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Les fonctionnaires sont éligibles. Ils sont considérés comme propriétaires de leur charge sitôt leur nomination définitive. Ils ne peuvent en être dépossédés si ce n'est pour manquements professionnels très graves, ce qui leur laisse une liberté politique absolue. Elus, on leur maintient leur traitement, et un leur accorde des congés réguliers pendant la durée des sessions.

Les fonctions de député sont gratuites; ainsi, elles sont inaccessibles à la classe pauvre. Cependant les socialistes, grâce à leur excellente organisation, sont parvenus à remédier à cet inconvénient, et leur caisse verse à leurs représentants des jetons de présence de 9 à 12 marks. Ordinairement le Reichstag est convoqué pour le mois de décembre; il siège une quinzaine pour expédier la première lecture ou discussion générale du budget et des projets de loi importants. Les grandes commissions sont nommées fin décembre, et commencent leurs travaux dans le courant de janvier. Quoique n'ayant aucune existence légale, ces commissions, grâce à leur puissante organisation, à leur discipline, sont une réduction parfaite du Parlement au point de vue des opinions politiques, et leurs décisions sont toujours ratifiées en séance plénière.

Si donc, en principe, les fractions ne sont rien au Reichstag, en fait elles sont tout.

Pendant la période électorale, on se présente avec une étiquette classée, avec un programme imposé par son parti. Elu, on se fait inscrire immédiatement dans un des groupes existants. Les fractions tiennent des séances régulières, où sont discutés en famille les projets de loi, et où on arrête la ligne de conduite du parti. Dans la plupart des questions, le compromis passé en séance de fractions a force de loi; car si un membre du parti manifestait une intention contraire, il serait exclu du groupe. Et l'on peut dire qu'en thèse générale le député enrégimenté dans une fraction a renoncé à toute individualité ; quelques hommes seulement, les plus habiles et les plus éloquents, concentrent en leurs mains toute l'activité parlementaire, ce sont les chefs de groupes. S'agit-il d'une proposition gouvernementale ayant au premier abord peu de chances de réussite, le chancelier de l'Empire négocie secrètement avec les chefs de groupes qui s'assurent du concours de leurs amis politiques, après quoi le projet est adopté au Reichstag.

Tous les projets de loi passent au Reichstag par trois lectures: une discussion générale se terminant presque toujours par un renvoi à une commission; une deuxième lecture avec vote sur chaque article et droit d'amendement pour chaque membre du Parlement: enfin lecture définitive où sont discutés les seuls amendements signés par 30 députés présents, se terminant par un vote sur l'ensemble de la loi.

L'Allemagne n'est pas un pays parlementaire au sens propre du mot. Le chancelier et les secrétaires d'Etat restent au pouvoir tant qu'ils jouissent de la confiance de l'Empereur.

Le droit de pétition au Reichstag est illimité; seules, celles ayant un caractère d'intérêt général y sont discutées.

En principe, les séances du Reichstag sont publiques Les interruptions y sont très rares, encore plus les marques de désapprobation bruyantes. La subordination, le respect, la discipline, voilà ce qui constitue la principale caractéristique du tempérament national allemand. Accepter sans récriminer les décisions des majorités ou même simplement des chefs de groupes, telle semble être la devise de tous les partis.

PAUL CUNY.

2o Revue générale d'administration.

E. MOUTON.

Le quorum au Conseil général (septembre 1905).

1o Etude de la règle fixant le quorum;

2o Voies de recours contre les délibérations prises sans que le quorum ait été atteint.

I. LA RÈGLE. Il faut, pour rendre une délibération valable, que la moitié plus un des membres du Conseil général soit présent. Si le nombre total est pair, la

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le nombre est impair, la majorité est de la moitié plus une demi-unité. La majorité se calcule alors sur le chiffre pair immédiatement inférieur.

La majorité est calculée sur le nombre total dont le Conseil doit se composer d'après le sectionnement cantonal du département.

