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D'autres, parmi lesquels sont Dumoulin et Pothier, disent que l'Aînesse une fois acquise à l'enfant né du mariage intermédiaire, ne peut lui être enlevée par la légitimation subséquente de l'enfant né auparavant. Ils se fondent sur le respect des droits acquis.

Leur opinion est, à mon avis, la plus juste, la plus raisonnable : mais ce n'est qu'une opinion d'auteur; et je crains que l'allégation du respect pour les droits acquis ne conserve que peu de force pour l'interprétation d'une Loi qui blesse essentiellement tant de droits ac quis.

TROISIÈME QUESTION.

Enfans adoptifs.

Un homme adopte un fils. Il se marie ensuite, et de son mariage il a d'autres enfans mâles. Quel sera l'Aîné, ou du fils adoptif, ou du fils né du sang du testateur?

Cette question n'est pas résolue par l'ancienne Jurisprudence, car elle n'admettait pas l'adoption.

On pourrait prétendre que le Code l'a résolue en disant, art. 350, que « l'adopté aura sur la succession de l'adoptant les mêmes droits que ceux qu'aurait l'enfant né en mariage, même quand il y aurait d'autres enfans de cette dernière qualité nés depuis l'adoption. » Donc, dirait-on, l'adopté doit avoir l'Ainesse, même à l'encontre des enfans nés depuis l'adoption.

Mais il faut reconnaître deux choses.

1°. Que le Code en disposant ainsi n'a pas eu en vue le droit d'aînesse, puisqu'il n'admettait pas ce droit; 2°. Que le père qui a adopté

sous l'empire de cette Loi, ad molliendum naturæ defectum vel infortunium, n'a pas entendu se donner un Ainé avec privilége sur les enfans qu'il pourrait avoir. Or l'adoption est un contrat qui reçoit essentiellement son interprétation de la volonté que les parties ont eue en le formant aux conditions prescrites par la Loi.

Objectera-t-on que le projet actuel employant l'expression de premier né, exclut évidemment l'adopté qui n'est pas l'enfant né du testateur? alors il cessera donc d'être vrai de dire avec l'article 350, que l'adopté a LES MÉMES DROITS que ceux qu'aurait l'enfant né en mariage? vous abrogez donc en partie cet article? si telle est votre intention, dites-le donc !

Ajoutons que dans beaucoup de lettrespatentes accordées par Napoléon, il est dit que les titres seront transmissibles dans la descendance légitime et adoptive de l'individu : or, dans l'espèce d'un adopté qui aura été saisi de l'expectative de succéder au majorat de son père adoptif, la survenance d'un enfant légitime le dépouillera-t-elle de ce qu'on peut appeler son Droit acquis? N'y aura-t-il pas même raison de décider, que dans l'espèce entre l'enfant légitime et le légitimé par mariage subséquent?

QUATRIÈME QUESTION.

Enfans Prêtres.

Si le fils aîné est Prêtre, Trapiste, et cætera, aura-t-il le Droit d'Aînesse, au préjudice de ses frères cadets et de ses soeurs? Ne serait-ce pas le cas de faire une exception au privilége de masculinité et de primogéniture? En effet, le motif de la Loi ne cesse-t-il pas absolument? D'un côté, il ne s'agit plus d'éclat, mais d'humilité de l'autre, le Prêtre ne peut plus, en raison de son état, perpétuer la famille; sa ligne finit en lui et avec lui. Sera-t-il juste de créer, par privilége, un superflu au célibataire, au préjudice du puîné qui se mariera, ou de la sœur qui sera mère de famille?

CINQUIÈME QUESTION.

Le Droit d'Ainesse aura-t-il lieu par représen

tation?

La représentation a lieu à l'infini en ligne directe; c'est-à-dire, que les descendans d'un enfant décédé viennent, en son lieu et place, prendre dans la succession de l'ascendant, la part que l'enfant décédé y prendrait s'il vivait.

Si l'aîné est décédé, ses descendans prendront-ils le Droit d'Aînesse à sa place?

Ici les coutumes distinguaient: les unes conséquentes avec le principe féodal qui avait fait établir le Droit d'Ainesse, accordaient sans difficulté la représentation, si l'aîné avait laissé un enfant mâle. Alors celui-ci succédait, à l'ex. clusion de ses sœurs et de ses puînés, à l'aînesse de son père dans la succession de son aïeul.

-D'autres coutumes accordaient la représentation même aux filles; mais dans ce cas que deviendrait le prétexte électoral?

Que veut le projet de loi? il faut qu'il le dise.

Cette question ne peut pas être abandonnée au juge, elle veut être résolue par la loi.

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