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de la pospérité publique dans tous les pays soumis à son influence; ou comme si elle pouvait tomber dans l'absurdité de s'imaginer Buonaparte capable d'abandonner les maximes qu'il a invariablement observées.

L'Espagne n'a pas besoin de demander conseil à personne; elle en a reçu d'assez instructifs, en se détrompant d'une manière si funeste. Buonaparte l'a affligée de deux espèces de guerre; jusqu'à l'an 1808, il l'a fit à la dignité, aux trésors, aux escadres et aux armées de l'Espagne, en les faisant servir à ses desseins; voilà ce que cet allié exterminateur appela son amitié ; et afin que personne ne se fiât aux assurances de sa reconnaissance, il mit en œuvre, la même année à Bayonne, les machinations bien connues du public; et ensuite pour maintenir l'ouvrage le plus atroce de perfidie et de violence, il répandit la dévastation et le carnage sur les provinces de cette nation, et la traita comme une propriété libre dont le maître peut disposer en faveur de qui bon lui semble, et à des conditions de son choix. Buonaparte ne s'est pas démenti; il signale sa nouvelle époque en sacrifiant à sa vanité le souverain légitime et adoré de la France, ainsi que la liberté de cette puissance, en ce qu'il se met à la tête d'une faction intéressée à ne pas faire cesser les malheurs de l'humanité. Buonaparte, dans la capitale de la France, dit à toutes les nations: Vous ne m'avez pas cru; dans les pacifications précédentes vous avez transigé avec vos intérêts les plus précieux, et avec vos devoirs les plus sacrés pour acheter la tranquillité des peuples, et ceux-ci ont été trompés. Buonaparte, dans la résidence du trône français, dit à tous les souverains dans d'autres tems, et malgré votre conviction, vous avez reconnu mes droits usurpés; vous m'avez permis de me placer dans vos rangs, et le résultat en a été de nourir ma vanité et mou ambition. Enfin, Buonaparte, dit à tout le monde toutes ces complaisances ont été méprisées par un homme sans foi et sans loi; de sorte qu'il n'y a pas de terme moyen entre son extermination et celle du genre humain.

Dans de pareilles circonstances, personne ne peut hésiter sur le parti à prendre. Toute l'Europe a pris celui qui est le plus sûr, le plus avantageux et le plus honorable. La méfiance entre les puissances a disparu, leurs intérêts se trouvent associés par le danger commun. La Prusse ne restera pas spectatrice passive des revers de l'Autriche; l'Autriche ne regardera pas avec indifférence le sort de la Prusse. La Russie ne permettra pas que la partie méridionale de l'Europe soit partagée en patrimoines pour nourrir des esclaves couronnés. L'Angleterre persistera à ne plus permettre que le téméraire Bonaparte paraisse au nombre des souverains; ce Buonaparte qui osa faire la loi aux mers, à une époque où tous les navires de la France étaient enchaînés dans ses ports; enfin, les souverains,

bien persuadés que la générosité n'est pas un motif pour des âmes d'une certaine trempe, n'écouteront que les réclamations de la justice et du salut public, cette loi suprême des gou

vernemens.

Espagnols! voilà donc une guerre commandée par cette loi; elle est innocente et parfaitement juste, parce qu'elle est calculée sur le bien des peuples et sur la sûreté des souverains appelés par la Providence et par les lois fondamentales à les gouverner. Elle est aussi sûre, parce que les mesures adoptées, et qui seront adoptées par la suite par les puissances coalisées pour reconquérir la paix de l'Europe, sont conformes à la gravité et à la haute importance de l'entreprise; elle est surtout nécessaire, parce que les corps de la nation, tout comme les individus, ne sauront point abandonner la loi qui leur ordonne de se conserver, ni transiger sur leur défense contre le perturbateur de la tranquillité du monde.

La nécessité de la guerre ne part pas de ce seul principe; vous en avez, Espagnols, une autre très-impérieuse de lutter contre celui qui forgea le projet impie de détruire l'ouvrage de Jésus-Christ, et de faire tomber, en deux ou quatre ans, ce que, dans ses instructions à Cervelloni, il appela l'édifice de la fourberie et des préjugés. Voilà ce Buonaparte qui, non content d'être l'origine de toutes les calamités, veut encore qu'on les souffre sans secours, sans consolation, sans espérance d'un meilleur sort, enfin, sans le secours de l'aimable, de la douce, de la compatissante religion catholique. conviennent pas à Napoléon ces dogmes qui prêchent la justice et l'équité; ils ne plaisent pas à l'usurpateur des trôues; enfin, ils ne conviennent pas à celui qui soutient que les noms de juste, d'équitable et de vertueux appartiennent exclusivement aux conquérans.

