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Nous venons de nous expliquer sur le pourvoi en matière répressive. Le pourvoi en matière civile, au contraire, n'est pas suspensif. Il n'y a pas à distinguer si l'action civile introduite devant les tribunaux civils, est motivée par une infraction de presse (1).

Quant aux pouvoirs respectifs des juges du fond et de la Cour de cassation, nous nous sommes suffisamment expliqué (2).

Délai. Le pourvoi doit ètre formé, dans le délai de trois jours, au greffe de la Cour ou du tribunal qui aura rendu la décision.

Le délai court du jour de la prononciation du jugement ou de l'arrêt contradictoire.

Mais quand l'arrêt a été prononcé après une mise en délibéré, sans une indication préalable du jour et en l'absence des parties, le délai du pourvoi ne court qu'après l'expiration des délais de l'opposition; et il n'est pas besoin d'une nouvelle signification pour faire courir le délai.

Le délai n'est pas franc. Il suit de là que, seul le jour de la prononciation de la décision ne comptera pas dans le calcul. Ainsi le pourvoi contre un arrêt rendu le 1or mai devra être formé au plus tard le 4 (3). Le délai du pourvoi se détermine aisément, quand il s'agit du recours

« à la cour d'assises, lorsque, statuant sur une exception d'incompétence, elles se « sont déclarées compétentes, de passer outre aux débats sur le fond, nonobstant << appel ou pourvoi en cassation »>.

« Le législateur de 1881 était loin, dit M. Fabre, de soupçonner la série d'obstructions qu'imagineraient certains journalistes contre les revendications des tiers.

« Au moyen d'une ingénieuse combinaison de procédés dilatoires, on retarde pendant des années la sentence dernière. Il est fait échec aux lois; et les décisions ne sont jamais amenées à effet.

« Notre proposition ne guérit pas le mal; mais elle le réduit ».

(1) Alger, 27 février 1894.

(2) Voir suprà, nos 55, 56.

(3) C., 19 juin 1890, 12 février 1898, 29 avril 1898, 22 juillet 1899, 23 juin 1900. V. Faivre et Benoist Lévy, p. 258. Contrà, Dutruc, no 434. Bazille et Constant, n 27%.

Jusqu'à la loi du 27 juillet 1849, les délais du pourvoi en matière de presse étaient les mêmes que ceux de l'article 373 du Code d'instruction criminelle. Le condamné, la partie civile, le ministère public avaient done trois jours francs à partir de la prononciation de la décision pour déclarer le pourvoi (art. 373).

Remarquons bien que le délai fixé par l'article 62 ne s'applique qu'aux délits de presse. C'est la qualification donnée par l'arrêt attaqué, qui fixe ce point. C., 29 décembre 1888, 10 avril 1891. Il suffit que le pourvoi soit formé contre des décisions rendues en matière de presse.

Mais le délai est de 5 jours, au cas de poursuite sur information préalable (article 48). C., 21 février 1884 (article 301 Code d'instruc.) et de 3 jours francs lorsqu'il s'agit d'un renvoi pour délit. C., 31 janvier 1889, 10 mai 1889.

contre l'arrêt mème de condamnation. Mais, au cours de la procédure des arrêts incidents, des décisions incidentes peuvent intervenir.

Formes. Dans le silence de nos articles il faut, quant aux formes du pourvoi, se référer aux prescriptions des articles 417 à 419 du Code d'instruction criminelle.

Voici l'article 417:

ARTICLE 417 du Code d'INSTRUCTION.

La déclaration de recours sera faite, au greffier, par la partie condamnée, et signée d'elle et du greffier; et si le déclarant ne peut ou ne veut signer, le greffier en fera mention. Cette déclaration pourra être faite, dans la même forme, par l'avoué de la partie condamnée ou par un fondé de pouvoir spécial; dans ce dernier cas, le pouvoir demeurera annexé à la déclaration.

Elle sera inscrite sur un registre à ce destiné; ce registre sera public, et toute personne aura le droit de s'en faire délivrer des

extraits.

Il est de principe que les formes prescrites par cet article, sont toutes de rigueur et ne peuvent être supplées par équivalents (1).

(1) Jurisprudence constante. V. Hélie, t. IX,

p. 393.

Mais s'il était constaté qu'il n'existe pas au greffe de registre destiné à recevoir les déclarations de pourvoi, celles-ci pourraient être faites par requêtes ou exploits, etc.

L'avoué de la partie condamnée n'a pas besoin d'un pouvoir spécial.

Le pourvoi doit, sous peine d'irrecevabilité, lorsqu'il s'agit d'un arrêt de la Chambre des mises en accusation, être formé par déclaration, au greffe de la Cour d'appel qui a rendu l'arrêt attaqué. Le pourvoi formé par déclaration au greffe de la cour d'assises est nul. C., 20 juillet 1885. Cpr. articles 373, 409, 417, 422, 423 du Code d'instruction criminelle.

La déclaration du pourvoi est valablement faite au greffe après l'heure fixée pour sa fermeture et le greffier est tenu de la recevoir.

