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en lu montrant sa machine décrite et gravée dans le Traité de la Magie naturelle, par J.-B. Porta.

Il a été plus heureux dans une invention que personne ne lui a disputée. Le 27 septembre 1799, il obtint un brevet d'invention pour sa « lampe docimastique » fondée sur les propriétés de l'éolipyle et destinée à l'essai des mines et métaux, comme également aux usages domestiques. Après diverses transformations, cette lampe docimastique est devenue, de nos jours, la lampe à souder des plombiers.

Doué d'une imagination inventive, Bertin avait conçu le projet de reliures vernies pour lesquelles il avait aussi pris un brevet en 1811. Aidé du comte Frochot, préfet de la Seine, qui s'intéressait à lui, il établit un vaste atelier dans les anciens bâtiments du Châtelet; mais toujours malheureux dans ses entreprises, il fut bientôt obligé de l'abandonner. Les livres, recouverts d'un cartonnage verni avec miniatures, dessins gravés, peints ou incrustés, étaient assez agréables à l'œil, mais n'offraient pas de solidité.

IV

Nous avons suivi Bertin comme sténographe et comme inventeur; voyons-le maintenant comme traducteur et littérateur.

Pierre Bertin est assurément l'un des écrivains les plus laborieux qu'ait possédé la France'. Ses œuvres, traductions et opuscules, ne s'élèvent pas à moins de cinquante ouvrages formant plus de cent volumes 2.

Ayant acquis une connaissance approfondie de la langue anglaise, il voulut, à l'exemple de Voltaire, faire connaître à ses contemporains les institutions parlementaires du RoyaumeUni, et les œuvres des plus célèbres écrivains anglais.

C'est en 1788 qu'il débuta comme traducteur. Etonné de l'oubli de Letourneur qui n'avait pas compris dans les œuvres choisies du célèbre orateur des Nuits, les Satyres d'Young sur l'Amour et la Renommée, il en fit une traduction. La Vie de Bacon, par David Mallet, et un ouvrage de William Paley, sur la Justice criminelle et sur le Jury, ont été traduits par Bertin

1. Larousse.

Dict. du XIXe siècle. V. Bertin.

La Biographie des Provins-lettre, 1880,

2. Quérard, France Littéraire, t. I, p. 388, Hommes Vivants, Didot, t. Ier, p. 319,- Fourtier, p. 56, ont donné la liste complète des œuvres de Bertin.

avant 1789. De 1795 à 1804, il donna l'Histoire des principaux Lazarets de l'Europe. Cette traduction, dont on trouve des exemplaires séparément, fait partie du Recueil des Mémoires sur les Etablissements d'Humanité publié par ordre du Ministre de l'Intérieur. Il fit paraître, en 1817, la quatrième édition de la Grammaire Française et Anglaise, de Dubieff.

Bertin avait préparé, dans sa jeunesse, une traduction complète de Tom Jones; son but était de venger l'ingénieux philosophe Fielding, des mutilations de Laplace. Son manuscrit était presqu'achevé lorsqu'il fut devancé par des concurrents plus diligents, entr'autres par Davaux en 1794. Forcé de renoncer à son entreprise, qui aurait pu lui procurer un succès durable, il traduisit une multitude de romans anglais.

En 1814, Berlin salua le retour des Bourbons et, comme tant d'autres, crut devoir attaquer le pouvoir impérial qui venait d'être renversé; il écrivit une brochure intitulée : Le Cri de l'Indignation ou l'Ami des Bourbons'. Mais son zèle, sans doute, ne fut pas récompensé, puisqu'arrivé à l'âge où le repos devient nécessaire, cet écrivain laborieux et digne d'un meilleur sort fut forcé de continuer le métier ingrat et pénible de traducteur.

Le

Citons encore parmi ses opuscules: La Comiphonie ou les Femmes dans le délire (Paris, 1802, in-12 avec fig.). Tom Jones des Enfants, (Paris, 1812, in-18 avec fig.)

Et parmi ses autres traductions: L'Eté du Nord (Northen Summer) traduit de John Carr, (Paris, 1802, 2 vol. in-80). Les Misères de la vie humaine, traduit de James Baresfort, (Paris, 1818, 2 vol. in-8°, fig. sur bois). Les Curiosités de la Littérature, traduit d'Israéli, (Paris, 1819, 2 vol. in-8°)*.

V

En 1875, dans une courte notice intitulée : Le Sténographe Bertin, né à Provins, nous indiquions, d'une manière certaine, le lieu de naissance de Théodore-Pierre Bertin.

1. Dict. de la Conversation.

2. Traduction de J. Howard, Paris, 1799-1804. 15 vol. in-8°.

3. Paris, 1814. Dabo Blanchard, in-8° de 48 pages.

4. Plusieurs des ouvrages de Pierre Bertin ont été attribués, à tort, à Louis-François Bertin, sou homonyme qui, comme lui, s'occupa de traduction d'ouvrages anglais.

5. Arcis-sur-Aube, 1875, 3 pages in-8°.

1

Ce travail, reproduit en caractères abréviatifs dans la Gazette stenographique de Seine-et-Marne et, plus tard, en langue allemande, dans les Archiv für Stenografie, devait être le point de départ de l'hommage public rendu depuis à la mémoire du célèbre sténographe.

Dans sa réunion tenue à Laguy, le 16 octobre 1881, le cercle sténographique de la Brie décidait qu'une plaque commémorative serait placée à Provins, sur la maison de naissance de Bertin, en souvenir des services rendus par lui à la cause sténographique. »>

Une souscription fut ouverte et la ville de Provins, s'associant à cette généreuse pensée, s'inscrivit aussitôt pour une somme de trois cents francs.

