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exécuter leur crime. Les autres coupables, Topino-Lebrun, Demerville, Aréna, tombè- Ax 9. rent dans les mains de la police, quelques jours après. Le ministre Fouché en rendit compte aux Consuls, le 1." brumaire.

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« L'œil vigilant de la police, disait ce magistrat, vous avertissait, il y a quelques mois, qu'une poignée de misérables, poussés par les ennemis de la France, tramaient les plus noirs attentats. Bientôt les papiers du comité anglais, mis sous vos yeux, vous donnèrent la preuve de ces trames criminelles. Les agens de ce comité ont été arrêtés ou mis en fuite. Le gou vernement n'a pas saisi les tribunaux de cette affaire; ce délai fut commandé par l'intérêt

de l'Etat.

» Un nouvel attentat fut ourdi ; on a pensé qu'en frappant le premier consul, on frappait à mort la république, ou du moins qu'on la replongeait dans le chaos.

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>> Seulement ici on ne trouve plus la tête qui dirigea le bras des assassins; elle s'est caehée dans un nuage. La police a saisi les coupables, ils avouent leurs crimes; mais ce ne que des agens obscurs qui s'agitent dans la poussière. Comment croire que ce fait ne se rattache pas à une cause plus puissante, lorsqu'on réfléchit que, dans le même tems son horrible succès a été calculé dans certaines contrées de l'Europe?

» Cependant je me garderai d'aucune accusation indéfinie et illimitée. Quand on n'aime que la vérité, quand on veut ne répandre que la lumière, on doit accuser avec précision, et seulement lorsque les preuves convainquent.

» Je vous propose de traduire au tribunal de la Seine les accusés, et d'y renvoyer tous les interrogatoires, avec les pièces de conviction. Tout a des bornes, les affections généreuses ont les leurs aussi. Au-delà de ces sentimens des grandes ames, sont la faiblesse et l'imprévoyance, comme au-delà de la nature est le chaos ».

Quatre des coupables furent condamnés à la peine de mort, le juri acquitta les autres, contre lesquels les preuves n'étaient pas complètes; ce procès donna lieu d'examiner quelle conduite la France entière devait tenir envers un petit nombre d'hommes dont la fatale influence présida à toutes les scènes funestes de la révolution, et qui, ne respirant que l'anarchie, menaçaient perpétuellement de plonger, non-seulement la France, mais l'Europe entière dans une désorganisation générale.

« Des hommes exercés à tous les genres de forfaits, disait à ce sujet le ministre de la police, qui les connaissait parfaitement, renouvellent chaque jour, sous toutes les formes, le plan conçu par eux d'anéantir en France l'ordre et le bonheur public. Ce ne sont pas

des malfaiteurs qui menacent seulement quelques personnes ou quelques propriétés, et AN 9. contre lesquels les formes de la justice sont instituées, mais des ennemis de la France entière, qui menacent à chaque instant tous les Français de les livrer aux fureurs de l'anarchie. Les attentats de ces hommes affreux sont innombrables.

>> Par eux la convention nationale fut attaquée jusques dans son sanctuaire; ils tentèrent cent fois de rendre les comités de gouvernement complices ou victimes de leur rage sanguinaire; ils tentèrent de soulever, contre le gouvernement, les troupes destinées à sa garde. Ces hommes sont les ennemis de toute institution politique; celle qu'eux - mêmes auraient créée, serait bientôt renversée par leurs mains.

» Leur tactique a dû changer à l'aspect d'un gouvernement que l'affection publique environne. Ne pouvant sonlever la multitude, dont ils réunissent l'aversion et le mépris, ils n'ont tenté que des assassinats, tantôt sur le chemin de la maison de campagne de Bonaparte, tantôt à l'opéra, tantôt dans les rues, tantôt en s'introduisant dans les souterrains des Tuileries. La stupeur et le désordre qu'auraient causés la mort du premier consul, paraissaient favorables à leurs affreux desseins. C'est une guerre atroce qui ne peut être ter

minée que par un acte de haute police extraor1800. dinaire.

>> Parmi ces hommes, tous n'ont pas été pris le poignard à la main, mais tous sont connus pour capables de l'aiguiser et de le prendre, lorsque l'occasion s'en présentera. Il ne s'agit pas seulement de punir des coupables, mais de garantir l'ordre social. »

Le ministre de la police proposait de prononcer la déportation contre cent trente individus, dont les noms étaient annexés à son rapport.

Deux questions furent soumises à la délibération du conseil d'Etat; on examina si la mesure, proposée par le ministre de la police, était nécessaire au maintien de la constitution, et si cette mesure devait être un acte du gouvernement ou convertie en projet de loi il fut pris l'arrêté suivant :

<< Le conseil, considérant que depuis le commencement de la révolution il existe une classe d'individus qui, profitant du silence des lois, s'est livrée à des crimes dont l'impunité fut une source de calomnie contre la nation française, et que, depuis l'organisation du gouvernement actuel elle a tramé plusieurs fois l'assassinat du premier magistrat de la république ; que cette classe ne peut être envisagée que comme une association de brigands que les lois ordinaires ne sauraient ré

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primer; pense que, pour assurer la liberté publique, le gouvernement doit les déporter AN 9. hors du territoire européen de la république, et que cette mesure n'est pas de nature à devenir l'objet d'une loi, mais que cet acte extraordinaire, ayant pour objet de maintenir la constitution et la liberté publique, doit être présenté par trois conseillers d'Etat au sénat conservateur, pour être la matière d'un sénatus-consulte, prononçant sur la question de savoir si cette mesure est conservatrice de la constitution. >>

Le sénat ayant rendu un senatus - consulte conforme à l'arrêté du conseil d'Etat, les individus indiqués dans le rapport du ministre de la police furent déportés.

Plusieurs de ces hommes n'étaient pas coupables, sans doute, des assassinats médités contre Bonaparte; mais il est constant que le plus grand nombre d'entr'eux s'était souillé des plus noirs forfaits dans Paris ou dans les provinces. C'étaient les auteurs des journées affreuses de septembre à Paris, à Versailles, de la Glacière à Avignon, des noyades à Nantes. Il est constant que ces individus qui prenaient le titre de patriotes exclusifs, s'arrogeant le nom et les droits du peuple français, s'étaient montrés, dans toutes occasions, le foyer de tout complot, les agens de tout attentat, l'instrument vénal de tout ennemi

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