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CÉLIGNI ARDOUIN 20

qui, dans l'occasion, pût briser brutalement tous les obstacles élevés sur sa route : il fallait enfin unir les deux partis de Toussaint et de Rigaud en un seul : celui de la patrie. Dessalines réunissait en sa personne toutes les conditions désirables ; et la soumission de Pétion, des lors admis dans son intimité, donnait un gage suffisant aux partisans de Rigaud pour reconnaîre l'autorité de Dessalines. Les évènements justifièrent les prévisions de Pétion. + x 4

. .. Avant d'arriver dans le quartier de Plaisance où, le 7 juillet 1802, pour la première fois depuis la guerre civile, Pétion rencontra Dessalines, le chef de la 13e avait déjà résolu d'abandonner la cause française. Le concours de Dessalines lui avait paru utile, nécessaire, indispensable à la cause nationale. Il se félicita donc du hasard qui les mettait tous les deux en présence.

Mais, d'abord, il y eut de part et d'autre quelque gêne, résultat nécessaire de la difl'érence des antécédents politiques de chacun. Dessalines se méfiait de l'étion, ancien transfuge du parti que le futur Empereur avait défendu avec tant de dévouement et qui venait d'être abattu par suite des efforts du parti contraire, appuyant la cause métropolitaine. Quant à IPétion, sentant le besoin de se rapprocher de l)essalines, il provoqua des explications qui devaient justifier sa conduite. Leur entretien roulant naturellement sur les évènements de l'époque, et Pétion considérant ces évènements comme étant la conséquence des fautes du système de Toussaint, ne tarda pas à porter la conviction dans l'âme de cet homme qui rendit peu après de si éminents services à la patrie. Il est vrai que Dessalines, tout en se montrant dévoué à Toussaint, ne laissait jamais perdre l'occasion d'humilier autant qu'il le pouvait la caste dont les intérêts seuls

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32 MORCEAUX CHOISIS

François et Moreau, leur fait part de sa pensée et se concerte avec eux sur la prompte réalisation de son ,rojet, la défection de la 13e.

Rendu aux ordres de Claparède, Pétion apprend que Clauzel le mande près de lui ; il s'y rend. Clauzel veut le retenir à diner, ayant, dit-il, à l'entretenir de choses importantes. Pétion refuse le repas, mais reste près de Clauzel. Cependant à peine Pétion était-il parti, que J. L. François fait venir l'un de ses affidés des rangs inférieurs, le caporal Germain, et lui confie son secret. Puis, sous le plus frivole prétexte, il le frappe devant les autres militaires. Germain prend la fuite et va porter ses plaintes à Pétion. Celui-ci le repousse avec douceur, et lui dit qu'à son retour il vérifiera le fait. Mais Germain insiste et dit avec l'accent du désespoir : « Colonel, mes camarades sont indignés. « Si vous ne venez pas mettre un terme à ces injustes « traitements du commandant Jean-Louis, vous verrez « ce qui arrivera. »

Clauzel avait remarqué la menace du militaire. Il dit à Pétion : « Eh bien ! allez rétablir l'ordre dans votre corps, je vous reverrai. »

Pétion part avec l'apparence du calme et arrive à son camp de Bréda. C'était dans la soirée du 13 octobre 1802. Il y trouve sa demi-brigade en efl'ervescence. Il en profite pour haranguer ses camarades : sans peine il les conduit à l'insurrection. A minuit le mouvement se décide. Il est tout aussitôt imité par la 10e et par une partie de la 6° demi-brigades coloniales qui se trouvent sur la même ligne. Clervaux, en qui Pétion n'eut pas grande confiance, n'apprit le mouvement de ce dernier que lorsqu'il ne lui était plus possible de prendre un autre parti : il partagea cette importante défection.

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