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CHAPITRE TROISIÈME

DE L'ACTION ET DE LA COMPÉTENCE

363. Le délit de dénonciation calomnieuse peut être poursuivi d'office par le ministère public, et sans qu'une plainte préalable soit nécessaire (1).

La partie civile jouit du droit de citation directe et peut assigner, à son choix, devant le tribunal correctionnel ou le tribunal civil.

Le tribunal correctionnel du lieu où réside l'officier de justice qui a reçu la plainte, base du délit de dénonciation calomnieuse poursuivi, est compétent pour statuer sur ce délit, encore bien que la plainte et des lettres qui l'ont précédée, aient été adressées d'un autre arrondissement (2).

Lorsqu'à la suite d'une plainte en faux visant, à la fois, 1° comme auteur principal du fait dénoncé, le sieur X... domicilié à A... et 2o comme complice, le sieur Z... domicilié à B..., une enquête a été successivement faite par les parquets des tribunaux des deux villes (A. et B.), et lorsque la plainte a été classée sans suite, le sieur Z..., peut valablement introduire une action en dénonciation calomnieuse, contre l'auteur de la plainte, devant le tribunal correctionnel de la ville de B, puisque le délit de dénonciation calomnieuse a reçu son complément nécessaire et définitif dans cette ville et a justifié ainsi la compétence du tribunal dudit siège (3).

La prescription du délit court du jour, non où la fausseté des faits dénoncés est arrivée à la connaissance du plaignant, mais de celui où l'écrit contenant la dénonciation est arrivé à l'autorité (4)

(1) C., 3 juin 1813, 27 mars 1879, 4 juillet 1881.

(2) C., 27 mars 1856, 14 avril 1870. Au cas de décès de la personne dénoncée, toute action publique possible étant éteinte, il appartient au tribunal correctionnel de statuer sur la vérité ou fausseté des faits. Bourges, 21 novembre 1878. (3) C., 13 juillet 1899.

(4) C., 6 février 1857. Cpr. C., 6 août 1825. Mangin, no 330. Le Sellyer, Action publique, t. II, no 472. Garraud, t. V, no 48.

Le juge du fond constate souverainement, que la preuve légale d'un fait qualifié de dénonciation calomnieuse est rapportée (1).

Le rejet d'une qualification ne peut être assimilé à un acquittement sur le fond de la prévention et rester, à ce titre, acquis au prévenu, en l'absence de pourvoi de la partie publique.

Par suite, lorsque deux individus ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel, comme inculpés d'avoir le... et en tous cas depuis moins de trois ans, à... soit comme auteurs, soit comme complices, soustrait frauduleusement au préjudice du sieur..., maire de ladite commune, une lettre missive à lui adressée par l'inspecteur des enfants assistés et déposée chez lui par le facteur des postes X », supposons que la Cour d'appel se basant sur ce qu'il appartient au juge de restituer au fait sa véritable qualification légale, a déclaré que, dans l'espèce, le fait reproché aux prévenus ne constituait pas le délit de vol, mais présentait tous les caractères du délit de dénonciation calomnieuse.

Si cette décision a été cassée par la Cour de cassation par ce motif, que le juge, ayant substitué à l'objet de la prévention, l'incrimination d'un fait constitué par des éléments essentiellement différents, accompli dans un autre trait de temps, au préjudice d'une autre personne et sur lequel le prévenu n'avait pas été mis en demeure de se défendre, ne s'est pas borné à modifier la qualification du fait poursuivi, mais à violé l'article 182 du Code d'instruction criminelle et la règle du double degré de juridiction, a commis un excès de pouvoir et porté atteinte aux droits de la défense, - c'est à tort que les prévenus viendraient exciper devant la Cour de cassation, saisie du pourvoi formé contre l'arrêt rendu par la Cour de renvoi, que l'arrêt de la première Cour d'appel, n'ayant été attaqué que par eux seuls, lors de leur premier pourvoi, la juridiction du renvoi n'aurait pu refuser de reconnaître que l'arrêt annulé dans le seul intérêt des prévenus, avait conservé force de chose jugée dans sa partie contenant relaxe sur le chef de vol. En effet, la Cour de cassation, annulant le premier arrêt qui lui avait été déféré et renvoyant les prévenus devant une autre Cour, a remis la cause et les parties, au même et semblable état qu'au jour de l'appel qui investit la Cour de renvoi, comme l'avaient été les premiers juges, tant de la connaissance du fait spécifié par l'ordonnance

Mais, quand la dénonciation prend sa source dans une poursuite soit civile, soit correctionnelle : par exemple un abus de confiance, c'est à partir du jugement définitif de cette poursuite qu'a été ouvert le droit de plainte en dénonciation calomnieuse. C., 6 février 1857.

(1) C., 29 février 1892.

de mise en prévention, que de l'appréciation de la qualification applicable au fait poursuivi (1).

Le tribunal correctionnel qui a été saisi d'une plainte en dénonciation calomnieuse, peut légalement, sur les conclusions du ministère public et de la partie civile, faire entrer dans les éléments de sa décision des imputations également calomnieuses qui, bien que contenues dans un écrit postérieur à la plainte, se lient à la première dénonciation et viennent l'aggraver (2).

