Page images
PDF
EPUB

operante, excitante, prevenante, qui eft felon le P. Juenin la grace purement fuffifante actuelle, ne peut produire que le petit effet qu'elle produit

reellement.

que

2o. Il donne pour exemple de la grace fuffifante, le pouvoir de la Foy & de l'imparfaite charité par raport à la production de la parfaite fantification. Or cette Foy ne peut produire en nous cette parfaite fanctification, c'est-à-dire, la juftification de nos ames. Car il eft certain la Foy, qui n'est animée que par une charité imparfaite, peut bien nous difpofer à la juftification en genre de cause materielle & paffive, qui prepare le fujet, comme le marque le Concile de Trente mais elle ne peut nous donner comme caufe efficiente l'entiere juftification; puifque comme nous l'affure le même Concile, la caufe efficiente principale de notre juftification, c'eft Dieu : la morale & meritoire, c'eft J. C. qui a fatiffait pour nous & nous a communiqué par fes merites la parfaite fainteté : l'inftrumentelle, ce font les Sacremens : enfin fon unique caufe formelle, c'est la justice de Dieu par laquelle il nous justifie.

• To. s. p.sosi

6 CAPUT VI. Modus præparatio

nis (ad justificationem). Difponú juftitiam, dum excitati divinâ gratiâ, & adjuti, fidem ex liberè moventur in auditu concipientes, Deum......illum que tanquam omnis juftitia fontem, diligere incipiunt.... De hac dispositione fcriptum eft... Præparate corda ve¬ ftra Domino.

tur autem ad ipfam

.....

CAPUT VII, Quid fit juftificatio

impii, & quæ ejus caufa. Juftificationis caufæ funt; finalis quidem, gloria Dei, & Chrifti, ac vita æterna: efficiens verò, mifericors Deus, qui gratuitò abluit, & fanctificat fignans, & ungens fpiritu promiffionis fancto; qui eft pignus hæreditatis noftræ : meritoria autem dilectiflimus unigenitus fuus, Dominus nofter Jefus Chriftus..... inftrumentalis item Sacramentum Baptifmi.... Demum unica formalis caufa eft juftitia Dei... quâ nos justos facit. Conc. Trid. Seff. 6.

S. Thomas, 1. 2. q. 55. a. 4. ad 6. Virtus infufa caufatur in nobis à Deo fine nobis agen tibus, non tamen fine nobis confentientibus. Idem, q. 28. de V'erit. a. 8. ad s. Dicendum quòd difpofitio non facit aliquid ad formam effectivè, fed materialiter tantùm, in quan tum per difpofitionem materia efficitur congrua ad receptionem formæ: & fic contritio facit ad gratiæ infufionem in co qui culpam habet.

L'Auteur lui-même, qui prouve, To:s. p.658. que la grace habituelle n'est pas distinguée

de

de la charit habi

7.p.319.que

la cha

Voilà les feules caufes qui contiennent dans suelle, reconnoit To. leur fecondité & dans leur pouvoir actif ce grand rité habituelle eft effet de notre juftification; & la Foy agiffante donnée de Dieu aux par une imparfaite charité n'a qu'un pouvoir pafadultes qui aportent fif de preparer pour-ainfi-dire la matiere & le fuceßaires pour la re- jet à recevoir ce grand effet.

les difpofitions ne

cevoir. Ainfi il doit avouer que la Foy, l'Esperace & l'acte de Charité, qui

a

L'Auteur l'a bien compris, puifqu'il dit qu'elle » ne donne pas l'entiere fanté, l'entiere purification, & l'entiere liberté, quoique felon S. Augustin elle donne le POUVOIR D'ETRE cn» tierement PURIFIE' & parfaitement gueri.

[ocr errors]

difpose à la grace" de la justification

n'ont aucune vertu

active pour l'operer.

Il a foin de marquer ici ce pouvoir paflif & impuiffant en lettres Italiques, car il n'en admet point ici d'autre pour l'acompliffement du Commandement dans la grace fuffifante distinguée de la grace cooperante que l'Auteur apelle ordinaire

Fides quæ per imperfectam & inchoatam dilectionem operatur, non dat integram mundationem, perfectam libertatem; & tamen ex Auguftino dat POSSE integrè mundari; POSSE perfectè fanari. To. 5. p.sos.

