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sur ces sortes de contestations; enfin il invoquait le principe de la séparation des pouvoirs consacré par les lois des 16-24 août 1790 et 16 fruct. an 3 (V. Compétence administr., no 4). Il a été décidé ainsi qu'à l'autorité administrative scule il appartient de statuer : 1o sur la demande en payement formée par les créanciers d'un prince français contre l'Etat, comme détenant les biens de leur débiteur, soit en vertu des lois de confiscation, soit par suite de l'avénement de ce prince au trône (cons. d'Et. 4 fév. 1824, M. Cormenin, rap., aff. Bourbon-Conti); 2o Sur les réclamations des créanciers de l'ancienne liste civile de Charles X, les dettes de cette liste civile ayant été déclarées dettes de l'Etat par la loi du 8 avr. 1834, bien qu'avant cette loi ces réclamations fussent de la compétence des tribunaux ordinaires on dirait en vain qu'il s'agissait dans la cause d'un contrat passé avec le roi Charles X, dont la connaissance était du ressort de l'autorité judiciaire (V. les arrêts cités vo Domaine de la couronne, no 93); - 3o Sur la demande d'indemnité formée par un fabricant de tabac factice à raison de la cessation forcée de son industrie prohibée par la loi du 12 fév. 1835 (V. Impôts indir., no 609); — 4o Sur la question de savoir si l'Etat doit supporter les frais de construction d'une machine inventée par un particulier (un four portatif en tôle), proposée par lui au ministre de la guerre pour les besoins de l'armée, essayée par l'administration et refusée en définitive (cons. d'Et. 29 oct. 1839) (1); 5° Sur la question de savoir si l'Etat, étant aux droits d'un chapitre supprimé par les lois révolutionnaires, peut être tenu de remplir les obligations qui résulteraient contre lui d'une vente faite par ce chapitre avant 1790 d'un domaine engagé, non déclaré tel au contrat (cons. d'Et. 9 mai 1841, M. Macarel, rap., aff. dame de Bavre); 6° Sur la demande en dommages-intérêts formée par un particulier contre le ministre de la guerre pour inexécution des clauses d'un marché par lequel ce particulier s'était engagé à soigner certains chevaux malades, sous la condition de profiter du fumier et du travail de ces chevaux (cons. d'Et. 4 avr. 1845, M. Boulatignier, rap., aff. Galy); -7° Sur la demande en indemnité formée contre l'administration des postes, soit pour retard dans la remise d'une lettre (cons. d'Et. 8 août 1844, aff. Dupart, D. P. 45. 3. 3),... soit à raison de la prétendue soustraction d'un billet de banque renfermée dans une lettre cachetée et chargée (cons. d'Et. 9 déc. 1845, M. Boulatignier, rap., aff. Mouton C. Hazard et l'Etat); 8° Sur l'action qui a pour objet de faire condamner l'administration des postes, comme civilement responsable du fait de ses agents, à remettre à un particulier une lettre recommandée, sinon à lui payer des dommages-intérêts (cons. d'Et. 9 fév. 1847, aff. Legat, D. P. 47. 3. 113; 12 juill. 1851, même partie, D. P. 51. 3. 66); 9° Sur l'action en garantie dirigée par un particulier contre l'Etat, comme responsable de la perte d'un bateau causée par les fausses manœuvres des préposés à la navigation d'un canal (cons. d'Et. 2 mai 1845, aff. Carisey, D. P. 45. 3. 147); 10° Sur la demande en dommages-intérêts formée à la fois, contre un ingénieur chargé de la direction des travaux publics, et contre l'Etat comme civilement responsable, par la veuve d'un entrepreneur à raison d'un accident qui aurait entrainé la mort de son mari, et qu'elle impute au défaut de prévoyance de l'ingénieur (cons. d'Et. 26 avr. 1847, aff. Brunet, D. P. 47. 3. 113); -11° Sur l'action en dommages-intérêts formée contre l'Etat comme civilement responsable des blessures occasionnées par un cheval de l'armée (cons. d'Et. 20 août 1847, aff. Beauzemont, D. P. 48. 3. 51); · 12° Sur la demande en dommagesintérêts, formée contre l'Etat à raison des retards apportés à la radiation d'oppositions sur des rentes : - Considérant que... cette demande ne pouvait être appréciée par l'autorité judiciaire sans se livrer à la discussion des règies relatives au service de

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(1) (Préf. de la Seine C. Venancourt.) - LOUIS-PHILIPPE, etc., Vu les lois des 25-28 mars 1790; 17 juill. et 8 août 1790, 16-1722 déc 1790, 30 sept. 1791, 16 oct. 1791, 24 août 1795, 16 fruct. an 3; 3 brum. an 4; l'arrêté du 2 germ. an 5 et le décret du 11 juin 1806 Vu les ord. réglem. du 1er juin 1828 et du 12 mars 1851; Considérant que, d'après les lois ci-dessus visées sur la liquidation de la dette publique, les actions qui tendent à faire déclarer le tresor de l'Etat débiteur envers des particuliers sont du ressort de l'autorité administrative;

la dette inscrite et sans s'immiscer dans la connaissance des actes administratifs; que, d'ailleurs, c'est à l'autorité administrative qu'il appartient de statuer sur des actions qui tendent à constituer l'Etat débiteur » (cons. d'Et. 28 août 1844, M. Boulatignier, rap., aff. Arramburu).—On a aussi invoqué dans le même sens un arrêt de la cour de cassation (Req. cass. 11 mess. an 10, aff. Laurent, V. Compét. admin., no 107-1o). V. aussi Compét. admin., nos 92-1o, 112-5°, 136; Forêts, no 1058.

