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question, dans la phase où elle se trouve actuellement, rentre 1878 dans la compétence du Congrès; du moins le gouvernement allemand qui a cherché, en son temps, à remédier à cette situation, autant qu'il lui a été possible, ne se croirait pas appelé à formuler un jugement sur les motifs qui pourraient régler la conduite des autres gouvernements quant à des points qui sont en dehors de la tâche actuelle de la haute Assemblée. Il pense que cette question devrait être avant tout traitée directement entre le Représentants de la Grande Bretagne et de la Russie: les dispositions conciliantes des uns et des autres permettent d'espérer que ces pourparlers auraient une solution heureuse, et se serait seulement dans le cas contraire que le Congrès pourrait tenter, lors d'une prochaine séance, de mettre d'accord les deux parties intéressées par une médiation que les sentiments pacifiques de la haute Assemblée ne sauraient manquer de rendre efficace. Lord Beaconsfield ayant adhéré à cet avis, ainsi que tous les Plénipotentiaires, le Président déclare l'incident clos.

Le Président demande, si l'un des Plénipotentiaires a quelque communication à faire au Congrès de la part de son gouvernement.

Sadoullah Bey déclare ne pouvoir accepter l'opinion exprimée par M. le Comte Schouvaloff que la retraite de l'armée russe entraînerait des dangers pour la population chrétienne de Constantinople. M. le Plénipotentiaire de Turquie affirme que les forces ottomanes qui se trouvent dans la capitale, suffisent amplement pour y maintenir le calme et que l'ordre public n'est nullement compromis. Il ajoute que c'est au contraire la présence de l'armée russe dans le voisinage qui met en péril la tranquillité de la ville.

Le Président fait remarquer à M. le Plénipotentiaire de Turquie que le Congrès a prononcé la clôture de la discussion sur le point auquel il vient de faire allusion, et il est d'avis que l'incident ayant été clos, la discussion demeure ajournée sur cet objet.

Son Altesse Sérénissime propose ensuite à la haute Assemblée de se réunir lundi prochain le 17 à deux heures. Cette date est acceptée à l'unanimité.

Le Marquis de Salisbury annonce qu'il se propose de soumettre lundi à ses collègues la question de savoir si la Grèce doit être admise au Congrès.

Le Prince Gortchacow dit que cette question lui paraît résolue par les termes mêmes de la convocation, qui ne s'adresse qu'aux Puissances signataires du traité de Paris.

D'autres

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1878 états pourraient se croire autorisés à demander également leur participation si l'on s'écartait des dispositions convenues dès l'origine.

Le Prince de Bismarck, en réservant son opinion à ce sujet jusqu'au moment où la question posée par Lord Salisbury sera formellement soumise à la haute Assemblée, saisit l'occasion pour demander s'il ne serait pas opportun que les membres du Congrès qui voudraient faire une proposition, en informassent au préalable leurs collègues dans une séance précédente, ou tout au moins la veille de la séance, pour éviter des discussions imprévues et incomplètes. Les propositions connexes aux questions à l'ordre du jour et résultant de la discussion même en seraient exceptées.

Son Altesse considère comme un principe incontestable que la minorité du Congrès ne pourra pas être tenue de se soumettre à un vote de majorité. Mais il abandonne à l'appréciation de MM. ses collègues de décider s'il ne serait pas utile dans l'intérêt des travaux que les résolutions de la majorité concernant la procédure, sans toucher au fond, puissent être regardées comme décisions du Congrès toutes les fois que la minorité ne croirait pas devoir faire enregistrer une protestation formelle.

M. Waddington s'associe à l'opinion exprimée par M. le Président au sujet des propositions imprévues dont les membres du Congrès pourraient prendre l'initiative. M. le Premier Plénipotentiaire de France est même d'avis qu'il serait utile de décider que toute proposition de cette nature devrait être annoncée à la séance précédente, sans laisser la faculté de prévenir seulement la veille. Ce dernier délai paraît à Son Excellence trop restreint pour que les Plénipotentiaires soient toujours suffisamment préparés à une discussion approfondie.

Le Prince de Bismarck apprécie la justesse de cette observation et s'y rallie entièrement.

Le Marquis de Salisbury dit que les réflexions de M. le Premier Plénipotentiaire de France s'appliquent sans doute seulement aux propositions substantielles et non pas aux amendements et questions secondaires.

Le Congrès donne unanimement son adhésion à cette procédure.

Le séance est levée à 3 heures 14.

(Suivent les signatures.)

Protocole No. 2.

1878

Grèce.

Question de l'admission de ses représentants.

Séance du 17 juin 1878.

Déclaration de Cara

Proposition anglaise

théodory Pacha. Déclaration du Prince Gortchacow. Discussion sur la
proposition française. Amendement de Lord Salisbury.
(Bulgarie et Roumélie). · Discussion et votation.

Etaient présents:

Pour l'Allemagne:

Le prince de Bismarck,
M. de Bülow,

Le prince de Hohenlohe-Schillingsfürst.

Pour l'Autriche-Hongrie:

Le Comte Andrássy,

Le Comte Károlyi,

Le Baron de Haymerle.

Pour la France:

M. Waddington,

Le Comte de Saint-Vallier,
M. Desprez.

Pour la Grande Bretagne:

Le Comte de Beaconsfield,
Le Marquis de Salisbury,
Lord Odo Russell.

Pour l'Italie:

Le Comte Corti,
Le Comte de Launay.
Pour la Russie:

Le prince Gortchacow,
Le Comte Schouvaloff,
M. d'Oubril.

