est pas de même lorsqu'il s'agit de l'application de la loi spéciale du 22 frim. an VII, qui a ordonné l'expertise comme moyen de faire connaître. la valeur des biens immeubles soumis au droit de mutation; que, dès lors, les juges ne peuvent, en cette matière, ni faire par eux-mêmes l'estimation requise, ni critiquer celle faite par les experts, ni adopter arbitrairement l'avis isolé de l'un des experts, mais que c'est le résultat de l'expertise constaté par la majorité des experts, qui lie le tribunal et fait la loi des parties (1).

(1) La règle qui veut qu'en matière d'enregistrement, l'expertise soit obligatoire pour le juge, a été souvent appliquée par la jurisprudence (V. Cass. fr., 24 avril 1850 [D. P., 50, 1, 127 et la note]; Jur. gén., Vo Enr., nos 4760 et s., et BONNIER, tr. des preuves, no 88).

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· Contrà: DEMANTE, no 762. Quelle est, dit cet auteur, la foi due aux

Ainsi, si les trois experts ne sont pas d'accord, l'évaluation faite par deux des experts est définitive.

<< Attendu que si, en thèse générale, les juges peuvent quelquefois s'écarter de l'opinion des experts, cette faculté cesse quand la loi indique l'expertise comme moyen spécial de vérifier le fait; que, dans l'hypothèse actuelle de trois experts deux s'accordaient pour estimer à fr. 2,280, la maison vendue pour fr. 2.000 seulement, c'est-à-dire, 30 fr. au-delà du huitième en sus du prix exprimé au contrat; qu'ainsi, on ne pouvait, sans violer les art. 17 de la loi de frimaire an VII et 5 de la loi du 27 ventôse an IX, affranchir l'acquéreur du payement des frais de l'expertise et du double droit sur le supplément de l'estimation..... » [Cass. fr., 7 mars 1808, D. A., 7, 304, CH. et R., no 3272] (1).

rapports des experts? En règle générale, les juges ne sont pas astreints à suivre l'avis des experts si leur conviction s'y oppose (C. pr, civ., art. 323). On tient généralement qu'il en est autrement en matière d'enregistrement. Mais cette prétendue exception ne me paraît fondée ni sur le texte des lois ni sur les convenances judiciaires. Vainement on oppose qu'il peut y avoir << quelque danger à ce que des évaluations délicates qui donnent lieu à tant de fraudes contre le trésor public, soient entièrement à la merci du tribunal » (BONNIER, loc. cit.). Je ne vois pas moins de danger à laisser ces appréciations à la merci des experts. Je crois donc qu'en cette matière comme en toute autre, le rapport des experts n'est qu'un élément de preuve et que l'appréciation de ce rapport est soumise au juge dans les termes du droit commun » (V. note sur le dit arrêt, eod. loco).

(1) En cas d'expertise provoquée pour rechercher si le prix de vente déclaré dans un `acte est inférieur à la valeur vénale, le procès-verbal des experts ne doit pas nécessairement exprimer que cette valeur a été déterminée par eux en tenant compte de l'époque de l'aliénation et par comparaison avec des fonds voisins et de même nature.

En matière d'enregistrement, le rapport des experts, sauf le cas d'omissions ou d'erreurs matérielles, constitue une véritable décision à laquelle le juge a l'obligation de se référer. En conséquence, il n'est pas requis que ce rapport fasse connaître, conformément à l'art. 318, c. fr. civ., les motifs de l'avis émis par l'expert dissident; il suffit qu'il énonce l'avis des deux experts formant la majorité (Trib. d'Arlon, 17 août 1873; C. et B., t. 24, p. 199).

A l'occasion de l'art. 19 (L., 17 déc. 1851), la section centrale de la Chambre des Représentants disait que l'évacuation donnée par les experts en matière de droits de succession, est une évaluation définitive et sans appel. Elle concluait de là que les experts n'auraient pas besoin de motiver leur avis et de se livrer ainsi à un travail qui augmenterait les frais d'exper

Lorsque chacun des experts donne une évaluation différente, l'avis intermédiaire doit avoir la préférence. « Dans les expertises en matière d'enregistrement, décide un arrêt de la Cour de Cassation de France, du 9 mai 1892, D. P., 93, 1, 28, les juges ne peuvent faire par eux-mêmes, l'estimation requise ni adopter arbitrairement l'avis de l'un des experts; c'est le résultat de l'expertise qui lie le tribunal et fait la loi des parties; en conséquence, au cas où un tiers-expert ayant été appelé, les trois experts ont fait des estimations différentes, l'évaluation intermédiaire doit être nécessairement adoptée par le juge. » (L. de frim. an VII, art. 7, 18 et 19.) V. conf., Jur. gén., Vo Enr., no 4760 et s.