570. Les motifs sur lesquels repose cette jurispruden ce ont été fortement contestés. S'il était vrai, a-t-on dit, que les lois qui ont attribué à l'autorité administrative la liquidation des créances sur l'Etat eussent dépouillé les tribunaux de l connaissance des affaires dont il peut résulter une créance su le trésor public, elles seraient en opposition avec tous les textes qui supposent que l'Etat peut être actionné devant les tribunaux ordinaires (V. notamment c. pr. 69, nos 1, 2, 3 et 4), puisqu'il n'y a pas de procès dont il ne puisse résulter une créance contre la partie qui le perd, ne fût-ce que celle des frais, et qu'ainsi la totalité des affaires de l'Etat serait enlevée à la compétence judiciaire. - Et d'ailleurs, l'examen de ces lois démontre que c'est exagérer leur portée que d'en tirer une attribution exclusive à l'autorité administrative des actions qui tendent à constituer l'Etat débiteur. Ces lois, en effet, tracent le mode d'admission parmi les dettes de l'Etat de toute créance sur le trésor public; mais quant à l'établissement même des créances, elles ne s'en occupent point et laissent par conséquent dans leur entier les principes de compétence. Autre chose est le jugement de la créance, autre chose la liquidation de cette créance: la déclaration du droit au fond, l'obtention du titre se poursuit devant le juge déterminé par la nature du débat; ensuite vient la fonction de l'administrateur qui vérifie les titres, procède à la liquidation de la créance, en ordonne le payement; c'est cette dernière fonction seulement que les lois invoquées ont eu pour objet de régler. - Quant aux lois relatives à la séparation des pouvoirs, elles ne tranchent nullement la question; car si ces lois défendent à l'autorité judiciaire de s'immiscer dans les actes de l'administration, d'autres lois défendent également à l'autorité administrative de troubler l'autorité judiciaire (L. 16-24 août 1790, §§ 1 et 8, ch. 1; const. de 1791, tit. 3, ch. 4, sect. 2, art. 3; const. de l'an 3, art. 189). Reste donc toujours à savoir à laquelle de ces deux autorités appartient le litige en question. -V. motifs trib. de la Seine, 6 déc. 1850, aff. Caillau, rapporté avec le jugement du trib. des confl. du 7 avr. 1851, D, P. 51.

3.36.

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Cette thèse, soutenue par MM. Sourdal, de la Responsabilité, t. 2 nos 1037 et suiv.; Dufour, Droit admin., 1re édit., t. 2, nos 1365 et suiv., a été constamment suivie par la cour de cassation, en opposition formelle sur ce point avec le conseil d'Etat. Cette cour, sans mettre en question les principes invoqués par l'administration, mais considérant que ce serait exagérer ces principes que d'en faire sortir des conséquences qui pourraient tendre à consacrer des dénis de justice et à affaiblir les garanties que la constitution a données aux citoyens, en mettant leur honneur, leur personne et leur fortune sous la sauvegarde de l'ordre judiciaire, tout aussi bien lorsqu'ils auraient l'Etat pour adversaire que lorsqu'ils seraient en lutte avec de simples particuliers, n'a pas hésité à déclarer les tribunaux civils compétents pour frapper l'Etat de responsabilités civiles, lorsque les délits ou quasi-délits de ses agents ont causé d'injustes dommages aux réclamants.

5. C'est surtout en matière de responsabilité de l'administration des postes que la question s'est présentée devant les tribunaux. On a constaté que, pendant longtemps, cette administration semblait avoir reconnu elle-même la compétence ju

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Considérant d'ailleurs que, aux termes de l'art. 14 du décret précité du 11 juin 1806, le conseil d'Etat doit connaitre de toutes les contestations ou demandes relatives, soit aux marchés passés avec nos ministres ou en leur nom, soit aux travaux ou fournitures, faits pour le service de leurs départements respectifs; - Que, dès lors, c'est à tort que le tribunal civil de la Seine a, par son jugement du 22 juill. 1859, retenu la connaissance de l'instance dont il s'agit; Art. 1. L'arrêté de conflit est confirme, elc. Du 29 oct. 1839.-Ord. cons. d'Et -M. Boulatignier, ►

diciaire pour les affaires dans lesquelles elle se trouvait ainsi appelée. Dans plusieurs espèces portées devant les tribunaux, en effet, elle n'a point opposé l'exception d'incompétence (V. notamment Req. 30 janv. 1813, aff. Depeyre, vo Responsabilité, no 660-2°; Agen, 24 avril 1843, même aff., eod.; Crim. cass. 3 juin 1843, aff. Daullé, eod., no 661; Req. 30 janv. 1844, aff. Dutailly, V. eod., no 660-2o; 22 nov. 1848, aff. Carrey, D. P. 48. 1. 252; Crim. cass. 12 janv. 1849, aff. Vandermarcq, D. P. 49. 1. 59). – Et lorsque l'exception a été soulevée, soit par l'administration des postes, dans les affaires qui la concernaient, soit par l'Etat, en d'autres circonstances, les tribunaux ont toujours cru pouvoir retenir la connaissance de l'affaire. Ainsi il a été décidé que les tribunaux civils seuls doivent connaître de l'action en responsabilité dirigée contre l'administration des postes : «Attendu, entre autres motifs, que s'il est prescrit à l'autorité judiciaire de s'abstenir de tout examen et de toute critique des règlements, ordres administratifs et instructions compétemment donnés par l'administration, il appartenait incontestablement à l'autorité judiciaire d'apprécier les faits résultant de l'exécution plus ou moins intelligente, plus ou moins prudente des règlements et ordres administratifs » (Rej. 1er avril 1845, aff. Depeyre, D. P. 45. 1. 261), lors même qu'on prétendrait que ce n'est qu'en raison des instructions trop sévères qu'elle trace à ses agents que la responsabilité pèse sur cette administration (Colmar, 25 janv. 1848, aff. Turck, D. P. 49. 2. 61).-Décisions semblables relativement à des dommages causés par des agents de l'Etat, soit dans le service des contributions indirectes (Req. 30 janv. 1833, aff. Paul, V. Responsabilité, no 639), soit dans le service des douanes (Req. 22 janv. 1855, aff. Royer, V. Douanes, no 846-1°), soit dans le service des bureaux du trésor public (Rej. 29 fév. 1856, aff. Schuhman, V. Bourse de com., no 377). L'autorité judiciaire se reconnaissait incompétente dans le cas seulement où une loi❘ spéciale déférait la contestation à l'autorité administrative (V. par exemple, Rej. 3 juin 1840, aff. Rotrou, vo Compét. admin., n°105-10°).