Ils ne

Espagnols! la justice, la prudence, la loi de sa propre défense et la religion commandent cette guerre, pour arracher la France et son trône du joug de l'oppression sous lequel ils gémissent, et pour reconquérir la tranquillité et le repos du monde. Les conseils de l'ambition n'ont exercé aucune influence sur un tribuual si intègre. La France ne sera pas dé membrée, ni dans ses places, ni dans ses provinces. Les frontières seront religieusement respectées; et, pour que les armées auxiliaires n'y mettent pas le pied, la France n'a qu'à suivre l'impulsion qui lui commande de réfléchir sur l'outrage qu'on fait à la dignité nationale, en en faisant un jouet aux factions; qu'une nation commence à devenir esclave, du moment où elle perd les rois appelés par des lois fondamentales, et que la plus déshonorante de toutes les spéculations est celle de voir avec une indifférence apathique un roi, père de ses peuples, échangé contre un monstre qui se nourrit de sang humain,

Je connais bien le droit que j'ai de déclarer et de faire la guerre. Je suis persuadé que mes sujets se reposeront avec confiance sur un roi qui fonde sa félicité sur celle de ses peuples, et qui ne commence une guerre qu'avec la douleur de se voir forcé de les défendre. Mais j'ai voulu appeler à mon secours la force de la conviction, afin de confirmer d'avantage aux yeux des nations ma réputation de juste; afin d'augmen ter la bravoure de mes troupes, exciter la générosité des riches, exhorter tous à la résignation dans ces circonstances malheu reuses; et afin que la guerre se trouvant ainsi sanctifiée, tous puissent espérer les secours de celui qui seul accorde des victoires.

Donné de mon palais royal, à Madrid, le 2 Mai 1815.

(Signé)
(Contresigné)

FERDINAND. PEDRO CEVallos,

No. 12.

Déclaration des puissances sur les affaires de Suisse, 20 Mars,

Les puissances appelées à intervenir dans l'arrangement des affaires de la Suisse, pour l'exécution de l'article 6 du traité de Paris du 30 Mai 1814, ayant reconnu que l'intérêt général réclame en faveur du corps helvétique l'avantage d'une neutralité perpétuelle, et voulant par des restitutions territoriales et des cessions, lui fournir les moyens d'assurer son indépendance et maintenir sa neutralité; après avoir reçueilli toutes les informations sur les intérêts des différens cantons, et pris en considération les demandes qui leur ont été adressées par la légation helvétique, déclarent:

Que, dès que la diète helvétique aura donné son accession en boune et due forme aux stipulations renfermées dans la présente transaction, il sera fait un acte portant la reconnaissance et la garantie de la part de toutes les puissances, de la neutralité perpétuelle de la Suisse dans ses nouvelles frontières, lequel acte fera partie de celui qui, en exécution de l'article 32 du susdit traité de Paris du 30 Mai, doit compléter les disposi tions de ce traité.

Transaction.

Art. 1er. L'intégrité des dix-neuf cantons, tels qu'ils existaient en corps politique, à l'époque de la convention du 29 Décembre 1813, est reconnue pour base du systême helvétique.

2. Le Vallais, le territoire de Genève, la principauté de Neufchâtel sont réunis à la Suisse, et formerent trois nouveaux cantons. La vallée des Dappes ayant fait la partie du canton de Vaud lui est rendue,

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3. La confédération helvétique ayant témoigné le désir que l'évêché de Bâle lui fût réuni, et les puissances intervenantes voulant régler définitivement le sort de ce pays, le dit évêché, et la ville et territoire de Bienne feront à l'avenir partie du canton de Berne, On n'excepte que les districts suivans:

1o. Un district d'environ trois lieues carrées d'étendue, renfermant les communes d'Altschweiler, Schoubach, Oberweiler, Terweiler, Ettengen, Fürstenstein, Plotten, Pfetingen, Aesch, Bruck, Reinach, Arlesheim, lequel district sera réuni au canton de Bâle.

2o. Une petite enclave située près du village Neuchâtelois de Lignière, et laquelle étant aujourd'hui, quant à la juridiction criminelle, sous celle de l'évêché de Bâle, appartiendra en toute souveraineté à la principauté de Neufchâtel.

