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1878

Pour la Grand-Bretagne :
Le Comte de Beaconsfield,
Le Marquis de Salisbury,
Lord Odo Russell.

Pour l'Italie:

Le Comte Corti,

Le Comte de Launay.
Pour la Russie:

Le Prince Gortchacow,

Le Comte Schouvaloff,
M. d'Oubril.

Pour la Turquie:

Alexandre Carathéodory Pacha,
Mehemed Ali Pacha,

Sadoullah Bey.

La séance est ouverte à 2 heures et demie.

Le protocole No. 13 est adopté.

Le Président fait mention des pétitions de la liste No. 11. L'ordre du jour appelle l'article XVIII du traité de San Stefano, relatif à la ville de Khotour et à la rectification de la frontière turco-persane. Cet article est ainsi conçu:

»La Sublime Porte prendra en sérieuse considération l'opinion émise par les commissaires des puissances médiatrices au sujet de la possession de la ville de Khotour, et s'engage à faire exécuter les travaux de délimitation définitive de la frontière turco-persane.«

Le Président pense qu'il y a lieu, a lieu, conformément à la décision prise par le Congrès dans sa dernière réunion, d'entendre le représentant de Sa Majesté le Shah de Perse.

Son Excellence Malcom Khan est introduit, et le Président le prie de communiquer au Congrès les observations de son Gouvernement au sujet de l'article XVIII du traité de San Stefano.

Malcom Khan dit qu'il n'a point de communication à faire, mais qu'il désire seulement connaître la décision du Congrès.

Le Prince de Bismarck fait observer que la haute Assemblée n'a pas encore pris de résolution, mais a voulu s'assurer que la restitution de Khotour à la Perse serait acceptée par Sa Majesté le Shah.

Malcom Khan se déclare autorisé par son gouvernement à accepter avec reconnaissance la restitution du district de Khotour: il se réfère, pour l'étendue du territoire, à la délimitation dressée par la commission anglo-russe. Son Excellence ajoute quelques

X. Recueil.

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1878 considérations sur la situation de la frontière persane de Bayazid à Mouhamerra et appelle l'intérêt de la haute Assemblée sur le vif désir de son gouvernement de voir le Congrès mettre un terme à des difficultés sans cesse renaissantes. Le gouvernement persan se soumet d'avance à l'arbitrage qui serait fixé par la haute Assemblée.

Le Président pense que le Congrès consentira à prêter ses bons offices pour amener une entente entre la Turquie et la Perse, et le règlement de l'affaire de Khotour pourra lui en fournir l'occasion.

Malcom Khan se retire et, le Président ayant demandé aux Plénipotentiaires russes de faire connaître leur opinion sur l'article XVIII, le Comte Schouvaloff désire déterminer exactement le caractère actuel de la question. Dans les négociations qui ont eu lieu entre la Russie et la Turquie après la conclusion du Traité de San Stefano, la Russie consentit à rendre à la Sublime Porte Bayazid et la vallée d'Alachkerd, mais en stipulant, comme échange, la restitution du territoire de Khotour. C'est donc à titre d'échange que Khotour est rendu au Shah. Quant à la délimitation, il n'y a pas de difficulté, puisque Malcom Khan a déclaré accepter celle de la commission anglo-russe. Le Comte Schouvaloff ne peut qu'appuyer, d'ailleurs, le désir de la Perse d'arriver le plus tôt possible au règlement de ses

frontières.

Le Président demande si une proposition est faite en dehors du maintien pur et simple de l'article XVIII.

La lecture des offices adressés par Malcom Khan au Congrès établit que le ministre du Shah, de son côté, n'a présenté aucune proposition.

Le Comte Schouvaloff n'est point d'avis de maintenir purement et simplement l'article. Son Excellence répète que les situations respectives ont changé depuis le traité de San Stefano: il s'agit maintenant, de la part de la Turquie, non plus de prendre en sérieuse considération", mais d'exécuter un engagement, un échange, et ce caractère de la question doit être indiqué nettement dans une nouvelle rédaction.