En vertu de l'article 1036 du Code de procédure civile, l'insertion, la publication de l'affiche du jugement ou de l'arrêt peuvent être prononcées, à titre de réparation à la partie civile (3).

Les frais peuvent même comprendre, ceux d'une enquête ordonnée par le garde des sceaux pour vérifier la vérité ou la fausseté des faits 4).

364. Les articles 358, 359 du Code d'instruction criminelle sont applicables, lorsqu'il s'agit de la Cour d'assises. Mais il faut que le dénonciateur soit partie. La Cour d'assises aura à apprécier la question de bonne foi (5).

S'il ne s'agit pas de la Cour d'assises, la demande, en dommages par l'accusé acquitté en police correctionnelle peut être formée au civil (6).

La complicité peut exister en matière de dénonciation calomnieuse (7).

Le tribunal de police auquel sont soumis des faits pouvant constituer une dénonciation calomnieuse, ne peut se borner à renvoyer devant qui de droit l'appréciation du caractère de la dénonciation ; il doit se déclarer incompétent (8).

Lorsque celui qui a été l'objet d'une plainte en vol intente une

(1) C., 23 février 1900.

(2) C., 12 février 1819.

(3) C.. 21 juillet 1859, 25 avril 1862, 24 novembre 1864. V. suprà, no 8.

Mais le ministère public (art. 36 du Code pénal) ne peut, dans le silence de l'article 373, obtenir comme peine principale l'affiche du jugement. V. no 8. C., 7 février 1857.

Lorsqu'une action en dommages-intérêts à raison de faits qualifiés de diffamations a été portée devant les tribunaux on ne peut pas, pour la première fois devant la Cour de cassation, soutenir que les faits à l'occasion desquels cette action a été introduite, constituent une dénonciation calomnieuse. C'est là un moyen nouveau. C., 17 août 1881. P.. 84, 158.

(4) C., 10 février 1888.

(5) C., 30 décembre 1813, 23 mars 1821.

(6) Alger, 26 juillet 1890.

(7) C., 9 novembre 1860. V. nos 72 et ss. (8) C., 9 août 1844.

TOME II

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action en simple police contre son dénonciateur pour l'avoir injurié en l'accusant d'être l'auteur de ce vol, la nouvelle plainte s'identifie avec la dénonciation principale et doit être portée devant le même tribunal. Le juge de simple police est incompétent (1).

(1) C., 26 mai 1819.

Le Tribunal de simple police est compétent, en vertu de l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881, pour statuer sur une plainte en injure non publique par lettre missive, alors même que le prévenu, niant être l'auteur de la lettre incriminée, aurait assigné le plaignant devant une autre juridiction répressive, pour dénonciation calomnieuse et usage de faux. Il n'existe entre ces deux actions aucune connexite, les faits délictueux étant reprochés à deux personnes distinctes.

Mais le Tribunal de police, compétemment saisi, doit surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été décidé par l'autre juridiction, si le défendeur cité devant lui est ou non l'auteur de la missive incriminée. Trib. simple police de Paris, 15 avril 1899. Une citation en police correctionnelle peut-elle être considérée comme engageant valablement une procédure en usage de faux, alors que l'usage de faux est puni de peines criminelles et justiciable de la Cour d'assises?

Lorsque, devant un Tribunal de répression, une pièce est arguée de faux, ce Tribunal doit, aux termes de l'article 460 du Code d'instruction criminelle, décider préalablement s'il doit ou non surseoir. Il n'y a lieu à sursis que lorsque le faux ou l'usage de faux allégué est tel qu'il tende à justifier le prévenu de l'inculpation dont il est l'objet, et que, d'autre part, l'auteur présumé du faux peut être utilement poursuivi au criminel. C., 26 mars 1818, 6 avril 1821, 31 janvier 1823, voir Leloir (Code d'Instr. crim. annoté art. 460).

Ces principes sont d'une application certaine lorsque, devant le Tribunal répres sif saisi, le prévenu justifie de l'introduction régulière d'une procédure criminelle d'usage de faux devant la juridiction compétente.

D'autre part, une citation en dénonciation calomnieuse, bien que de la compétence du Tribunal correctionnel, doit-elle être regardée, par le juge de simple police, comme préjudicielle à la question dont la solution lui incombe ? On est en droit, semble-t-il, d'en douter, car le délit de dénonciation calomnieuse ne résulte juridiquement que de la fausseté reconnue de la plainte en injure et cette reconnaissance ne peut émaner que de la juridiction de simple police compétemment saisie de cette plainte.

TITRE HUITIÈME

DES MENACES

Dans notre législation pénale, les menaces sont envisagées sous trois aspects différents qui feront ici, l'objet de trois chapitres successifs.

CHAPITRE PREMIER

DES MENACES, CONSIDÉRÉES COMME UN DES MOYENS
DE PERPETRATION D'UN DÉlit

Nous les examinerons sous deux paragraphes.

§ 1er.

Articles 179, 181, 219, 223 à 225, 260 du Code pénal.

ARTICLE 179.

365.1° Quiconque aura contraint ou aura tenté de contraindre par voies de fait ou menaces, corrompu ou tenté de cor

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