S. Thomas non minùs quam Auguftinus, agnovit auxilium illud, quod licèt non det Agere, dat tamen Poße. Lect. 2. in cap. 3. Ep. ad Ephefios, docet, duplex adjutorium à Paulo hifce verbis: Cujus factus fum ego Minifter, fecundùm donum gratia Dei, qua data eft mihi fecundùm operationem virtutis ejus, diftinctum fuiffe: unum quidem quo datum fuerit Poffe feu facultas exequendi, & aliud quo datum fuerit ipfummet Agere, feu ipfa acceptæ facultatis executio: hujufmodi autem (inquit) auxilium duplex fuit: unum quidem ipfa facultas exequendi, aliud ipfa operatio actualis, facultatem autem dat Deus infundendo virtutem, & gratiam, per quas efficitur homo potens & aptus ad ad operandum : fed ipfam operationem confert in quantùm operatur in nobis interiùs movendo, & inftigando ad bonum; & ideo hoc accipiens Apoftolus à Deo, dicit quantùm ad primum: Dico quod factus fum Minifter, fed certè non meis meritis, nec virtute propriâ, fed fecundùm donum gratia que data eft mihi, quâ fcilicet idoneus efficior ad executionem divinorum ministeriorum, &c. Quantum autem ad fecundum, dicit: Secundùm operationem quam Deus efficit, in quantum virtus ejus operatur in nobis velle, & perficere. Igitur ex lancto Thoma, facultas operandi, feu Poffe agere, quod eft à gratia, cum fit virtus per quam homo efficitur potens & aptus ad operandum, diftinguitur ab ipfomet Agere, quod eft per motum & inftigationem, in quantùm (ut ipfe ait) Dei virtus operatur in nobis velle & perficere s.p· sos. & sob.

Io.

ment efficace; Et ceux qui feront chargez d'enfeigner fa Theologie, pourront aisément le faire remarquer à ceux qu'ils auront initiez au mysterę du Parti.

Si nous apliquons donc ici le raisonnement du P. Juenin à toute grace fuffifante, il est visible que le pouvoir qu'il atribue à cette grace par raport à l'acomplissement du Commandement, est un pouvoir impuiffant; qui ne peut produire ce grand effet, mais qui peut feulement preparer le fujet à recevoir la grace cooperante, adjuvante, ou fubfequente, c'eft-à-dire, la grace efficace, qui feule dans le fyfteme de l'Auteur donne le pouvoir complet de pratiquer la Loy de Dieu.

a

30. Enfin il prouve le pouvoir de cette grace fuffifante par celui des facultez habituelles diftinguées des fecours actuels; & fi vous le fuivez jufqu'à la fin de fes preuves, vous ferez étonné de voir dans celle qu'il apelle " la raison fondamentale de fa Conclufion, que cette grace fuffifante (distinguée de l'efficace) dont il a prétendu justifier l'existence, n'est autre chose que la habituelle; ce qui revient au fens de Janfenius:

grace

•Idem Angelicus Doctor fuse exponit

& probat rationem

fundamentalem cur

in rebus quæ ad falutem fpectant, gra tia Sufficiens ab effi

caci diftingui debeat. Nempe docet quòd de agentibus modo fupernaturali, idem ferendum fit judicium ac de agentibus modo naturali: in agentibus autem modo naturali, duo requiruntur, forma quæ fit principium motûs, & ipfa motio primi agentis : Videmus in corporalibus (inquit, i. 2. quæft. io9. art. 1.) quòd ad motum non folùm requiritur ipfa forma que eft principium motus vel actionis, fed etiam requiritur motio primi moventis: ergo pariter in agentibus modo fupernaturali requiruntur forma quæ fit principium actionis, & motio primi agentis: illa verò forma non aliud eft quam Gratia Sufficiens. Per gratiam nimirum fufficientem agens fit potens ad operandum modo fupernaturali, eò quòd fiat proportionatus cum effectu qui vires illius excedit; & per Gratiam Efficacem, potentia per Gratiam fufficientem recepta, ad actum reducitur. To. s. p. 506. & 507.

a

• On ne peut pas Illa verò forma (" id eft gratia habitualis) non aliud douter que l' Auteur est quàm Gratia Sufficiens.

n'entende la grace

habituelle par cette

en citant le même en

grace

fuffifan

On fçait affez en bonne Theologie que la grace forme dont il parle habituelle n'a qu'un pouvoir eloigné & impuiffant ici; puifqu'il le dit expreffement dans le à moins qu'elle ne foit jointe à une grace actuelmême Tome, p.572. le qui donne le pouvoir prochain. Voilà quel eft, felon le P. Juenin, le pouvoir de la te en tant qu'elle eft diftinguée de l'efficace; un pouvoir fi eloigné & fi impuiffant, qu'il est autant impoffible d'acomplir le Commandement avec ce feul pouvoir fans grace actuelle, qu'il est impoffible à l'homme de voler fans ailes.

