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PROCLAMATION.

LA COMMISSION DE GOUVERNEMENT AUX FRANÇAIS.

Français,

Dans les circonstsnces difficiles où les rênes de l'état nous ont été confiées, il n'était pas en notre pouvoir de maîtriser le cours des événemens et d'écarter tous les dangers; mais nous devions défendre les intérêts du peuple et de l'armée également compromis dans la cause d'un prince abandonné par la fortune et la volonté nationale.

Nous devions conserver à la patrie les restes précieux de ces braves légions, dont le courage est supérieur aux revers, et qui ont été victimes d'un dévouement que la patrie réclame aujourd'hui.

Nous devions garantir la capitale des horreurs d'un siége ou des chances d'un combat, maintenir la tranquillité publique au milieu du tumulte et des agitations de la guerre, soutenir les espérances des amis de la liberté au milieu des craintes et des inquiétudes d'une prévoyance soupçonneuse; nous devions surtout arrêter l'effusion inutile du sang: il fallait opter entre une existence nationale assurée, ou courir le risque d'exposer la patrie et les citoyens à un bouleversement général qui ne laissait plus ni espérance ni avenir.

Aucun des moyens de défense que le tems, et nos ressour ces permettaient, rien de ce qu'exigeait le service des camps et de la cité, n'a été négligé.

Tandis qu'on terminait la pacification de l'Ouest, des plénipotentiaires se rendaient auprès des puissances alliées, et toutes les pièces de cette négociation ont été mises sous les yeux de nos représentans.

Le sort de la capitale est réglé par une convention; ses ha bitans, dont la fermeté, le courage et la persévérance sont audessus de tout éloge, ses habitans en conservent la garde. Les déclarations des souverains de l'Europe doivent inspirer trop de confiance, leurs promesses ont été trop solennelles, pour craiudre que nos libertés et nos plus chers intérêts puissent être sacrifiés à la victoire.

Nous recevons enfin les garanties qui doivent prévenir ces triomphes alternatifs et passagers des factions qui nous agitent depuis vingt-cinq ans, qui doivent terminer nos révolu tions, et confondre sous une protection commune tous les partis qu'elle a fait naître et tous ceux qu'elle a combattus.

Les garanties qui jusqu'ici n'ont existé que dans nos prin cipes et dans notre courage, nous les trouverons dans nos lois, dans nos constitutions, dans notre système représentatif; car, quelles que soient les lumières, les vertus, les qualités personnelles du monarque, elles ne suffisent jamais pour met tre le peuple à l'abri de l'oppression de la puissance, des prés

jugés de l'orgueil, de l'injustice des cours et de l'ambition des courtisans.

Français, la paix est nécessaire à votre commerce, à vos arts, à l'amélioration de vos mœurs, au développement des ressources qui vous restent: soyez unis, et vous touchez au. terme de vos maux. Le repos de l'Europe est inséparable du vôtre; l'Europe est intéressée à votre tranquillité et à votre bonheur.

Donné à Paris, le 5 Juillet 1815.

Le président de la commission,

(Signé) Le duc D'OTRANTE.

Par la commission du gouvernement,

Le secrétaire-adjoint au ministre secrétaire-d'état,
T. BERLIER,

MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR.

Le ministre de l'intérieur à M. de préfet de

Paris, le 5 Juillet, 1815. Monsieur le préfet, le Moniteur d'aujourd'hui vous porte la suspension d'armes qui vient d'être arrêtée entre les chefs des armées alliées et les commissaires du gouvernement français. Si le sort des batailles a dû faire remettre momentanément la capitale aux mains des ennemis, ils ont pris l'engagement solennel de respecter les personnes, les propriétés publiques et particulières, nos institutions, nos autorités, nos couleurs nationales. Ces conditions honorables ont mérité et obtenu l'assentiment général de la nation et de ses représen tans; on peut les regarder comme le gage d'une paix définitive, prochaine.

Notre armée se retire toute entière derrière la Loire avec son matériel, et surtout son courage et son honneur inaltérables, qui lui ont valu la reconnaissance de la patrie.

