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à Vérone (1822), entra en Espagne le 7 avril 1823. Elle eut peu d'occasions de combattre et ne rencontra de résistance sérieuse qu'à Cadix dont elle fit le siége. Le 31 août nos troupes s'emparèrent, après un brillant assaut, de la forte position du Trocadéro, et ce succès détermina la reddition de la ville. Rétabli par nos armes, Ferdinand VII n'en écouta que moins nos conseils, et fit peser un joug plus dur sur son royaume. Cette expédition ne put donc, comme l'avait espéré Chateaubriand, alors ministre, faire rejaillir sur la branche aînée des Bourbons assez de gloire militaire pour la réconcilier avec le pays. Le ministère et la congrégation y puisèrent une confiance fatale que les élections augmentèrent encore, parce qu'elles ne laissèrent entrer à la Chambre que dix-neuf députés libéraux.

Courier, Béranger. Mais derrière eux et avec eux était le pays tout entier qui applaudissait aux arrêts de la magistrature, devenue libérale depuis que la congrégation était menaçante, et qui surtout lisait avidement les pamphlets de Paul-Louis Courier et les chansons de Béranger. Béranger continuait, même en prison, à chansonner le Gouvernement, à attaquer cette union dangereuse du trône et de l'autel. Béranger évoquait les glorieux souvenirs de l'Empire et réveillait le patriotisme des Français. Aussi, lorsqu'il mourut, en 1857, l'empereur Napoléon III voulut que l'État fît les frais des funérailles de ce poëte populaire et national.

Charles X, M. de Villèle.- La mort de Louis XVIII, roi prudent et modéré, parut devoir assurer le triomphe des ultra-royalistes en faisant passer la couronne sur la tête de son frère Charles X (1824). Un de ceux qui, en 1789, avaient donné le signal de l'émigration, depuis longtemps ennemi du nouveau régime, ce prince se croyait appelé à faire revivre en France la foi à l'ancienne monarchie. Dès les premiers jours de son règne, il fit demander aux Chambres par M. de Villèle une indemnité d'un milliard pour les émigrés, le rétablissement des couvents de femmes, celui du droit d'atnesse, et la dure loi du sacrilege contre les délits commis dans les églises. Les députés accordèrent tout; il n'y eut de résistance qu'à la Chambre des pairs, qui par cette opposition gagna quelques jours de popularité.

Au mois de mai 1825, le nouveau roi fit renouveler en sa faveur l'antique cérémonie du sacre. A cette fête royale répondit une manifestation populaire. Un des chefs du parti libéral, le général Foy, venait de mourir. Cent mille personnes suivirent ses funérailles, et une souscription nationale assura l'avenir de ses enfants.

La conduite du ministère avait irrité contre lui la population de toutes les grandes villes. Paris surtout lui était hostile. A une revue de la garde nationale, que le roi passa lui-même au mois d'avril 1827, le cri « Vive la charte! retentit dans tous les rangs. Le soir même, la garde nationale fut licenciée. C'était une faute, car la royauté, en achevant d'éloigner d'elle toute la classe moyenne, se trouva avec ses seules forces en face d'une révolution prochaine. Le ministère

Villèle vécut huit mois encore; mais les élections générales qu'il provoqua imprudemment envoyèrent à la Chambre une majorité libérale devant laquelle il tomba.

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Bataille de Navarin. Expédition de Morée. · Tous les partis manifestaient leurs sympathies pour un peuple qui défendait avec héroïsme son indépendance, le peuple grec. Cette nation, si célèbre dans l'antiquité, venait de secouer le joug énervant des Turcs, mais elle allait succomber lorsque l'Angleterre, la France et la Russie s'unirent pour la sauver (5 juillet 1827). Les trois flottes alliées écrasèrent à Navarin la marine turque (20 septembre 1827).

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La France envoya de plus en Morée un corps d'armée commandé par le général Maison qui reprit en peu de temps toutes les villes occupées par les Turcs. La Grèce était délivrée. Modération de M. de Martignac. Le 4 janvier 1828, un nouveau cabinet avait été formé; il porta le nom du ministre le plus influent, M. de Martignac, et dura dix-huit mois, jusqu'au 8 août 1829. Ses intentions furent droites, libérales, et ses actes généralement approuvés. Il abolit la censure qui pesait sur les journaux, chercha à prévenir les fraudes électorales, et plaça sous le régime commun les établissements d'éducation dirigés par des ec

clésiastiques. Malheureusement Charles X, toujours livré aux funestes conseils de la congrégation, supportait son ministère sans l'aimer, et n'acceptait qu'à contre-cœur les ordonnances soumises à sa signature. Il se crut assez fort pour jeter le défi à la France, et, renvoyant son ministère libéral, il le remplaça par un ministère où dominaient MM. de Polignac, de Labourdonnaie et de Bourmont. Le ministère Polignac. Ces choix étaient une déclaration de guerre de la royauté au pays : une crise devenait inévitable. Pendant dix mois, la presse de l'opposition répéta au gouvernement qu'il aboutirait forcément à un coup d'État, et les députés déclarèrent dans leur réponse au discours du roi que le ministère n'avait pas la confiance du pays. La Chambre fut dissoute, mais les deux cent