En matière d'enregistrement, lorsque l'expertise a été réclamée, le tribunal est lié par ses résultats et ne peut adopter l'avis isolé de l'un des experts.

Par suite, dans le cas où l'estimation du tiers-expert excède celle des deux autres experts, l'estimation intermédiaire doit être prise pour base de la perception. comme représentant l'avis de la majorité (trib. de Château-Thierry, du 31 juillet 1858, D. P., 58, III, 63).

En réalité, dit ce jugement, le résultat de l'expertise, quand il y a un tiers-expert, se trouve toujours dans l'avis partagé par la majorité, puisqu'elle est comprise à fortiori dans l'évaluation plus élevée faite par le tiers-expert.

- En matière d'enregistrement, le résultat de l'expertise est obligatoire pour les tribunaux... Et si en cas de nomination d'un tiers-expert, les trois experts ont fait une estimation différente, l'évaluation intermédiaire étant comprise dans la plus forte, doit être considérée comme constituant l'avis de la majorité des experts et le juge ne

tise. On modifia, en conséquence, le projet de loi qui exigeait un avis motivé de la part des experts. L'avis des experts en matière d'enregistrement n'est donc pas seulement un élément d'instruction destiné à éclairer le juge et que celui-ci est libre de repousser ou d'adopter, mais une véritable décision qui fait loi entre les parties (ibid).

peut s'en écarter en adoptant l'estimation la moins élevée (Cass. fr., 24 avril 1850, D. P., 50, 1, 126). — V. comme analogie, l'art. 16 de la loi du 27 décembre 1817 sur les droits de succession, qui porte qu'en cas de dissentiment entre les trois experts, l'estimation qui n'est ni la plus haute, ni la plus basse, sera censée représenter la valeur vénale du bien (1).

373. Mais le tribunal peut, à la suite de la première expertise et à raison de son irrégularité ou de son insuffisance, en ordonner une seconde en annulant la première. Le tribunal, dans ce cas, pourra-t-il, en conformité de l'art. 322, C. pr. civ., nommer d'office les trois experts chargés de procéder à cette seconde expertise?

La Jurisprudence française est dans le sens de la négative.

Attendu, porte un arrêt de la Cour de Cassation de France, du 16 avril 1845 (D. P., 45, 1, 196), que ces formes (prescrites par l'art. 18 de la loi de frim. an VII) sont les seules qui peuvent être suivies; qu'il résulte, en effet, de l'avis du Conseil d'Etat, du 12 mai 1807, que le Code de procédure (art. 1041) n'a pas dérogé aux règles prescrites en cette matière par la loi sur l'enregistrement;

qu'il n'existe dans cette loi aucune disposition qui autorise les juges, dans le cas où ils croient devoir ordonner une seconde expertise à raison de l'insuffisance de la première, à suivre d'autres règles que celles qui sont prescrites par l'art. 18..... (V. conf., 16 juin 1823,

(1) Les dispositions de l'art. 318, c. pr. c. doivent-elles être observées en ce qui concerne les expertises en matière d'enregistrement?

Ainsi, lorsque dans une expertise d'enregistrement, l'intervention d'un tiers-expert est devenue nécessaire pour lever le dissentiment des deux premiers, faut-il, s'il ne s'est pas formé un seul avis à la pluralité des voix, qu'une nouvelle expertise soit ordonnée? — Résolu négativement par l'arrêt de la Cour de Cassation belge, du 19 février 1833 (Pas., 1833, 1, 130). — V. Conf., Déc., 21 mars et 28 nov. 1820; 15 nov. 1825 (Req., no 554 et 1535; Charleroi, 30 avril 1859; J., no 8273).

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