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Un sol riche en potasse se trouvera bien de l'addition de superphosphate azoté, et réciproquement.

A la suite d'un défrichement, les engrais chimiques peuvent même remplacer momentanément le fumier que la ferme qui s'établit ou s'agrandit n'a pu produire encore.

Bref, les progrès de la culture intensive seront liés désormais à l'emploi judicieux des substances fertilisantes que nous fournit le commerce et qui doivent compléter ou régulariser la production agricole.

Aussi, l'industrie s'est-elle, depuis longtemps, mise à l'œuvre pour offrir aux agriculteurs ces produits chimiques, autrefois négligés ou perdus les fabriques de sulfate d'ammoniaque se multiplient chaque jour, et les phosphates fossiles sont extraits du sol en quantités considérables, véritables mines d'or destinées à accroître la richesse publique.

Mais, il est bien évident pour tout le monde, que les engrais commerciaux n'ont de valeur que par l'azote, l'acide phosphorique, la potasse, etc., qu'ils contiennent, et l'état dans lequel ces substances s'y trouvent: comme, d'autre part, l'analyse chimique seule peut renseigner à cet égard, on ne conçoit un commerce un peu étendu de ces matières qu'avec un laboratoire d'essai, intermédiaire entre le producteur et le consommateur; offrant à tous la moralité de cette branche de commerce, qui s'étendra, il n'en faut pas douter, au fur et à mesure que les agriculteurs seront témoins des résultats obtenus chez leurs voisins.

La station agronomique du Centre, suivant les traces de sa sœur aînée de l'Est, ouvre son laboratoire au contrôle des engrais. Elle traitera de même avec les fabricants pour l'analyse et la garantie des produits de leur fabrication Des dispositions vont être prises pour qu'à l'aide de plombs et autres moyens usités en pareil cas le public soit assuré, de par la station agronomique, de la richesse des engrais mis en vente.

Le contrôle exercé par le laboratoire de la station s'étendra, d'ailleurs, à tous les produits, à toutes les substances qui, directement ou indirectement, servent à méliorer le sol ou les récoltes.

En résumé, j'ai l'espoir que ce contrôle des engrais,

commerciaux, que ces analyses exécutées et publiées par les stations agronomiques, amèneront plus d'un résultat utile.

D'un côté, nous renseignerons les agriculteurs sur la valeur exacte des produits qu'ils achètent, et cette connaissance les conduira à les employer avec plus de confiance; de l'autre, nous les instruirons: le plus petit cultivateur saura que tel champ est riche en potasse pour des siècles et que ce serait une folie ruineuse de lui fournir cet alcali d'une manière spéciale, mais que ce sol est pauvre en acide phosphorique et manque complétement de l'élément calcaire, circonstances qui lui indiquent avec une logique infaillible ce qu'il a à faire. Il raisonnera azote, phosphate, potasse, avec d'autant plus de sûreté que l'expérience et l'application seront ses guides. La science sera vulgarisée, ce qui est le but constant de nos eflorts.

Extrait d'une communication de M. P. TRUCHOT, docteur ès-sciences, directeur de la station agronomique du Centre, à ClermontFerrand.

VIGNE BLAUER PORTUGIESER.

Les bons Raisins précoces sont aujourd'hui plus que jamais recherchés pour la vinification et pour la table. Les premières grappes qui paraissent sur le marché sont celles qui se vendent le plus cher, non pas toujours en raison de leur qualité, mais à cause de leur rareté. C'est avec des Raisins précoces seulement que nos régions du centre et du nord-est peuvent produire des vins agréables, et si l'on pouvait y implanter des cépages d'une maturité encore plus hâtive, il n'y a pas de doute que les produits de ces vignobles auraient beaucoup à y gagner. Walheareusement les cépages håtifs sont rares, surtout les variétés à fruits noirs, et jusqu'à présent l'on n'est guère sorti du cercle des Pinaux et des Gamay, qui se

cultivent sous des dénominations très-diverses dans beaucoup de nos vignobles, mais qui ne sont, après tout, que les similaires du Pineau et du Gamay de la Bourgogne, où ils sont implantés de temps immémorial et où, très-probablement, ils ont pris naissance. Comme Raisins à manger, ces deux variétés sont agréables, mais elles ne constituent pas ce que l'on appelle un beau et bon Raisin de table, » et elles ne sont pas du tout non plus des Raisins de conserve.

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Quant aux Madeleines noires qui les précèdent, leur qualité est tellement médiocre qu'il faut les passer sous silence. L'Ischia vaut un peu mieux; mais il est long à parfaire sa maturité, et lorsqu'il l'a atteinte, les Pineaux sont alors préférables. Parmi les Raisins noirs précoces obtenus de semis, il en est qui devancent le Pineau à la maturité, mais aucun n'approche de sa qualité; il est inutile de les mentionner. Le nombre de nos bons Raisins noirs de première époque de maturité est donc fort restreint, et parmi nos cépages indigènes on n'a pas l'embarras du choix.

A vrai dire, les vignobles étrangers ne sont guère plus riches que les nôtres en Vignes hâtives; cependant il en est que nous pourrions nous approprier avec avantage, soit pour l'usage de la table, soit pour la vinification.

