dans celles qui sont aigues: elle ne serviroit qu'à fortifier les injustes défiances que bien des gens ont de la Médecine. Ce paslage a donc été tronqué, & il l'a été à dessein, cela est évident : on en apperçoit facilement la raison. Il reste néanmoins encore une difficulté à juger entre Celse & M. Bruhier. Le premier croit qu'il n'y a que des ignorans qui puissent se tromper sur les signes de la Mort : il en donne pour preuve ce que nous venons de dire, après lui, d'Asclepiade, Médecin qui a joui de son vivant & après sa mort de la réputation la plus brillante. M. Bruhier cite la même histoire d'après Kirchman * : Celui-ci l'a tirée d'Apulée, qui appelle Afclepiade le prince ou le premier des Médecins si l'on en excepte Hippocrate seul. Le même fait sert donc à Celse pour * Pag. 90. premiere édition du I. volume. 4 prouver que les signes de la Mort sont certains; M. Bruhier au contraire le rapporte en faveur de l'incertitude de ces signes. Vous feriez tort à votre sagacité fi vous balanciez un moment à vous déterminer dans un cas aussi peu embarraflant. Le doute & l'incertitude ne sont applicables quà ceux qui ont jugé que cet homme étoit mort, Leur conduite est marquée au sceau de l'ignorance & de la témérité: non crimen artis fi quod profefforis eft. L'état de cet homme n'a point été équivoque pour Afclepiade ; les fauffles apparences ne pouvoient faire illusion qu'à des personnes inattentives ou peu instruites: non bonos fed imperitos medicos decipiunt. Afclépiade, Médecin intelligent, a connu que l'homme qu'on portoit en terre n'étoit pas morr: intellexit eum vivere qui efferebatur. Si les signes de la Mort étoient incertains, ce n'est pas dans ce fait qu'il falloit en chercher la preuve : L'inconféquence est trop marquée pour trouver quelque crédit dans l'esprit des gens qui font le moindre usage de leur raison. Il est démontre, par ce que nous venons de dire, que Celse n'a parlé de l'opinion de Démocrite sur les signes de la Mort que par occasion, & qu'il l'a-combattue expressement. Elle cho que trop ouvertement toute vraisemblance pour en avoir imposé à ceux qui l'auroient éxaminée sans prévention. M. Leclerc, * en parlant de Démocrite, a senți que ce principe étoit trop vague. Le jugement de cet hiftorien ne fera pas suspect de partia>> Au reste il croyoit (Dé>>>mocrite) que bien loin qu'il y eut >> des signes sur lesquels on put cer» tainement juger de la mort pro lité.. .... * Histoire de la Médecine, premiere partie, page 1. >> chaine : : : › chaine d'un homme, il n'y avoit » pas même des marques assez fûres, >> ou sur lesquelles les Médecins puf>> sent compter fûrement, qu'un >> homme ne vivoit plus; ce qui se 1 » doit entendre de l'état où est une >> personne que l'on croit qui vient » d'expirer. » Cette restriction est d'un homme judicieux. Vous voyez, Monfieur, que l'opinion de l'incertitude des signes de la mort n'a pas été admise aussi généralement que vous l'aviez d'abord imaginé sur la foi d'autrui. Je me suis fait une maxime de vérifier, autant qu'il est en mon pouvoir, tout ce qu'on rapporte d'après les anciens : je me suis apperçu qu'on leur faisoit dire souvent ce à quoi ils avoient le moins pensé. Ce n'est pas toujours faute de jugement qu'on saisit mal leurs fentimens. On veut absolument s'étayer de leur autorité; on parcourt leurs B ouvrages avec précipitation, quelquefois même avec des dispositions peu finceres. L'expression est modérée à l'égard de ceux qui ne les feuilletent que dans le dessein d'y trouver quelque apparence de protection pour les sentimens dont ils sont prévenus, & pour éluder les décisions qui leur sont contraires. Parmi les Auteurs modernes, Lancisi, premier Médecin du Pape Clement XI. est celui dont le fuffrage a paru le plus favorable à ceux qui soutiennent que les signes de la Mort font incertains. * Ce Médecin célébre & respectable rapporte que dans le tems de peste plusieurs personnes ont été enterrées comme mortes, quoiqu'elles ne le fuffent pas. Il cite plusieurs cas de cette nature d'après Zacchias, Médecin de Rome; & il * Laudatus & nunquam fatis laudandus Lancifius. Voyez la These de M. Winflow. 1 |