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RECUEIL, &c.

TROISIÈME PARTIE.

(Moniteur, No. 240,-20 Mai, 1804.

Rapport fait par le Sénateur Lacepède, au nom de la Commission Spéciale du Sénat, le 28 Floréal, An 12.

Citoyen Consul Président.

Le Sénat a renvoyé à sa Commission Spéciale le projet de Sénatus-Consulte organique qui lui a été présenté par des orateurs du Gouvernement, et dont je viens de faire lecture.

La Commission m'a chargé d'avoir l'honneur de soumettre au Sénat, les résultats de l'examen qu'elle a fait de ce projet.

Ce sera une grande époque dans l'histoire des nations, que celle où le Peuple François, faisant entendre de nouveau sa volonté souveraine, met un frein à la fureur des discordes civiles, termine la plus mémorable des révolutions, fixe ses glorieuses destinées, et consacre un monument digne de lui, à la liberté, à l'égalité, à la raison, à la reconnoissance, en assurant dans la famille de son héros, cette couronne Impériale qui va briller sur un front décoré tant de fois des Lauriers de la victoire.

C'est vous, Citoyens Sénateurs, qui avez pressenti ce grand événement, qui l'avez préparé, et dont la décision, que désire avec tant d'ardeur la France attentive, va donner le mouvement aux élans généreux de la Grande Nation.

Mais les pères de la patrie doivent commander à l'enthousiasme de sentiment. Vous avez émis un vœu solennel pour que le Gouvernement de la République fut confié à Napoléon Empereur héréditaire. Vous avez désiré en même temps que nos institutions fussent perfectionnées pour assurer à jamais le règne de la liberté et de l'égalité. Les mesures qui doivent garantir et les droits de la nation, et la durée de l'Empire héréditaire vous sont aujourd'hui présentées dans les formes prescrites par les Constitutions de la République. Le projet de Sénatus-Consulte qui les renferme est sous vos yeux. L'orateur du gouvernement vous en a développé les motifs. Vous avez pu en méditer la nature, en rechercher les résultats, en observer les liaisons.

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longue durée des fonctions des tribuns ajoutera à leur expérience dans les affaires.

Une Haute-Cour Impériale, garante des prérogatives nationales confiées aux grandes autorités, de la sûreté de l'Etat et de celle des Citoyens, formera un Tribunal véritablement indépendant et auguste consacré à la justice et à la patrie.

Son siége tutelaire et redoutable sera dans cette enceinte. Les conservateurs du pacte social, les dépositaires des lois civiles, y rassureront l'innocence en faisant trembler le crime qu'aucun asyle ne pourra dérober à la puissance de la nation.

L'Aréopage d'Athènes jugeoit au milieu des ombres, de la nuit. C'étoit un emblême de l'impartial équité. La France aura la réalité de cette image.

La Haute-Cour, placée au sommet de l'Etat, n'apercevra ni les intérêts privés, ni les affections particulières que leur distance fera disparoître.

Elle ne verra que la République et la Loi.

Elle assurera surtout la responsabilité des grandes fonctionnaires, de ceux particulièrement qu'un grand éloignement de la métropole, pourroit soustraire à la crainte de la vengeance des lois.

Elle assurera surtout la responsabilité des Ministres, cette responsabilité sans laquelle la liberté n'est qu'un fantôme derrière lequel se cache le despotisme.

Enfin le Sénatus-Consulte rend l'hommage le plus éclatant à la souveraineté nationale.

Il détermine que le Peuple prononcera lui-même, sur la proposition d'établir l'hérédité Impériale dans la famille de Napoléon Buonaparté.

Il fait plus, et je prie qu'on soit attentif à cette observation, il consacre et fortifie par de sages institutions le Gouvernement que la Nation Françoise a voulu dans les plus beaux jours de la révolution; et lorsqu'elle a manifesté sa volonté avec le plus d'éclat, de force et de grandeur.

La Commission a douc pensé à l'unanimité qu'elle devoit proposer au Sénat d'adopter le projet de Sénatus-Consulte qui lui a été présenté.

Que Napoléon Buonaparté soit Empereur des François.

Et puisse-t-il faire le bonheur de nos arrières-neveux, comme il fera à jamais l'admiration de la postérité !

Ce sentiment nous amène à l'expression de la reconnoissance publique envers les deux Consuls qui, pendant tout le cours de leur haute Magistrature, n'ont cessé de bien mériter de la patrie, et que l'estime du Sénat suivra dans tous les rangs où le bien de l'Etat les portera.

Mais, Citoyens Sénateurs, lorsque vous aurez adopté le projet de Sénatus-Consulte qui vous est présenté, il vous restera encore un grand devoir à remplir envers la patrie.