Art. 4. 1°. Les habitans de l'évêché de Bâle, et ceux de Bienne réunis aux cantons de Berne et de Bâle, jouiront à tous égards, sans différence de religion (qui sera conservée dans l'état présent) des mêmes droits politiques et civils dont jouissent et pourront jouir les habitans des anciennes parties desdits cantons. En conséquence, ils concourront avec eux aux places de représentans et autres fonctions suivant les constitutions cantonales. Il sera conservé à la ville de Bienne et aux villages ayant formé sa juridiction, les priviléges municipaux compatibles avec la constitution et les réglemens généraux du canton de Berne.

2o. La vente des domaines nationaux sera maintenue, et les rentes féodales et les dîmes ne pourront point être rétablies.

3o. Les actes respectifs de réunion seront dressés conformément aux principes ci-dessus énoncés, par des commissions composées d'un nombre égal de députés de chaque partie intéressée. Ceux de l'évêché de Bâle seront choisis par le can ton-directeur, parmi les citoyens les plus notables du pays.

Lesdits actes seront garantis par la confédération suisse. Tous les points sur lesquels les parties ne pourront s'entendre, seront décidés par un arbitre nommé par la diète.

4°. Les revenus ordinaires du pays seront perçus pour le compte de l'administration actuelle jusqu'au jour de l'acces sion de la diète helvétique à la présente transaction. Il en sera de même pour l'arriéré desdits revenus; ceux levés extraordinairement et qui ne seraient point encore entrés en caisse, cesseront d'être perçus.

5°. Le ci-devant prince-évêque de Bâle n'ayant reçu ni indemnité ni pension pour la quote-part de l'évêché qui, autrefois, faisait partie de la Suisse, le recès de l'empire germanique de 1803 n'ayant stipulé qu'en raison des pays qui ont fait partie intégrante dudit empire, les cantons de Berne et de Bâle se chargent de lui payer, en augmentation de ladite pensiou viagère, la somme de douze mille florins d'empire, à

dater de la réunion de l'évêché de Bâle aux cantons de Berne et de Bâle. La cinquième partie de cette somme sera employée et restera affectée à la sustentation des chanoines de l'ancienne cathédrale de Bâle, pour compléter la rente viagère qui a été stipulée par ledit recès de l'empire germanique.

6o. La diète helvétique décidera s'il est besoin de conserver un évêché dans cette partie de la Suisse, ou si ce diocèse peut être réuni à celui qui, par suite des nouvelles dispositions, sera formé des territoires suisses qui avaient fait partie du diocèse de Coustance. En cas que l'évêché de Bâle dût être conservé, le canton de Berne fournira dans la proportion des autres pays, qui, à l'avenir, seront sous l'administration spirituelle de l'évêque, les sommes nécessaires à l'entretien de ce prélat, de son chapitre et de son séminaire.

5. Pour assurer les communications commerciales et militaires de Genève avec le canton de Vaud et le reste de la Suisse, et, pour completter à cet égard l'art 4 du traité de Paris, S. M. T. C. consent à faire placer la ligne de douanes de manière à ce que la route qui conduit de Genève par Versoix en Suisse, soit en tout tems libre, et que ni les postes, ni les voyageurs, ni les transports de marchandises n'y soient inquiétés par aucune visite des douanes ni soumis à aucun droit. Il est également entendu que le passage des troupes suisses ne pourra y être aucunement

entravé.

Dans les réglemens additionels à faire à ce sujet, on assurera de la manière la plus avantageuse aux Génevois l'exécution des traités relatifs à leurs libres communications entre la ville de Genève et le mandement de Beney, S. M. T. C. consent, en outre, à ce que la gendarmerie et les milices du canton de Genève, passent par la grande route du Meyrin dudit mandement à la ville de Genève, et réciproquement après en avoir prévenu le poste militaire de la gendarmerie française le plus voisin.

Les puissances intervenantes interposeront de plus leurs bons offices pour faire obtenir à la ville de Genève un'arrondissement convenable du côté de la Savoie.

6. Pour établir des compensations mutuelles, les cantons d'Argovie, de Vaud, du Tessin et de Saint-Gall fourniront aux anciens cantons de Schwitz, Unterwalden, Uri, Glaris, Zug et Appenzell (Rhodes intérieures), une somme qui sera appliquée à l'instruction publique et aux frais d'administration générale (mais principalement au premier objet), dans lesdits cantons. La quotité, le mode de paiement et la répartition de cette compensation pécuniaire, sont fixés ainsi qu'il suit ;

1o. Les cantons d'Argovie, de Vaud et de Saint-Gall, fourniront aux cantons de Schwitz, Unterwalden, Uri, Zug, Glaris et Appenzell (Rhodes intérieures), un fonds de 500,000 livres de Suisse ;

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