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CIRCULAIRE.

Tunisie. Algérie. Exécution dans ces deux

pays

des décisions et des mandats émanés des juridictions répressives françaises.

(23 août 1901.)

Monsieur le Procureur général,

L'attention du Département des affaires étrangères et de ma Chancellerie s'est portée sur l'utilité qu'il y aurait, dans l'état actuel des rapports entre la France et la Tunisie, à faciliter l'action de la justice dans votre ressort, en uniformisant les règles relatives à l'exécution en Algérie et en Tunisie des mandats décernés et des décisions répressives rendues contre les justiciables des tribunaux algériens et des tribunaux français de Tunisie.

Appartenant, en effet, au même ressort, appliquant en général les mêmes règles de procédure et les mêmes lois pénales, ces tribunaux remplissent dans des conditions identiques leur mission à l'égard de tous ceux, français ou non français, qui relèvent de leur juridiction.

Dorénavant, en conséquence, tous les individus justiciables des tribunaux français de Tunisie et des tribunaux d'Algérie, quelle que soit leur nationalité devront être considérés comme soumis, selon les règles ordinaires du droit, à l'action de la justice répressive française, sans distinguer s'ils se trouvent dans le pays où siège le tribunal compétent, ou dans le pays voisin; par suite, les mandats décernés par les juges français compétents, ainsi que les jugements rendus par eux, devront être exécutés de part et d'autre, sur la simple réquisition du ministère public, par toute autorité judiciaire française, en ayant soin de suivre toutefois les règles de droit et de hiérarchie établies.

Ces prescriptions ne s'appliquent pas d'ailleurs aux justiciables des juridictions beylicales et réfugiés en Algérie, leur situation doit faire l'objet d'un accord administratif entre la Résidence générale de Tunis et le Gouvernement général de l'Algérie.

Vous voudrez bien m'accuser réception des présentes in

structions et les porter à la connaissance de vos substituts d'Algérie et de Tunisie.

Recevez, Monsieur le Procureur général, l'assurance de ma considération très distinguée.

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Monsieur le Procureur général,

J'ai constaté à de nombreuses reprises que les cadres imprimés qui vous sont transmis par ma Chancellerie en vue de l'instruction des recours en grâce m'étaient renvoyés par votre parquet sans contenir toutes les indications demandées.

Je vous prie de prendre les mesures nécessaires pour qu'à l'avenir les renseignements dont s'agit soient toujours pris aussi complètement et aussi exactement que possible. Il sera notamment recherché si le travail du condamné constitue la seule ressource de sa famille et si son incarcération ou le recouvrement sur lui de l'amende par les voies de droit n'aurait pas pour effet de jeter momentanément ceux qu'il fait vivre dans un complet dénùment. Ces éléments d'appréciation indispensables me permettront de statuer en pleine connaissance de cause et de rechercher dans quelle mesure la nécessité de répression doit être conciliée avec les devoirs d'humanité.

Vous voudrez bien adresser à vos substituts les instructions les plus précises en ce sens et veiller à leur stricte obser

vation.

Je désire que vous me rendiez compte du résultat de vos

diligences en m'accusant réception de la présente circulaire, dont je vous adresse des exemplaires en nombre suffisant pour tous les parquets de votre ressort.

Recevez, Monsieur le Procureur général, l'assurance de ma considération très distinguée.

Le Garde des sceaux, Ministre de la justice,

MONIS.

Par le Garde des sceaux, Ministre de la justice:

Le Directeur des affaires criminelles et des graces,

F. MALEPEYRE.

CIRCULAIRE.

Application de la loi du 1 juillet 1901. Congrégations rel gieuses non autorisées. Poursuites correctionnelles.

dure de liquidation.

(24 septembre 1901.)

Monsieur le Procureur général,

cr

Procé

La loi du 1 juillet 1901 relative au contrat d'association, promulguée le 2 juillet dernier, accorde aux congrégations religieuses non autorisées ou reconnues un delai de trois mois pour justifier qu'elles ont fait les diligences nécessaires en vue de se conformer aux prescriptions légales. Ce délai expirera le 3 octobre prochain.

Les congrégations qui ne pourront, à cette date, faire cette justification, tomberont sous le coup des dispositions pénales de la loi, si elles ne se sont pas dispersées. D'autre part, dispersées ou non, il y aura lieu de faire procéder, au point de vue civil, à leur liquidation, dans les conditions prévues par la loi.