Les présents sont tous ceux qui assistent à la séance y compris ceux qui s'abstiennent de voter. Sont regardés comme présents, les membres qui sont là au début de la séance et à l'ouverture du scrutin, mais se retirent avant le vote. Il suffit que la majorité soit présente au premier tour, pour qu'on puisse procéder aux autres.

Le Conseil général vote de trois manières par assis et levé, au scrutin public et au scrutin secret. Pour établir qu'une délibération a été prise par la majorité, il n'y a pas de difficulté pour les deux derniers modes. Quant au vote par assis et levé, qui ne fait pas mention du nombre des votants, il faut se reporter à l'appel nominal fait au début de chaque séance. Or comme le moment précis où la majorité doit être présente est celui de l'ouverture du scrutin, et qu'entre le moment où commence la séance et celui du scrutin certains conseillers peuvent avoir quitté la salle des séances, il faudra, pour que la réduction du nombre des présents ait quelque effet, qu'elle soit constatée par le bureau. Autrement la délibération serait valable.

Quand, lors de la réunion du Conseil général, la majorité n'est pas présente, la session est renvoyée au lundi suivant. Les délibérations prises à ce moment sont valables quel que soit le nombre des conseillers votants.

Dans le cas d'une réunion convoquée sur la demande des deux tiers des membres, le Conseil ne pourrait pas délibérer si la majorité ne se trouvait pas réunie au jour de la convocation. Pour que la session ait lieu, il faudrait alors qu'une nouvelle demande intervienne.

Dans une session réunie par décret, c'est-à-dire extraordinaire, si la majorité n'était pas atteinte lors d'une délibération, celle-ci renvoyée au surlendemain pourrait avoir lieu mème en dehors de la période de huit jours assignée aux sessions de ce genre. Au contraire, lorsque la session a lieu sur demande, il est nécessaire que la délibération ait lieu dans les huit jours légaux.

Sanctions. Deux sortes de nullité: 1o nullité absolue s'appliquant à tout acte ou délibération relatifs à des objets non compris légalement dans les attributions du Conseil général; 2° nullité relative s'appliquant aux délibérations pour lesquelles les Conseils généraux statuent définitivement.

La nullité qui s'applique aux délibérations prises en l'absence de la majorité est absolue. Cette délibération n'est pas un acte du Conseil général; par conséquent, elle est, plus que tout autre acte, entachée de nullité absolue. Cette nullité peut être prononcée à toute époque.

II. VOIES DE RECOURS.

Recours administratif. La nullité est prononcée par décret rendu en la forme des règlements d'administration publique. Le recours est personnel au préfet ou plutôt au ministre de l'intérieur. Il n'est soumis à aucune condition de forme. Il n'y a pas d'instance; par suite, le Conseil général n'est pas partie. Ses observations ne sont que des documents administratifs. Le décret d'annulation peut être annulé par le Conseil d'Etat statuant au contentieux sur pourvoi du Conseil général fondé sur une illégalité. C'est le seul cas d'annulation. La nullité étant absolue, le recours du préfet n'a pas à être notifié au président du Conseil général, ni à celui de la commission départementale.

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Recours contentieux Les personnes dont les droits seraient lésés par les délibérations du Conseil général peuvent les déférer au Conseil d'Etat dans les cas et formes du recours pour excès de pouvoir.

L'intéressé est toute personne dont un intérêt direct et personnel a été lésé par la délibération entreprise.

Les conseillers généraux peuvent-ils former un recours? Pour résoudre la question, il faut se demander si les membres du Conseil général pris ut singuli doivent être considérés comme parties intéressées. Il faut poser comme principe que les conseillers peuvent être lésés par une délibération portant atteinte à une des prérogatives attribuées par la loi aux conseillers généraux. Ils ont alors un intérêt personnel et direct. Mais la seule qualité de conseiller général ne leur donne pas ce droit.

Ils ne peuvent attaquer pour excès de pouvoir une délibération prise sans que le quorum ait été atteint. Si le conseiller qui se prétend lésé était présent, il lui a été facile d'user de tous ses droits. S'il était absent, il ne peut raisonnable. ment se plaindre d'une situation illégale que sa volonté a contribué à créer. TOUSSAINT.

