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On avait soutenu la négative par des motifs tirés de la règle commune. On disait que les actes nuls n'interrompant point la prescription (c. c., art. 2247), ils ne pouvaient par le même motif fonder une prescription nouvelle. Mais, dans l'espèce, une règle spéciale est établie par la loi de frim. an VII; il y a eu des actes de poursuite et il y a interruption pendant un an. D'ailleurs, les nullités sont des exceptions que ne peuvent, sauf les cas prévus par la loi, comme par exemple, pour les mineurs, opposer ceux qui les commettent. La prescription interruptive de poursuites pourra être invoquée même lorsqu'il y aura désistement, car les poursuites dont on se sera désisté, n'en auront pas moins existé (Dict. de l'enr., Vo Prescription, no 35).

861. L'interruption civile de la prescription ne profite qu'à celui qui l'a formée; ainsi, l'action de la régie n'a pas conservé celle qu'on pouvait avoir contre elle. (Arrêt du 30 mars 1808.) Addè, Déc. Min. Just., 30 août 1808 et Fin., 24 sept. 1808; nombre 2, I, gén., 23 mars 1824, n° 424.

Ainsi, si la vente a été faite à plusieurs acquéreurs et que la demande en expertise ne soit signifiée qu'à l'un d'eux, il n'y aura pas interruption à l'égard de tous.

862. Elle ne profite non plus qu'au regard du droit dont on a demandé la restitution; ainsi, elle n'arrêterait pas la prescription à l'égard d'autres droits qui auraient été payés indûment pour le même acte mais dont la restitution n'aurait pas été demandée (Cass. fr., 8 décembre 1856; Montpellier, 10 février 1862; GARNIER, article 840, 1684).

La prescription du droit d'enregistrement ou des actions en restitution de ces droits, ainsi que l'exprime la note sur l'arrêt de la Cour de cassation de France, du

8 déc. 1856, D. P., 57, I, IOI, n'est interrompue par les demandes formées avant l'expiration du délai qu'autant que la demande a pour objet le même droit qu'il s'agit de percevoir ou de restituer, ou qu'elle le comprend virtuellement (V. Jur. gén., Vo Enr., n° 5496 et suiv.; 5497 et suiv.).

Cette demande n'est donc interruptive que relativement au droit dont la perception ou la restitution sont demandées. Elle n'est pas interruptive à l'égard d'un droit complètement distinct de celui qui en a fait l'objet.

C'est ce qui a été décidé par le dit arrêt.

Article IV. PRESCRIPTIONS PLUS COURTES
QUE CELLES RÉGIES PAR LES ARTICLES PRÉCÉDENTS
DE LA LOI DU 17 AOUT 1873.

863. « L'art. 8, pour éviter tout doute sur la portée du projet de loi, assure d'une manière expresse, le maintien des dispositions légales existantes qui pourraient avoir établi, en faveur des particuliers, des prescriptions plus courtes que celles qui sont indiquées dans la nouvelle loi proposée » (Rapport de la Commission).

« L'art. 8 réserve les droits existants en faveur des particuliers. » (Annexe).

Séance du Sénat, du 4 août 1873, p. 288. Art. 8.-M. L MINISTRE DE LA JUSTICE.« Je lis dans une note communiquée par le Département des finances, ce qui suit: Dans les développements à l'appui de leur proposition, MM. Debaets et Lelièvre ont déclaré ne pas vouloir déroger aux lois spéciales qui établissent d'autres délais de prescription et, notamment, à celles qui en fixent de plus courts; cette déclaration pourrait n'être pas suffisante en présence des termes généraux employés dans le projet présenté, celui-ci n'ayant d'autre but que de ré

duire aux termes à établir, les prescriptions qui seraient plus longues d'après les lois en vigueur. Je crois qu'il serait prudent, pour éviter des contestations ultérieures, d'exprimer cette idée d'une manière positive dans le texte de la nouvelle loi. »

« C'est pour répondre à cette préoccupation que l'art. 8 a été introduit dans la loi; il n'a d'autre but donc que de mieux en préciser la portée. Je le reconnais, la disposition pourrait, à cet égard, être considérée comme surabondante; cependant, à un autre point de vue, elle peut n'être pas sans utilité; le nombre des textes de loi qui composent notre législation en matière civile et fiscale est si considérable, les matières qu'elles règlent si complexes, que, quelque minutieux qu'ait pu être l'examen auquel se sont livrés les départements de la justice et des finances, il n'est pas impossible cependant que dans l'une ou l'autre de ces lois, une prescription plus courte que celle dont nous nous occupons, ait échappé à l'attention. Il n'est pas entré dans la pensée des auteurs de la loi d'enlever aux particuliers le bénéfice d'une disposition favorable quelconque. L'art. 8 leur en garantit la conservation.

