Page images
PDF
EPUB

en présence de M. Néhou, ingénieur des Ponts et Chaussées, de M. Pigault de Beaupré, membre du Conseil général, et de M. Philippe Devot, président du Tribunal de Commerce.

Le projet de M. Néhou, en date du 11 avril 1829, prévoyait: 1° une écluse à sas, dont le but était d'établir la communication des canaux avec le port; 2 un bassin à flot pour le transbordement des marchandises; 3° le prolongement des jetées; 4o une écluse de chasse.

L'écluse à sas de la citadelle fut commencée le 27 octobre 1835 et terminée vers la fin de 1836. Le bassin à flot, commencé en 1838, fut livré au commerce en 1842. Il était limité au nord et au sud par de hauts et grands murs en béton revêtus de pierres de Stinkal; à l'Est, par une belle écluse de 17 mètres d'ouverture formant l'entrée du bassin; à l'Ouest, par une vaste grève avec un talus incliné vers le bassin. Sa longueur était de 260 mètres et sa largeur de 75 mètres. Il fut, d'abord, appelé bassin d'Orléans, en mémoire du duc d'Orléans, fils aîné de Louis-Philippe, qui venait de mourir d'une chute de voiture, le 13 juillet, et pour lequel ou célébra à Calais un service funèbre le 25 juillet.

Le prolongement des jetées, commencé en 1839, a été terminé en 1842. Celle de l'Est porta le nom de Louis-Philippe, en souvenir de l'échouement du Véloce. Pour rappeler cette circonstance, on grava sur le parapet de la jetée l'inscription suivante :

Sa Majesté Louis-Philippe

LL. AA. RR. le duc et la duchesse de Nemours,
Le duc d'Aumale, le duc de Montpensier,
La princesse Clémentine et Mm. Adélaïde, sœur du roi,
Surpris par la tempête

Pendant le trajet du Tréport à Boulogne
Sur le navire le Véloce,

Sont venus débarquer à cette jetée
Le 17 août 1840.

L'écluse de chasse, commencée en 1839, fonctionna pour la première fois le 25 Déc. 1843. Elle fut inaugurée en présence du Sous-Préfet, du maire, du président de la Chambre de Commerce et de M. Néhou.

[ocr errors]

Elle prit en 1844 le nom d'écluse Raffeneau, du nom de l'ingénieur en chef des Ponts et Chaussées qui avait rendu à la région des services signalés. Depuis 1828 M. Raffeneau avait plus spécialement concentré son attention sur la vieille digue de Sangatte et sur le port de Calais. En 1825, lorsque la mer avait entamé la digue de Sangatte et que le Pays-Bas était de nouveau menacé d'une désastreuse inondation, ce fut grâce à ses travaux et à sa résistance à l'emballement du public et aux propositions du syndicat des digues et dunes, que la digue fut reconstruite avec solidité suivant ses plans et ses idées. Il mourut à Lille le 10 avril 1843.

Ces divers travaux coûtèrent 5.730.000 francs. Lorsqu'ils furent terminés, en reconnaissance de leur heureuse exécution, les membres de la Chambre de Commerce remirent à M. Néhou, le 7 juillet 1844, une coupe en argent et en vermeil.

Dans sa séance du 28 Décembre 1844, le Conseil munide Calais délibéra que le Gouvernement serait prié d'élargir le quai sous le mur Ouest du bastion du Courgain et d'agrandir autant que possible ce bastion en portant son front-Nord plus en avant.

Le 24 mars 1846, le Ministre des Travaux Publics présenta à la Chambre des Députés un projet de loi, élaboré par M. Néhou, comportant la construction d'un quai de marée qui serait établi du côté de la jetée-Est, et l'amélioration de la position du canal comprise entre le pont Thierry, l'écluse du Crucifix et le port. La nouvelle écluse serait déplacée et le tracé du canal modifié. L'emplacement de la nouvelle écluse serait porté à l'extrémité du nouveau canal qui déboucherait sous l'escarpe de l'un des bastions à la naissance du fossé qui sépare la place de la citadelle. Le quai de marée fut construit en 1849, et les travaux du nouveau pont du Crucifix et la reconstruction du pont Thierry furent achevés en 1854.

Depuis un certain nombre d'années il était question de la démolition de la partie des fortifications comprenant la première enceinte du front-Sud.

A la date du 7 août 1835, l'administration de la guerre avait adopté en principe la pétition des Calaisiens en ce qui concerne cette suppression. Mais ce ne fut qu'en 1843 que

l'on donna suite au projet. On avait émis, d'abord, l'idée de creuser, sur l'emplacement de la partie démolie, un bassin intérieur qui eût permis de recevoir des marchandises dans Calais même. A la suite de la construction d'un nouveau bassin sur le port, communiquant avec le canal, on renonça à la première entreprise. Plus tard, on décida d'y installer le jardin public que nous voyons encore aujourd'hui.

Le 16 février 1837, le Conseil municipal avait voté des fonds pour l'embellissement de l'entrée de la ville, entre St Pierre et la porte Royale. Cet endroit présentait un aspect lamentable. Le passage des portes n'était pas en rapport avec la tenue de la ville, et l'avenue allant de l'hospice à l'écluse du Crucifix n'était plantée que d'un côté on y trouvait un corps-de-garde abandonné, derrière lequel on voyait un ancien cimetière morcelé par des dépôts de bois, et vis-àun terrain encombré de pierres de taille. On proposa d'embellir le passage allant de la porte Royale à l'écluse du Crucifix par des balustrades, derrière lesquelles on planterait des arbres, et par des haies et l'avenue qui s'étendait de l'hospice à l'écluse par une balustrade.

