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réitérer sa demande en l'accompagnant d'une description définitive et complète.

La demande serait alors publiée, et sans admettre toute personne à faire opposition à la délivrance du brevet, sous le prétexte que la découverte n'est pas nouvelle, on pourrait permettre de faire opposition entre les mains du Ministre, à celui qui prétendrait avoir été dépouillé indûment de son invention.

Pour obtenir ce résultat, il faudrait adopter une disposition analogue à celle qui résulte des articles 3 et 24 combinés de la loi allemande.

<< Celui-là n'a pas droit à la délivrance d'un brevet qui a fait une déclaration dont le contenu essentiel est emprunté à des descriptions, à des dessins, à des modèles, à des instruments ou des dispositions dont une autre personne est l'auteur, ou à un procédé employé par celle-ci sans son consentement,

si cette personne fait opposition en se fondant sur ce motif. >>

L'opposition, formée par exemple dans les deux mois de la publication de la demande définitive, serait jugée en premier ressort par le Ministre, et en appel par le Conseil d'État, ou par une autre juridiction désignée à cet effet.

Si nous n'adoptons pas le système d'oppositions tel qu'il est pratiqué en Allemagne et en Angleterre, c'est parce qu'il est évident que le droit donné à

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toute personne de se prévaloir, à l'encontre du breveté, du défaut de nouveauté de l'invention est inutile dans la plupart des cas et peut souvent être dangereux.

Il faut en effet supposer que les demandes de brevet sont connues effectivement d'un grand nombre de personnes, disposées à courir les risques d'une aventure judiciaire sans intérêt appréciable, pour croire à l'efficacité d'une pareille mesure.

« Nous pensons, dit M. Klostermann (1), qu'il n'est pas juste de repousser la demande d'un inventeur sans jugement des tribunaux; mais en même temps, nous sommes d'avis que la question de savoir si la demande est fondée sur un droit réel, s'il y a ou non une invention nouvelle, peut être jugée par les tribunaux aussi bien avant la délivrance du brevet que dans le cas où le produit d'un tiers est argué de contrefaçon. >>

La compétence du tribunal est certainement la même dans les deux cas, mais ce qui est différent, c'est l'empressement de ceux qui doivent se présenter devant les tribunaux pour faire juger le brevet.

Après sa délivrance, le brevet, grâce à la présomption de validité dont il jouit, dans les pays de nonexamen aussi bien que dans ceux d'examen, permet

(1) Congrès de Paris, 1878.

à son titulaire de faire opérer la saisie des objets argués de contrefaçon. Cette saisie éveille l'attention de celui sur lequel elle est opérée et l'action est nécessairement portée devant les tribunaux.

Croit-on que sans avoir été mis en cause et avant toute exploitation d'un brevet, un industriel, à la simple lecture de la description d'une découverte, intentera un procès en nullité du brevet futur? On aurait tort de le penser, car l'expérience a démontré que les actions préventives n'étaient jamais exercées. D'autre part, on exposerait l'inventeur à de grands dangers si on permettait à ses concurrents de multiplier les obstacles qu'il doit franchir pour obtenir le privilège qu'il sollicite chaque opposition entraîne à la fois des retards et des frais de procédure qui peuvent décourager ou ruiner un inventeur pauvre.

Les dispositions d'une loi destinée à protéger une classe de personnes aussi utiles que méritantes doivent être inspirées par le désir de concilier l'intérêt de la Société avec le droit de l'inventeur.

CHAPITRE IV

EFFETS DU BREVET

$1. - Protection provisoire.

Nous devons maintenant examiner les privilèges accordés à l'auteur d'une découverte, qui la fait breveter.

Les lois qui ordonnent la publicité de la demande doivent nécessairement accorder au demandeur une protection provisoire, destinée à parer aux inconvénients qui pourraient résulter de cette publication. L'article 22 de la loi allemande pose la règle suivante : « Si l'Office des brevets estime que la demande est régulière et que l'invention est brevetable, il ordonnera la publication de la demande. Dès le jour de cette publication se produiront provisoirement les effets légaux de la délivrance d'un brevet pour l'objet de la demande. »

Le point de départ de cette protection était facile à déterminer; l'examen auquel se livre l'Office des brevets, lorsqu'il reçoit communication de la demande, ne porte en effet aucune atteinte aux droits de l'inventeur, qui reste libre de modifier ses descrip

tions, ses dessins, son invention tout entière, et qui doit même le faire si les examinateurs lui signalent des irrégularités dans sa demande : tout ce qui se passe durant cette première période reste secret, et les tiers ne peuvent prendre connaissance de la découverte. La situation change quand la demande a été publiée; elle doit, aux termes de l'article 20, décrire l'invention de telle façon que son application par des spécialistes semble possible; dès lors, il est juste, à partir de ce moment, d'interdire à toute personne de produire industriellement, sans la permission du breveté, l'objet de cette invention ou d'appliquer le procédé découvert et expliqué.

Cette protection provisoire dure jusqu'à la délivrance définitive du brevet, dont les effets peuvent être considérés comme s'étant produits du jour de la publication de la demande. « Si le brevet est refusé, dit l'article 26, par. 2, la résolution repoussant la demande doit aussi être publiée. Le refus fait considérer comme non avenus les effets de la protection provisoire. >>

Pendant la période des oppositions, les droits du demandeur en brevet dépendent d'une condition résolutoire, la non-obtention du brevet.

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