572. Le tribunal des conflits (institution établie par le gouvernement républicain de 1848 et qui a été supprimée à la suite du coup d'État du 2 déc. 1851), appelé à son tour à statuer sur la question, s'est rangé à la jurisprudence du conseil d'Etat. Toutefois le principe sur lequel il s'est appuyé est tout autre que celui qui servait de base aux décisions antérieures; son silence à cet égard semblerait même indiquer que les conséquences tirées des lois sur la liquidation de la dette publique ne lui paraissaient pas suffisantes pour motiver la compétence exclusive de l'autorité administrative, en cette matière. Il place celte compétence sous la seule protection de la règle qui interdit aux tribunaux de s'immiscer dans l'examen et l'interprétation des règlements administratifs. C'est en s'appuyant sur ce motif qu'il décide que c'est devant l'autorité administrative et non devant les tribunaux civils, que doit être portée : 1o l'action en responsabilité dirigée contre le directeur général des postes pour détournements, par un employé de son administration, de valeurs déposées dans une lettre recommandée : - - « Considérant, dit-il, que l'appréciation de la demande en dommages-intérêts contre l'administration des postes dépend du point de savoir si le fait imputé aurait été commis dans l'exercice des fonctions auxquelles sont préposés les agents de cette administration; que ce n'est que, par l'examen des règlements administratifs qui fixent le mode du service de la poste aux lettres, qu'il est possible de déterminer dans quel cas l'agent de cette administration doit être réputé avoir fait un acte dépendant de ses fonctions et susceptible d'ètre couvert par la responsabilité de l'administration; qu'un semblable examen de la part du tribunal impliquerait nécessairement l'interprétation des règlements relatifs au service de la poste, et qu'ainsi l'autorité judiciaire s'immiscerait dans l'appréciation et l'application d'actes administratifs, dont les lois sur la séparation des pouvoirs lui défendent de connaître » (trib. des confl. 17 juill. 1850, aff. Letellier, D. P. 51. 3. 26 ; décisions semblables, 20 mai 1850, aff. Manoury, D. P. 50. 3. 65; même jour, cinq autres décisions identiques, eod.; 7 avr. 1851, aff. Caillau, D. P. 51. 3. 35); — 2o La demande en restitution d'une somme versée entre les mains d'un directeur de la poste pour être payée, dans

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un autre bureau, en vertu d'un mandat délivré, et qui n'a point été payé au destinataire (trib. des confl. 28 nov. 1850, M. Miller, rap., aff. Leclerc); 3o La demande en restitution des droits perçus à cette occasion par la poste, et en dommagesintérêts (même jugement).

573. La manière dont le tribunal des conflits avait résolu la question laissait toujours prise à la controverse; car s'il est bien vrai que les tribunaux doivent s'arrêter devant l'appréciation des acles et des règlements administratifs, il est reconnu également qu'ils sont compétents pour faire l'application de ces actes, lorsque le sens n'en est pas douteux ou qu'il n'est pas contesté (V. MM. Sourdat, loc. cit., no 1075; Jousselin, article inséré dang la Revue crit., t. 2, 7 livr. juill. 1852). Et d'ailleurs, le motif donné par le tribunal des conflits était insuffisant, en ce qu'il laissait en dehors de son application toutes les espèces dans lesquelles les règlements administratifs n'étaient pas mis en question. Aussi la cour de cassation a-t-elle cru devoir, malgré les décisions du tribunal des conflits, persister dans sa jurisprudence antérieure. Elle a décidé, en conséquence, que l'autorité judiciaire, essentiellement compétente pour connaître des actions en réparation de dommages causés à autrui, ne cesse pas de l'être par le motif que ces dommages auraient été causés par des agents d'administrations publiques, et constitueraient, en même temps que des fautes, négligences ou imprudences, dans les principes du droit commun, des infractions aux règlements particuliers de ces administrations;-...Surtout lorsque ces règlements ne soi pas contestés (Rej. 19 déc. 1854, aff. Acher, D. P. 55. 1. 37}2 Et qu'il en est ainsi, même au cas où l'action réagit cont l'administration elle-même et peut amener des condamnations på» cuniaires contre elle, comme reponsable du fait de ses agents; ...Sauf à n'exécuter les condamnations qui peuvent intervenir que de la manière et dans les formes déterminées par les lois spéciales (même arrêt).

