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REVUE BIBLIOGRAPHIQUE,

Par M. BOUCHARD, vice-secrétaire.

Messieurs,

Afin d'augmenter les recueils intéressants qui composent déjà notre nombreuse bibliothèque, votre conseil d'administration a cru devoir prendre un abonnement au Journal de l'Agriculture rédigé par M. Barral. Je vais passer en revue les douze numéros qui nous sont parvenus et recommander à vos lecteurs les articles qui m'ont semblé les plus dignes d'attirer votre attention.

N° 351. Une note curieuse sur l'aération des moûts; procédé grâce auquel M. Boschier, qui en est l'inventeur, a réussi à empêcher le développement de la maladie des vins blancs connue sous le nom de noircissement. Page 13: Un article de M. Moll, ayant pour titre Les Chevaux; qui peut se résumer en quelques lignes : Prendre comme type améliorateur le cheval arabe à l'exclusion du pur sang anglais, l'incapacité absolue du cheval anglais à supporter les privations le rendant tout à fait impropre à donner même dans ses dérivés le vrai cheval de guerre.

N° 352, page 49: L'article Culture du Lupin, dû à M. le comte de Béhague, présente un intérêt tout particulier pour les éleveurs de moutons. Ces animaux, sont trèsfriands de cette plante, dont la valeur nutritive est quatre fois supérieure à celle du maïs. Le lupin se cultive dans les terres siliceuses.

N° 353 L'article de M. de la Tréhonnais sur l'économie des concours d'animaux de boucherie. L'auteur conclut à ce qu'un changement radical dans l'économie des concours devient une véritable nécessité; il demeure acquis par l'expérience que l'engraissement exagéré des animaux, loin de stimuler le progrès, ne fait que lancer les éleveurs dans une voie fausse et fatale. Je reccommande cet important article à l'attention de nos éleveurs.

N° 354, page 130 La conférence de M. Goffart sur l'en

tilage du maïs haché et non haché. Je n'entrerai pas dans le détail de ce travail, vous connaissez tous les heureux résultats obtenus par M. Goffart. Le but de sa conférence était du reste d'affirmer de nouveau ces résultats. Seulement il y a une grande question à étudier, celle des espèces de maïs cultivés. Aussi il résulte des renseignements parvenus à M. Goffart que le maïs carague que l'on croyait originaire du Nicaragua, n'en vient pas du tout et que c'est bien plus probablement le nom de l'une des nombreuses variétés de maïs que produit l'Amérique du Nord dans sa partie la plus méridionale.

N° 355, page 175: M. Léon, dans un article intitulé les Débris de chanvres employés dans les étables, démontre combien il serait important pour les horticulteurs de substituer les déchets de chanvre à la paille comme litière des animaux. Ces débris ajoutant à leur puissance fertili sante la richesse des matières fécales dont ils se trouveraient imprégnés, constitueraient un engrais hors ligne à très-bon marché, divisant admirablement la terre et fixant les gaz fertilisants.

Les cendres de déchets de chanvre contiennent, d'après M. Robierre, 7,28 0/0 de potasse, et 41 0/0 de chaux. J'ajouterai comme réflexion personnelle que, depuis plusieurs années, nos horticulteurs emploient préférablement au fumier, des déchets de chanvre pour chauffer leurs châssis. Les boumites (c'est le nom particulier qu'ils donnent aux déchets de chanvre), développant une plus grande somme de chaleur que le fumier, et se refroidissant moins rapidement.

N° 357 Je signalerai à votre attention, page 255, l'article de M. Pouillet, avocat à la cour de Paris, intitulé Droit rural, traitant de la distance légale des plantations, et dans le n° 358, du même auteur, l'article de l'entretien des haies mitoyennes, page 289 et page 293, le rapport de M. Barral, sur le concours régional agricole au palais de l'Industrie. N° 359: La suite du rapport de M. Barral, page 326 et 331. L'article de M. Tisserand, de l'action du froid sur le lait et les produits qu'on en tire, qui se résume ainsi :

1° La montée de la crême est plus rapide quand la tem

pérature à laquelle a été exposé le lait se rapproche le plus de 0°;

2o Le volume de crême obtenu est plus grand si le lait a été soumis à un plus fort refroidissement;

3o Le rendement en beurre est aussi plus considérable quand le lait a été exposé à une température plus basse; 4o Le lait écrémé, le beurre et le fromage sont de meilleure qualité dans ce dernier cas.

Tous ces faits sont savamment discutés dans cet article sérieux et bien fait.

No 362 Lire la savante étude de M. de Gasparin, sur la présence du fer dans le blé, page 453, et sur l'action des lichens sur les roches.

N° 360 Je signalerai à votre attention, page 378, les recherches sur l'emploi agricole des résidus de pannerie, et le rapport de M. Julien, sur l'ensilage du maïs fourage page 368.

Dans le N° 361, page 422: Sous le titre : Fabrication et conservation des vins à l'abri du contact de l'air; M. le Dr Louis de Martin traite d'une façon très-étendue la question de la bonde hydraulique, il en signale les avantages s'appuyant sur une expérience de douze ans.

