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PRÉFACE.

LE Code pénal de l'empire n'est plus de notre temps. Vingt-cinq années à peine nous séparent de l'époque où il a paru; mais les idées libérales ont marché rapidement, et en présence des principes qui dominent aujourd'hui la société, on est involontairement frappé du contraste qu'il forme avec nos institutions politiques et nos autres lois. Il est là comme un débris d'un autre âge; étranger à nos mœurs et à notre civilisation.

La France a senti la nécessité de réformer cette législation surannée; la Belgique ne pouvait rester en arrière. Aussi doit-on savoir gré au gouvernement d'avoir, conformément au vœu de la constitution, préparé un projet de

révision, et d'avoir fait un appel à l'opinion en livrant ce travail à la publicité.

Le projet de Code pénal, tel qu'il a été publié, constitue déjà une notable amélioration. Cependant, nous trouvons que les auteurs ne sont pas entrés assez franchement dans la voie des réformes, et qu'ils ont montré trop de timidité en se bornant à modifier là où un changement radical était nécessaire. Ni le temps ni les moyens ne nous manquent pour jeter les bases d'une législation plus perfectionnée. Il n'y a nul motif pour poser seulement une pierre d'attente, lorsqu'il est possible d'élever un monument national durable et définitif.

J'ai d'abord été conduit par la nature de mes fonctions à examiner attentivement le projet de révision et à noter ce qui me semblait défectueux. Puis à l'esprit de critique a succédé le désir d'améliorer. C'est ainsi que mon plan s'est étendu et que j'ai cru devoir reprendre en sous-œuvre un travail dont j'appréciais l'importance, mais qui sur plusieurs points me paraissait offrir de grandes lacunes.

Je n'ai rien négligé pour atteindre mon but. J'ai consulté les procès-verbaux des séances du conseil-d'état dans lesquelles ont été discu

tés les différents titres du Code de 1810; j'ai recueilli les opinions émises par les chambres françaises sur les dispositions de la loi du 28 avril 1832; je me suis entouré des ouvrages des criminalistes les plus célèbres; j'ai comparé entre elles les législations étrangères; j'ai employé en un mot tous les moyens dont je pouvais disposer pour qu'aucun progrès ne fût perdu, aucun perfectionnement oublié.

Je présente au public la première partie de mes observations, comprenant les deux premiers livres du projet de révision. La seconde partie qui comprendra le troisième et le quatrième livres, paraîtra dans quelques mois.

Pour justifier les nombreux amendements que je propose, j'ai été obligé quelquefois de descendre dans les détails et de donner des développements assez étendus sur les matières les plus importantes, telles que la tentative, le système des pénalités en général et en particulier la peine de mort, la récidive, la complicité, les causes de justification, les circonstances atténuantes.

Je publierai, à la suite de la seconde partie, un nouveau projet de Code pénal, dans lequel les changements qui me paraissent devoir être

adoptés, seront classés méthodiquement, et que je désire soumettre à la sagesse de la législature et au jugement de l'opinion.

Je ne regretterai ni le temps ni les peines que ces recherches m'ont coutés, si je puis contribuer quelque peu à doter la Belgique d'une législation pénale en harmonie avec la civilisation actuelle. En tout cas, j'aurai fait preuve de bon vouloir, et cet essai témoignera du moins de l'intention que j'ai de payer à ma patrie adoptive la dette de la reconnaissance.

Gand, le 15 avril 1835.

J. J. HAUS.

DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

RIEN ne révèle mieux la tendance progressive de notre siècle que les efforts tentés partout, depuis les quarante dernières années, pour mettre la législation criminelle en harmonie avec les principes de la justice et de l'humanité. Sans parler des états de l'Amérique Septentrionale et Méridionale, où les événements politiques ont également amené d'importantes améliorations dans l'ancien système pénal, il n'existe aujourd'hui en Europe presqu'aucun pays qui n'ait vu réformer ses vieilles lois criminelles, soit par de nouveaux Codes, soit par des lois particulières. Ces essais de réforme, il est vrai, n'ont pas été couronnés d'un succès complet; la législation criminelle est encore partout au-dessous de la civilisation actuelle; souvent même elle se trouve en opposition avec les principes de liberté consacrés par les institutions politiques. Mais toujours est-il que cette branche de la législation, si négligée auparavant, a fait, en peu de temps, des progrès immenses et qu'elle suit vers le perfectionnement une marche rapide et assurée qu'aucun gouvernement n'est plus à même d'arrêter ou de ralentir.

C'est dans la seconde moitié du dix-huitième siècle que l'esprit de réforme, qui a produit ces effets salutaires, a commencé à se manifester avec une ardeur dont aucune

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