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M. LE BARON D'ANETHAN..... — « La loi qui nous est soumise est une loi de simplification. C'est une loi qui unifie en quelque sorte, les prescriptions qui étaient disséminées dans différentes lois et qui établit des délais généraux pour tous les cas.

» Or, maintenant, au lieu d'avoir un code aussi complet que possible de prescriptions en matière civile et financière, nous aurons cet article 8, qui va nécessiter de nouvelles recherches pour savoir s'il n'existe pas quelques prescriptions spéciales non prévues par le projet de loi.

» Je ne proposerai pas d'amendement et je ne pense pas que la commission entende que j'en formule un; je voterai la loi, même avec cet article 8, mais je le

considère comme inutile et conséquemment comme fâcheux ».

M. LE MINISTRE DE LA JUSTICE. - « M. d'Anethan s'est arrêté à une seule des considérations que j'ai eu l'honneur d'exposer. Il n'a tenu aucun compte de l'autre, de celle qui consiste à dire qu'en présence de la substitution du système d'énumération à ce sujet, au système du projet primitif, ainsi qu'à raison de la disposition de l'art. 3, il ne pouvait pas être sans utilité de préciser la portée de la loi ».

L'art. 8 est adopté.

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864. Avant la révolution, on ne pouvait opposer au Roi la prescription pour les droits de contrôle, d'insinuation et de centième denier. Ces droits étaient considérés comme essentiels à la souveraineté, et, par cela même, imprescriptibles de leur nature. Mais, pour empêcher ses fermiers de faire remonter leurs recherches à des temps trop reculés, le Roi fixait des époques dans des baux qu'il leur passait. Ainsi, par exemple, les baux des 16 septembre 1738, 20 août 1755 et 26 août 1774, portaient la clause suivante : « Le fermier ne pourra faire la recherche des droits de contrôle, insinuation, centième denier... échus plus de vingt années antérieurement à sa demande, sans préjudicier néanmoins à la nullité des actes ordonnée par les règlements; Sa Majesté se réservant de faire faire, si elle le juge à propos, le recouvrement des dits droits échus avant cette époque ».

Aujourd'hui, les lois nouvelles ont dérogé aux anciens principes sur ce point.

La première de ces lois, celle du 19 décembre 1790, établit (art. 18): 1o la prescription d'une année contre toute demande en supplément et contre toute action en restitution de droits perçus sur tous les actes et contrats;

2o la prescription de trois années, pour toute contravention par omission ou insuffisance d'évaluation dans les déclarations faites par les héritiers, légataires et donataires éventuels; 3 la prescription de cinq années, pour toute demande de droits résultant de successions directes ou collatérales.

Cette prescription n'est applicable qu'à des cas particuliers. Le paragraphe premier de l'art. 18, en parlant de tous actes et contrats en général, paraît les embrasser tous indistinctement; mais évidemment il n'entend parler que des actes et contrats qui ont été présentés à l'enregistre

ment.

Cet article ne parle nullement des actes de mutation, à titre onéreux ou gratuit, qui n'y ont pas été pré

sentés.

La seconde loi, celle du 9 octobre 1791, additionnelle à la première de décembre 1790, parle aussi de la prescription dans ses art. II et 16.

L'article II porte : « la date des actes sous seings privės ne pourra être opposée pour preuve de prescription, contre la transmission d'immeubles, demande des droits ouverts par la transmission d'immeubles réels ou fictifs >>.

Et l'article 16 est ainsi conçu : « la prescription des droits dûs sur des actes publics ANTÉRIEURS à la loi du 19 décembre dernier et non insinués, aura lieu, après cinq ans, à compter du jour de leur date ».

Ces mots, sur des actes publics non insinués, s'appliquent bien à tous actes de mutation, soit à titre onéreux, soit à titre gratuit; mais l'application doit être restreinte aux actes antérieurs à la loi du 16 décembre 1790.

La troisième loi, celle du 14 thermidor an IV, contenant une nouvelle fixation des droits d'enregistrement, est absolument muette sur la prescription.

La quatrième loi, celle du 9 vendémiaire an VI, porte, art. 16 « Le droit d'enregistrement des donations et

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