574. Le conseil d'Etat, devant lequel la question est revenue, après la suppression du tribunal des conflits, n'a pas imité la timide réserve de ce tribunal. Ce n'est pas seulement sur cette règle que les tribunaux sont incompétents pour se livrer à l'examen des règlements administratifs, qu'il établit sa thèse, mais aussi sur le principe qui faisait la base de son ancienne jurisprudence, à savoir, qu'à l'autorité administrative seule, il appartient de reconnaître des actions qui tendent à faire déclarer l'Etat débiteur. Mais ce principe, à partir de 1853 surtout, il le développe et l'établit sur des raisons qui nous paraissent à l'abri de de la critique: « Considérant, dit-il, que c'est à l'administration seule qu'il appartient, sous l'autorité de la loi, de régler les conditions des services publics dont elle est chargée d'assurer le cours; qu'il lui appartient de déterminer les rapports qui s'établissent, à l'occasion de ces services, entre l'Etat, les nombreux agents qui opèrent en son nom et les particuliers qui profitent de ces services, et, dès lors, de connaître et d'apprécier le caractère et l'étendue des droits et obligations réciproques qui en doivent naître; que ces rapports, ces droits et ces obligations ne peuvent être réglés selon les principes et les dispositions du seul droit civil et comme ils le sont de particulier à particulier; que, notamment, en ce qui to che la responsabilité de l'Etat en cas de faute, de négligence ou l'erreur commises par un agent de l'administration, cette responsabilité n'est ni générale ni absolue, qu'elle se modifie suivant a nature et les nécessités de chaque service; que, dès lors, l'administration seule peut en apprécier les conditions et la mes are; Considérant, d'autre part, que c'est à l'autorité administrative qu'il appartient (à moins qu'il n'en ait été autrement ordonné par des lois spéciales) de statuer sur les demandes qui ten ent à constituer l'Etat débiteur; que ce principe, proclamé par le décret du 26 sept. 1793, maintenu et développé par la législation subséquente relative à la liquidation de la dette publique, est devenu une des bases de notre droit public et la règle générale de compétence pour les instances introduites contre l'Etat, puissance publique, par les particuliers qui prétendent être ses créanciers; que, si, en certaines matières, il a été, par des dispositions expresses de lois, dérogé à ces principes, ces exceptions ne sauraient être étendues par voie d'assimilation ou à l'aide de l'analogie; - Considérant enfin que, si le code de procédure civile a réglé les formes

suivant lesquelles l'Etat serait assigné devant les tribunaux civils, ces dispositions, relatives soit aux instances domaniales, soit à celles pour lesquelles l'Etat a, par des lois spéciales, été renvoyé devant l'autorité judiciaire, n'ont eu pour but ni pour effet d'at- | tribuer à l'autorité judiciaire une compétence générale et d'enlever à l'autorité administrative la connaissance des questions contentieuses qui lui appartiennent » (cons. d'Et. 6 déc. 1855, aff. Rotschild, D. P. 39. 3. 34).

En conséquence, le conseil d'Etat a décidé que c'est devant l'autorité administrative, et non devant les tribunaux civils, que doit être portée : 1° l'action en dommages-intérêts dirigée 'contre l'Etat, comme responsable des irrégularités que ses agents auraient pu commettre dans les opérations relatives à la vente d'une coupe de bois communaux : — « Considérant, dit l'arrêt, qu'aux termes des lois susvisées il est de principe qu'il ne peut appartenir à l'autorité judiciaire de déterminer la responsabilité qui peut incomber à l'Etat, par suite des opérations des agents de l'administration; que s'il a été dérogé à ces principes, dans certains cas, par des dispositions particulières, il n'existe aucune disposition semblable qui soit applicable à la contestation élevée par la commune de Péron » (cons. d'Et. 25 mars 1852, M. Boulatignier, rap., aff. com. de Péron); 2° L'action en garantie dirigée contre l'Etat, à l'effet d'obtenir le remboursement d'un cautionnement fourni à la caisse des dépôts et consignations pour assurer l'exécution d'un contrat administratif, et que cette caisse, sur la demande en restitution de ce cautionnement formée contre elle, prétend avoir versé au trésor, en vertu d'une décision ministérielle (cons. d'Et. 25 nov. 1852) (1);

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(1) (Baudon et comp. C. caisse des consign. et l'Etat.) - NAPOLÉON, etc.;- Vu la foi du 24 août 1793, l'ord. du 31 mai 1858 et le décret des 16 mars, 7 juill. et 21 nov. 1848, - Vu les ordon. des 1er juin 1828 et 12 mars 1831; — Vu le décret du 25 janv. 1852 et celui du 15 juill. suivant., art. 5;- Considérant que les sieurs Baudon et comp. ont fait assigner le directeur général de la caisse des dépôts et consignations devant le tribunal civil de la Seine pour s'entendre condamner à leur remettre, soit douze bons du trésor de 50,000 fr. chacun qu'ils ont versés à ladite caisse le 31 mai 1847, soit les rentes 3 p. 100 que la caisse aurait reçues par voie de conversion comme vafeur représentative des bons qui avaient été versés; qu'en réponse à cette assignation, le directeur général de la caisse a déclaré que le montant des bons avait été versé par le caissier le 19 mai 1848 dans le caisse du trésor public pour obéir à une décision prise le 8 mai précédent par le ministre des finances agissant en vertu du traité intervenu entre l'Etat et la compagnie Hérout et de Handel; que ces faits sont reconnus par le ministre des finances dans les conclusions prises au nom du trésor public et par le préfet de la Seine, dans le mémoire en déclinatoire et dans l'arrêté de conflit; Considérant que les valeurs dont la remise est demandée ont été versées par les sieurs Baudon et comp., non pas en leur nom personnel et à titre de consignation judiciaire, mais au nom et pour le compte des sieurs Hérout et de Hande, à titre de cautionnement pour l'exécution d'un contrat administratif ; que c'est en se fondant sur les dispositions de ce contrat et à la garantie des droits qui pouvaient en résulter pour l'Etat, que le ministre des finances a ordonné, par sa décision du 8 mai 1848, que le cautionnement dont il s'agit serait versé dans la caisse du trésor public; qu'aux termes des dispositions législatives ci-dessus visées, toutes les difficultés auxquelles pourrait donner lieu l'exécution des clauses du traité relatif à l'entreprise des paquebots transatlantiques doivent être jugées par le ministre des finances, sauf recours au conseil d'Etat; que, dès lors, c'est avec raison que le préfet de la Seine a revendiqué pour l'autorité administrative le droit de statuer sur les difficultés elevees par les sieurs Baudon et comp. à la restitution du cautionnement de l'entreprise; Considérant, d'ailleurs, que la demande des sieurs Baudon et comp. soulève des questions relatives à l'application des décrets des 16 mars, 7 juill. et 21 nov. 1818, qui se rattachent aux opérations de la trésoIrerie et à la constitution de la dette publique; qu'aux termes des dispositions législatives susvisées concernant la comptabilité et la dette publiques, c'est à l'autorité administrative qu'il appartient de statuer sur les questions de cette nature;

