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(FERRE LAGRANGE CONTRE LAVIE ET LAGORIO ET AMAYON).

JUGEMENT.

Attendu que le sieur Ferre Lagrange à demandé une censerie pour la location d'une minoterie faite par le propriétaire de l'usine aux fabricants qui se proposent de l'exploiter;

Attendu que la location a compris, non un simple fonds de commerce, mais l'immeuble même avec les engins de l'usine, qui sont eux-mêmes des immeubles par destination;

Attendu que la location d'un immeuble est un contrat civil, alors même qu'elle est contractée par un négociant, en vue d'une fabrication;

Attendu que cette location n'ayant le caractère d'un acte de commerce à l'égard d'aucun des défendeurs, le courtier par l'entremise de qui elle aurait été faite, n'est pas fondé à réclamer devant la juridiction commerciale le paiement de son droit de censerie;

Par ces motifs,

Le Tribunal se déclare incompétent sur la demande du sieur Ferre Lagrange, et le condamne aux dépens.

Du 22 octobre 1868. Prés. M. LUCE. Plaid. MM. GRUÉ pour Ferre Lagrange, Paul SENES pour Lavie, TEMPIER pour Lagorio et Amayon.

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SOCIÉTÉ. ART. 1846 C. NAP. VERSEMENTS EN RETARD. INTERETS COURUS DE PLEIN DROIT. INTERPRETATION.

La disposition de l'art. 1846 C. Nap. qui fait courir de plein droit au profit de la Société les intérêts des sommes que les associés sont en retard de verser, n'a pas le caractère d'une pénalité et n'a pour but que de faire régner l'égalité entre tous les associés, en empéchant l'associé en retard

de s'enrichir des intérêts qu'est présumé produire l'argent resté entre ses mains.

En conséquence, dans le cas où les associés qui ont versé leurs mises de fonds, en ont retiré eux-mêmes les intérêts, ils ne peuvent exiger de l'associé en retard que le versement de son capital, sans pouvoir le forcer en outre à verser les intérêts dont la Société a implicitement profité en ce qu'elle n'a pas eu à lui en tenir compte comme aux autres.

(PADOVA DI SERRA CONTRE LIPMANN.)

JUGEMENT.

Attendu qu'aux termes de l'art. 1846 C. N., l'associé tenu d'apporter une somme dans la société, et qui ne l'a point versée, devient de plein droit débiteur des intérêts de cette somme, à compter du jour où elle devait être payée;

Attendu que cette disposition de la loi a pour objet d'établir l'égalité qui doit exister entre les associés, en obligeant ceux qui sont en retard d'effectuer un versement à la société, de lui rapporter les intérêts qu'est présumé produire l'argent resté dans leurs mains;

Attendu que l'art. 1846 n'a pas d'ailleurs le caractère d'une pénalité, qui ne pourrait résulter que d'un texte formel;

Attendu, par suite, que des associés qui ont versé leurs mises de fonds, et qui en ont retiré les intérêts de la société, ont seulement le droit d'exiger que les associés qui n'ont pas fait les apports d'argent dont ils étaient tenus, les effectuent; qu'ils ne sont pas fondés à réclamer en même temps des intérêts dont la société a profité, en ce qu'elle n'a pas à en tenir compte aux membres de la société en retard de fournir leurs apports;

Attendu que c'est d'après ces principes que doit être appréciée la demande du sieur Padova di Serra, liquidateur de la société David Altaras et C, contre le sieur Lipmann, souscripteur d'une mise de fonds de 10,000 fr. dans cette

société; que le sieur Lipmann doit être tenu de verser une provision de 30 pour cent, conformément à la décision intervenue contre un autre associé, et conformément à son offre ; qu'il ne doit pas être tenu de payer aussi des intérêts, parce que les associés qui ont fait leurs versements, en ont reçu les intérêts, ou devront être crédités des intérêts non encore acquittés;

Attendu que le sieur Lipmann a été débité dans son compte avec David Altaras et C d'une commission de 2 pour cent pour la vente d'une maison;

Attendu que le sieur David Altaras a rempli un mandat officieux, à raison notamment de sa parenté avec le sieur Aug. Lipmann; que, d'ailleurs, il a débité son compte d'un courtage de 4 pour cent; que la commission doit être, par suite, retranchée;

Par ces motifs,

Le Tribunal donne acte au sieur Lipmann de son offre de verser dans les mains du sieur Padova di Serra la somme de 3,000 fr. à titre de provision sur la commandite, avec intérêts du 16 septembre 1868, jour de la demande en justice, sous déduction du montant du solde de son compte particulier; fixe ce solde de compte en faveur du sieur Lipmann à 502 fr. 10 c., valeur du 30 août 1865; ordonne que le sieur Lipmann versera la provision par lui offerte, sous déduction de ce solde de compte; le met hors d'instance sur le surplus de la demande du sieur Padova di Serra; condamne ce dernier aux dépens.

