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VARIÉTÉS.

SPECTACLES. Théâtre Français. Londres; les Fausses Confidences.

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En rendant compte de la reprise de Tom Jones à Londres, je n'ai parlé qu'en général du jeu des acteurs qui ont procuré à ce mauvais ouvrage, tout le succès dont il est susceptible; il eût été juste de faire une mention particulière de Baptiste, aîné, qui s'est distingué dans le rôle de Western. L'accent vrai et plein de sentiment par lequel il a exprimé la tendresse paternelle, a produit une émotion générale. Combien ces inflexions qui parlent à l'ame', et qui en partent, sont-elles supérieures à ces cris et à ces convulsions d'énergumène qui excitent si souvent les applaudissemens d'une multitude ignorante !

On peut justement reprocher aux Fausses Confidences la promptitude de l'amour qu'Araminte éprouve pour un 'homme qu'elle ne connaissait point auparavant; c'est le défaut de la plupart des pièces de Marivaux. Mais les réssorts mis en œuvre pour développer et accroître cet amour sont très-heureusement imaginés le rôle de Dubois est excellent. Il n'est aucune comédie du Théâtre-Français dont la représentation offre plus d'ensemble: tous les acteurs méritent des éloges. M Leverd, qui a joué avec beaucoup de sensibilité et d'intelligence, a parlé quelquefois trop bas, de sorte qu'on l'entendait difficilement; quelque circonstance particulière a peut-être donné lieu à cette légère imperfection, qui cependant n'a point nui à l'effet général du rôle et de la pièce.

Theatre Faydeau. - Première représentation de Mademoiselle de Launay à la Bastille, opéra en un acte et en prose; la Servante Maîtresse, la Jeune Femme Colère.

Mile de Launay, femme de chambre de la duchesse du Maine, et M. Demesnil, jeune militaire sont enfermés à la Bastille, par ordre du Régent, comme complices de la duchesse. Un simple mur sépare la chambre des deux prisonniers, qui ne se connaissent pas même de vue, mais qui peuvent s'entendre. Cette circonstance singulière engage M. Demesnil à écrire à Mile de Launay une lettre pleine d'esprit et de gaîté; Mlle de Launay y répond, et la correspondance s'établit au moyen de l'officieux gouverneur, M. de Maison-Rouge, qui quoique sexagénaire, à

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conçu une vive passion pour sa prisonnière, à laquelle il ne peut rieu refuser. On lui demande une entrevne l'accorde encore, et s'enhardit enfin à offrir à Mefe nay son cœur et sa main. Il sort après cette déclaration et comme il a oublié de fermer la porte de la chambre de M. Demesnil, celui-ci revient; un porte-clefs qui le croit dans la sienne, l'enferme dans celle de Me de Launay M. de Maison-Rouge de retour est aussi afflige qu'étonné de ce qu'il voit, part en jurant de se venger, laevient un instant après annoncer aux prisonniers leur délivrance, qu'il a obtenue du ministre, arrivé à la Bastille. Mlle de Launay, pour récompenser sa générosité, lui donne la préférence sur son rival, qui cède de très-bonne grâce, et tout le monde est content.

Il n'y a ni comique ni intérêt dans cette pièce, dont le fonds est trop léger pour produire de l'effet. Beaucoup d'allées et de venues inutiles, deux rôles insignifians de valet et de soubrette, un dénouement peu désiré et peu vraisemblable, voilà les principaux défauts d'uu ouvrage dont les auteurs ont garde l'anonyme: Huet est venu annoncer que la musique était de l'auteur des Deux Jaloux; chacun le savait d'avance. On a paru généralement préférer son premier ouvrage, et j'avais adopté moi-même cette opinion à la première représentation; mais les suivantes, en changeant la mienne, m'ont confirmé dans l'idée qu'une composition musicale devait être entendue plus d'une fois pour être bien appréciée. L'ouverture, bien supérieure à celle des Deux Jaloux, est gracieuse, vive et légère, on y entend avec plaisir les motifs de quelques morceaux de la pièce. Le premier duo du gouverneur et de Jacinthe n'a rien de remarquable; mais la romance sur la Liberté est charmante, sur-tout à la fin; on l'applaudit toujours vivement. Quand à l'air à roulades, non-seulement il est mal amené, mais le chant n'offre rien de saillant, les morceaux de ce genre sont demandés par les acteurs et les actrices, qui y sont toujours applaudis; mais il n'ajoutent rien à la gloire du musicien. Les deux quatuors sont d'un effet trèsheureux, sur-tout le premier. Le duo, entre Mlle de Launay et Jacinthe, qui le termine, a une expression juste et caractérisée. Le motif de la romance du gouverneur est simple et touchant, celui des couplets qui terminent la pièce est agréable; mais ils offrent tous deux des réminiscences et manquent d'originalité. Le commencement du duo de Frontin et de Jacinthe, qui se répète ensuite deux fois, est

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très-joli, Je crois donc que cette composition musicale de Me Gail, malgré les justes critiques auxquelles elle peut donner lieu, doit non-seulement confirmer les espérances que son premier ouvrage avait données, mais encore ajouter à sa réputation. Il est à désirer seulement qu'elle travaille sur des poëmes plus favorables à son talent. La musique vif sur-tout d'images, de sentimens et de situations; c'est en adoptant ces principes que Marmontel et Sedaine out développé l'heureux génie de Grétry et de Monsigny, auxquels nous devons ces chefs-d'œuvre de mélodie et d'expression, mille fois préférables à ce que quelques prétendus connaisseurs veulent nous faire admirer exclusivement. MARTINE.

A MM. les Rédacteurs du Mercure de France.

