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DES

BREVETS D'INVENTION

EN

DROIT INTERNATIONAL

INTRODUCTION

SECTION I

Historique.

Les premières lois destinées à protéger les inventeurs datent de l'époque où furent supprimés les monopoles qui entravaient la liberté industrielle.

On comprit qu'en permettant à tout individu de produire librement des objets destinés à la vente, il fallait donner aux inventeurs une garantie qui leur permît de profiter de leurs découvertes.

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C'est ce qui se produisit en Angleterre et en France. Lorsque Jacques Ir abolit, en 1623, tous les monopoles industriels, il admit une exception en faveur des auteurs de procédés et de produits nouveaux, auxquels il accorda le droit d'obtenir des privilèges de 14 ans, pouvant s'étendre à 21 ans dans certains cas, et portant le nom de Patentes d'invention.

Avec le temps, le succès des Anglais frappa toutes les nations industrielles, et le droit des inventeurs fut reconnu et proclamé par les États-Unis dans leur constitution du 17 décembre 1787; l'article 1er établit qu'il est nécessaire d'accorder aux auteurs un droit exclusif sur les écrits et sur les découvertes 'pendant un temps limité, afin d'exciter les progrès des sciences et des arts utiles; les lois des 10 avril 1790, 21 février 1793, etc., consacrèrent ce principe.

En France, l'Assemblée nationale, après qu'elle eût aboli les privilèges, discuta et vota la loi qui, de 1791 à 1844, a régi la matière. Mais, tandis que le législateur américain faisait reposer le droit des inventeurs sur une sorte de contrat ayant pour objet de favoriser les arts utiles, le législateur français déclarait que ce droit était un droit de propriété ayant son fondement dans la loi naturelle.

« Les découvertes de l'industrie et des arts, disait

Mirabeau, étaient une propriété avant que l'Assemblée nationale l'eût déclaré », et le préambule de la loi était ainsi conçu: « L'Assemblée nationale, considérant que toute idée nouvelle, dont la manifestation ou le développement peut devenir utile à la Société, appartient privativement à celui qui l'a conçue, et que ce serait attaquer les droits de l'homme que de ne pas regarder une découverte industrielle comme la propriété de son auteur; considérant, en même temps, combien le défaut d'une déclaration positive et authentique de cette vérité peut avoir contribué jusqu'à présent à décourager l'industrie française, en occasionnant l'émigration de plusieurs artistes distingués et en faisant passer à l'étranger un grand nombre d'inventions nouvelles, dont cet empire aurait dû tirer les premiers avantages; considérant, enfin, que tous les principes de justice, d'ordre public et d'intérêt national lui commandent impérieusement de fixer désormais l'opinion des citoyens français sur ce genre de propriété par une loi qui la consacre et qui la protége, décrète, etc. »

Peu à peu, toutes les nations européennes suivirent ces exemples; la première loi russe date de 1812, celle de la Prusse date de 1815; les Pays-Bas (Belgique et Hollande) promulguèrent la leur le 25 janvier 1817. Toutes ces législations ont été, depuis un demi-siècle, modifiées ou transformées,

et les seuls États européens qui, aujourd'hui, ne protégent pas les inventions sont la Hollande, la Suisse (1) et la Serbie.

Les lois les plus récentes sont celles:

Des États-Unis d'Amérique..... 22 juin

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1874

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De l'Espagne.

De la Turquie.

Du grand duché de Luxembourg. 30 juin

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Il existe entre ces lois des différences essentielles, qui eussent été peu remarquées à une époque où la difficulté des communications, jointe aux prohibitions douanières, rendait presque impossibles les rapports de nation à nation, mais qui sont devenues choquantes depuis que la facilité des transports et l'abaissement des tarifs douaniers ont rapproché les producteurs des divers pays.

Il ne suffit plus à un inventeur français d'être protégé en France, il faut encore qu'il le soit en

(1) A la date du 16 mars 1888, une dépêche de Berne annonçait que le Conseil national venait de voter la loi relative aux brevets d'invention par 66 voix contre 22.

Angleterre, en Allemagne, etc., s'il veut se prévaloir de son invention sur les marchés anglais, allemands; il est donc obligé de remplir toutes les formalités prescrites par les lois diverses.

<< Sans une loi internationale, a-t-on dit avec raison (1), ou tout au moins sans convention, les meilleures lois nationales sur les brevets perdent une grande partie de leur efficacité; la plus mauvaise loi internationale serait meilleure que la loi nationale la plus parfaite..... A défaut d'entente entre tous les états, il faudrait chercher à établir au plus tôt une union entre ceux qui voudraient en faire partie. >>

Les industriels de tous pays, appelés aujourd'hui à se rencontrer sur les marchés internationaux, ne peuvent lutter qu'à armes égales, il est donc juste de vouloir leur imposer les mêmes règles et les mêmes obligations.

On peut atteindre ce but de deux manières : en soumettant les brevetés au même régime ou en supprimant tous les brevets. C'est ce second système qui fut d'abord proposé.

Au congrès international pour la réforme douanière tenu à Bruxelles en 1856, M. Akersdyck, pro

(1) Note de M. Poirrier, président de la Chambre de commerce de Paris, publiée dans le compte rendu du Congrès de la propriété industrielle tenu à Paris en 1878. Annexe n° 7.

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