Le Prince de Bismarck ayant exprimé le désir de savoir si les Plénipotentiaires russes désirent s'en charger, et Lord Salisbury ayant offert pour ce travail le concours des Plénipotentiaires anglais également intéressés dans la question au point de vue du commerce de la Perse, le Comte Schouvaloff annonce qu'à la prochaine séance, il présentera un nouvel article, après s'être concerté avec ses collègues d'Angleterre.

Le Président constate que les principes de l'article XVIII 1878 sont confirmés, sauf le complément que doivent préparer les Plénipotentiaires d'Angleterre et de Russie.

Carathéodory Pacha dit que, pour ce qui le concerne, il n'aurait aucun changement à proposer pour l'article XVIII. H n'a pas connaissance des négociations postérieures au traité de San Stefano, auxquelles le Comte Schouvaloff a fait allusion, qu'il sollicitera sur ce point les instructions de son gouvernement; mais qu'en attendant, les Plénipotentiaires ottomans sont toutefois à la disposition du Comte Schouvaloff pour la rédaction du nouvel article, tant qu'il s'agira de confirmer la décision rendue par la commission mixte au sujet de la cession de Khotour.

Le Président rappelle que, dans la séance précédente, le Congrès avait mis à l'ordre du jour d'aujourd'hui le résultat de pourparlers complémentaires sur différentes questions de détail relatives à la ville et au port de Batoum. Les Plénipotentiaires intéressés n'étant pas encore en mesure de faire connaître leurs décisions, la question est remise à la prochaine séance.

Procédant au point suivant de l'ordre du jour, le Président fait observer que Lord Salisbury s'est réservé de communiquer à la haute Assemblée le résultat d'une entente ultérieure avec les Plénipotentiaires ottomans sur la rédaction de l'article XVI, concernant les arméniens.

Lord Salisbury donne lecture de la rédaction concertée entre les Plénipotentiaires de la Grande-Bretagne et de la Turquie :

»La Sublime Porte s'engage à réaliser, sans plus de retard, les améliorations et les réformes exigées par les besoins locaux dans les provinces habitées par les arméniens et à garantir leur sécurité contre les kurdes et les circassiens. Elle donnera connaissance périodiquement des mesures prises dans ce but aux puissances, qui y veilleront.<<

Le Congrès donne son assentiment à cet article.

Le Président dit que, dans la dernière séance, Carathéodory Pacha a saisi le Congrès d'une motion relative à la pétition de l'archevêque Gerassimos sur les couvents dédiés. En voici

le texte :

»Considérant que le différend entre les saints lieux d'Orient et la Roumanie, relatif aux biens dédiés, qui, aux termes des protocoles des conférences des grandes puissances tenues à Paris en 1858, 1859 et 1861 et de la conférence réunie ad hoc à Constantinople en 1864, devait être réglé par la voie d'arbitrage, demeure jusqu'ici en souffrance:

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Les Plénipotentiaires ottomans prient cette haute Assemblée de vouloir bien prendre en considération le mémoire des saints lieux d'Orient porté sur la liste des pétitions présentées au Congrès sous le No. 49, et par lequel les pétitionnaires s'en remettent au Congrès pour qu'il veuille bien fixer un délai pour la mise en pratique de l'arbitrage et désigner un surarbitre pour le cas de partage.«

Le Premier Plénipotentiaire de Turquie déclare qu'il n'a pas formulé de proposition proprement dite, mais qu'il est prêt à s'approprier les conclusions du mémoire adressé par les saints lieux à la haute Assemblée. Son Excellence appelle l'intérêt du Congrès sur la déplorable situation des saints lieux orthodoxes qui réclament la mise à exécution des arrangements pris par la conférence tenue à Paris en 1858, l'arbitrage et la désignation éventuelle du sur arbitre, prévus par le Protocole du 30 juillet 1858. Les saints lieux s'en remettent au Congrès pour la nomination d'un surarbitre.