Le peuple sera consulté sur la proposition de l'hérédité de la dignité Impériale dans la famille de Napoléon Buonaparté.

Nous attendrons avec respect șa décision souveraine sur cette importante proposition.

Mais c'est par le Sénatus-Consulte organique qui vous est soumis, que la dignité Consulaire est changée en dignité Impé riale pour Napoléon, et pour le successeur que les Constitutions actuelles de la République, lui donnent le droit de présenter.

A l'instant où vous aurez imprimé le sceau de votre autorité au Sénatus-Consulte, Napoléon est Empereur des François.

Hâtez-vous de satisfaire la juste impatience des Citoyens, des Magistrats, de l'armée, de la flotte, de la France entière.

Donnez le signal qu'on vous demande de toute parts; et qu'une démarche solennelle proclame l'Empereur.

Votre commission a donc l'honneur de vous proposer à l'unanimité,

Premièrement d'adopter le projet de Sénatus Consulte organique, présenté par les orateurs du Gouvernement;

Secondement, de rendre le décret suivant:

"Le Sénat, en corps, présentera immédiatement après sa séance, le Sénatus-Consulte organique de ce jour, à Napoléon Buonaparté, Empereur des François.

"Le Président du Sénat Cambacères portera la parole."

SENATUS-CONSULTE ORGANIQUE.

Napoléon par la grâce de Dieu et par les Constitutions de la République, Empereur des François, à tous présens et à venir, salut;

Le Sénat après avoir entendu les orateurs du Conseil d'Etat, á décrété et nous ordonnons ce qui suit:

Extrait des Registres du Sénat-Conservateur, du 28 Floréal

an 12.

Le Sénat-Conservateur, réuni au nombre de Membres prescrit par l'article xc de la Constitution; vu le projet de SenatusConsulte rédigé en la forme prescrite par l'article LVII du Senatus-Consulte organique, en date du 16 Thermidor an 10:

Après avoir entendu, sur les motifs dudit projet, les orateurs du Gouvernement, et le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la séance du 26 de ce mois :

L'adoption ayant été délibérée au nombre de voix prescrit par l'art. LVI du Sénatus-Consulte organique, du 16 Thermidor

an 10.

Décrète ce qui suit:

TITRE PREMIER.

Art. 1. Le Gouvernement de la République est confié à un Empereur, qui prend le titre d'Empereur des François.

La justice se rend, au nom de l'Empereur, par les Officiers qu'il institue.

2. Napoléon Buonaparte, Premier Consul actuel de la Répu blique, est Empereur des François.

TITRE II.

De l'Hérédité.

3. La dignité Impériale est héréditaire dans la descendance directe naturelle et légitime de Napoléon Buonaparté, de mâle en må'e, par ordre de primogéniture, et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

4. Napoléon Buonaparté peut adopter les enfans ou petits enfans de ses frères, pourvu qu'ils aient atteint l'âge de dix-huit ans accomplis, et que lui-même n'ait point d'enfans mâles au moment de l'adoption.

Ses fi's adoptifs entrent dans la ligne de sa descendance directe. Si, postérieurement à l'adoption, il lui survient des enfans mâles, ses fils adoptifs ne peuvent être appelés qu'après les descen lans naturels et légitimes.

L'adoption est interdite aux successeurs de Napoléon Buonaparté et à leurs descendans.

5. A défaut d'héritier naturel et légitime ou d'héritier adoptif · de Napoléon Buonaparté, la dignité Impériale est dévolue et déférée à Joseph Buonaparté et à ses descendans naturels et légitimes, par ordre de primogéniture et de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

6. A défaut de Joseph Buonaparté et de ses descendans mâles, la dignité Impériale est dévolue et déférée à Louis Buonaparté et à ses descendans naturels et légitimes, par ordre de primogé. niture et de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

7. A défaut d'héritier naturel et légitime ou d'héritier adoptif de Napoléon Buonaparté ;

A défaut d'héritiers naturels et légitimes de Joseph Buonaparté et de ses descendans mâles ;

De Louis Buonaparté et de ses descendans mâles;

Un Sénatus-Consulte organique, proposé au Sénat par les titulaires des grandes dignités de l'Empire, et soumis à l'acceptation du Peuple, nommé l'Empereur, et règle dans sa famille l'ordre de l'héridité, de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

8. Jusqu'au moment où l'election du nouvel Empereur est consommée, les affaires de l'Etat sont gouvernées par les Ministres, qui se forment en Conseil de Gouvernement, et qui délibèrent à la majorité des voix. Le Secrétaire d'Etat tient le registre des délibérations.

TITRE III.

De la Famille Impériale.

9. Les Membres de la Famille Impériale, dans l'ordre de l'hérédité, portent le titre de Princes François.

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