Page images
PDF
EPUB

encore, dont, pour les études de droit public, je souhaite de plus en plus l'élaboration, qui n'aurait point du tout la « sécheresse technique » que certains esprits éminents, avec une prévention de moins en moins justifiée, prétendent exigée dans un ouvrage d'histoire juridique et constitutionnelle (Monod, Rev. historique, t. LXXVII, ann. 1901, p. 347), et dont l'originalité serait celle des récents travaux de « haute vulgarisation du domaine littéraire ou historique, pour autant que, bien informé, utilisant à l'occasion les ouvrages de seconde main, mais se reportant régulièrement aux sources, il montrerait la relation des constitutions rédigées dans le secret d'un comité ou élaborées dans les assemblées avec la vie sociale et politique de leur époque.- En attendant, il n'est guère de guide, à mon avis, plus sûr et plus agréable que M. Seignobos; c'est pourquoi il est moins intéressant d'indiquer sur quels rares points il y aurait entre ses vues et les miennes quelque divergence, que de noter notre accord sur l'irrésistible force d'expansion de l'heureuse évolution démocratique moderne et de redire comment, pour parfaire leur éducation généralement si insuffisante et pour tirer plein profit de certains enseignements, les étudiants des Facultés n'auraient point de meilleur aide-mémoire que les Cours de M. Seignobos, s'ils consentaient surtout à en compléter les succinctes données sur l'évolution des partis et des formes politiques avec un autre livre, du même auteur, pour l'heure incomparable, et en soi de très grande valeur, l'Histoire politique de l'Europe contemporaine.

JOSEPH DELPECH,

La diplomatie de la troisième République et le droit des gens, par FRANTZ DESPAGNET, professeur de droit international à l'Université de Bordeaux, membre de l'Institut de droit international. — 1 vol. gr. in-8°, VIII-806 p., 1905, Paris, Larose et Tenin; Bordeaux, Gounouilhou; 18 fr.

L'opinion publique, que, maintes fois, la presse de tous pays a tôt fait d'égarer par de néfastes conseils, des fautes de goût ou des erreurs éviden. tes sur le fond des choses et l'essentiel des doctrines, devrait être exactement instruite des sûres raisons historiques et de la profonde portée économique des évènements internationaux qui, se succédant en ordre de plus en plus serré, lui donnent le spectacle passionnant de diplomaties, les unes agitées fréquemment d'arrière-pensées belliqueuses et par là toujours inquiétantes pour les « sentinelles chargées de veiller sur la tour », les autres, c'est-à-dire la plupart, influencées par le développement de la solidarité organique née de l'apparition d'un commerce mondial, et trouvant dans leur activité commerciale des motifs de réconciliation, des prétextes à liquider leurs différends, et des raisons à une collaboration ferme et fidèle. Or, à en croire M. Despagnet, « les Français, à qui l'on reproche avec trop de raison d'être indifférents aux questions de politique extérieure et de les

mal connaître ou même de les ignorer complètement, ne sont pas tout à fait sans excuses. Il est, en effet, fort difficile, dans notre pays, pour tous ceux qui ne font pas du droit international et des affaires diplomatiques l'objet de leurs études, d'avoir en ces matières des informations impartiales, précises et éclairées. Les débats de notre Parlement sur la politique extérieure sont, à de trop rares exceptions près, intermittents, sans méthode et surtout déplorablement faussés par les préoccupations de l'esprit de parti. On retrouve en général les mêmes défauts dans notre presse, qui est d'ailleurs notoirement inférieure à celle de l'étranger pour l'abondance, la régularité, la netteté et la sûreté des informations concernant les questions internationales. Quant aux nombreux ouvrages consacrés à des points intéressant nos relations extérieures, s'ils ne sont pas dominés par les passions politiques ou nationales, ce qui arrive trop souvent, ils ne renseignent le public que sur les difficultés particulières dont ils traiSauf quelques réserves opportunes, quant à ce dernier point, au profit de monographies très récentes établies d'après les seules bases scientifiques du droit des gens. l'étude immédiate des sources et l'interprétation originale des instruments diplomatiques eux-mêmes, l'appréciation n'est point trop sévère, car, en cette matière aussi, hors des exposés d'ensemble de la coutume et de la législation internationales, on serait fondé à dire « qu'on énumèrerait plus aisément ce qui manque que ce qui

tent >>.

existe ».