Il resterait bien d'autres choses fort dignes d'attirer vos regards, dans cette collection du Journal de l'Agriculture. Ainsi je ne vous ai pas parlé d'un article fort important, la Culture des racines qui, terminé, méritera à lui seul, un rapport complet. Je ne vous ai signalé également qu'en passant, quelques articles de droit rural, par M. Pouillet, chaque numéro renferme sur ce sujet un article toujours curieux à étudier.

24 mars 1876.

Séance du 27 mai 1876.

Les membres de la Société centrale d'horticulture de France, qui assistaient à la deuxième séance d'octobre, ont eu occasion de voir un petit animal tristement célèbre par ces méfaits dans un vaste pays, heureusement

séparé de nous par l'Océan, les Etats-Unis d'Amérique. Ce destructeur de petite taille, connu sous le nom d'insecte du Coraldo et auquel les naturalistes ont donné le nom plus scientifique et surtout plus compliqué de Doryphera decem lineata, s'attaque, comme on le sait, aux pommes de terre et cause, dans les Etats-Unis, autant de ravages que le phylloxera dans nos beaux vignobles du midi de la France.

Un spécimen mort du doryphera ayant été envoyé de New-York à M. Duchartre, membre de l'Institut et professeur à la Sorbonne, ce savant secrétaire-rédacteur de la Société d'horticulture l'a présenté à la séance et en a fait le sujet d'une intéressante communication, qui a été écoutée avec le plus vif intérêt.

Ses assertions étaient corroborées par des citations empruntées à un long article publié par le journal américain, le New-York Herald, dans son numéro du 15 juin dernier, article dû à la plume de M. Dodge, l'un des naturalistes les plus distingués des Etats-Unis.

L'insecte du Colorado est un coléoptère d'un centimètre de longueur et autant à peu près de largeur. Par la couleur marron de son corselet et de ses ailes, il ressemble à un petit hanneton. Sa fécondité est extraordinaire, ce qui explique la rapidité de son invasion.

Il y a une douzaine d'années, il était encore inconnu dans son pays natal, les Montagnes Rocheuses, vivant là du suc d'une plante indigène de la famille des solanées, le Solanum rostratum. A cette époque, les défrichements successifs opérés aux Etats-Unis apportèrent la culture de la pomme de terre jusqu'au pied des Montagnes-Rocheuses; l'insecte y goûta et abandonna aussitôt sa solanée sauvage pour se porter avec un appétit dévorant sur la fane succulente de la solanée cultivée : la pomme de terre.

Bien différent du phylloxera, qui attaque les racines, c'est-à-dire la partie souterraine de la vigne, l'insecte du Colorado dévore la partie aérienne, c'est-à-dire les feuilles de la pomme de terre. Les champs sur lesquels il vient s'abatre sont, en quelques jours, dépouillés de toutes leurs fanes vertes; il n'y reste bientôt que des tiges noires et désséchées sur un sol nu.

L'invasion, partie des Montagnes-Rocheuses, s'est, dans l'espace de dix années, répandue de l'ouest à l'est; elle a successivement couvert d'immenses territoires et atteint aujourd'hui les terres de l'Etat de New-Yorck sur les bords de l'Atlantique.

Les ravages causés sont considérables. Avant l'invasion, on évaluait la récolte annuelle de pommes de terre aux Etats-Unis à 120 millions de livres; aujourd'hui, malgré de nouvelles mises en culture, le rendement moyen est tombé à 80 millions de livres américaines.

Le Doryphera n'attaque pas seulement les pommes de terre, il dévore également les feuilles de tomates, d'aubergines, etc., en un mot, les fanes de la plupart des plantes de la famille des solanées.

Deux moyens sont également mis en pratique pour détruire le terrible insecte du Colorado: le premier consiste à leur faire la chasse et à les écraser, procédé qui n'est pas sans danger, car ce coléoptère, qui est très-vénimeux, cause des souffrances intolérables et même dangereuses aux personnes qui, par mégarde, l'écrasent entre leurs doigts. Le second moyen est l'emploi d'un produit chimique, connu aux Etats-Unis sous le nom de vert de Paris, et qui est un arséniate de cuivre. Ce produit, dont la manipulation n'est elle-même pas sans danger, est répandu sur les feuilles, soit pur, soit mélangé, suivant le degré de pureté auquel il est livré aux cultivateurs par le

commerce.

La question de savoir si le Doryphera ne finira pas par s'introduire en Europe ne laisse pas que de susciter des inquiétudes sérieuses. Hâtons-nous de dire que le hasard, avec lequel il faut néanmoins, malheureusement toujours compter, pourrait seul amener sur notre sol ce terrible convive. En effet, l'insecte du Colorado ne se trouve jamais dans les tubercules de la pomme de terre, mais seulement dans les fanes de la plante.

Il en résulte qu'alors même que tous les Etats d'Europe ne prendraient pas, comme la France, la mesure d'interdire l'importation des pommes de terre d'Amérique, on pourrait espérer d'échapper au fléau qui alarme les Américains.

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