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vingt et un signataires de l'adresse furent réélus, et la royauté vaincue dans les élections se décida à faire elle-même une révolution.

Prise d'Alger.

- La conquête d'Alger, entreprise pour venger un affront fait à notre consul, parut fournir une occasion favorable. Une armée de 37 000 hommes, commandée par le comte Bourmont, s'embarqua à Toulon et descendit le 14 juin sur la côte africaine. Les Algériens furent battus et dispersés dans les montagnes. Le 4 juillet nos troupes s'emparaient du fort appelé le Château de l'Empereur, qui domine Alger et dont la chute amena celle de la ville. Le trésor amassé par les deys paya les frais de cette expédition qui plantait notre drapeau civilisateur sur la terre d'Afrique, d'où il n'a plus été enlevé.

La révolution de 1830. —Le 26 du même mois parurent les fameuses ordonnances qui supprimaient la liberté de la presse et créaient un nouveau système d'élections. Paris répondit à cette provocation par les trois mémorables journées des 27, 28 et 29 juillet 1830. Malgré la bravoure de la garde royale Charles X fut vaincu et obligé de quitter le royaume (29 juillet-16 août). Après les premiers jours d'août, on éleva au trône le chef de la branche cadette des Bourbons, le duc d'Orléans, qui prit le nom de Louis-Philippe Ier. Six mille victimes étaient tombées mortes ou blessées. La France salua de ses unanimes acclamations cette séparation d'avec les hommes et l'affront de 1815. En reprenant le drapeau tricolore, elle semblait reprendre aussi possession d'elle-même, avec toutes ses gloires et toutes les libertés légitimes.

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Le roi Louis-Philippe. La Fayette avait dit en montrant le duc d'Orléans au peuple, à l'hôtel de ville : « Voilà la meilleure des républiques. Beaucoup avaient pensé comme la Fayette. Les vertus privées du prince, sa belle famille, ses antécédents libéraux, les souvenirs soigneusement ravivés de Jemmapes et de Valmy, ses habitudes bourgeoises, l'éducation populaire donnée à ses fils dans nos écoles publiques, tout encourageait les espérances.

Le duc d'Orléans, chef de la branche cadette de la maison de Bourbon, fut proclamé roi le 9 août, après qu'il eut juré l'observation de la Charte revisée. Les changements étaient peu importants: abolition de l'hérédité de la pairie, fixation du cens d'éligibilité à 500 francs et du cens électoral à 200. Les droits politiques restaient conférés à la fortune, plutôt qu'à l'intelligence, et la masse de la nation en était exclue. Mais en 1814, Louis XVIII avait donné une Charte octroyée par son bon plaisir; en 1830, Louis-Philippe en acceptait une qui lui était imposée par la Chambre des députés. Dans ce fait était toute la révolution.

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1830-1831. Ministère de M. Laffitte. L'ébranlement causé par la chute de la Restauration avait donné une force inattendue au parti républicain. Il fallut d'abord compter avec lui. On le flatta

quelque temps dans la personne de deux hommes que les républicains respectaient, le général la Fayette que l'on nomma commandant de toutes les gardes nationales de France et M. Laffitte qui fut appelé au ministère. On exploita habilement la popularité du premier jusqu'après le procès des ministres de Charles X et celle du second jusqu'au moment où il fallut se prononcer nettement sur la politique extérieure.

La France a l'insigne honneur de fixer sur elle l'attention du

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monde. Au bruit du trône qui s'écroulait à Paris, le 29 juillet 1830, tous les trônes avaient été ébranlés, tous les pouvoirs impopulaires compromis. En Suisse, les gouvernements aristocratiques tombèrent; en Allemagne, de libérales innovations s'introduisirent. L'Italie était frémissante; l'Espagne préparait une révolution; la Belgique se séparait de la Hollande; l'Angleterre elle-même, émue, agitée, arrachait aux tories le bill de réforme. La paix avait été plus profitable que la guerre à la liberté. Nos idées refaisaient les conquêtes que nos armes avaient perdues.

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