Une lacune, particulièrement regrettable en régime démocratique, lequel présuppose une large, réelle et éclairée participation du nombre aux affaires publiques, existe donc; M. D. l'a voulu combler. Or, pour n'avoir point, de parti-pris, choisi la manière à mon sens la meilleure, l'exposition érudite, vivante, systématique, coordonnée et surtout une de chaque question, au lieu d'en morceler, de gênante ou désagréable façon, l'exacte et très satisfaisante explication, en prenant comme prétextes de coupures et points de repère assez fictifs les diverses présidences de la République, de 1875 à 1899, il a si peu suivi la pire que son œuvre vaut d'être véritablement vantée pour son importance, et mérite une large diffusion, tant elle peut exercer une saine influence. Elle ne fera certes point oublier, par exemple, pour la question d'Orient et les suites du traité de Berlin l'exposé si lumineux et parfait en sa simplicité de Max Choublier, et les essais si creusés d'histoire diplomatique à la manière de Mischeff; elle n'a rien de comparable à des travaux pleins de maîtrise en leur élégante sobriété de Moncharville, à certaines chroniques minutieuses et fouillées à l'excès de Fauchille sur la condition du Congo, ou encore à de petites études, comme celle de Politis sur les Nouvelles-Hébrides, qu'on donnerait aisément pour des modèles; elle ne dispensera personne curieux des choses d'Egypte et du Soudan, ou des luttes des puissances pour l'expansion coloniale et l'influence méditerranéenne, soit de reprendre l'étude, par endroits passionnée, mais uniformément merveilleuse de science et de virtuosité, de Cocheris, soit de demander aux articles si achevés et péné

trants de René Pinon la détermination de la vraie place que ces questions tiennent dans l'économie de la vie nationale ou le secret du jeu subtil des intérêts politiques et commerciaux qui s'y entrecroisent et cherchent un équilibre; et elle laisse de même tout leur intérêt aux séries si élégantes de forme et impressionnantes de documentation données déjà par de Lapradelle sur la question chinoise. Je serais tout prêt aussi à lui reprocher d'avoir, sous cet assez mauvais prétexte, amphibologique à moins qu'il ne soit complètement erroné, « que les questions réglées avec le Souverain Pontife se rattachent au droit public de chaque pays et sont, par ellesmêmes, étrangères à sa politique extérieure », laissé complètement de côté les relations diplomatiques de la France avec le Saint-Siège, si celles-ci n'avaient été, historiquement, bien traitées en 1901 dans la thèse de Durand-Morimbau, et, au point de vue juridique, dans le Sirey de 1895, synthétisées, avec une grande vigueur de pensée et un rare bonheur d'expression, en une note de Pillet.

-

Cependant, étendu à toutes les questions discutées depuis trente ans [Relations avec l'Allemagne et la Triple-Alliance; Affaires d'Orient; Question d'Egypte, et démêlés avec l'Angleterre ; Traité de Berlin; Annam, Tunisie, Madagascar, Tonkin, Siam, Haut-Mékong, Dahomey; Entente avec la Russie; Expansion en Afrique et en Océanie; Commerce avec la Chine; Conférences et arbitrages], - pris tel qu'il fut conçu, avec le souci de donner << sur notre situation internationale à l'époque contemporaine une nette vue d'ensemble, résultant d'une connaissance sérieuse et coordonnée des éléments essentiels de cette situation », composé scrupuleusement avec les documents authentiques soumis dans chaque pays aux assemblées, tels que Livres jaunes français, peu réguliers, souvent désordonnés et assez généralement incomplets, ou Blue Books britanniques, précis et abondants, délibérément dépouillé de toutes opinions personnelles ou sentimentales, explications déductives et appréciations de politique ou de moralité, ce gros livre devrait éveiller (si tant est qu'on y puisse croire) la curiosité intelligente des gouvernés et l'anxieuse conscience des gouvernants; il peut satisfaire à l'une et éduquer l'autre c'est pourquoi je le tiens, sans réserves, pour une œuvre considérable et utile, faite, pour le grand public, par un professeur maître de son sujet et instruit de cette vérité, communément répétée, sinon appliquée, qu'il peut y avoir, en un livre de vulgarisation, comme en des conférences de propagande populaire, une réelle portée scientifique.

JOSEPH DELPECH,

Professeur agrégé de droit public à l'Université d'Aix-Marseille.

REVUE DES PÉRIODIQUES

LOUIS MICHON.

I. PÉRIODIQUES FRANÇAIS

1o Le Correspondant.

Le gouvernement parlementaire au début de la deuxième restauration (10 juin 1905).

M. Louis Michon montre dans son article, comment, pendant les Cent Jours, s'est élaboré le gouvernement de cabinet, et ce que fut ce gouvernement né après Waterloo, au lendemain de la rentrée du roi en France.

I. – Louis XVIII est à Gand, avec ses ministres, à l'exception de Montesquieu qui remplace provisoirement M. de Chateaubriand. Contre le parti du roi, le parti de la cour, composé des amis de Monsieur est partisan de l'ancienne charte.

Talleyrand, depuis Vienne, favorise la conception et la naissance d'un ministère homogène et solidaire.

Au lendemain de Waterloo, Louis XVIII quitte Gand pour Mons. Talleyrand l'y rejoint. Le roi se rend à Cambrai. Un Conseil préparatoire se forme, Beugnot rédige une proclamation instituant une commission provisoire du gouver

nement.

