placé leur choeur dans le sanctuaire tout près du maître-autel : il est petit et étroit et c'est sans doute pour cela qu'entre chaque siège il n'y a ni appui, ni porte close. La sacristie boisée proprement, bien fournie de linge et argenterie, reliquaires avec reliques il y en a une de cuculla S. Bernardi. Le tout tenu avec beaucoup d'ordre. Au-dessus de la table où s'habille le prêtre, est un bon portrait de saint Bernard. La bibliothèque est bien rangée et a de l'agrément par la belle situation de l'abbaye : il y a un volume de sermons en français de saint Bernard et le Genus illustre S. Bernardi du Père Chifflet. L'abbaye a la seigneurie du bourg. Il y a un soleil de figures anciennes, en émail, soutenu par deux anges. Il y a cinq religieux. Dans une salle il y a un bon portrait de saint François de Sales. Dans le réfectoire, il y a au dos de la place du supérieur deux tablettes, sur l'une, les armoiries de la maison et au-dessus on lit: Illustrissimus Gerardus de Rosillon totius Burgundiæ multarum que aliarum provinciarum princeps', cujus stemma hic depingitur, hujus sacri monasterii Pultheriensis fundator viam universæ carnis ingressus est anno octogesimo. Sur l'autre tablette: Sacri monasterii Pultheriensis ad romanam curiam immediate pertinentis insignia. Ce sont deux clefs croisées avec une épée qui élève la pointe en haut au milieu. Je remarquay au bas d'une estampe de saint Jérôme multos sacros libros sua manu descripsit. Il y a un ancien manuscrit de la vie de saint Paulin, évêque de Nole.

J'allay coucher à Châtillon où je fus obligé de loger à l'enseigne de Saint-Maurice, où je vis un ancien portrait portant au bas: Cytoien romain Guillaume Philandor, chanoine de Rodez, il était né à Chatillon et fort estimé du cardinal d'Armagnac ". Il y avait beaucoup de prisonniers. Le lendemain je visitais à la chartreuse de Lugny. L'église a été embellie tout à neuf, le rétable, les niches, grand chandelier à deux branches au bas de l'autel qui ont au bas pour armoiries le saint nom de Jésus : quatre autres chandeliers de croix fort beaux, à feuilles d'ar

1. Gérard II, fut le dernier comte de Roussillon il légua ses états à Alfonse, roi d'Aragon, et mourut en 1172.

2. Châtillon, chef-lieu d'arrondissement de la Côte-d'Or.

3. Evidemment Georges d'Armagnac, archevêque de Toulouse, puis d'Avignon, cardinal (1501-1585).

4. Lugny, canton de Recey (Côte-d'Or). Le château a été restauré en 1770, appartint à la maison de Damas et passa au xve siècle dans celle de Lévis.

gent, pour le prix de 200 livres chaque. Il y a huit religieux : dom Alexis, ancien, qui a un valet pour le servir, le père prieur dom François, Bonhaume, de Beaune, dom Ambroise, bon ouvrier en cire et dorure, tous raisonnables et de bonne conversation.

Je lus in calendario benefactorum domus Luvigniaci, anno 1598 : « Inscriptio tumuli fundatoris nostri Hic jacet reverendus in christo pater dominus Galterus olim Lingonensis præsul' et hujus domus fundator, qui diem suum feliciter clausit extraneum anno domini 1178. »

Le 20 octobre, samedy, je me rendis de Lugny à l'abbaye d'Auberive. L'église et la sacristie sont mal bâties, mal faites. L'église lambrissée, induement ornée dans toutes ses parties. M. l'abbé a son entrée au midy près d'une chapelle, ce qui donne lieu à dissipation dans le choeur et à l'entrée par là dans l'église de tous, son domestique, gouvernante, servantes, valets, etc., contre la régularité et le bon ordre. Le sanctuaire qui est plus bas que le reste de l'église est voûté : le SaintSacrement repose dans le coin de la muraille du levant, du côté de l'Epitre, dans une châsse de pierre ouvragée, fermée d'un grillage de fer, un rideau dessus point de lampe clairante. Les femmes ont un passage de l'église sortant du logis de M. l'abbé pour aller dans les cloîtres et les religieux de leur cloitre audit logis par devant le Saint-Sacrement, ce qui est d'une pratique continuelle et fort scandaleuse. Il y a deux côtés de cloitre neufs, bien voûtés et pavés: on travaille à faire les deux autres semblables et des appartements par dessus au couchant. Le dortoir est ancien, propre et commode il y a trois ou quatre chambres à feu. La seconde contigue à l'église, sert de bibliothèque il y a quelques livres mal proprement tenus, mais l'armoire qui y est renfermant les tiltres de l'abbaye est à bonne serrure et les titres sont bien en ordre avec des répertoires bien reliés et bien écrits. Il y a aussi quelques cahiers de l'histoire chronologique des abbés soit réguliers, soit commanditaires, d'où j'ai tiré ce qui suit :