Le Président exprime ses doutes sur la compétence de la haute Assemblée dans cette question étrangère en elle-même aux traités de 1856 et 1871 et de San Stefano. Il désirerait cependant la recommander à l'attention de ses collègues et demande si l'un des Plénipotentiaires aurait à présenter quelques observations à ce sujet.

Lord Salisbury serait disposé à insister, mais Son Excellence ne voit pas quelle pourrait être la sanction d'une décision du Congrès en pareille matière, du moment que l'indépendance de la Roumanie n'en saurait dépendre.

Le Prince de Bismarck dit que, comme représentant de l'Allemagne, il est de l'avis de Lord Salisbury, et ne connaît, en effet, aucun moyen de coërcition à exercer par le Congrès en cette affaire.

Carathéodory Pacha remercie le Président d'avoir présenté la question à la haute Assemblée. Son Excellence regarde, comme désirable que cette difficulté reçoive une solution pour prévenir des discussions ultérieures entre la Roumanie et la Porte. Le Premier Plénipotentiaire ottoman demande, du moins, que, dans le cas où la haute Assemblée ne croirait pas devoir se saisir de l'affaire, la question pût être traitée en dehors du Congrès par les puissances.

Le Prince de Bismarck croit qu'en effet ce serait la seule manière réalisable de traiter cette question et pense que ses collègues consentiront à écrire en ce sens à leurs Gouverne

ments.

Le Comte Schouvaloff rappelle que la proposition des 1878 Plénipotentiaires français relative à la liberté religieuse et aux diverses garanties accordées à tous les cultes a créé un droit nouveau applicable à toutes les Principautés et qui autorise les intéressés à faire valoir, en temps et lieu, leurs justes réclamations.

Le Président est d'accord sur ce point avec les Plénipotentiaires de Russie. Son Altesse Sérénissime pense, en général, qu'on pourrait introduire dans le traité un article qui léguerait aux puissances représentées au Congrès la tâche de veiller, soit par leurs représentants à Constantinople, soit par d'autres délégués, sur l'exécution des diverses dispositions qui viennent d'être rappelées. La question des saints lieux pourrait se rattacher à ce contrôle. Le Prince de Bismarck ajoute, avec l'assentiment de la haute Assemblée, qu'en ce qui regarde cette dernière question, il sera noté au protocole que les Représentants des puissances sont prêts à référer à leurs gouvernements à ce sujet et à recommander à leur sollicitude l'examen de cette affaire, soit sur les anciennes bases, soit sur celles qui seront le résultat des délibérations du Congrés.

L'ordre du jour appelle le rapport de la commission de délimitation.

Le Prince de Hohenlohe, Président de la commission, indique d'abord le tracé de la frontière nord de la Principauté de Bulgarie qui suit la rive du droite du Danube depuis l'ancienne frontière de Serbie jusqu'à la ligne déterminée par le Congrès dans une précédente séance et qui part d'un point à l'est de Silistrie pour rejoindre Mangalia, sur la mer Noire. Le point à l'est de Silistrie n'est pas encore fixé, mais il ne s'agit pas d'une ligne stratégique: c'est une concession faite à la Roumanie, et le tracé exact de cette concession demeure réservé.

Le Comte Schouvaloff rappelle qu'en effet, il ne s'agit pas ici d'une ligne stratégique. Les Plénipotentiaires russes ont augmenté le territoire destiné à la Roumanie: il a été décidé qu'une ligne, partant à l'est de Silistrie, rejoindrait Mangalia qui serait inclus dans le territoire roumain. C'est une question de bonne foi: le point important étant le nombre d'eléments roumains à comprendre dans la Bulgarie, cette ligne doit être tracée avec soin et pourrait être confiée à une commission européenne.

Le Comte Andrássy dit que, les deux points d'attache étant fixés, les détails doivent, en effet, être remis à la commission.

Le Prince de Hohenlohe fait remarquer que l'on ne peut préciser encore le point d'attache du côté de Silistrie, mais que

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