3o Revue politique et parlementaire.

DE MONZIE. De la responsabilité civile des instituteurs (mai 1905) L'article 1384 du Code civil met à la charge des instituteurs une lourde présomption de responsabilité. Ces derniers sont responsables du dommage causé par leurs élèves pendant le temps où ils sont sous leur surveillance, à moins qu'ils ne prouvent l'impossibilité où ils sont d'empêcher le fait dommageable. Ce soin est laissé à l'appréciation des tribunaux qui se sont généralement montrés favorables aux instituteurs et ont tenu compte des diverses circonstances qui paralysent leur surveillance. Pourtant en 1892 a surgi un incident mémorable l'affaire Leblanc.

Un enfant frappé dans l'intérieur d'une école par quelques camarades meurt des suites de ses blessures. L'instituteur, poursuivi et condamné à de forts dommages-intérêts, est atteint d'un désespoir qui cause sa folie et sa mort. Une deuxième affaire du même genre surgit un peu plus tard devant la Cour de Limoges qui déclare la faute personnelle de l'instituteur. Une souscription en faveur de ce dernier est faite dans tous les départements. Des sociétés d'assurances contre les accidents se forment, des pétitionnements tendant à l'abrogation de l'article 1384 sont organisés. Puis trois propositions de loi sont dépo sées, dont l'une aboutit à la loi du 20 juillet 1899 qui ajoute au texte de l'article 1384 celui-ci : « Toutefois, la responsabilité civile de l'Etat est substituée à celle des membres de l'enseignement public ».

Cette loi, accueillie d'abord avec une grande faveur, ne répondait pas à l'espoir des instituteurs. De nombreuses instances furent engagées de 1899 à 1905, et les préfets, contre qui ces recours étaient formés, se retournèrent contre les instituteurs en invoquant contre eux l'article 1382, en vertu duquel chacun est tenu civilement de son fait personnel. Ainsi, l'instituteur restant exposé aux poursuites judiciaires, condamné en vertu d'un texte ou d'un autre, n'a rien acquis de la loi de 1899. Le mécontentement des instituteurs se fait d'autant mieux sentir qu'ils n'ont pu jusqu'alors constituer leurs amicales en sociétés d'assurances mutuelles. C'est à ce sujet que dernièrement même le Conseil supérieur de la mutualité prit une délibération en termes ironiques et renvoya les intéressés devant le Parlement où ils pourraient exposer leurs griefs.

Aussi M. Dupuy a-t-il récemment déposé à la Chambre un projet tendant à réformer l'article 1384 dans sa teneur actuelle. Ce projet est ainsi conçu : « La responsabilité des instituteurs n'est engagée que s'il est prouvé par la partie plaignante qu'il y a eu défaut de surveillance. Dans tous les cas, la responsabilité de l'Etat sera substituée à celle des instituteurs ».

Donc à la responsabilité contractuelle, fondée sur une présomption de négligence, M. Dupuy substitue une responsabilité délictuelle.

Et en effet, à l'heure présente, où l'enfant n'est plus comme un prisonnier enfermé dans une geôle, ainsi qu'il en était autrefois, l'instituteur ne peut, de sa propre volonté, écarter les enfants qu'il regarde comme dangereux; il est obligé de les recevoir tous et ne peut opérer une sélection parmi eux, à l'encontre du chef d'une institution privée qui peut, à son gré, éloigner les enfants qu'il redoute. Par conséquent, il ne peut pas y avoir juridiquement mandat tacite transféré par le père à l'instituteur de la puissance paternelle avec la responsabilité qu'elle renferme.

Aussi la proposition de M. Dupuy n'est pas assez radicale; car, tout en suppri mant la présomption de culpabilité, elle laisse subsister la présomption de responsabilité. Il faut être plus radical. Par les articles 1382 et 1383, en vertu desquels les parents pourront obtenir la réparation du dommage causé à leurs enfants par la faute du maître, l'instituteur reste engagé au delà des ressources que lui fournit sa profession, et cette profession comporte des risques inėvitables.

