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envahi hostilement la capitale même, et vous avez rendu rebelle la milice; vous avez occupé les postes et les imprimeries; vous avez arraché de notre sein les conseillers intimes pour la direction des affaires spirituelles de l'église, les ministres d'état, et vous nous avez constitué nous-même prisonnier dans notre résidence apostolique, en pesant militairement sur notre peuple. Nous en appelons pour la décision de cette manière d'agir de votre part, au droit de tous les peuples; nous en appelons à vous-même, comme à un fils consacré et assermenté, pour réparer les dommages; et pour soutenir les droits de l'église catholique; nous en appelons enfin à la justice du Très-Haut. Vous abusez de la force, foulant aux pieds tous les devoirs sacrés et principalement au préjudice de l'église ; vous nous forcerez ainsi, à ce que nous fassions, dans l'humilité de notre cœur, usage de cette force que le Dieu tout-puissant à mise en nos mains, si par la suite vous nous donnez des motifs ultérieurs de faire connaître à l'univers la justice de notre cause; car les maux qui pourront en résulter, tomberont sur votre responsabilité.

Contresigné au secrétariat de l'ambassade, le 27 mars

1808.

LETTRES APOSTOLIQUES

En forme de Bref, par lesquelles sont déclarés excommuniés, et de nouveau excommuniés, Buonaparte et tous les Auteurs, Exécuteurs, et Fauteurs de l'Usurpation de l'Etat de Rome, et des autres Etats appartenant au Saint-Siége.

PIE VII, PAPE,

POUR EN PERPETUER LE SOUVENIR.

Lorsque, dans la mémorable journée du 2 février, les troupes françaises, après avoir envahi les plus riches provinces de l'état pontifical, ont fait une irruption soudaine dans Rome même, il nous a été impossible d'attribuer un pareil attentat, uniquement aux raisons politiques et militaires que les usurpateurs mettaient en avant; c'est-à-dire, de se défendre dans cette ville, et d'éloigner leurs ennemis du territoire de la sainte église romaine: nous n'y avons vu au contraire que le désir de tirer vengeance de notre fermeté et de notre constance à refuser de nous soumettre aux prétentions du gouvernement français. Nous avons vu sur-le-champ que cet attentat avait un objet bien plus étendu que de simples précautions militaires et momentanées, ou une simple démonstration de mécontentement envers nous.

Nous avons vu revivre, renaître de leurs cendres, et reparaître au grand jour les complots impies, qui semblaient sinon réprimés, au moins assoupis, de ces hommes trompés et trompeurs qui voulaient introduire des sectes de perdition, par le secours d'une philosophie vaine et fallacieuse, et qui tramaient ainsi depuis long-temps la destruction de notre sainte religion. Nous avons vu que, dans notre personne, on attaquait, on circonvenait, on combattait le saint-siége du bienheureux prince des apôtres, dans l'espoir que sa chute, si toutefois elle était possible, entraînerait nécessairement avec elle la ruine de l'église catholique, fondée par son divin auteur sur ce siége, comme sur une pierre inébranlable.

Nous avions pensé, nous avions espéré naguère, que le gouvernement français, instruit par l'expérience des malheurs dans lesquels cette puissante nation s'était vue entraînée pour avoir lâché la bride à l'impiété et au schisme, et convaincu par le vœu unanime de la grande majorité des citoyens, s'était enfin véritablement et profondément pénétré de l'importance extrême dont il était pour la sûreté, ainsi que pour le bonheur public, de rétablir de bonne foi le libre exercice de la religion catholique, et de le prendre sous sa protection particulière. Mu par cette opinion, animé par cette espérance, nous qui, tout indigné que nous sommes, tenons sur la terre la place de celui qui est le Dieu de paix, à peine nous fêmes-nous aperçu qu'il s'ouvrait une perspective de réparer les désastres de l'église en France, l'univers entier nous est témoin de

l'empressement avec lequel nous nous sommes prêté à des traités de paix, et combien il nous en à coûté, et à nous et à cette même église, pour conduire ces traités à la fin qu'il a été possible d'obtenir.

Mais, grand Dieu! à quoi notre espoir a-t-il abouti? quel a été le fruit définitif de notre condescendance et de notre libéralité? Depuis le moment où cette paix a été promulguée, nous avons été réduit à faire entendre la plainte du prophète. Voici que dans la paix mon amertume devient encore plus amère, nous n'avons pas dissimulé cette amertume à l'église, ni à nos frères les cardinaux de la sainte église romaine dans l'allocution que nous leur fîmes en consistoire le 24 de mai de l'an 1802, pour leur signifier que, dans cette promulgation on avait ajouté à la convention que nous avions faite, quelques articles ignorés de nous, que nous improuvèmes dès qu'ils nous furent connus. En effet, par ces articles, non-seulement on anéantit dans l'exercice de la religion catholique, dans les points les plus graves et les plus importans, la liberté qui avait été assurée verbalement, convenue, et solennellement promise dans le préambule même de la convention, comme en étant la base et le fondement; mais encore dans quelques-uns de ces articles la doctrine même de l'évangile se trouve attaquée de près. Le résultat de la convention que nous fîmes avec le gouvernement de la république italienne, fut à-peu près sembable: ces mêmes articles que nous avions pris tant de soin de garantir de toute interprétation arbitraire et équivoque, ayant été précisément

interprêtés d'une manière absolument arbitraire et la plus ouvertement frauduleuse.

Après avoir vu ainsi violer et dénaturer les conditions de l'une et de l'autre de ces conventions, qui avaient été stipulées en faveur de l'église, et la puissance spirituelle ayant été ainsi soumise à la volonté de la puissance laïque, bien loin que les effets salutaires que nous nous étions promis de ces conventions, eussent été obtenus, nous eûmes, au contraire, la douleur de voir les malheurs et les désastres de l'église de Jésus-Christ s'accroître et s'étendre chaque jour.

Nous ne nous arrêtons pas ici à rappeler et à énumérer, l'un après l'autre, ces maux et ces désastres; ils sont assez publiquement connus et déplorés de tous les gens de hien: nous les avons d'ailleurs, suffisamment exposés dans deux allocutions consistoriales, que nous fîmes, l'une le 16 de mars de la même année 1808, et que nons avons cherché à faire connaître publiquement, autant que l'a permis l'état de contrainte dans lequel nous sommes placé. Par ce moyen, le monde saura, et la postérité verra, quels ont été nos sentimens au sujet de ces si nombreux et si grands attentats du gouvernement français sur les objets relatifs à l'église: on reconnaîtra quelle patience et quelle longanimité il nous a fallu pour nous taire si long-temps, parce qu'ayant la paix à cœur, et ayant conçu le ferme espoir d'apporter un remède et de mettre une fin à tant de maux, nous avons,de jour en jour, différé d'élever la voix en public. On verra quelles ont été nos peines et nos sollicitudes, et combien par nos actions, nos prières, nos

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