Pour la Turquic:

Alexandre Carathéodory Pacha,

Mehemed Ali Pacha,

Sadoullah Bey.

La séance est ouverte à 2 heures ; le protocole de la séance précédente, lu par M. le Comte de Mouy est adopté. Les Plénipotentiaires ottomans, Alexandre Carathéodory Pacha, Mehemed Ali Pacha et Sadoullah Bey remettent leurs pleins-pouvoirs.

Le Président propose que désormais, pour accélérer le travail du Congrès, la communication préalable du protocole imprimé aux Plénipotentiaires tienne lieu de la lecture traditionnelle au début de la séance. Dans le cas où aucune modification n'aurait été faite par les membres de la haute

-1878 Assemblée, le texte serait considéré comme approuvé et déposé aux archives.

Sur des observations du Comte Andrássy et de M. Waddington relatives aux modifications que les Plénipotentiaires pourraient demander au texte du protocole et qui ne sauraient être ignorées de leur collègues, le Président propose et le Congres décide que lecture de ces changements sera donnée par le secrétariat au commencement de chaque séance. Il reste d'ailleurs bien entendu que le protocole devra être lu en entier, si la demande en est faite par l'un des membres du Congrès.

Le Comte Schouvaloff et M. d'Oubril expriment le désir que le protocole définitif soit rapidement distribué, pour hâter la communication aux gouvernements respectifs.

Le Prince Gortchacow s'associe à cette observation: il approuve d'avance toute disposition propre à faciliter et hâter les travaux de la haute Assemblée. Son Altesse espère une solution pacifique, et il importe que la paix du monde soit assurée aussi promptement que possible.

Le Président dit qu'il donnera des instructions au secrétariat pour une rapide distribution des protocoles.

Son Altesse Sérénissime annonce à ses collègues que des pétitions et des documents en nombre assez considérable on été adressés au Congrès et à lui-même. Le secrétariat a été chargé de faire le triage de ces pièces d'une importance fort inégale. Celles de ces pétitions qui présentent un certain intérêt politique ont été résumées dans une liste distribuée à tous les Plénipotentiaires: cette liste sera continuée au fur et à mesure de la présentation de communications analogues, et toutes ces pièces seront déposées au secrétariat. Son Altesse Sérénissime pense, et son sentiment obtient l'adhésion unanime, qu'en principe aucune proposition ou aucun document ne doivent être soumis à l'examen de la haute Assemblée s'ils ne sont introduits par un des Plénipotentiaires. Il se conforme donc à cette règle pour les pétitions dont il vient d'être question.

Son Altesse propose de passer à l'ordre du jour fixé dans la séance précédente.

Le Marquis de Salisbury donne lecture de la motion

suivante:

» Dès que la proposition pour la réunion d'un Congrès eût été faite, le gouvernement de la Reine communiqua aux six Puissances son opinion que la Grèce devrait y être représentée. On s'aperçoit facilement des raisons qui ont motivé

cette proposition. Le Gouvernement qui commença la guerre. 1878 aujourd'hui terminée, déclara qu'il l'avait entreprise avec des vues élevés et sans arrière-pensée. Il annonça qu'il ne recherchait pas d'acquisitions territoriales: son but était de délivrer les populations chrétiennes des maux dont l'existence était généralement reconnue quelle qu'en fût la cause. Son Altesse le Prince Gortchacow a réitéré les mêmes vues élevées dans cette salle à la première séance du Congrès.

>>> Une guerre entreprise avec de telles vues doit être évidemment terminée par une paix portant l'empreinte des mêmes sentiments; et le premier devoir des Représentants des Puissances sera de veiller à ce que les prévisions du traité soient restreintes dans les limites qui leur ont été ainsi prescrites.

>>L'objet des discussions du Congrès, si elles ne dépassent pas leur vrai but, sera, tout en diminuant le plus possible les changements territoriaux, d'améliorer le sort et d'assurer le bien-être de ces provinces de la Turquie européenne qui ont été le théâtre de calamités déplorables.

>>Or, les chrétiens de ces régions se divisent en deux parties dont les intérêts ne sont pas identiques et dont les sympathies ne sont pas en harmonie.

»Le Congrès n'ignore pas que pendant ces dernières années les liens d'amitié qui unissaient autrefois les sujets grecs et slaves de la Porte ont été rompus. D'alliés ils sont devenus rivaux. Les slaves, qui reconnaissaient autrefois l'autorité du patriarche grec, se sont ralliés à une nouvelle organisation ecclésiastique qui a réclamé leur soumission. Dans une grande partie du territoire habité par la race grecque le droit de posséder les églises et les écoles a donné lieu à des contestations, souvent même à des luttes, entre les populations des deux races.

>>Le conflit s'est profondément aggravé à la suite des événements qui se sont passés pendant ces derniers mois, et les passions engendrées par ces conflits, ont de plus en plus éloigné ces deux races l'une de l'autre. Il s'agissait de quelque chose de plus que d'une divergence d'opinion sur la question du régime ecclésiastique. Les Grecs redoutent, et avec raison, la subjugation de leur Eglise, la suppression de leur langue, et l'absorption et la disparition progressives de leur race, si leurs rivaux se trouvaient dans une position prépondérante. Ces points sont pour eux d'un intérêt capital et leur sort dépend de la forme que donnera le Congrès aux dispositions qui seront arrêtées dans le but de protéger les chrétiens et

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