L'an 1263, la collégiale de Châteauvilain' fondée par Jean,

1. Gautier de Bourgogne, évêque de 1163 à 1179.

2. Abbaye cistercienne, fondée en 1135 par Guillenc, évêque de Langres; canton d'Aubcrive.

3. Chef-lieu de canton de la Haute-Marne, donna son nom à une ancienne famille éteinte par le mariage de la dernière héritière dans la maison de Thil-en-Auxois.

sire dudit lieu, l'un des 300 nobles chevaliers qui eurent les yeux crevés à la conquête de la Terre Sainte l'an 1261.

En 1443, sous l'abbé Simon, les salus d'or avaient cours, valant 2 1. 15 s. Ledit abbé fut pris par le bastard de Bourbon. Auberive perdit le contre scel de son église. Jean de Vergy 1 chassa les Anglais de Nogent, Montigny et Coiffy.

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L'an 1434, les gens de M. de Varambon, en garnison à Chaumont, prirent près de Marac trois religieux d'Auberive, menés en prison à Chaumont et rachetés pour 8 hémines bléavoine.

L'an 1452, la livre d'estain ne valait que 6 blancs, 4 deniers. L'an 1468, Guy Bernard, 85e évêque de Langres, acheta le domaine de Mussy '.

L'an 1476, il établit des chanoines dans l'église Saint-Jean de Chaumont.

L'an 1639, le nonce extraordinaire du pape, Scoli, passant à l'abbaye de Clairvaux, y célébra pontificalement le grande messe le jour de saint Bernard. Il permit l'entrée des femmes dans l'église mais ayant trouvé les portes ouvertes, clles entrèrent dans toute l'abbaye.

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Dans un autre livre, nous avons extrait ceci : Benedictio unguenti ad Tineam. Benedic, Domine, hoc unguentum sicut benedixisti unguentum quod tibi obtulit Maria Magdalena in domo Symonis leprosi quando pedes tuos lacrymis lavit et capillis suis tersit, et unguento alabastro unxit, et peccata sua, quia dilexit multum sibi dimisisti. Ita tuam immensam deprecor clementiam, Domine, ut sacrifices et benedicas hoc unguentum ad sanandam Tineam; et per tuam magnam virtutem fugiat atque discedat omne malum et omnis infirmitas per intercessionem beatorum Cosma et Damiani, amen. Pater noster IIII; Ave Maria III, in nomine patris et filii et spiritus sancti amen. »

Il y a au dehors du clos régulier d'Auberive une chapelle contiguë fort propre, paroisse sur le vocable de Sainte-Anne. Le jardin est grand, fort beau, bien entretenu. Dans la sacris

1. Jean de Vergy, sénéchal de Bourgogne, en 1332, mort en 1418. 2. Canton de Langres (IIaute-Marne).

3. Mussy-l'Evêque, où les prélats langrois curent dès lors leur résidence d'agrément.

tie des ornements neufs assez propres. Au dortoir où loge le Prieur, il a pratiqué depuis peu dans une chambre au couchant qui a une petite fenêtre sur le sanctuaire de l'église un oratoire pour réciter les vigiles la nuit en hiver. Il y a des croix anciennes fort belles, travaillées en filigranne fin, depuis peu raccomodées fort adroitement. Il y en a une en or. M. l'évêque de Meaux, abbé commanditaire et les religieux ne sont pas amis le temporel n'en vaut mieux. Le portail de l'église est lambrissé il y a sur la droite plusieurs tombes élevées que l'on dit couvrir les corps de plusieurs archidiacres de Langres: une grille de fer ferme la nef entre le chœur d'abbé et de prieur, quoique la nef soit assez large.