Le Ministère public devra sans aucun retard saisir de ses réquisitions, suivant les hypothèses, la juridiction correctionnelle ou la juridiction civile.

Afin d'assurer l'unité d'action du ministère public, je crois devoir résumer les principales règles dont les Parquets devront s'inspirer.

Je ne puis prévoir toutes les difficultés qui se présenteront; il vous appartiendra de compléter, le cas échéant, mes instructions, et de guider ceux de vos substituts qui auraient des hésitasions sur la portée de la loi du 1 juillet 1901 ou sur le caractère et l'étendue des attributions que cette loi leur confère.

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I

POURSUITES CORRECTIONNELLES.

les

L'article 18 de la loi du 1er juillet 1901 dispose que congrégations existantes au moment de la promulgation de la loi qui ne justifieraient pas de l'accomplissement dans le délai de trois mois des diligences nécessaires seront réputées dissoutes de plein droit.

La dissolution, dans ce cas, découle de la loi même; il n'y a pas lieu de la faire déclarer par les tribunaux.

Cet article 18 accorde aux intéressés un délai de trois mois pour régulariser leur situation.

S'ils se conforment à ses dispositions, ils échappent à toute répression pour le passé.

S'ils ne s'y conforment pas, ils constituent, à partir du 3 octobre, une congrégation non autorisée, puisque, malgré la dissolution de plano prononcée par l'article 18, ils conti

nuent à vivre en commun.

Il y aurait donc lieu non pas de dissoudre une telle congrégation, ce qui est souverainement fait par la loi, mais de la faire déclarer illicite dans les termes de l'article 16 et de faire appliquer à ses membres les peines portées aux paragraphes 2 et 3 de cet article.

Cet article 16 est ainsi conçu: «Toute congrégation formée sans autorisation sera déclarée illicite. Ceux qui en auront fait partie seront punis des peines édictées à l'article 8, § 2. Les peines applicables aux fondateurs ou administrateurs seront portées au double. >>

Dans sa généralité, il s'applique aussi bien aux associations formées sans autorisation depuis la promulgation de la loi qu'aux associations qui, formées avant cette loi, n'auraient pas obtenu depuis cette loi l'autorisation nécessaire. Les unes et les autres sont, à partir du 3 octobre, dans une situation

identique au point de vue pénal; les unes et les autres constituent la même illégalité; elles sont également illicites.

Le devoir du Parquet est de leur appliquer le même traitement et de les poursuivre devant la juridiction correctionnelle pour leur faire appliquer les peines fixées par l'ar

ticle 16.

Le délit prévu par cet article comprend deux éléments, et pour la justification de sa poursuite le Parquet devra prouver : 1° que la congrégation formée ou continuant d'exister depuis la loi du 1er juillet 1901 est non autorisée et par conséquent illicite; 2o que l'inculpé a fait partie de cette congrégation.

Ces deux éléments du délit seront soigneusement constatés soit dans les procès-verbaux dressés, soit au cours de l'information qu'il pourrait être nécessaire d'ouvrir.

Le premier sera facilement établi, en cas de contestation, par les renseignements que l'autorité administrative fournira sur leur demande, aux magistrats. La constatation du second sera l'œuvre de l'information quand elle ne résultera pas de procès-verbaux dressés par un officier de police judiciaire. Un autre délit est visé par la loi du 1 juillet 1901 dans son article 14.

Il a pour but d'interdire à un membre d'une congrégation religieuse non autorisée : (a) de diriger soit directement, soit par personne interposée, un établissement d'enseignement de quelque ordre qu'il soit; (b) ou d'y donner l'ensei

gnement.

Dans le premier cas prévu, on demandera à la fois contre le délinquant l'application de la peine et la fermeture de

l'établissement.

Dans la seconde hypothèse, c'est-à-dire au cas où le membre appartenant à une congrégation non autorisée donne l'enseignement dans un établissement dont il n'a pas la direction, il y a lieu de poursuivre, en même temps que le délinquant, et selon les circonstances, le directeur de l'établissement comme co-auteur ou complice du délit et de faire prononcer contre lui la fermeture de l'établissement.

Peut-être peut-on prévoir que certains membres de congrégations dissoutes par la loi chercheront à éluder ses prescriptions en se disant désormais sécularisés.

Nous verrons plus loin qu'une pareille transformation

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