C'est l'un de ces cépages étrangers que je voudrais présenter aux lecteurs de la Revue horticole et recommander comme une excellente acquisition, soit pour la grande culture, soit pour l'espalier ou le contre-espalier. Ce raisin est le Blower Portugieser que représente la figure coloriée ci-contre et qui, ainsi que l'indique son nom, est d'origine portugaise, et d'après les indications que nous a fournies notre savant correspondant, M. le comte de la Villamaior, directeur de l'Université de Coïmbre, cette Vigne est connue et répandue dans la région vinicole du Douro sous le nom de Murcto. Elle est très-commune en Allemagne, et les vignobles renommés de Mons, de Schumberger, près Vienne, sont presque uniquement complantés de cette variété; ses jolies grappes sont recherchées sur les marchés et trèsestimées comme le meilleur Raisin noir précoce.

Sous le nom d'Oporto, ce cépage est très-répandu en

Transylvanie, où il donne des vins estimés. On le retrouve encore dans le Tyrol italien, et M. de Rovasenda nous écrit qu'à Udine, il porte le nom de Blauer franchiser et de Vete di monica. C'est le plant de Porto qui vient d'être introduit aux environs d'Epernay, où il produit un vin très-noir et très-solide.

La culture très-étendue de cette Vigne indique évidemment qu'elle est méritante, et nous sommes étonné qu'elle soit restée si longtemps inconnue en France. Nous l'avons vue et appréciée pour la première fois au Jardin botanique de Dijon, dans la magnifique collection qu'avait créée et installée M. le docteur Fleurot. C'était en 1864, lors du Congrès pomologique qui siégea dans cette ville, si je m'en rappelle bien, dans le courant de septembre. M. Hardy, l'ancien directeur des jardins et Vignes du Luxembourg et l'un de nos collègues au Congrès, nous recommanda cette variété et nous dit qu'il la cultivait et la multipliait sous le nom de Raisin des roses.

Le comte Odart cite cette variété dans son Ampelographie universelle, sous le nom de Fruh portugieser (dénomination très-usitée en Allemagne), mais il ne paraît pas avoir reçu le vrai Fruh portugieser (portugais précoce), puisque dans ses collections ce cépage ne mûrit qu'à la troisième époque, en même temps que l'Enfariné, le Trousseau, le Merlot et autres. On peut donc croire que sous ce nom notre bien regrettable ampélographe avait reçu une autre variété de Portugieser, la même sans doute que nous avons vue au Jardin botanique de Dijon, à côté du Blauer Portugieser, avec l'étiquette « Portugieser Leroux, » et que nous avons tirée depuis de Hongrie, pour la cultiver en grand, après avoir apprécié sur quelques échantillons sa remarquable fertilité, sa rusticité et la bonne qualité de son fruit, qui toutefois mûrit douze ou quinze jours plus tard que celui du vrai Blauer Portugieser. Ce dernier a toujours atteint sa maturité, dans nos collections, au moins aussitôt que le Pineau et le Gamay, et cette appreciation m'a été souvent confirmée par un de nos viticulteurs et pépiniéristes les plus distingués, M. Ferdinand Gaillard, chez qui cette bonne variété a été appréciée et multipliée depuis plusieurs années.

Le Blauer Portugieser ne donne pas seulement un bon Raisin précoce de cave et de table; ce cépage a encore la qualité d'être remarquablement vigoureux et fertile, deux choses qui se trouvent rarement réunies; et ce qui ne nuit en rien, sa grappe est d'une belle dimension, plus grosse que celle du Gamay et de conservation facile; aussi sera-t-elle d'une vente avantageuse sur le marché en première saison. A côté de toutes ces qualités, il ne faut pas dissimuler un défaut que nous lui connaissons, celui d'être sujet à la carie dans les terrains frais et profonds. Pour parer à cet inconvénient, on le plantera à une exposition chaude et dans des sols secs ou pierreux, qui lui conviennent particulièrement. Il remplacera là avec avantage les Vignes peu vigoureuses qui, comme le Gamay, n'y peuvent vivre et produire que pendant un nombre d'années souvent très-restreint.

Comme tous les cépages bien fertiles, le Blauer Portugieser est d'un bon produit à la taille courte; mais il s'accommode très-bien aussi de la taille longue, en raison de sa bonne vigueur. La conduite en cordons horizontaux sur un certain développement, avec coursons, nous semble lui convenir plus particulièrement; il se comportera également très-bien en treillages et en hautains. Le Blauer Portugieser se reconnaît aux caractères suivant :

Bourgeonnement presque glabre.

Sarments forts, à contre-noeuds longs et de couleur acajou clair.

Feuilles assez grandes, aussi larges que longues, glabres à leur face supérieure, et à peine un peu duveleuses sur les nervures de la face inférieure; sinus supérieurs profonds et fermés; sinus secondaires moins marqués; sinus pétiolaire presque fermé; dents courtes, larges, obtuses ou très-courtement aiguës; petiole long, assez fort, souvent coloré de rouge vineux.

Grappe moyenne ou surmoyenne, un peu ailée, assez compacte et cylindrique; pédoncule de longueur ordinaire et de moyenne force.

Grains moyens, sphériques; pédicelles longs et grêles sur les ailerons, et moins longs sur le reste de la grappe. Peau mince et cependant résistante, d'un beau noir

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