Art. 1. L'arrêté de conflit pris par le préfet de la Seine, le 3 juin 1852, est confirmé. Art. 2. Sont considérés comme non avenus la requète adressée au président du tribunal civil de la Seine le 29 janv. 1852, et l'exploit introductif d'instance aux fins de ladite requête, en date du 30 janvier, les conclusions prises par les sieurs Baudon et comp., le jugement du tribunal civil de la Seine en date du 21 mai 1852.

Du 25 nov. 1852.-Décr. cons. d'Et.-M. Boulatignier, rap.

(2) (Dudon C. l'Etat et la liste civile.) - NAPOLEON, A.; Vu le

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3o L'action en responsabilité dirigée contre le directeur général des postes pour détournement de valeur déposée dans une lettre recommandée (cons. d'Et. 9 déc. 1852, aff, syndics Pou let, D. P. 53. 3. 21. — V. aussi cons. d'Et. 14 sept. 1852, ass. Prenel, D. P. 53. 3. 12; 29 mars 1853, aff. Caillau, D. P. 53. 3. 55); 4° L'action en responsabilité formée par un particulier contre un établissement de l'Etat (une école vétérinaire), à raison d'un dommage résultant d'actes des agents de cet établissement (cons. d'Et. 10 mars 1855, aff. Perregaux, D. P. 53. 5. 55); 5o L'action dirigée contre le directeur d'un service public (le directeur des postes ou des lignes télégraphiques), en son nom personnel et contre le ministre sous l'autorité duquel il agit, alors qu'aucun fait personnel n'est imputé au directeur, et que l'action contre le ministre ne pourrait avoir pour effet, si elle était admise, que de faire condamner l'Etat (cons. d'Et. 6 déc. 1855, aff. Rothschild, D. P. 59. 3. 34; mème jour, aff. Gloxin, eod.; 20 fév. 1858, aff. Carcassonne, D. P. 59. 3. 55); -6° La question de savoir si l'Etat ou la liste civile à laquelle l'Etat, après résiliation du traité passé entre le ministre et un particulier pour l'exploitation de l'Académie impériale de musique, a fait remise des bâtiments et du matériel affectés à cette entreprise, sont tenus soit des indemnités auxquelles l'entrepreneur s'était obligé au profit d'un tiers qui avait fourni les fonds destinés à son cautionnement, soit de continuer les locations de loges consenties comme condition accessoire de ce cautionnement, sous peine de dommages-intérêts (cons. d'Et. 27 nov. 1856) (2). Cette jurisprudence à laquelle nous avons déjà donné notre assentiment (V. Compét. admin., nos 98 et suiv.,

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décret du 11 juin 1806; --Vu les lois des 16-24 août 1790, 24 juill. 1793 et 5 niv. an 5; Vu le décret du 16 fruct. an 3 et l'arrêté du directoire du 2 germ. an 5; Vu la loi du 24 frim. an 6, l'arrêté du

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29 pluv. an 6; Vu la loi du 28 pluv. an 8, l'arrêté du 15 flor. an 11, la loi du 16 sept. 1807, le décret du 25 fév. 1808 sur la liquidation de la dette publique, le décret du 13 déc. 1809; Vu la loi du 18 janv. 1810; Vu les lois des 20 mars 1815, 23 sept. 1814, 25 mars 1817, 15 mai 1818, 17 août 1822, 27 avr. 1825, 50 avr. 1826, 29 janv. 1851, et l'ord du 31 mai 1858; Vu la loi du 6 avr. 1791, le décret du 1er germ. an 15; Vu les ord. des 1er juin 1828 et 12 mars 1831: Vu notre décret du 28 juill. 1856 portant fixation des vacances de notre conseil d'Etat;

Considérant que, par exploit du 27 juin 1855, le baron Dudon a assigné devant le tribunal de la Seine: 1° notre ministre des finances; 2o notre ministre d'Etat et de la maison impériale; 5° le sieur Nestor Roqueplan, ancien entrepreneur de l'Opéra, à l'effet de voir déclarez que l'Etat sera tenu d'exécuter les conventions intervenues les 30 sept. 1817 et 20 juill. 1852 entre le demandeur et le sieur Roqueplan, et, en conséquence, condamné: 1o à lui payer les termes échus et à échoir jusqu'au 31 déc. 1861 de la somme annuelle de 13,412 fr. stipulée à son profit à titre d'indemnité pour le dépôt d'une inscription de rentes affectée au cautionnement de l'entreprise de l'Opéra, et subsidiairement à lui consentir la remise de l'inscription de rentes déposée, et a lui payer la différence entre le prix d'achat desdites ren'es et leur valeur au jour de la remise de l'inscription; 2o à le remettre en possession des deux loges dont il jouissait antérieurement au 29 juin 1951, avec les meubles dont il les avait garnies, à la charge par lui de payer le prix de location stipulé par lesdits traités, et subsidiairement, pour le cas où, dans un intérêt de police, la jouissance de celle des deux loges située sur la scène ne pourrait lui être conservée, à lui payer une indemnité réglée à dire d'experts, et, en outre, la valeur des travaux exécutés et des meubles placés par lui dans ladite loge; 3° à lui rembourser les frais d'enregistrement du traité du 50 sept. 1847, qu'une clause expresse dudit traité mettait à la charge des entrepreneurs de l'Opéra, que le baron Dudon demandait, en outre, que le jugement à intervenir fût déclaré commun avec notre ministre d'Etat en ce qui touche la restitution de son cautionnement, la jouissance des loges et de leur mobilier, et avec le sieur Roqueplan en ce qui le concerné;

