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famille de Brienne, dans l'armorial récemment publié de l'élection de Bar-sur-Aube: au lieu de azur au lion de gueules, etc., il faut lire d'argent au lion de gueules, etc.

Le 5 mars, l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres a élu ́ deux des collaborateurs de la Revue. M. Antoine Héron de Villefosse, conservateur au Louvre, et M. Longnon, ce dernier est de plus un champenois, né à Montmirail. Tous deux entrent jeunes à l'Institut et ont complètement mérité cette haute distinction par des travaux d'une érudition qui n'est contestée par personne. M. de Villefosse, comme épigraphiste, jouit d'une autorité réelle et M. Longnon, pour la géographie historique n'a pas de rival. Nous sommes heureux et fiers du succès de nos collaborateurs.

Mile Anne de Nettancourt, sœur du comte de Nettancourt dont nous avons mentionné le mariage l'année dernière, a épousé le comte Valsin-Esterhazy, capitaine de cavalerie, fils du général chef de la branche de cette famille hongroise établie en France. Elle est fille du chef de la vieille maison champenoise de Nettancourt. Dreux de Nettancourt accompagna Philippe-Auguste à la croisade. Sa descendance a produit des évêques, des lieutenants généraux, des chevaliers des ordres, des gouverneurs de Châlons. Georges de Nettancourt, gouverneur de Bar, épousa en 1426 Alienor d'Aspremont qui lui apporta la baronnie de Vaubecourt. Jean de Nettancourt commanda la cavalerie à la bataille d'Ivry et fut blessé à celle d'Aumale en dégageant Henri IV. Armes gueules au chevron d'or.

de

Nous avons encore deux mariages champenois à annoncer. Le 16 mars a été célébré à Reims, dans la chapelle de l'Archevêché, celui de Mule Ruinart de Brimont avec M. Ouizille, de Lorient, dont une sœur a épousé M. Gallice, d'Epernay. La mariée est fille du vicomte Charles de Brimont, demeurant au château de Sillery près de Reims, et de Mile Hennessy, nièce du comte de Mareuil. Nous avons déjà plusieurs fois eu à parler de la famille Ruinart de Brimont, l'une des plus honorables de Reims.

Puis le mariage de M. le baron Roger de Sivry avec Mile Suzanne de Montesquieu, fille du baron Charles de Montesquieu, descendant de l'illustre philosophe et chef actuel de la maison de Secondat de Montesquieu, et de Mue Aubelin de Villers, issue d'une des plus anciennes familles de Châlons, et remontant à Guyot Aubelin qui fonda son obit en 1300 à Epernay. Son arrière-petit-fils, bailli de

Châlons en 1438, épousa Marie Le Cerf, fille du procureur général du parlement de Paris. Branches de Voulzy, Miremont, Villers. Maintenue par Caumartin en 1668. M. Aubelin de Villers mourut en 1848, laissant de Louise de Raymond, fille du vicomte de Raymond, intendant militaire, de Euphrosine du Cauzé de Nazelles, Mme de Montesquieu. D'azur au chevron d'argent, accompagné en chef de deux étoiles et en pointe d'un massacre de cerf, le tout d'or.

LE MISSEL PONTIFICAL DE RAOUL DU FOU. Raoul du Fou appartient à la Champagne par son titre d'abbé de Saint-Thierri, qu'il obtint en 1461. La description d'une de ses œuvres artistiques ne sera donc pas ici déplacée, bien qu'elle n'ait pas été exécutée dans et pour l'archidiocèse de Reims. Mais comme ce fut là qu'il obtint sa première dignité ecclésiastique, nous pouvons supposer qu'il y puisa le goût élevé qui distingua toute sa vie, terminée en 1511'.

I.

Le grand séminaire de Poitiers possède, par héritage, un missel d'une haute valeur archéologique. Ce manuscrit n'est pas absolument inconnu, mais on peut le considérer comme inédit. M. Cousseau en a parlé dans son histoire de la liturgie poitevine 2, s'arrêtant plutôt à ses belles miniatures à pleine page, qu'à son texte qui l'a égaré, car, en voyant en tête la messe de sainte Radegonde, il s'est imaginé qu'il avait été écrit pour l'abbaye de Sainte-Croix, tandis qu'il provient certainement de celle de Nouaillé (Vienne). En effet, si les litanies font penser, par les saints qui y sont enregistrés, à un monastère bénédictin du diocèse de Poitiers, l'office de saint Junien spécifie quel est ce monastère et l'abbé (non une abbesse), désigné par ses armes, nomme exclusivement Nouaillé.

Ce précieux missel n'étant pas dans un dépôt public, manque par conséquent de la publicité nécessaire. Peu d'amateurs connaissent son existence, un plus petit nombre a pu de visu en apprécier le mérite. En le décrivant minutieusement, j'aiderai à attirer sur lui l'attention, au risque de déranger le bibliothécaire qui, d'ailleurs, se prête toujours de fort bonne grâce aux exigences des amateurs. Cependant, pour ne pas abuser de sa patience, j'ai préféré en demander communication directement à Mgr Bellot des Minières, qui s'est empressé de le mettre à ma disposition. Qu'il trouve ici l'expression de ma gratitude, à laquelle se joindra, je n'en doute pas, celle non moins sentie de mes lecteurs.

II.

