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Né à Port-au-Prince Ie 25 août 1828. Directeur de l'EcoIe de médecine ( 1869-1871), député ( 1871 ), sénateur ( 1872 et 1876 ).

CEUvREs : Collaboration à l'Opinion Nationale, au Civilisateur, au Bien Public. Fragments d'histoire contemporaine, 1 vol. ( 1903, Imprimerie de M" F. Smith. Port-au-Prince. ). Conférence inédite sur John Brown ( annoncée pour paraitre prochainement )

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L. Docteur en médecine François Hyppolite ( dit Révolu ) de Jérémie, un noir pur, comme l'était Désilus, — il faut nous arrêter quelques instants sur cet homme d'élite — avait été lui-même son créateur intellectuel, plus exactement « cultural ». Il n'apprit à lire, — comme notre Louverture — qu'à l'âge de 50 ans, à la lumière de la lune, en faisant sa faction, sous l'administration de Boyer. Il nous racontait que, surpris une fois à épeler son B-a, ba, il reçut de son capitaine une volée de coups de plat de sabre, qui lui apprit la vigilance pour l'avenir, sans avoir diminué son goût pour l'alphabet. Cet homme nous jetait à la Chambre, plus tard au Sénat, en de prodigieux étonnements Je me le figure, · en cet instant, prenant la parole, une fois entre beaucoup d'autres, dans une question ardue de droit constitutionnel, où feu Camille Nau, instruit, intelligent, vif, de parole aisée, mais de la dernière roublardise, s'escrin1ait contre Edmond Paul. Edmond, froid, plein de flegme, cherchant ses phrases, assénait des coups de logique, comme on frappe des bottes

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52 MORCEAUX CHOISIS

M. Courtois, nonobstant son inviolabilité comme sénateur. A cette nouvelle, M. Courtois défonça un quart de poudre (*), mit dessus son pied et la gueule de son pistolet. Pendant vingt-quatre heures, il tint ainsi la police en échec. Ce ne fut qu'à force d'instances que son ami et collègue, M. Bance père, obtint qu'il désarmât et consentît à se laisser accompagner par lui à la prison. Il comparut devant la Haute Cour de Justice qui, tenant peut-être compte de l'épigraphe de la « Feuille du Commerce » et voulant d'autre part donner satisfaction au Pouvoir, condamna le grand fonctionnaire à la peine d'un mois de détention. Elle parut insuflisante à Soulouque qui ordonna sur l'heure l'exécution de M. Courtois. Sa fosse était déjà creusée, la troupe d'exécution attendait à la Conciergerie, on battait l'assemblée générale ! Madame Courtois affolée courut auprès du Chargé d'aflaires de France, Monsieur Maxime Raybaud, qui vite se rendit au Palais et, dans un langage pathétique, s'adressant au Chef de l'Etat : « Président, il ne sera pas dit qu'un homme qui mérita de la France la croix des braves aura trouvé la mort autrement que sur le champ d'honneur ! » Soulouque, pour son honneur, fut vaincu, et une heure après, on embarquait M. Courtois derrière l'Arsenal.

Il resta 11 ans en exil, revint dans le pays en 1859 sous Geffrard, et mourut à Port-au-Prince en 1877, à l'àge de 92 ans.

II

MADAME CoURToIs

Il est des femmes qui ont l'energie d'un homme et Mme Courtois fût de celles-là. Elle se nommait Juliette

(') La vente de cet article etait alors libre.

DURACINÉ POUILH 53

et naquit au Cap-Haïtien, en 1787, de Bussière Laforest, propriétaire de biens ruraux et urbains, et de Prudence Elisabeth Renard, l'un et l'autre gens de couleur appartenant à la classe des Affranchis. M. Bussière Laforest, représentant du peuple ( de la députation du Nord de St Domingue ), se rendit en France en 1795, devint plus tard membre du Conseil des Cinq cents et mourut dans la Métropole en 1813. Il avait amené avec lui sa fille, à qui il fit donner une brillante éducation. Elle devint plus tard lectrice de la princesse Pauline lBonaparte et fut une musicienne distinguee. — Nous savons, pour l'avoir tenu de M. Joseph A. Courtois, notre collègue à la Cour de Cassation, que M. Bussière Laforest, son grand père, était l'ami intime du général Alexandre Dumas Davy de la Pailleterie, qui appelait Mademoiselle Laforest « ma payse », et que celle-ci tenait souvent sur ses genoux, pour le caresser, le fils du Général, qui devait devenir plus tard le grand dramaturge, le fécond romancier. Mademoiselle Bussière épousa en 1814 M. Joseph Courtois et revint cn Haiti avec lui en 1817. Elle ouvrit en 1818, de concert avec son mari, un Externat et un Pensionnat des deux sexes, où elle eut exclusivement "la direction des demoiselles, tant pour la partie littéraire que pour la partie musicale Bien de nos mères de famille ont pu revendiquer l'honneur d'avoir été ses élèves. Après la fermeture de son pensionnat en 1828, elle continua à enseigner le piano jusqu'à sa mort. Elle forma à cet art trois des ses enfants et un bon nombre d élèves qui s'y distinguèrent. Nous avons dit en commençant cette notice que Mme Courtois était de ces femmes qui ont l'énergie d'un homme. Elle était aussi d'un courage héroïque et elle en donna la preuve, lorsqu'on voulut arrêter son mari en 1847 et au cours du procès qui s'ensuivit, procès plutôt politique que pour délit de presse.

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