II. — Fouché en est président. Il écrit à Wellington que le vœu de la France est de trouver à égale distance des excès de la République et de l'Empire, l'indépendance, l'ordre et la paix de l'Europe. La réforme la plus désirable est la for. mation d'un ministère solidaire et responsable.

III. Louis XVIII remonte sur le trône. Par une ordonnance du 10 juillet, composant le cabinet, il entend réserver la réalité du pouvoir aux seuls ministres, secrétaires d'Etat, réunis en Conseil.

Le Conseil privé qui existe à côté du Conseil des ministres, n'est qu'un moyen de satisfaire quelques seigneurs qui se croient indispensables. Il ne jouit d'aucun pouvoir, d'aucune initiative.

Talleyrand préside le Conseil des ministres. Ce ministère présente un caractère d'unité, grâce à ce double fait que le duc de Richelieu a refusé le ministère de la maison du roi et Pozzo di Borgo celui de l'intérieur,

Les ministres se mettent à l'œuvre chez Talleyrand ou aux Tuileries.

IV. – Malgré les imperfections qui existent dans le fonctionnement du cabinet de 1815, ses membres affirment d'une façon remarquable leur responsabilité et leur solidarité. Talleyrand écrit aux secrétaires d'Etat des puissances alliées qu'un ministère est créé ; que les membres exécutent, chacun dans leur sphère respective, ce qui a été arrêté dans une délibération commune. D'où, force d'action donnée par l'unité; et responsabilité, meilleur préservatif contre les aberrations du pouvoir. Un document relaté dans l'article et intitulé « Mémoires sur

les Attributions du Conseil des ministres et celles des différents départements ministériels », dit que l'unité, la responsabilité et la solidarité sont les trois bases du ministère ; et développe longuement ce principe.

V. La Chambre des pairs et celle des représentants avaient été dissoutes à la rentrée du roi. Il était cependant impossible de rappeler les députés de 1814. Plusieurs ordonnances furent rendues. soit pour l'augmentation du nombre des députés, soit pour leur nomination. La dernière, en date du 15 thermidor an X, aurait, si l'on en croit certains auteurs, valu à la France la Chambre introuvable.

Talleyrand crut alors sauver le ministère en sacrifiant Fouché. Mais Talleyrand lui-même n'était plus assez avancé. Le roi résolut de ne plus le soutenir contre la Chambre. Talleyrand dut se retirer.

M. Michon termine en considérant que ce premier ministère de la seconde Restauration n'avait pas duré trois mois ; qu'il ne s'était pas trouvé en présence des Chambres; mais que cependant une étape très considérable avait été franchie dans la voie du gouvernement parlementaire.

WETTERLÉ.

cembre 1905).

LARMOYER.

Institutions parlementaires de l'Empire allemand (25 dé

L'Empire allemand est une fédération d'Etats indépendants. Chacun des pays confédérés a sa constitution particulière, ses lois, ses usages, son mode spécial de prélèvement d'impôts, son fonctionnarisme. L'Empire respecte dans la limite du possible leur autonomie. Les lois sont présentées au nom des gouvernements confédérés, et c'est véritablement le Conseil fédéral qui détient le pouvoir, l'empereur n'en est que l'organe et le président.

Nous nous trouvons donc en présence de deux systèmes législatifs parallèles : celui de l'Empire et celui des Etats, ayant leur domaine propre.

Dans tout ce qui lui est réservé, l'Empire peut légiférer; ses lois sont applicables à tous les Etats après avoir été votées par le Reichstag, parlement d'Empire, et par le Bundesrath, conseil fédéral; s'il néglige de dire le droit sur ce qui est de sa compétence, les Etats particuliers gardent sur ce point leur complète indépendance.

Les ressources financières proviennent de quelques impôts indirects; de plus, les Etats sont tenus de verser à l'Empire des « contributions matriculaires >>, dont le montant est calculé proportionnellement à la population. Passons à l'examen des organes de l'Empire :

1 Empereur. Le roi de Prusse est titulaire de l'Executif, déclare la guerre, fait la paix avec avis, si possible, du Bundesrath, nomme les ambassadeurs et fonctionnaires de l'Empire, ses décisions sont contresignées par le chancelier. Pour les traités, il doit obtenir l'assentiment du Bundesrath et du Reichstag.

2o Le Bundesrath ou Conseil fédéral est une assemblée souveraine, composée de délégués nommés par les chefs d'Etats confédérés, et liés dans leur vote par les instructions formelles qu'ils reçoivent des souverains qu'ils représentent, Ils ont place sur les bancs du gouvernement au Reichstag, où ils peuvent prendre la parole pour soutenir leurs revendications.

Les décisions de ce Conseil sont prises à la majorité absolue; les absents ne votent pas.

3o Reichstag, ou parlement d'Empire, élu au suffrage universel par les citoyens de vingt-cinq ans révolus; même âge pour être éligible.

« PreviousContinue »