Les liturgistes ont classé les misssels du moyen-âge en deux

1. Fisquet, La France pontificale, Reims, p. 287. 2. Mém. de la Soc. des Antiq. de l'Ouest, t. III.

3. La barbe suffit à éviter toute confusion.

catégories distinctes: pléniers1 et non pléniers. Le missel plénier devait son nom à son contenu, car on y trouvait, comme dans les missels modernes, tout ce qui se disait à la messe, le prêtre répétant à basse voix, aux grand'messes, la partie que le chœur chantait. Au contraire, dans le missel non plénier n'étaient pas insérées les prières chantées par le chœur, mais simplement celles que le prêtre célébrant devait réciter. Le premier servait indifféremment à toutes les messes, tandis que l'usage du second était limité aux seules messes à note, pour employer l'expression du temps.

Une autre distinction me semble indispensable. Il faudrait créer deux catégories particulières de missels les uns usuels, servant individuellement ou conventuellement; les autres pontificaux, .exclusivement affectés aux messes célébrées solennellement, soit par un évêque, soit par un abbé, ces prélats pouvant officier avec les insignes pontificaux. Le missel se ressentait du luxe qui accompagnait et rehaussait la fonction, mais il offrait aussi cette partieularité qu'il ne contenait pas toutes les messes, seulement celles où le prélat pouvait officier, ce qui allégeait d'autant le volume. De ce genre était le missel de l'évêque de Poitiers, commandé par Jean Juvénal des Ursins et est celui de Nouaillé, qui nous occupe.

III.

Qu'on jette un coup d'œil d'ensemble sur les trois parties, qui le composent, on verra aussitôt quelles lacunes il renferme. Certains offices ont été exelus systématiquement : ils appartiennent soit au commun, soit aux fêtes moindres, ou encore aux dimanches ordinaires. Le rédacteur n'a donc gardé que les solennités principales de l'année, les dimanches réservés et la semaine sainte. La première partie comprend les fêtes du premier dimanche d'Avent au jour des Morts, en tout dix-sept messes propres, plus celle de la Vierge dite de Sabbato. Dans la seconde partie sont rangées les intonations du Gloria et du Credo, les préfaces et Pater, enfin le canon. La dernière partie reprend la suite des dimanches de l'Avent, y ajoute ceux du Carême, la semaine Sainte et termine par la messe de saint Junien.

IV.

Mes remarques, passant à la synthèse, se résument ainsi : Le fond est romain, mais avec additions propres à la France, même dans l'ordinaire de la messe; c'est ce qui constitue le rite romano-gallican. Ainsi le graduel conserve son nom primitif de répons, responsorium; il n'y a pas d'Ite missa est à la messe de minuit, parce que laudes doit suivre; à Noël, l'épître est précédée d'une

1. Voir du Cange au mot Missale plenarium.

leçon tirée d'Isaïe; les litanies s'ouvrent aux saints de l'ordre ou de la contrée, les fêtes de la Vierge admettent un Gloria farci. Je constate trois Kyrie divers, un pour les fêtes de Notre-Seigneur, un spécial pour la Fête-Dieu, un pour les fêtes de la Vierge. Chaque fête entraîne avec elle un sentiment de joie, de là les proses; la tristesse devant le bannir, le jour des Morts, le Dies ira ne se dit pas, c'était logique. On reconnaît encore les désignations françaises dans les mots officium et magna missa. Le rit français se constate aussi à la communion du Vendredi saint et à la triple invitation d'allumer les cierges, le Samedi saint, avant la messe.

J'ai relevé minutieusement les passages et les textes qui m'ont paru devoir intéresser au triple point de vue de la liturgie, de la poésie et de la légende, me contentant d'indiquer ce qui a été édité ailleurs. J'y reviendrai dans un autre travail.

Enfin trois nouveautés méritent d'être signalées : ce sont les messes propres de la Conception, du saint Suaire et de la sainte Croix. Les deux premières caractérisent la dévotion courante du Ive siècle, la dernière suppose un culte local, peut-être à cause de la relique du saint Sang, dont était fière l'abbaye de Nouaillé 2.

V.

Je distingue trois époques dans le manuscrit. Le missel primitif commence au premier dimanche d'Avent et se poursuit jusqu'aux préfaces notées (fol. 6-28), puis il reprend au folio 39 et s'arrête à la messe de saint Junien (folio 73 verso). En haut du folio 6 est inscrit le chiffre J. à l'encre rouge. Cette partie est datée par un écusson peint au bas de cette même première page. Je l'attribue à Raoul du Fou, trente-sixième abbé de Nouaillé, selon dom Fonteneau; trente-neuvième selon le Gallia christiana (t. II, col. 12431244); il gouverna de 1473 à 1510. Le missel, comme style général, convient bien à cette époque, c'est-à-dire la fin du xve siècle ou les débuts du suivant. L'écu ogivé a été repeint, mais il y a encore trace de la mitre, à fanons pendants, qui le surmontait et les deux supports sont analogues à ceux qui sont sculptés au-dessus de la porte du prieuré d'Availles, près Nouaillé. Ces supports sont deux anges agenouillés et sceptrés, à ailes d'azur, aube rose et dalmatique de drap d'or bleu, sur une terrasse de sinople3.

1. Voir le mot jubilus, dans Du Cange: la prose ajoute des paroles au neume prolongé.

2. Bull. du Com, des trav. historiq., Archéologie, 1884, p. 95. 3. Le Gallia christiana (t. II, col. 1243) attribue un bréviaire à Raoul du Fou: Ad monasterii usum edi curavit breviarium, an. 1473 ». Edi dénoterait plutôt un bréviaire imprimé. Thibaudeau (Abrégé de l'hist. du Poitou,

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