La municipalité, d'accord avec les membres du Cercle fixa au lundi 22 mai 1882, l'inauguration du monument. Par les soins d'une commission spéciale, des fêtes furent organisées : concours de gymnastique, marches militaires, bals, illuminations, attirèrent la population de la ville et des pays voisins qui se pressait dans les rues enguirlandées de la vieille cité des roses.

Des conférences eurent lieu, ce jour-là, dans la salle du théâtre, sous la présidence de M. Lenient, professeur à la Sorbonne et député de l'arrondissement, en présence de la municipalité, des fonctionnaires et des délégués du Cercle sténographique: MM. Fleury fils, président; Fleury, père, Inspecteur d'Académie, le docteur Thierry-Mieg, Jules Grenier, etc... Une foule nombreuse, un public d'élite, occupait l'intérieur de la salle.

Après deux charmantes allocutions de MM. Lenient, député, et Duflos, Sous-Préfet, MM. Fleury, père et fils, firent, tour à tour, l'éloge de Bertin et de la sténographie; puis l'Assemblée se transporta rue aux Aulx, où fut solennellement découverte

1. Février et mars 1878. Journal mensuel dirigé par M. Jules Grenier, officier d'Académie, d'après la méthode des frères Duployé.

2. Publication mensuelle publiée à Weimar, par le Dr Paul Mitzchke, archiviste du Grand-Duc de Saxe-Weimar. No 360, décembre 1878.

3. Dans son assemblée générale du 30 avril 1882, le Cercle sténographique conféra à M. Choullier le titre de Membre d'Honneur. - Au mois de novembre de la même année, cette société prit le nom d'Union sténographique de Seine-et-Marne. Elle a, actuellement, pour Président d'Honneur M. le comte Foucher de Careil, sénateur, ancien Préfet de Seine-et-Marne, et, pour Président effectif, M. Schindler, de Provins. (Note de l'Editeur.)

l'inscription suivante gravée, en lettres d'or, sur une plaque de marbre noir encastrée au-dessus de la porte de la maison portant le numéro 14 :

HONOS PATRIÆ

PIERRE-THEODORE BERTIN

INTRODUCTEUR DE LA STENOGRAPHIE EN FRANCE
EST NÉ DANS CETTE MAISON LE 2 NOVEMBRE 1751

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En participant à l'œuvre entreprise par le Cercle sténographique, la ville de Provins a montré, une fois de plus, qu'elle aimait à reconnaître, quand il se révélait, le mérite de ceux de ses enfants qui, dans la mesure de leur force, ont contribué à l'avancement des sciences, des lettres ou des arts, et sont restés l'honneur du pays. Il s'agissait de perpétuer le souvenir d'un compatriote méritant, d'un citoyen utile, qui a su non-seulement faire faire un grand pas à l'art sténographique, mais encore acquérir, par ses travaux divers, des droits à la reconnaissance de tous. Bertin, sténographe, littérateur et inventeur, est un de ces hommes dont la vie, toute de labeur et de persévérantes recherches, peut être donnée en exemple. aux amis du progrès.

Espérons que l'ancienne capitale de la Brie, fière de toutes. ses gloires, voudra aussi un jour honorer la mémoire du « doux chantre de la Voulzie », si Provinois par le cœur, et que bientôt la statue d'Hégésippe Moreau se dressera rayonnante sur l'une des places publiques de Provins!

ERNEST CHOULLIER.

DE DOM GUYTON EN CHAMPAGNE

Le portail de l'église est profond avec piliers. M. l'abbé y a une porte de communication: son logis est au midi. C'est aujourd'hui monseigneur Vauréal', évêque de Rennes, ambassadeur en Espagne, qui n'accommode pas les prieur et religieux, et les laisse, disent-ils, à la mercy d'un agent ou intendant qui n'entend du tout aux affaires. Le service divin se fait bien à Jony il y a de bonnes voix qui ne s'épargnent pas. Les religieux marquent dans l'église et dans le cloitre l'endroit des sépultures de leurs confrères par un carreau de brique sur lequel est gravé les noms et surnoms des religieux et le temps de l'obit. La sacristie au nord assez propre. Il y a des reliques, entr'autres un buste dont la tète porte en étiquette: Sancti Marci et Marcelliani, quoi qu'il n'y ait qu'un chef. Il y a des saints de figure antique. Beaux cloîtres voûtés dans les quatre parties en ogive. Le chapitre qui a trois fenêtres au levant est bien boisé de côtés, mais pas au fond. Au devant du réfectoire, une belle rotonde voûtée sur laquelle il y a une fontaine. Le réfectoire est beau, long, large, sans pilliers, bien voûté, bien éclairé : une chaire dont l'escalier est dans la muraille, mais la lecture se fait à la table du prieur. Le dortoir est beau et assez large. De l'horloge il y a un fil de fer qui répond dans le milieu du dortoir à un timbre qui réveille forcément à deux heures après minuit pour l'office divin. Du dortoir on monte par 4 ou 5 marches à la salle de la bibliothèque, belle, bien boisée, parquetée. Il y a de bons livres, des manuscrits en velin, deux gros globes. Du dortoir, un peu au-dessus de la bibliothèque, on va à l'infirmerie, dont les fenêtres donnent sur une chapelle d'où les malades entendent la messe. L'appartement du prieur qui a issue au dortoir, est fort commode.

* Voir page 13, tome XXI, de la Revue de Champagne.

1. Louis-Gui Guérapin de Vauréal, ambassadeur en Espagne, évêque de Rennes de 1732 à 1758.

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