Agréez, Monsieur le préfet, l'assurance de ma considération distinguée.

Le commissaire chargé provisoirement du ministère de l'intérieur,

(Signé) CARNOT.

8 Juillet 1815.

Paris, le 7 Juillet.

La commission de gouvernement a fait connaître au Roi, par l'organe de son président, qu'elle venait de se dissoudre. Les pairs et les représentans imposés par le dernier gous vernement, ont reçu à cet égard une notification.

Les chambres son dissoutes.

Le Roi entrera demain à Paris vers trois heures après-midi,
S. M. descendra au château de Tuileries.

FIN DU GOUVERNEMENT DE NAPOLEON BUONAPARTE.

DESTINATION

DE

BUONAPARTE.

18 Juillet, 1815.

Paris, le 16 Juillet.

Des mesures avaient été prises pour prévenir l'évasion de Napoléon Buonaparte; on verra par l'extrait suivant d'une lettre du préfet maritime de Rochefort à S. Exc. le ministre de la marine, que le résultat a été tel qu'on avait lieu de l'espérer.

Rochefort, le 15 Juillet, 1815, à dix heures du soir. "Pour exécuter les ordres de V. Exc., je me suis embarqué dans mon canot, accompagné de M. le baron Richard, préfet de la Charente-Inférieure. Les rapports de la rade de la journée du 14 ne m'étaient point encore parvenus; il me fut rendu compte par le capitaine de vaisseau Philibert, commandant la frégate l'Amphytrite, que Buonaparte s'était embarqué sur le brick l'Epervier, armé en parlementaire, déterminé à se rendre à la croisière anglaise.

"En effet, au point du jour nous le vimes manoeuvrer pour s'approcher du vaisseau anglais le Bellerophon, commandé par le capitaine Maitland, qui, voyant que Buonaparte se dirigeait sur lui, avait arboré pavillon blanc au mât de misaine.

"Buonaparte a été reçu à bord du vaisseau anglais, ainsi que les personnes de sa suite. L'officier que j'avais laissé en observation m'avait informé de cette importante nouvelle, quand le général Beker, arrivé peu de momens après, me l'a confirmée.'

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Capitaine de vaisseau, préfet maritime.

C'est ainsi que sous le refuge du pavillon blanc, Buonaparte a terminé à bord du vaisseau anglais le Bellerophon, l'entreprise conçue par lui, et exécutée à l'aide de MM. Labedoyère, Ney, Bassano, Lavalette, Savary, Bertrand, d'Erion, Regnaud de Saint-Jean-d'Angely, Lefebvre - Desnouettes, Boullay de la Meurthe, Defermont, Etienne, et mesdames Hortense, Souza, et Hamelin.

23 Juillet 1815. Paris le 22 Juillet,

Extrait de la correspondance du préfet maritime de Roche

Monseigneur,

fort,

Rochefort, le 18 Juillet 1815. La cocarde blanche et le pavillon blanc ont été solennelle

ment arborés hier à midi, à Rochefort, par les trois services réunis, avec un parfait accord. Ce grand événement n'a occasionné ni rixes ni le moindre désordre. Je n'ai eu à me plaindre d'aucun individu, malgré les craintes que la malveillance avait cherché sourdement à inspirer. Les troupes de terre et de mer, les marins, les ouvriers, les habitans, se sont prononcés pour le roi d'une manière très-satisfaisante. Malgré la circonstance particulière et fâcheuse pour nous de l'apparition toute récente de Napoléon Buonaparte sur un point où il se trouvait des jeunes gens effervescens qui ont fait la guerre avec lui, aucun cri séditieux ne s'est fait entendre, aucune opposition ne s'est manifestée, et les vive le Roi! ont été la seule expression des sentimens de la population. Les officiers civils et militaires de terre et de mer, de toute arme et de tout service, ont montré dans cette importante occasion l'esprit dont tous les bons Français sont animés.

