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aux perfonnes réputées mortes. Et je ne crains point d'avancer que le danger réel & inévitable qu'il y auroit à laiffer journellement dans un Hôpital, les morts dans leurs lits jufqu'à la manifestation de la pourriture, ne peut être mis en comparaison avec l'inconvénient poffible de porter très-rarement une perfonne vivante dans un lieu qui seroit destiné à recevoir celles qui font mortes. Mais doré. navant perfonne ne doit être la victime de l'ignorance ou du peu d'attention qui donneroient lieu à l'accident fatal de l'inhumation d'un vivant les fignes de la mort ne font point incertains; Que ceux à qui le foin des Hôpitaux est confié s'instruifent de leurs cobligations, & des devoirs que l'humanité leur prescrit; alors les pauvres feront confolés dans leur miféte, on préviendra leurs befoins, & l'on abolira des

úfages meurtriers par lesquels les miférables trouvent quelquefois la fin de leur infortune, par les mains cruellement secourables des perfonnes qu'un zéle mal dirigé anime en leur faveur.

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M. Bruhier fait à ce fujet des reproches très-vifs à l'Hôtel-Dieu de Paris; vous connoissez, Monfieur, bien d'autres Maifons dont l'inftitution n'eft ni moins charitable, ni moins utile, qui pourroient fe les appliquer. Il eft certain, dit cet » Auteur * , que file reproche de » précipiter les enterremens eft fon» dé, c'eft furtout dans les Hôpitaux, » & par conféquent il n'y a point de » doute qu'on n'y enterre souvenɛ » des perfonnes encore vivantes. » Mais ce n'eft pas le feul reproche » qu'on ait à faire à l'Hôtel-Dieu de Paris. Perfonne de ceux qui font *Tome II. pag. 762 esiohd

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réputés morts n'y échappe à un "traitement extrêmement propre à

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les rendre effectivement tels. Car » à peine ont ils rendu les derniers foupirs, du moins à ce qu'on croit, qu'on les transporte dans la falle des morts, où on les étend fur une » table de pierre jufqu'à ce qu'on les »enfeveliffe. Or je laiffe à penfer s'il » y a des moyens plus efficaces, fur» tout l'hiver, pour achever d'étein» dre les reftes de la vie d'un malade épuifé quelquefois par la maladie » & les remédes, & attaqué d'une » affection foporeuse qui eft accompagnée d'un fi grand rallentiffe» ment de la circulation, qu'elle eft adevenue infenfible. Auffi fuis-je perfuadé que le nombre de ceux » qu'on enterre vivans, n'est pas auffi » grand qu'il le feroit, vû la précipitation avec laquelle on enterre, iGi l'on ne mettoit point en usage

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» ce moyen prefqu'infaillible d'ache » ver ceux qui ne font encore morts

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qu'imparfaitement. Il est défendu » d'enterrer un mort encore chaud. » C'eft fur ce principe qu'à l'Hôtel» Dieu on met les corps fur des ta»bles de pierre. Mais peut-on tirer » d'un principe auffi judicieux une » conféquence auffi abfurde? Peut» on en conclure qu'il faille fe pref» fer d'éteindre cette chaleur qui ne » demande des égards pour un corps

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où elle fe fait encore fentir, que » parce qu'elle eft un attribut, » un figne de la vie ? Et pourquoi » les malheureux, qui n'ont de reffource contre leurs maladies. que dans la charité des hommes, fontils privés de la faveur équivoque » de la loi qui ne veut pas qu'on » donne la fépulture avant l'expiration des vingt-quatre heuresti.s » Je- fuis perfuadé¡gmcontinue ¡Mə

Bruhier, que dans toutes ces maifons, le plus invincible des obftacles

eft la prévention & l'ufage; tirans d'autant plus impérieux, & d'au»tant plus abfolus, qu'ils devien» nent principes dans tout ce qu'on appelle communauté. »

Il est bien aifé de prévenir dans les Hôpitaux le malheur d'enterrer quelqu'un fous de fauffes apparences de la mort. Il ne s'agit que de commettre un Chirurgien à la vifite de ceux qui font réputés morts, & que les Infirmiers, Sœurs & Infirmieres, ne puiffent enfevelir avant qu'on leur ait affuré que la mort eft certaine. On peut ordonner que les mêmes précautions foient prifes chez les particuliers de quelque rang & qualité qu'ils foient. M. Bruhier avoit prudemment conçu qu'il étoit néceffaire qu'on fit choix d'Officiers pour faire la vifite des perfonnes réputées

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