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bien adjugé, lequel n'excède pas sa part dans la masse héréditaire?

Cette question a déjà été examinée suprà, no 409; nous y renvoyons le lecteur.

798. Une condition qui doit certainement s'accomplir n'est pas proprement une condition et n'a l'effet que d'un terme de payement. C'est pourquoi si sub câ conditione debetur quae omnimodò extitura sit, solutum repeti non potest. L. 18, ff., d. t.

C'est, sans doute, en s'inspirant de cette règle, que le fisc ordonne la perception immédiate des droits dûs sur certains contrats dont la réalisation est soumise à une condition, tels que sont les contrats de mariage.

799. La condition résolutoire, au contraire, tenant en suspens non plus les effets des contrats mais leur révocation, le contrat fait sous condition résolutoire, produit, de même qu'un contrat pur et simple, tous ses effets, hic et nunc, c'est-à-dire, dès qu'il est formé; il est, dès lors, soumis, dès sa formation, aux droits proportionnels auxquels il donne lieu, sans que ceux-ci soient restituables si, par la suite, le contrat vient à se résoudre en vertu d'une clause expresse de l'acte.

La réalisation de cette condition est un événement ultérieur qui, aux termes de l'art. 60, ne peut autoriser la restitution d'un droit régulièrement perçu.

C'est sur ce principe qu'il faut décider:

1o que la révocation d'une donation pour survenance d'enfants n'opère point la restitution du droit perçu sur la donation;

2o que lorsqu'un immeuble a été vendu pour le prix qui sera déterminé par experts et que néanmoins les parties ont donné à cet immeuble une estimation provisoire pour l'assiette du droit d'enregistrement, cette esti

mation a rendu la vente parfaite, nonobstant que les parties en auraient consenti depuis, la résolution. Cette résolution n'ayant d'effet que pour l'avenir, ne rend pas restituable le droit primitivement perçu [Cass., 14 août 1807] (1);

et 3° qu'une vente d'immeubles faite sous la charge d'acquitter les dettes hypothécaires dont ils sont grevés, est pure et simple et renferme seulement, comme tout autre contrat synallagmatique, la condition résolutoire pour le cas où l'acquéreur ne satisfera pas à ses engagements; en conséquence, il n'y a pas lieu à restitution du droit perçu, lorsque, par le fait, la vente se trouve résolue, faute par l'acquéreur d'avoir rempli sa condition (Cass., 28 août 1815).

800. Si la condition est suspensive, le droit qui aurait été perçu devra être restitué dès qu'il sera devenu certain que la condition ne s'accomplira pas (c. c., art. 1176). Ainsi :

1o le droit perçu sur un jugement contradictoire qui

(1) CH. et RIG. décident, au contraire, que lorsque le prix d'une vente est laissé à l'arbitrage d'un tiers, la vente est soumise à une condition suspensive. Si ce tiers, par une circonstance quelconque, ne fixe point le prix, il n'y a pas de vente, le droit n'est point dù.

L'administration qui n'aime pas à courir après les conditions suspen sives, exige que, sur la présentation d'un pareil acte, les parties fassent une déclaration qui serve de base à la perception.

Les parties doivent se refuser à cette exigence du receveur. L'acte, tel qu'il est arrêté entre les parties, n'a pas de prix; celle qui la présente n'a pas le pouvoir de changer la convention. Vainement, le receveur dirait que la déclaration ne tire pas à conséquence, qu'elle n'est destinée qu'à faire une perception provisoire. La loi ne reconnait que dans les cas qu'elle précise, des perceptions provisoires. S'il n'y a pas de prix, l'acte doit être enregistré au droit fixe; d'ailleurs, lorsque la partie a cédé à la demande du receveur, la régie se fait une arme de la déclaration qu'elle a ainsi obtenue, pour soutenir que les parties n'ont pas attendu l'appréciation de l'expert et que le prix qu'elles ont consenti à fixer rend la vente parfaite.

C'est ainsi qu'un arrêt de la Cour de cassation, chambre civile, du 19 mars 1850, a décidé que le droit n'était pas restituable, faute d'estimation par le tiers.

condamne au payement du prix d'une vente verbale, sauf une preuve réservée à l'acheteur, doit être restitué en partie, si la preuve étant faite, un second jugement réduit la première condamnation;

2o le droit proportionnel perçu sur les stipulations contenues dans un acte constitutif de société anonyme doit être restitué, lorsqu'il est établi que la société n'a point été autorisée par le Gouvernement (tribunal de Bordeaux, 13 janvier 1836); la perception faite dans ces conditions, étant essentiellement provisoire et sujette à restitution (Délibération de la régie française, 13 janvier 1836, Jurisprudence générale, Vo Enregistrement, no 5401);

et 3° le droit perçu sur une donation contenue dans un acte de mariage, doit être restitué si le mariage n'a pas lieu.

801. Quid? en cas d'annulation d'un testament? Le droit perçu sur un legs doit-il être restitué? La Cour de cassation de France a constamment jugé dans le sens de la négative.

Elle a décidé, par un premier arrêt, que l'annulation d'un testament prononcée depuis que le testament a été enregistré, est un événement ultérieur qui ne peut servir de fondement à une demande en restitution ou en réduction des droits régulièrement perçus (Cassation, 7 avril 1840).