Il faut donc déclarer l'Etat civilement responsable des fautes présumées de l'instituteur. De même qu'il est responsable de ses fautes effectives, de même il serait responsable des délits dont le plaignant aurait fait la preuve.

Ainsi, non seulement il faut modifier l'article 1384, mais l'abroger, et appliquer le droit commun, d'une part à l'instituteur en le libérant de toute présomption de responsabilité, d'autre part à l'Etat, qui est, vis à-vis de l'instituteur, dans la situation d'un chef d'entreprise vis-à-vis de son employé, et qui par là-même doit supporter les actions en garantie qu'un particulier, lésé par le fait d'un préposé, peut diriger contre le commettant. Il ne s'agit pas d'un privilège à créer en faveur de l'instituteur, mais de supprimer contre lui un régime d'exception. J. LANSARD.

4. La Révolution française (juin 1905)

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A. AULARD.

La loi du 19 vendémiaire an III dit :

Le Comité de Salut public a-t-il suspendu la vente des biens nationaux en messidor an II.

Art. 1. — La vente des immeubles nationaux, suspendue par arrêté du Comité de Salut public du 10 messidor sera continuée. »

« Art. 2.- Le bureau des domaines de Paris ne pourra faire procéder à la vente d'aucun un meuble que d'après un avis de la Commission des artistes préparés pour la division de Paris, confirmé par un arrêté du Comité des finances. »

En ouvrant le recueil de A. Aulard sur les actes du Comité de Salut public à la date du 10 messidor, on n'y trouve aucun arrêté suspendant la vente des biens nationaux.

Où est la vérité ?

Le procès-verbal porte la date du 10 messidor: il n'y a pas d'erreur là.

La minute originale du décret porte cette même date. Elle est signée de Portier: le rapport de Portier qui pourrait nous donner quelque éclaircissement est introuvable.

Relisons la loi.

L'article 2 semble interprétatif de l'article 1er.

Il permet de supposer qu'il ne s'agit que des immeubles nationaux à Paris, d'après le nom même de la « Commission des artistes préposés à la division de Paris. »

Il semble même qu'il ne s'agisse que de certains immeubles de Paris. En effet un arrêté, l'arrêté numéro 9, à la date du 10 messidor, met à la disposition de la Commission des transports des immeubles nationaux diverses maisons nationales déterminées (3 maisons). Cet arrêté suspend par conséquent la mise en vente de ces immeubles et la loi du 19 vendémiaire an III lève cette suspension. Reste un point à éclaircir. Pourquoi le Comité de Salut public n'a-t-il pas pris lui-même un arrêté pour révoquer celui du 10 messidor? Sans doute parce que la loi du 7 fructidor an II, réorganisant le gouvernement révolutionnaire, avait restreint ses attributions et lui avait enlevé le droit en vertu duquel il avait indirectement suspendu la vente de trois immeubles nationaux en les affectant à un service public.

Seul l'article 1er de la loi du 19 vendémiaire an III, très ambigu, a semblé donner à cette loi une portée générale. D'ailleurs, si cette loi avait eu une portée générale, pourquoi le silence des journaux à son sujet ?

A notre avis donc, et jusqu'à preuve du contraire, la loi du 19 vendémiaire an III est une loi spéciale à quelques immeubles nationaux de Paris : le Comité de Salut public n'a donc pas suspendu en messidor an II la vente des biens nationaux.

M. BINET.

5' Revue d'histoire moderne et contemporaine (juillet 1905)

D CARON.

1889, an VIII

Les comités militaires des assemblées de la Révolution,

Les comités militaires de la Constituante, de l'Assemblée législative, de la Convention nationale furent un des « rouages permanents» de ces assemblées révolutionnaires.

Le souci de la réorganisation de l'armée apparaît dès les premières séances de l'Assemblée constituante: en août et septembre 1789 est réclamée par trois fois la nomination d'un comité qui serait chargé de coopérer avec le ministre à cet effet. Le 2 octobre 1789 un comité de douze membres est élu.

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