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drait de faire cependant, dans une aussi grande affaire que celle de la religion, nous sommes trop sûr que votre dévouement pour cette religion vous fera triompher de tout obstacle, et qu'en attirant sur vous et sur la France les bénédictions du ciel, vous mériterez toujours davantage de la religion, non moins que de la nation à laquelle vous procurez un si grand bien. Reconnaissant, dans votre sagesse, la sainteté et l'utilité de la religion pour l'avantage non moins spirituel que temporel de la France, sûrement vous ne pouvez pas ne pas vouloir qu'on exécute ce qu'exige la très-sainte constitution de la religion qu'on a rétablie, et que tout soit d'accord avec la salutaire discipline qu'ont établie les lois de l'Eglise. C'est pourquoi nous vous supplions chaleureusement de faire en sorte que les articles organiques, qui nous étaient inconnus, reçoivent les modifications nécessaires.

«Notre cardinal-légat vous fera, à ce sujet, connaître plus particulièrement nos désirs, qui, nous en avons l'espoir, seront parfaitement satisfaits par vous car nous ne voulons pas vous entretenir longuement dans cette lettre, à cause de vos si nombreuses occupations. Dans le Consistoire nous avons transféré, à l'église de Milan, le cardinal Caprara. Finissons en vous donnant la paternelle bénédiction apostolique. Donné à Rome, à Sainte-Marie-Majeure, le 27 Mai de l'an 1802, de notre pontificat le Ie ».

PIE VII, Pape.

Consalvi avait fait, au nom du Pape, les mêmes remontrances à M. Cacault, au sujet des articles organiques (1).

<< Citoyen ministre,

5 prairial an x. (25 Mai 1802.)

« Le soussigné cardinal secrétaire d'Etat vient remplir l'ordre reçu de Sa Sainteté de vous faire savoir que dans le Con

(1) L'original italien aux Archives du ministère des affaires étrangères, à Paris.

sistoire secret, tenu par Sa Sainteté, on a exécuté, du côté du Saint-Père, la publication de la Bulle du 15 Août 1801, qui contient les 17 articles du Concordat, entre Sa Sainteté et le gouvernement français.

<< Le Saint-Père, se réjouissant de la publication de ladite Bulle, enfin exécutée en France, et du rétablissement de la religion catholique, a ordonné de solennelles actions de grâces au Très-Haut et à cet effet, Sa Sainteté chantera un solennel Te Deum, dans le très-auguste prochain jour de l'Ascension, laquelle fête est une des plus grandes de la sainte Eglise Sa Sainteté veut la célébrer avec une pompe solennelle dans la grande basilique de Latran, qui est la première Eglise de l'univers, et donner en cette occasion la solennelle bénédiction papale de la grande loge de la basilique, à tout le peuple de Rome et du voisinage: cette circonstance, qui convient si bien à un si grand événement, contribuera à rendre la sacrée cérémonie plus auguste et plus solennelle.

<< Sa Sainteté, selon l'usage, a fait part au sacré Collège de tout ce qui est arrivé relativement à cet objet, dans la publication qu'on a faite en France.

<< Vous verrez que dans l'allocution prononcée par Sa Sainteté, que je joins ici, elle a fait connaître au sacré Collége et à l'univers entier, combien on est redevable au premier Consul pour avoir conçu et effectué la grande pensée qui redonne à la France l'antique religion de ses pères, et pour les grands soins qu'il a pris pour le succès de ce grand œuvre.

<< Cependant le soussigné ne doit pas taire, par ordre de Sa Sainteté, que ce qui a accompagné la publication faite en France du Concordat, le 15 Juillet 1801, et de la Bulle qui le contient, a douloureusement impressionné Sa Sainteté et l'a placée dans un grand embarras, relativement à la publication que le SaintPère devait faire du Concordat.

<< Le soussigné ne veut pas parler de l'institution dans les nouveaux siéges de certains évêques constitutionnels. Sa Sainteté en les recevant dans son sein, a la plus ferme confiance dans le

Seigneur, qu'elle n'aura pas à se repentir de l'indulgence dont les avantages de l'unité la fait user envers eux.