En ce qui concerne la demande dirigée contre le sieur Roqueplan: - Considérant que l'arrêté de conflit n'a pas pour objet d'en revendtquer la connaissance; que c'est à l'autorité judiciaire qu'il appartient da connaître de l'exécution des conventions intervenues entre le demandeur et Roqueplan;

En ce qui touche la demande dirigée contre notre ministre des finans ces, et, en tant que de besoin, contre notre ministre d'Elat: Considérant que le baron Dudon soutient à l'appui de sa demande que les engagements pris envers lui par le sieur Roqueplan ont été contractés dans l'intérêt de l'administration de l'Opéra, et en exécution du cahier des charges de l'entreprise; it's af et autorisés ou approuvés par l'administration superieur, * S, pureffet de notre décret du #

121 et suiv.), est aussi approuvée par MM. Serrigny, Compét. admin., t. 2, p. 318, nos 962 et suiv.; Lerat de Magnitot, Dict. de droit admin., vo Dette publ., p. 401; Chauveau, Compét. et jurid. admin., t. 1, nos 706 et suiv.; Cotelle, Droit admin. appliqué aux trav. publ., 3o éd, t. 2, p. 70, nos 64 et suiv., 70. 575. En admettant la compétence exclusive de l'autorité ¿dministrative, alors que l'action tend à rendre l'Etat débiteur, 1 n'en est plus de même lorsqu'il s'agit de statuer: 1° sur l'acton dirigée contre le directeur d'un bureau de poste personzellement, comme civilement responsable d'un détournement de valeurs commis dans son bureau, les tribunaux civils sont, en ce cas, seuls compétents, sauf la garantie de l'autorisation préalable (trib. des confl. 20 mai 1850, aff. Manoury, D. P. 50. 3. 65; du même jour, six autres décisions identiques, eod.; cons. d'Et. 29 mars 1853, aff. de Merlhiac, D. P. 53. 3. 55; 6 déc. 1855, aff. Rothschild, D. P. 59. 3. 34); 2o Sur la demande formée contre des fonctionnaires et agents du service de la navigation, et tendant à les faire condamner personnellement à la réparation d'un sinistre qu'on prétend être arrivé par suite d'une négligence à eux imputée dans l'accomplissement de leurs devoirs « Considérant, dit l'ordonnance, qu'il ne s'agit, dans la demande formée par les sieurs de Rotrou et comp., que d'une poursuite à fins civiles contre le préfet de police du département de la Seine, le sieur Dumoulin et le sieur Paris; que, dès lors, c'est avec raison que le conseil de préfecture s'est déclaré incompétent» (cons. d'Et. 6 juill. 1843, M. Lavenay, rap., aff. Rotrou).

576. Décidé en conséquence que les tribunaux sont compétents pour connaître de l'action dirigée contre un agent de l'administration des postes, à raison de fautes que l'on prétend avoir été commises par lui dans son service, lorsqu'il n'apparaît pas que le jugement de cette action dépende d'une question réservée à l'administration par une disposition législative, et spécialement, que le tribunal correctionnel est compétent pour statuer sur l'action formée par le destinataire d'une lettre contre

juin 1854, ils ont été mis à la charge de l'Etat; Considerant que le sieur Roqueplan avait entrepris l'exploitation de l'Opéra en vertu d'un traité passé avec le ministre de l'interieur le 31 juill. 1847; que le traité avait pour objet l'exploitation de l'Académie royale de musique avec une subvention payée sur les fonds du trésor, dans des bâtiments qui étaient la propriété de l'Etat et avaient été affectés par lui à celle destination; qu'il comprenait, en outre, l'entretien, la conservation et le renouvellement d'un matériel appartenant à l'Etat; qu'ainsi il avait le caractère d'un marché administratif; Considérant que la question de savoir si, après que la résiliation de l'entreprise a été consommée par la démission du sieur Roqueplan et notre décret du 29 juin 1854, l'Etat ou notre liste civile, à qui l'Elat a fait remise des bâtiments et du materiel de l'Opéra, aient tenus, soit des indemnités que l'entrepreneur avait stipulées au profit du bailleur de son cautionnement, soit de continuer les locations des loges qu'il lui avait consenties et qui étaient une condition accessoire de ce cautionnement, soulève une contestation sur l'exécution de ce marché, et que l'autorité administrative est seule compétente pour en connaître; Considérant, d'ailleurs, que, pour apprécier la demande du baron Dudon, il est nécessaire de reconnaître si, ainsi qu'il le prétend, des actes de l'administration ont autorisé ou approuvé les conventions intervenues entre lui et l'entrepreneur de l'Opéra, et si notre décret du 29 juin 1854 a entendu mettre à la charge de l'Etat les dettes provenant de l'entreprise, et que c'est à l'autorité administrative qu'il appartient de déterminer le sens et la portée de ces actes qui sont émanés d'elle; — Considérant, enfin, que la demande du baron Dudon, dirigée contre l'Etat, puissance publique, aurait pour objet de le faire reconnaître créancier du trésor public, et que c'est à l'autorité administrative qu'il appartient, à moins qu'il n'en ait été autrement ordonné par des lois spéciales, de statuer sur les demandes tendant à faire déclarer l'Etat débiteur;

Considérant, en ce qui concerne le chef de la demande du baron Dudon relatif à la restitution des inscriptions de rentes déposées par lui à titre de cautionnement, que ce cautionnement ayant eu pour objet de parantir l'exécution d'un marché administratif, l'autorité administrative est seule compétente pour statuer sur les difficultés qui pourraient s'éever relativement à la restitution demandée;

Art. 1. L arrêté de conflit ci-dessus visé est confirmé. — Art. 2. Sonl considérés comme non avenus l'exploit introductif d'instance et l'acte d'appel ci-dessus visé, sauf en ce qui concerne la demande dirigée contre le sieur Roqueplan.