Et depuis, elle a décidé même que le droit de mutation perçu sur un legs universel, par suite de la déclaration de décès faite par le légataire universel, n'est pas restituable en cas d'annulation de ce legs, encore que le légataire ne l'aurait acquitté que sous la réserve des fins de l'instance de nullité déjà engagée lors de ce payement (Cass., 6 août 1849).

Une exception est établie par l'art. 8, § 4 de la loi du 16 déc. 1851, à l'égard des droits payés par les héritiers

présomptifs d'un absent, au cas où l'existence de ce dernier a été légalement prouvée.

802. II. Sont également restituables, les droits d'enregistrement payés par erreur de fait.

Cette règle de toute justice a été souvent méconnue, dit DALLOZ, n° 5413. Ainsi, il a été décidé :

1o qu'une erreur constatée dans l'évaluation du revenu d'immeubles échangés ne peut autoriser la demande en restitution d'une partie des droits perçus d'après cette évaluation;

2o que les droits perçus sur un acte de vente où, par erreur, le prix a été porté à une somme supérieure à celle qui a été convenue entre parties, ne doivent pas être restitués, alors même que cette erreur matérielle est prouvée ;

3o que lorsque les parties, en présentant un acte de donation immobilière à l'enregistrement, ont désigné, par erreur, la valeur capitale de l'immeuble pour le revenu, les droits ne doivent pas être restitués, alors même que les parties justifient leur erreur en produisant le rôle des contributions foncières;

et 4° que lorsque les droits d'enregistrement ont été perçus d'après le prix exprimé dans une vente d'immeubles faite avec indication de contenance, il n'y a pas lieu à restitution d'une partie des droits, alors qu'étant ultérieurement reconnu par jugement qu'il y a erreur dans la contenance de l'immeuble, le vendeur est condamné à la restitution du surplus du prix payé (Cass. B., 16 nov. 1850, Bull. 1850, 1, 465).

V. conf. Jug. du trib. de Nevers, 10 juill. 1855, D. P., 56, III, 8. « La perception du droit proportionnel de vente immobilière faite sur le prix déterminé au contrat, n'est soumise à aucune réduction pour le cas où ultérieurement, une partie du prix serait restituée à l'acheteur, à raison du déficit de convenance, Encore

même que cette circonstance aurait été prévue, si d'ailleurs les parties n'ont point entendu que la fixation serait purement provisoire ».

C'est là, ajoute la note, un avertissement dont les notaires feraient sagement de tenir compte [V. D. P., 52, III, 16] (1).

Mais parfois aussi, cette règle a été exactement appliquée.

Il a été décidé, en effet, 1o que, lorsque le droit de

(1) 1o L'art. 60 de la loi de frimaire qui prohibe la restitution de tout droit d'enregistrement régulièrement perçu, est applicable même au cas où la perception a été opérée par suite d'une erreur de fait. Il n'appartient pas aux tribunaux d'apprécier l'usage que fait l'administration de la faculté d'opérer la restitution des droits perçus à la suite d'erreurs matérielles.

<< Il est vrai que l'Administration reconnaît que ses instructions lui permettent d'opérer la restitution des droits perçus à la suite d'erreurs matérielles, mais ces instructions ont le caractère de règlement d'ordre intérieur et l'Administration conserve le droit de ne pas en appliquer les dispositions lorsque les circonstances l'exigent; le tribunal n'a pas à rechercher si, dans l'espèce, il n'aurait pas été plus équitable de restituer la somme perçue par suite d'une erreur qui paraît contestée et il convient en conséquence, d'appliquer strictement les dispositions de l'art. 60, derrière lequel se retranche l'Administration (Du 9 août 1890); trib. civ. de Bourgoin, D. P., 91, table, Vo Enr., no 40.

2o L'acte qualifié « rectificatif » dans lequel les parties déclarent que le prix mentionné dans le contrat de vente déjà soumis à l'enregistrement a été porté par erreur à un chiffre plus élevé que celui réellement dû, ne peut servir de base à une demande de restitution du droit proportionnel perçu sur la somme excédant ce chiffre, alors que les parties ne peuvent, à l'appui de leur obligation d'erreur matérielle, produire aucun acte authentique antérieur à la perception (L. de frim., art. 60), du 25 août 1861, trib. de Vitry-le-François, D. P., 61, III, 85.

Le présent jugement réserve avec raison le cas où l'erreur de fait pouvait être prouvée à l'égard de l'Administration, à l'aide d'actes authentiques antérieurs à celui soumis à la formalité. Mais l'Administration, dans les instructions transmises à ses préposés, ne fait pas cette concession. Par une solution du 22 août 1834, elle a déclaré que les droits perçus sur un acte de vente où, par erreur, le prix a été porté à une somme supérieure à celui qui a été convenu entre parties, ne doivent pas être restitués, alors même que l'erreur matérielle est prouvée. Cette doctrine a été critiquée avec raison, non seulement comme contraire à l'équité qui veut que les parties puissent, comme l'Administration, revenir sur une perception entachée d'erreur, mais aussi comme contraire aux intérêts du fisc. - V. GARNIER, Rép. gén. de l'enr., no 11202 et suiv.; V. Jur. gén., Vo Enr., nos 5413 et suiv.

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