Du 23 octobre 1868. Prés. M. LUCE. Plaid. MM. HORNBOSTEL pour Padova di Serra, GERMONDY pour Lipmann.

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Dans le cas d'abordage en pays étranger, une lettre écrite par le capitaine du navire abordé à l'agent des armateurs du navire abordeur, et remise à ce dernier par l'agent con

1869. 1 P.

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sulaire, constitue une protestation suffisante pour conserver le droit à indemnité (1).

(COLOM GONTRE MAUREL ET PRON).

JUGEMENT.

Attendu que, d'après le rapport de mer qu'a fait à SainteMarie-de-Bathurst, le 29 juillet 1867, le sieur Colom, commandant le trois-mâts Andora, ce navire sortait le 28 juillet de la rivière, ayant encore son pilote à bord; qu'il vira de bord sur l'ordre du pilote, pour éviter le banc de Jinnack; mais qu'il toucha pár l'arrière, et, dans cette position, il fut abordé par la goëlette Geba, qui venait aussi de Sainte-Mariede-Bathurst;

Attendu que le capitaine de la goëlette Geba, dans un rapport de mer fait le même jour, a déclaré qu'il rencontra sur sa route l'Andora, masqué par une de ces fausses risées si fréquentes dans l'hivernage; qu'il a filé l'écoute de gui et mis la barre du gouvernail à babord; mais que l'Andora étant toutjours masqué et culant, n'a pu éviter l'abordage;

Attendu que ce navire a été réparé à Sainte-Marie-de-Bathurst, après déchargement de 3,700 boisseaux d'arachides; Attendu qu'une demande en dommages-intérêts a été formée par son capitaine contre les armateurs de la Geba; que ceux-ci ont d'abord prétendu que la demande n'était pas recevable, par défaut de protestation en temps utile de la part du capitaine de l'Andora;

Attendu que, le 29 juillet, le capitaine de l'Andora a adressé aux agents des armateurs de la Geba, une lettre pour les informer que son navire avait été abordé par la Geba, qu'il avait de graves avaries et que lui, capitaine, allait faire nommer des experts pour les faire constater; qu'il a écrit à ces agents une seconde lettre le 31, pour leur réitérer la première et les prévenir qu'une seconde expertise allait être ordonnée ;

(1) Voy. ce rec. 1866. 2. 180.

que les agents ont accusé réception de ces deux lettres, en prétendant que le capitaine de l'Andora aurait dû s'adresser à celui de la Geba, et en déclinant, d'ailleurs, toute responsabilité quant à l'abordage ;

Attendu que la lettre du 29 juillet a eu le caractère d'une véritable protestation; que si, d'après l'art. 436, la protestation doit être signifiée, le capitaine de l'Andora se trouvait dans un pays où l'agent consulaire seul pouvait lui prêter son ministère; que c'est par l'intermédiaire de l'agent qu'il a fait porter la lettre; que la lettre a été remise comme l'aurait été une signification, et, faute de toute autre date qui précise le moment de la remise, on doit admettre celle du 27, inscrite en tête de sa lettre, par le capitaine, et visée par les armateurs de la Geba, dans leur réponse;

Attendu que le capitaine a pu aussi adresser sa protestation à des agents des armateurs de la Geba, qui avaient qualité pour recevoir un acte purement provisoire; qu'il est d'ailleurs possible qu'il n'eût pas pu également faire remettre une lettre, le 29, au capitaine de la Geba;

Attendu, au fond, qu'il est suffisamment établi par les rapports de mer que, lors de l'abordage, le navire Andora se trouvait hors d'état de pouvoir manoeuvrer utilement; que c'était au capitaine et à l'équipage de la Geba à naviguer de manière à éviter l'Andora; que rien ne leur cachait la vue de ce navire et qu'ils ne l'ont abordé que parce qu'ils n'ont point pris les dispositions nécessaires;

Attendu que le capitaine de l'Andora a réclamé 12,000 fr. de dommages-intérêts pour frais de déchargement et de réparation à Sainte-Marie-de-Bathurst, pour indemnité d'une prolongation de séjour de 2 mois dans ce port, pour dédommagement d'une perte de fret, à raison de 20 tonneaux de marchandises laissées à Sainte-Marie-de-Bathurst, par suite de l'état du navire, après des réparations incomplètes, et pour des dépenses de réparations complémentaires effectuées à Marseille ;

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