Dans sa réunion, le Conseil municipal se préoccupa également de débarrasser l'église Notre-Dame des baraquements qui l'encombraient et de rouvrir le portail St-Jacques.

L'approvisionnement en eau potable de la ville de Calais préoccupa aussi beaucoup les esprits en ce temps-là. En septembre 1835, parut un mémoire de M. Néhou ayant pour objet la conduite et la distribution à domicile des eaux de la la fontaine de Coquelles. Mais cette proposition fut écartée, et l'on accueillit celle du forage d'un puits artésien sur le Marché aux herbes, qu'entreprit le même architecte qui venait de creuser avec succès le puits de Grenelle. Durant plusieurs années le travail ne cessa pas; des fonds furent successivement votés, pour la continuation de l'entreprise, par la ville et le conseil général; enfin, le 8 septembre 1845, la sonde parvint à 346 mètres sans rencontrer d'eau jaillissante, Devant cet insuccès, les travaux furent suspendus et le projet abandonné. La question de l'adduction des eaux à Calais sera reprise en 1853.

Durant la monarchie de Juillet, l'industrie du tulle continue à se développer, par suite de la levée de la prohibition des fils de colon en 1834. Cette année-là, MM. Champailler et Pearson montent un métier au tulle point d'esprit. En 1837, les mêmes fabricants prennent un brevet pour la fabrication sur le métier Leavers d'un tulle imitant les blondes de Chantilly.

En 1841, le conseil des prud'hommes fit le rencensement général de la fabrique de tulle de la région. Calais avait 50 fabricants et 192 métiers; St-Pierre qui prenait de plus en plus d'importance au détriment de Calais, 97 fabricants et 426 métiers; Guînes, 20 fabricants et 32 métiers; Sangatte, 22 fabricants et 29 métiers; Tournehem, 10 fabricants et 18 métiers; Andres, 8 fabricants et 13 métiers; Peuplingues, 6 fabricants et 9 métiers; Marck, 3 fabricants et 5 métiers ; Hâmes-Boucres, 3 fabricants et 4 métiers; Audruick, 4 fabricants et 4 métiers; Coquelles, 2 fabricants et 2 métiers.

En cette année, Fergusson accomplit une révolution par l'application ingénieuse qu'il fait du système Jacquard au métier à tulle.

Le rencensement du 1er janvier 1844 donna pour Calais, 52 fabricants et 210 métiers, et pour St-Pierre, 114 fabricants et 449 métiers.

Les fabriques de tulle qui d'abord, pour la plupart, s'étaient installées à Calais nord, émigrèrent à St-Pierre, à la suite d'une circonstance assez singulière. Le maire de Calais M. Leveux, jugeant que les métiers troublaient le sommeil de ses administrés, prit un arrêté, en date du 5 juillet 1832, interdisant le travail de nuit dans les usines à tulle. M. LegrosDevot son successeur, intervint à son tour dans le même objet par un arrêté du 11 avril 1843. Les fabricants s'installèrent alors à St-Pierre, où ils trouvèrent à la fois terrain et liberté.

Au point de vue du trafic maritime, Calais lutte avec avantage contre Boulogne. Ses recettes douanières annuelles atteignent et parfois dépassent celles de ce dernier port. On y importe surtout des fils de coton et de soie, des fils de lin, des laines, des, fontes et des fers, des houilles, ainsi que des bois du Nord, pour la réception desquels il tiendra bientôt le premier rang. Le trafic d'exportation connaît une pleine prospérité.

Durant de longues années la lutte est des plus vives entre Calais et Boulogne à propos du passage des malles. Le Journal de Calais et l'Industriel Calaisien, d'une part, l'Annotateur et la Colonne de Boulogne, d'autre part, contiennent, à ce propos, des polémiques interminables. Grâce à son titre de Sous-préfecture et à son siège de direction des douanes, Boulogne eût sans doute obtenu l'avantage, si la nature, plus puissante que toutes les intrigues, ne se fût chargée de la défense des intérêts calaisiens. Le vent d'ouest qui règne la plus grande partie de l'année dans le détroit, et qui, les jours de tempête, rend le port de Boulogne inaccessible, ne ménagea pas plus les navires à vapeur voulant alors pénétrer dans ce port, qu'il n'avait épargné jusque-là les navires à voiles.

C'est ainsi qu'en 1845, les navires à vapeur " Amphitrite et Duke de Sussex "font naufrage à l'entrée du port de Boulogne. Du 7 au 9 août de la même année, dix navires viennent chercher un refuge à Calais, le port de Boulogne étant inabordable.

Calais conserva donc, pour le moment, la réception des malles, et le service des voyageurs prit une extension considérable par suite du perfectionnement de la navigation à vapeur. Jusqu'en 1837, on n'employa que le bois pour la construction des navires à vapeur destinés au transport des voyageurs; cette année-là, ful lancé le premier vapeur en fer. Bientôt, de nouveaux bateaux, plus rapides et plus luxueux que les précédents, furent utilisés. La Cie du South-Eastern se forma en 1845.

Grâce à ces améliorations, le port de Calais, de 1830 à 1848, est choisi comme lieu de passage par de nombreux souverains et des personnages divers.

Le 23 juin 1831, Don Pedro, ex-empereur du Brésil, s'y embarqua pour l'Angleterre et le Portugal. Cet ex-souverain, qui affectait des idées libérales, était venu en France pour recruter des partisans destinés à former une armée, dans le but de détrôner son frère, Don Miguel, roi du Portugal. Après sa victoire, sans se soucier davantage des engagés français et allemands qui avaient contribué à son succès, il en renvoya un certain nombre par l'Angleterre. Le 10 mars 1834, 84

« PreviousContinue »