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ceux dont on l'auroit prié de certifier l'état. I confeille expreffément aux Médecins de confulter leur prudence; «fi l'on apperçoit encore quelques -»mouvemens dans la poitrine ou dans le bas-ventre du fujet, il ne faut pas', » dit-il, affurer pour cela que la per» fonne n'eft pas morte: car on a ob»fervé que ces fortes de mouvemens

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fe faifoient dans les cadavres par » l'affaiffement des parties folidesi, "par la fermentation des humeurs & par l'explosion des matieres venteu»' ses ; de-là, fans doute, if eft arrivé, » continue Lancifi, que de's gens peti expérimentés fe font trompés, & le font même couverts de ridicule, en

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-" croyant que le principe de la vie » fubfiftoit encore dans certains ca» davres. Eanci n'a donc pas

* Quibus forfitan factum eft ut minus in arte -periti, vitam cadaveribus attribuentes, non Solum falfi, atqui certè ridiculi interdùm evaferint.

cru que les fignes de la Mort étoient incertains. Dans cette opinion un Médecin pourroit-il être taxé de peu d'habileté, & encore moins tourné en ridicule, pour avoir continué les foins à une perfonne dans la poitrine ou dans le ventre de laquelle il auroit apperçu des mouvemens ? Ces foins, au contraire, ne feroientpas l'éloge de fa charité & de la prudence?

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Enfin, M. l'opinion de l'incertitude des fignes de la Mort eft trop injurieuse à la Médecine pour être vraie. Cet art exifte, on n'en peut douter : des fautes que l'on commet en l'exercant, quelques groffieres qu'elles foient, font une preuve de fon exiftence. Mais fi les bornes de cet art font telles qu'il ne foit pas poffible de connoître fi un homme eft mort ou s'il eft vivant, quelle idée aura- t'on déformais des regles de cette science?

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l'étude réfléchie de la nature, les obfervations les mieux conftatées fur fes divers mouvemens, l'expérience la plus fuivie, ne formeront donc qu'une science frivole; la Médecine ne fera donc plus qu'une chimere? Si un Médecin en qui l'on fuppofe des lumieres, de la sagesse & de l'expérience, ne peut fçavoir avec certitude fi un homme eft mort ou vivant, comment, je vous prie, concevoir qu'il puiffe diftinguer à travers les différens fimptômes d'une maladie compliquée, quel eft celui auquel il doit fa principale attention? Ne pouvoir difcerner pofitivement fi une perfonne eft vivante lorsqu'elle eft en fincope ou en léthargie; c'eft effectivement fe tromper fur les fignes de la Mort; mais c'eft auffi, par la même raifon, ne pas fe connoître en fincope ni en téthargie. De l'incertitude des fignes de la Mort réfulteroit néceffairement

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l'incertitude de la Médecine. Tous les Médecins qui ont écrit fur la fincope & fur la léthargie, ne nous en auroient donné que des defcriptions vagues & incertaines, fi elles font incapables de fixer nos connoiffances fur ces deux états. Quel jugement portera-t'on des ouvrages admirables qui ont été composés depuis Hippocrate, fur le prognostic des maladies ? L'excellent Traité de Profper Alpin * fur les préfages de la vie & de la mort, ne fera donc plus qu'un tiffu de dogmes abfurdes; & fes fçavantes réflexions, vuides de fens ? Il femble, en effet, qu'il faille bien moins de fçavoir & d'intelligence pour déterminer fi une perfonne eft morte ou vivante, que pour connoître fi elle mourra de fa maladie, ou fi elle peut en échaper. Si l'on n'a aucunes marques certaines par lesquelles on puiffe connoître

*De prafagiendâ vitâ & morte agrotantium.

l'état

l'état pofitif de la vie & de la mort; comment feroit-il poffible qu'on en eut pour juger de l'avenir ? les connoiffances que les anciens nous ont tranfmifes mettent heureusement l'honneur de la Médecine à l'abri de pareils reproches. Bérenger de Carpi, fameux Chirurgien Italien du XVIe fiécle, & à plufieurs titres le bienfaiteur de l'humanité, nous a laiffé un exem

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ple bien décisif de ce qu'on eft en droit d'attendre de la certitude de l'art, lorfqu'il eft exercé par des perfonnes éclairées. Ce fçavant homme nous apprend qu'il a prédit l'heure précife de la mort fix jours avant qu'elle arrivât. Il eftima d'abord le dégré de force du poulx du malade : il le vifitoit presque à chaque heure, afin de ju

ger

de la diminution de la force des

* Il a été le reftaurateur de l'Anatomie en Italie, & a inventé la méthode de donner les frictions mercurielles pour la guérison de la V....

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