Du 27 nov 1856.-Décr. cons. d'Et.-M. du Martroy, rap.

(1), (Comp. Ling C. comp. Guy.) - NAPOLÉON, etc.; - Vu le rap

un facteur de la poste, à raison de ce que cette lettre renfermant des valeurs, aurait été remise par le facteur à un tiers, contrairement aux recommandations du destinataire (cons. d'Ét. 10 sept. 1855, aff. Saint-Sèbe, D. P. 56. 3. 34). — Et en pareil cas, le défaut d'autorisation des poursuites ne saurait donner lieu à conflit (même décis.). ·

57. Mais il suffit qu'aucun fait personnel ne soit articulé à l'appui de l'action en dommages-intérêts, dirigée contre un chef de service et le ministre sous l'autorité duquel il est placé, pour que cette action soit de la compétence exclusive de l'autorité administrative, comme tendant à obtenir une condamnation contre l'Etat (cons. d'Ét. 6 déc. 1855, aff. Gloxin, D. P. 59. 5. 35).

58. Les difficultés qui s'élèvent en matière de pensions, de traitements, sont encore de la compétence de l'autorité administrative (V. Pension, nos 77 et suiv., 170, 192 et suiv.; Traitement, nos 85 et suiv., 110, 115, 152). I a même été décidé que c'est à l'administration qu'il appartient de fixer et liquider le salaire dù à un particulier préposé à la garde d'une maison, par ordre du préfet : « Considerant qu'il s'agit de la liquidation de salaires administratifs réclamés par un agent de l'administration, et qu'aux termes de l'arrêté ci-dessus visé (2 germ. an 5), c'est à l'autorité administrative seule qu'il appartient de fixer et de liquider ces salaires » (cons. d'Et. 1o mai 1822, M. Peyronnet, rap., aff. Reinquin).

59. Du reste, lorsque la réclamation du créancier de l'État soulève l'examen et l'appréciation d'actes administratifs, aucune difficulté ne peut s'élever les tribunaux sont manitestement incompétents.—C'est ainsi qu'il a été décidé: 1o que les tribunaux sont incompétents, soit pour interpréter les arrêts administratifs de l'ancien conseil, soit pour prononcer, entre particuliers, sur une indemnité à laquelle le trésor est intéressé, en ce qu'elle devait être fournie pour lui sous une condition qui n'a pas été remplie (cons. d’Ét. 6 fév. 1811) (1);— 2o Que c'est à l'autorité administrative seule qu'il appartient de pro

port de notre grand juge ministre de la justice, ayant pour objet de faire confirmer un arrêté par lequel notre conseiller d'Etat, préfet du département de la Seine, a élevé le conflit d'attribution et revendiqué, comme étant du ressort de l'autorité administrative, toutes les contestatic s existantes entre les actionnaires de la compagnie Ling et ceux de la compagnie Guy-Dennesson, sur une indemnité de 200,000 fr. accordée à la première de ces deux compagnies, à charge de fournir à la ville de Paris 600,000 pieds cubes de charbon épuré, et sur une autre indemnité accordée par un arrêt du conseil du roi, du 7 juin 1785, lequel arrêt révoque, en outre, le privilége de la compagne Ling, et en investit les sieurs Bourgeois, Faujas de Saint-Fonds et consorts : Vu le jugement du tribunal du cinquième arrondissement de Paris, en date du 20 oct. 1790, par lequel la compagnie Guy-Dennesson a été déclarée non recevable dans ses demandes; un autre jugement du quatrième arrondissement de Paris, rendu le 9 therm. an 3, qui réforme le précédent jugement, et condamne la société Ling à payer à la société Dennesson la somme de 166,000 fr.; - Le jugement du tribunal de cassation, du 29 mess. an 3, qui rejette le pourvoi des sieurs Laboulaye, Marie et Caignard, actionnaires de la compagnie Ling; - Vu l'assignation pour comparaître devant notre cour de Paris, donnée à la requête du sieur Caignard du Rotoy, à plusieurs actionnaires de la compagnie Ling, pour qu'ils aient à le garantir et indemuiser des poursuites dirigées contre lui;

Considérant que les contestations qui ont existé entre les deux compagnies avaient pour objet de faire décider si l'intention du roi avait été d'accorder les deux indemnités à la compagnie Ling exclusivement, ou si la compagnie Guy-Dennesson, qui jouissait dans le Lyonnais d'une partie du privilege concédé originairement au sieur Stuart, et acquis depuis par la compagnie Ling, pouvait demander une portion de cette indemnité, à raison de la révocation de la totalite du privilege;-Considérant que cette question tend à faire interpréter un acte de l'autorité souveraine, rendu en matière administrative; - Considérant, en outre, qu'il n'est pas justifié que la compagnie Ling ait fait la fourniture pour laquelle il lui avait été accordé une somme de 200,000 fr.; que dès lors l'Etat est intéressé dans ces diverses contestations, qu'il peut avoir des réclamations à former contre la compagnie Ling;

Art. 1. L'arrêté par lequel notre conseiller d'État, préfet du département de la Seine, a élevé le confit d'attribution et revendiqué, comme étant du ressort de l'autorité administrative, la connaissance des contestations existantes entre la compagnie Dennesson et la compagnie Ling, est approuvé.