En passant au village de Rouvres ', je vis l'église qui est en bon état chapelle au midi de M. de Rouvres au-dessus du tableau de l'autel sont les armoiries de MM. Bruslart (Madame la mère était une Bruslart 2), et ailleurs celles de M. de Tissart, comte de Rouvres. Cette maison a son charnier dans cette chapelle, sur la muraille du côté de l'Evangile est un drap de velours noir sur lequel est un cœur d'argent qui renferme le cœur du susdit comte mort à Provins en se rendant à Paris. Le château est beau, couvert de laves, les fossés, les jardins sont grands. Dans l'église d'Aubepierre beaucoup d'instructions écrites sur les murailles, les commandements de Dieu et de l'Eglise sur la grande porte en dedans.

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L'abbaye de Longuay', autrefois des chanoines réguliers de Saint-Augustin, est au-dessus d'Auberive, de Rouvre et d'Aubepierre, en plaines, bon air, bonnes eaux, bien dégagée des bois. Elle a une fort belle église, réparée à neuf, beau chœur et sanctuaire. Les deux chapelles appliquées derrière les places d'abbé et de prieur, ont en l'un, au nord, une grande figure sur les gradins d'autel inscrite: Sanctus sanctorum, sur bois en carnation, fort bien sculptée : Et en l'autre, au midy, une figure de pareille hauteur qui est inscrite: Mater dolorosa,

1. Canton d'Auberive (Haute-Marne).

2. Madeleine Brulart, fille de Noël, baron de Sombernon, comte de Rouvres, conseiller au grand conseil, et de Jeanne Gruyn, marié le 8 mai 1698, à Louis de Tissart, seigneur de Biche, Toucheronde, etc.

3. Canton d'Arc (Haute-Marne).

4. Abbaye cistercienne, diocèse de Langres; commune de Dancevoir, canton d'Arc. Subsistent la grange dimière et une chapelle avec de bonnes peintures.

qui vient du même ouvrier Bouchardon, fameux sculpteur de Chaumont, très bien faite. Le balustre de pierre qui est à hauteur d'appui et distingue la nef du haut de l'église, est surmonté d'une bande de fer à pointes dorées. M. l'abbé qui a derrière l'église son hôtel, grand, beau et commode et y réside, a son passage pour l'église par l'ancienne sacristie sous le dortoir. Il devrait s'en servir seul, mais tous ses gens, hommes ou femmes n'en prennent pas d'autres, ce qui est scandale. On dit qu'il tire bien 9,000 livres de son abbaye. La sacristie est bien meublée en beaux ornements, linges, reliquaires et reliques: deux croix moyennes renferment du bois de la vraie croix. En argenterie, belle croix ayant pierreries: un petit reliquaire en façon de jonc, vermeil, où on disait qu'il y a un peu du roseau de Notre-Seigneur; un buste de bois. doré où il y a un chef et l'étiquette: caput S. Agnetis virginis et martyris, un grand morceau de la tunique de saint Bernard, dont le prieur et la communauté donneront un morceau avec attestation signée d'eux tous. Aux crédences qui sont de chaque côté du maitre-autel, il y a deux portraits de saint Benoit et de saint Bernard, que l'on dit de bonnes pièces. Ce saint Bernard m'a bien plu: il a le chaperon cousu à la cuculle. Le maîtreautel est le premier élevé en l'honneur de notre père saint Bernard, consacré par saint Pierre, archevêque de Tarentaise', mort à l'abbaye de Belleval, diocèse de Besançon. Plusieurs os de saints dans une bourse à la sacristie sans noms. Il y en a aussi dans la chambre du Prieur dans des bourses d'autel. Il y a aussy une petite boite en argent pour porter dans leurs fermes le Saint-Sacrement, dont une grande et belle bourse brodée d'or. Il y a dans le dortoir quatre grandes armoires pleines de livres et dans leurs archives aussi placées dans l'ancien chauffoir qui est auprès : ceux-ci sont à terre les uns sur les autres qui se perdent ceux des armoires sont pleins de poussière. J'en ay remarqué cependant de rares, mème des manuscrits fort beaux sur velin, comme un martyrologe de règle de saint Benoit, ayant à la fin les obits et mémoires et confraternité: un autre in-folio: c'est d'abord la vie de saint Bernard, par Guillaume, abbé de saint Thierry, un sermon au jour anniversaire de sa déposition, un sermon de saint Hylaire, évêque d'Arles, sur saint Honoré, accommodé à saint Bernard; la narration comment le roy Amaury de Jérusalem, a envoyé à Clairvaux la vraie croix : quomodo rex Jerusalem sanctam cru

1. Saint Pierre, archevêque de 1141 à 1174.