droit de S.Thomas: Ex S. Thoma, 1. 2.

q. 109. a. 1. in ho

mine jufto fe habet

fi

gratia habitualis cut fe habet forma

in caufis naturalibus atqui forma dat fubjecto cui in

quantum (ait S. Do

dem S. Doctore, eft

Notre Auteur ne peche pas par ignorance il eft poffe operari, fçait ce qu'il ecrit. Il ne veut pas atribuer à la &tor) ad fufficien- grace fuffifante en tant que diftinguée de l'efficatiam operativa vir- ce, d'autre pouvoir, 1°. qu'un pouvoir imparfait, sutis ergo gratia impuiffant, invalide, lequel fe termine au fimple habitualis, ex eo defir dont il a parlé d'abord; 2°. ou tel qu'il est in aliquo fenfu Suf- dans la Foy, qui n'agit que par la charité imparfaite par raport à la production de la parfaite fanté de l'ame & de fon entiere juftification; ou 3°. enfin tel qu'il eft dans les graces habituelles, qui font impuiffantes lorfqu'elles ne font pas aidées par un fecours actuel.

faciens.

Eft-ce là la Theologie des Thomiftes, dont on prétendoit raporter les definitions? Reconnoit-on ici la doctrine de l'Eglife fur la grace fuffifante? Y a-t-il une tromperie pareille dans aucun Auteur Catholique? Auroit-on pû s'imaginer qu'un TheoDari Gratiam logien couvrît le fens de Janfenius fous une Protenditur. To. 5. P. le langage ordinaire en eft la condamnation ? pofition qui paroît fi fimple, & qui dans le fens &

Sufficientem fic of

[ocr errors]
[ocr errors]

a

Voici encore un endroit où le P. Juenin femble expliquer le dogme Catholique fur ce point. C'est dans le To. 5. p. 508. où il paroit fupofer que la grace qui eft apellée fuffifante pour agir, n'eft pas feulement suffisante a de nom mais qu'elle l'est en effet. C'est ainsi que les Theologiens Catholiques ont toujours parlé, & l'on ne peut demander à notre Auteur des termes plus aparens. Il eft feulement queftion de voir en quel fens il prend le terme de fuffifant. L'art des équivoques lui eft ici d'un grand úfage; car fi on l'en veut croire, ce terme fe prend en bien des fens.

Il y a UN SECOURS SUFFISANT felon lui, EN TOUT GENRE, & UN qui l'eft feulement EN QUELQUE SENS. Le fecours fuffi

fant en tout genre, c'est la grace efficace ; c'eft-là
felon lui, le don fuffifant de la parfaite efpece. Le
fecours de la feconde efpece, eft celui que les
Theologiens apellent fimplement fuffifant; & ce-
lui-ci n'eft fuffifant qu'en un certain fens, qui
compatit fort bien avec une veritable infuffifance,
n'y aïant dans le systeme de notre Auteur de grace
entierement suffisante que la grace
efficace. C'eft-

[ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

ter architectum, inftrumenta, materia, & alia diverfi generis requirantur; at verò eadem gratia eft SUFFICIENS IN ALIQUO GENERE, nimirum in genere POTENTIÆ, quia præter illam non requeritur alia gratia ut voluntas poffit operari, quamvis in alio genere, actualis fcilicet operationis, non fit fufficiens, eò quòd ut actu operetur, alia, fed diverfi generis, gratia requiratur. To. s. p. 509.

Ici l'ordre du langage commun eft entierement renversé par l'Auteur; car felon l'ufage ordinaire des Theologiens, le nom de fuffifant fine addito devroit être donné à la grace Suffifante comme diftinguée de la grace efficace. Mais l'Auteur l'attribuë tantôt à la grace habituelle. To. s. p. 507. & 572. tantôt à la grace operante, excitante on prevenante. Ibid. p. 5oo. 514. 515. 541. & To. 2. p. 347. & tantôt à la grace cooperante. To. 5. p. 509. C'est par de telles licences qu'il répand la confufion par tout, & qu'il cache fon erreur dans ces tenebres affectées.

M

« PreviousContinue »