<< Le soussigné veut parler, par ordre de Sa Sainteté, des articles organiques, que, à l'insu de Sa Sainteté, on a publiés conjointement avec les 17 articles du Concordat, comme s'ils en faisaient partie, ce que l'on a généralement cru, à cause de la date et de la forme de la publication: ces articles organiques étant présentés, comme la forme et les conditions, avec lesquelles a eu lieu en France le rétablissement de la religion catholique, et divers articles ayant été trouvés par le Saint-Père en opposition avec les règles de l'Eglise, il ne peut pas, par devoir de son ministère, ne pas désirer qu'ils reçoivent les modifications nécessaires, comme il en prie directement le premier Consul, de la religion et sagesse duquel il a la plus vive confiance de

l'obtenir.

<<< Vous connaissez trop, citoyen ministre, parce que vous êtes le témoin journalier, les sentiments les plus intimes d'estime, d'amitié et de paternel attachement du Saint-Père, envers le gouvernement français, pour que le cardinal soussigné ait besoin de vous les exposer et de vous engager à en faire connaître au gouvernement la sincérité et la constance.

<< Le cardinal soussigné vous prie, citoyen ministre, d'agréer les assurances de sa considération la plus distinguée ».

E. card. CONSALVI.

CHAPITRE NEUVIÈME.

Retour des évêques constitutionnels à l'unité de l'Eglise, et réconciliation du clergé constitutionnel du second ordre.

Soumission des évêques constitutionnels au Saint-Siége; belles lettres de quelques-uns à ce sujet ; bref de sécularisation accordé à Talleyrand; lettre de Pie VII à Bonaparte. Puissance du clergé constitutionnel; vive discussion entre le gouvernement français et le légat du Saint-Siége sur la déclaration à exiger des prêtres constitutionnels pour leur réconciliation : le légat se rend à l'avis de Bonaparte. Conflit entre les constitutionnels et les anticonstitutionnels: sévère remontrance de Bonaparte à quelques évêques ; il impose la concorde; il réprime les menées de quelques évêques exilés qui conspiraient contre la France.

L'exemple scandaleux donné par les quatre évêques constitutionnels dont nous avons parlé plus haut, ne se renouvela plus. La plupart de ces évêques, après s'être sincèrement réconciliés avec l'Eglise, rentrèrent au sein de leurs familles, et ne s'occupèrent que du salut de leur âme. D'autres, qui s'étaient fait remarquer par la sincérité avec laquelle ils se soumirent au Saint-Siége, furent nommés aux nouveaux siéges. Du nombre de ces respectables prélats étaient les évêques de Versailles et de Coutances, dont Pie VII fit le juste éloge (1).

Le siége d'Avignon, dans ces temps de troubles, avait simultanément deux évêques constitutionnels, dont l'un, dès le moment de la conclusion du Concordat, s'était réconcilié avec l'Eglise, comme nous l'avons déjà raconté ; l'autre annonça, le 26 Octobre 1802, au Pape, son sincère retour à l'Eglise (2).

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Le même exemple édifiant fut donné par M. Aubry, évêque constitutionnel de Verdun.

Saint-Aubin, 29 Août 1802.

«Très-Saint Père,

« C'est avec la plus grande et la plus sincère confiance, que je prends la liberté de vous écrire, pour vous assurer que mon intention n'a jamais été et ne sera jamais de me séparer de la communion du Saint-Siége, et que, moyennant la grâce de Dieu, je vivrai et mourrai attaché de cœur et d'affection à la religion catholique, apostolique et romaine. J'ai été évêque constitutionnel de Verdun, et je puis dire que je n'ai jamais ambitionné, encore moins recherché cette qualité; j'étais alors à l'Assemblée constituante de France. Je déclare aujourd'hui à Votre Sainteté que j'abandonne avec plaisir le siége que j'ai occupé, en ayant donné ma démission, il y a un an, à Son Eminence le cardinallégat en France, et au gouvernement. Je vous assure de ma vraie, parfaite et respectueuse obéissance à Votre Sainteté, et je déclare renoncer à la Constitution civile du clergé de France, comme je l'ai déjà fait, et adhérer et me soumettre d'un esprit sincère et respectueux au jugement du Saint-Siége, sur les affaires ecclésiastiques de France, admettant purement et simplement, et promettant me conformer au Concordat passé entre Votre Sainteté et le gouvernement de France.

<< D'après ces dispositions, que je prie Votre Sainteté de croire sincères, j'ose espérer, Très-Saint Père, que vous ne me refuserez pas votre bénédiction apostolique, que j'attends avec le plus profond respect filial, en vous priant de me croire, << De Votre Sainteté, etc. »

AUBRY,

ci-devant évêque constitutionnel de Verdun.

Mr Butaud-Dupoux, évêque constitutionnel de Moulins,

n'exprime pas des sentiments moins religieux.

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