Doit être déclaré non recevable le pourvoi formé le 12 contre un arrêt du 8, alors même que le demandeur aurait manifesté au greffier en chef de la Cour d'appel son intention de se pourvoir dans le délai légal, s'il ne résulte pas des documents qui peuvent être produits à l'appui de cette allégation que le demandeur a été empêché de réaliser cette intention dans le délai légal, par des circonstances indépendantes de sa volonté. C., 2 juin 1900.

Et il importe peu que le dernier jour du délai pour le pourvoi soit un jour férié pendant lequel le greffe de la Cour d'appel peut être fermé, alors que le demandeur ne justifie, d'aucune diligence, faite par lui, pour réaliser une déclaration de pourvoi. Au surplus, l'article 1033 du Code de procédure civile modifié par la loi du 13 avril 1895 s'applique exclusivement aux délais prévus par les lois de procédure civile et commerciale et ne concerne pas la matière des pourvois criminels. C. 22 juin 1900.

SECTION II

De la prescription.

ARTICLE 65 DE LA LOI DE 1881.

L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi, se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte de poursuite, s'il en a été fait.

(Mais voir Loi du 16 mars 1898).

Les prescriptions commencées à l'époque de la publication de la présente loi, et pour lesquelles il faudrait encore, suivant les lois existantes, plus de trois mois à compter de la même époque, seront, par ce laps de trois mois, définitivement accomplies.

Aperçu général. En droit commun, la prescription est en matière de crimes, de 10 ans ; de délits, de 3 ans ; de contraventions de 1 an (articles 637 à 640 du Code d'instruction).

Ici, au contraire, en vertu de l'art. 65, la prescription est très courte. Elle est de 3 mois. Toutefois, en matière d'outrage aux bonnes mœurs par le livre, elle est d'un an (Loi du 16 mars 1898).

La prescription est une excuse essentiellement péremptoire (1) qui, nous le verrons, doit, devant les juridictions répressives, être suppléé

(1) Lorsque le gérant ou l'éditeur sont connus, la prescription, acquise à leur profit, empêche de poursuivre les vendeurs, distributeurs, colporteurs, afficheurs. C., 29 décembre 1882. Cpr. toutefois, C. d'assises de la Seine. 15 février 1886.

Mais il est nécessaire devant la Cour de cassation, que les constatations de fait de l'arrêt ou du jugement justifient l'exception de prescription ou qu'elle résulte de la procédure. C., 13 février 1880.

Lorsque, en défense au pourvoi de la partie civile, le prévenu d'un délit de presse établit que, dès avant le jugement de première instance, l'action était prescrite, il

d'office et peut, pour la première fois, être invoquée devant la Cour de cassation.

L'action civile séparée comme l'action répressive sont régies par l'article 65.

y a lieu à cassation; mais seulement pour violation de l'art. 65 de la loi du 21 juillet 1881 et sans renvoi. C., 9 novembre 1889.

Les magistrats qui ont reconnu le bien fondé d'une exception péremptoire de prescription, n'ont point, en effet, à ordonner ou à admettre une discussion inutile sur les circonstances d'un délit, à raison duquel les prévenus ne peuvent plus être poursuivis, et, par suite, ils peuvent statuer sur le moyen de prescription, sans admettre les parties et le ministère public à présenter leurs observations relativement au délit poursuivi, C., 28 juillet 1900.

La prescription ne peut plus être invoquée, après une décision définitive passée en force de chose jugée. C., 28 juillet 1882, Amiens, 5 avril 1884.

CHAPITRE PREMIER

PORTÉE DE L'ARTICLE 65, POINT DE DÉPART DE LA
PRESCRIPTION

140. Sphère d'application. -La portée de notre article est générale. Il s'applique aux crimes, délits, contraventions quelconques, prévus par la loi du 29 juillet 1881. Une question posée par M. Lorois au rapporteur, à la Chambre des députés l'a nettement précisé (1). Mais ce n'est qu'à ces infractions de presse que la prescription de l'article 65 s'applique.

La prescription d'une action civile ordinaire n'est réglée par l'article 65, qu'autant qu'elle repose sur un fait délictueux. Si elle est basée, au contraire, sur une simple faute, sur un quasi-délit, un délit civil, sur une disposition du droit civil ; si la demande est formée, abstraction faite de tout caractère délictueux, et qu'il soit en effet certain que l'acte dont la réparation est poursuivie est dépourvu de toute nature délictueuse, ce sera alors la prescription de trente ans. Mais quand le fait constitue un délit, le demandeur ne peut pas, pour échapper à la prescription, le considérer comme un fait simplement dommageable et le modifier dans ses éléments (2).

Point de départ. C'est, dit notre article, à partir du jour de l'infraction, que court le délai de la prescription. Généralement, tous les délits par voie de publication sont consommés au moment même où ils

(1) Il en est ainsi de la contravention d'injure ou de diffamation non publiques, qui est prévue par l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881. C. civil 6 avril 1898, 26 octobre 1887, 13 mai 1893.

V. Trib. de Nancy, 9 juin 1884. Trib. de paix de Clelles, 21 juillet 1883, Bordeaux, 16 avril 1886.

(2) F. Hélie, t. II, no 1114. Boitard, no 876. Morin, vo Action civile, no 15. Le Sellyer, t, II, n° 548. Mangin, no 363 et 367. Merlin, Répert., vo Prescription, p. 868,

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