Je fais faire des patrouilles nocturnes qui maintiendront le bon ordre, dont l'habitude deviendra bientôt plus forte que toutes les entreprises que des agitateurs obscurs pourraient faire pour le troubler. Tous les services, désorganisés, en quelque sorte, par une interruption de gouvernement, vont maintenant reprendre leur régularité; toutes les administrations marcheront de front et sans embarras, suivant les directions qui leur seront données par les ministres du Roi,

(Signé) le baron BONNEFOUX. A. S. Exc. le ministre secrétaire-d'état de la marine et des colonies.

Extrait de la correspondance officielle du préfet maritime de Rochefort.

Monseigneur,

Rochefort, le 17 Juillet 1815.

J'ai l'honneur d'informer V. Exc. que le vaisseau de S. M. britannique le Bellerophon, à bord duquel Napoléon Buonaparte s'est embarqué le 15 de ce mois, a fait voile pour l'Angleterre hier 16, à une heure après-midi.

Ce vaisseau emporte, outre ce personnage, toutes les personnes qui se sont attachées à son sort: la liste en est ici jointe; elles avaient d'abord été réparties sur les frégates le Saul et la Méduse; passées ensuite le 14 au soir, sur le brick l'Epervier et la goëlette la Sophie, elles ont été versées à bord des embarcations de la division anglaise commandée par l'amiral sir Henry Hotham.

Liste des principaux personnages embarqués sur le Bellerophon avec Napoléon Bonaparte.

Le lieutenant-général comte Bertrand, grand-maréchal du palais.

La comtesse Bertrand et trois enfans..
Le lieutenant-général duc de Rovigo.
Le lieutenant-général Lallemand.

Le maréchal-de-camp baron Gourgaud, aide-de-camp de. Napoléon.

Le maréchal de-camp Montholon-Sémonville, idem.

La comtesse Montholon-Sémonville et un enfant.
Le comte de Las Case, conseiller-d'état et son fils.
M. de Résigny, chef d'escadron, officier d'ordonnance;
M. Planat, chef d'escadron, officier d'ordonnance;

M. Autric, lieutenant, officier d'ordonnance;

M. Schultz, chef d'escadron,

M. Pointkorski, capitaine,

M. Maingault, chirurgien de Napoléon.

(Suivent les noms de quarante individus composant la suite de Napoléon et des autres passagers embarqués avec lui.) (Signé) comte BONNEFOUX.

A. S. Exc. le ministre secrétaire-d'état du

la marine et des colonies.

Rapport fait à S. Exc. le ministre de la marine et des colonies, par le capitaine de frégate de Rigny, envoyé en mission à Rochefort.

Monseigneur,

J'ai l'honneur de rendre compte à V. Exc. des renseignemens que j'ai recueillis, et qui sont relatifs à la mission dont je viens d'être chargé à Rochefort.

En arrivant dans ce port. le 18 matin, j'appris que Napoléon Buonaparte était parti pour l'Angleterre sur le vaisseau de S. M. britannique le Bellerophon. capitaine Maitland, le 16 Juillet à une heure et demie après midi.

Mes instructions me prescrivant d'avoir à ce sujet des communications officielles avec M. l'amiral Hotham, commandant la station anglaise, je m'empressai de lui écrire en lui adressant en même tems des dépêches de M. Croker, sécretaire de l'amirauté d'Angleterre, dont j'étais porteur. Ces lettres furent remises à M. l'amiral, par M. le lieutenant de vaisseau Fleuriau, que Votre Excellence avait bien voulu m'adjoindre. Il résulte des différentes communications que j'ai eues avec M. l'amiral anglais et M. le préfet maritime, que Napoléon, arrivé à Rochefort le 3 Juillet, s'est établi à la préfecture maritime jusqu'au 8. Pressé par le général Becker, qui avait été chargé de l'escorte jusqu'à bord, et par M. Le Baron de BONNEFOUX préfet maritime de profiter de toutes les occasions qu'offraient le vent et la marée, il se décida enfin à s'embarquer dans les canots qui l'attendaient à chaque marée, et se rendit à dix heures du soir à bord de la Saal, et fit partager sa suite sur cette frégate et sur la Méduse.

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