MESSIEURS, parmi les nombreux articles qui remplissent les feuilles périodiques (quotidiennes ou autres), il en est souvent qui contiennent d'excellentes observations sur les sciences, les lettres et les arts. Pourquoi, dans quel ques pages du Mercure, ne feriez-vous pas une revue hebdomadaire de ces articles; mais seulement de ceux qui vous paraîtraient les mieux rédigés ou les plus utiles?

Trop de journalistes traitent le public comme ces divi nités que l'on ne peut se rendre favorables qu'en leur offrant beaucoup de victimes. Ils ne se contentent pas d'immoler de malheureux auteurs ; ils se déchirent entre. eux pour le plus grand plaisir du Dieu.

Laissez leur ces cruels et vils moyens de succès; présentez au public un encens plus pur. Ne craignez point de rendre justice même à vos confrères, et donnez leur des éloges lorsqu'ils vous paraîtront en mériter.

Recevez, Messieurs, l'assurance, etc.

Réponse.

L. D. DE R.

A dater du 1o N° de janvier 1814, le Mercure contiendra une Revue des meilleurs articles qui auront parų dans tous les autres journaux.

POLITIQUE

C'EST le dimanche 19 de ce mois qu'à eu lieu, avec la plus grande solemnité, l'ouverture de la session du CorpsLégislatif.

S. M. L'Empereur et Roi est parti à une heure du palais des Tuileries, en grand cortége, pour se rendre au CorpsLégislatif.

Des salves d'artilles ont annoncé le départ de S. M. des Tuileries et son arrivée au Corps-Législatif.

le

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Le cortége a traversé le jardin des Tuileries, la place et pont de la Concorde, et S. M. est descendue de voiture au perron de la façade du palais du Corps-Législatif.

M. le président du Corps-Législatif et vingt-cinq députés qui reçu S. M. au bas du perron et l'on conduite à l'appartement qui avait été préparé pour la recevoir.

Avant l'arrivée de S. M., le Sénat et le Conseil-d'Etat se sont placés dans la salle des séances sur des banquettes en face du trône, le Sénat à droite et le Conseil-d'Etat gauche.

S. M. l'Impératrice était dans la tribune, en face du trône de l'Empereur, accompagnée S. M. la reine Horlense, et entourée des officiers de sa maison.

Le Corps diplomatique occupait une tribune à droite. L'Empereur, après s'être arrêté un moment dans son appartement, s'est rend: dans la salle du Corps-Législa tif, précédé de son cortège.

A l'arrivée de S. M. tout le monde s'est levé.

S. M. s'est placée sur son trône.

Les princes grands-dignitaires, les ministres, les grandsofficiers de l'Empire et de la Couronne, les grands-a igles de la Légion-d'honneur et les officiers qui formaient le cortége de S. M. ont occupé autour du trône leurs places accoutumées; les princes grands-dignitaires à droite et à gauche suivant leurs rangs.

L'Empereur étant assis, le grand-maître des cérémonies a pris les ordres de S. M. et les a transmis à S. A. S. le prince de Bénéveut, vice-grand-électeur, qui s'avançant

au bas des marches du trône, a demandé à S. M. la permission de lui présenter S. Exc. M. le duc de Massa, président du Corps-Législatif, et de l'admettre a prêter ser

ment.

Un maître et un aide des cérémonies sont allés chercher S. Exc. qui s'étant rendue au pied du trône, a prêté serment dans la forme ordinaire.

S. Exc. étant retournée à sa place, l'Empereur a prononcé de discours suivant :

« Sénateurs, Conseillers-d'Etat ; députés des départemens au » Corps-Législatif,

» D'éclatantes victoires ont illustré les armes françaises dans cette > campagne ; des défections sans exemple ont rendu ces victoires > inutiles tout a tourné contre nous. La France même serait en » danger, sans l'énergie et l'union des Français.

» Dans ces grandes circonstances, ma première pensée a été de » vous appeler près de moi. Mon cœur a besoin de la présence et de » l'affection de mes sujets.

» Je n'ai jamais été séduit par la prospérité. L'adversité me trou> verait au-dessus de ses atteintes.

» J'ai plusieurs fois donné la paix aux nations lorsqu'elles avaient » tout perdu. D'une part de mes conquêtes, j'ai élevé des trônes » pour des rois qui m'ont abandonné.

J'avais conçu et exécuté de grands desseins pour la prospérité et » le bonheur du monde !.... Monarque et père, je sens ce que la » paix ajoute à la sécurité des trônes et à celle des familles. Des >> négociations ont été entamées avec les puissances coalisées. J'ai » adhéré aux bases préliminaires qu'elles ont présentées. J'avais donc l'espoir qu'avant l'ouverture de cette session, le congrès de Man» heim serait réuni; mais de nouveaux retards, qui ne sont pas > attribués à la France, ont différé ce moment que presse le vœu du » monde.

» J'ai ordonné qu'on vous communiquât toutes les pièces originales qui se trouvent au portefeuille de mon département des affaires » étrangères. Vous en prendrez connaissance par l'intermédiaire » d'une commission. Les orateurs de mon conseil vous feront cone naitre ma volonté sur cet objet.

» Rien ne s'oppose de ma part au rétablissement de la paix. Je connais et je partage tous les sentimens des Français. Je dis des » Français, parce qu'il n'en est aucun qui désirât la paix au prix de » l'honneur.

>> C'est à regret que je demande à ce peuple généreux de nouveaux » sacrifices; mais ils sont commandés par ses plus nobles et ses plus > chers intérêts. J'ai dû renforcer mes armées par de nombreuses > levées les nations ne traitent avec sécurité qu'en déployant toutes > leurs forces. Un accroissement dans les recettes devient indispensable. Ce que mon ministre des finances vous proposera est con» forme au système de finances que j'ai établi. Nous ferons face à

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