Du 6 fév. 1811.-Décr. cons. d'Et.

TRESOR PUBLIC.-CHAP. 3, SECT. 5, ART. 4.

noncer sur la demande en payement d'une créance qui a pour
origine des fournitures faites à l'Étal, par suite de réquisitions,
et qui entraîne l'appréciation du sens et des effets d'une con-
vention diplomatique et de divers actes administratifs (cons.
d'Et. 7 août 1843, M. Moltet, rap., aff. Schweighauser).

590. Décidé pareillement que si, par une décision rendue en l'an 2 par une administration de district, il a été déclaré que les dettes contractées pour la construction d'un canal d'arrosage étaient devenues dettes nationales, les tribunaux ne peuvent juger le contraire; qu'à supposer que le district eût mal décidé, il fallait s'adresser à l'autorité administrative supérieure pour faire réformer sa décision et non aux tribunaux (cons. d'Ét. 9 mess. an 13, aff. d'Agard).

581. Les tribunaux civils sont encore incompétents pour statuer: 1° sur l'action intentée par un créancier de l'État contre un payeur, à l'effet de faire décider qu'une pièce exigée par ce payeur est inutile et qu'il devra payer sans elle: ce débat doit être soumis au ministre des finances, et ensuite, s'il y a lieu, au conseil d'État (Metz, 12 mai 1859, aff. Vaissié, D. P. 60. 5. 117); 2° Sur la demande formée par un particulier contre le ministre des finances, pour obtenir payement des arrérages d'une rente viagère inscrite au grand-livre de la dette publique (cons. d'Et. 23 août 1838) (1).

582. Il résulte de la jurisprudence du conseil d'État retracée ci-dessus, no 574, que si, en principe, l'autorité administrative est seule compétente pour connaître des actions qui tendent à faire déclarer l'État débiteur, il est certaines de ces actions qui, par exception, appartiennent à la juridiction ordinaire. Reste à savoir maintenant quelles sont ces exceptions. L'État peut être envisagé sous deux rapports différents: ou comme puissance publique ou comme propriétaire. Au premier cas, il n'est justiciable que de lui-même; lui seul, il peut apprécier les actes et dire les conséquences qui en résultent, soit en sa faveur, soit contre lui: c'est à l'État, envisagé sous ce rapport seulement, que s'applique la jurisprudence qu'on vient de retracer.- Mais au second cas, c'est-à-dire lorsque l'État est actionné comme propriétaire, il est soumis pour ses biens aux mêmes règles que les particuliers, et comme eux, justiciable des tribunaux (c. nap. 541, 560, 2227), sauf le cas où il serait dérogé à cette règle par un texte exprès (V. Compét. admin., nos 64 et suiv.;

--

(1) (Lelong.)- LOUIS-PHILIPPE, etc.; Vu les décrets des 8 vent. et 26 fruct. an 13 et l'avis du conseil Vu la loi du 24 août 1793; d'Etat du 13 avril 1809, approuvé le même jour; -Vu l'art. 13, tit. 2, de la loi des 16-24 août 1790, celle du 16 fruct. an 3; - Considérant que, aux termes des lois et décrets ci-dessus visés, le service du trésor public, pour le payement des arrérages des rentes viagères inscrites au grand-livre de la dette publique, est soumis à des règles administratives dont la connaissance ne peut être déférée à l'autorité judiciaire; Art. 1. L'arrêté de conflit est confirmé.

Du 23 août 1838.- Ord. cons. d'Et.-M. de Gérando, rap.

(2) (Hérit. de Luscan C. l'Etat.) - LOUIS-NAPOLEON, etc. ; — Vu l'arrêté de conflit pris le 17 mai 1852 par le préfet des Hautes-Pyrénées, dans une instance pendante devant la cour d'appel de Pau, entre ledit préfet, représentant l'Etat, et les héritiers de Luscan;-Vu les art. 115 à 116 c. for. et l'art. 149 de l'ord. réglementaire du 1er août 1827; Vu la loi du 25 janv. 1852 et les ordonnances des 1er juin 1828 et 12 mars 1831; Considérant que l'action intentée contre l'Etat par les héritiers de Luscan a pour objet de faire opérer le partage des bois de la vallée de Barousse, dont ils ont été reconnus propriétaires en vertu de décisions judiciaires passées en force de chose jugée; que, d'après le code forestier et l'ordonnance réglementaire du 1er août 1827, les actions en partage des bois dans lesquels l'Etat a des droits de propriété indivis avec des particuliers doivent être intentées et suivies conformement au droit commun et dans les formes ordinaires, c'est-à-dire devant l'autorité judiciaire; que le partage comprend la liquidation des sommes que les copropriétaires peuvent se devoir respectivement à raison des produits des bois et des dépenses auxquelles ces bois ont donné lieu pendant la durée de l'indivision; que la cour de Pau, en se fondant sur ces motifs, a déclaré l'autorité judiciaire compétente pour prononcer sur la liquidation demandée par les héritiers de Luscan, mais a réservé à l'autorité administrative l'application, s'il y a lieu, des lois relatives aux déchéances établies contre les créanciers de l'Etat et le jugement des difficultés qui pourront s'élever sur la régularité ou la portée des actes administratifs qui viendraient à être produits dans le cours de la liquidation; et qu'en décidant ainsi, la cour a fait une juste appréciation des attributions respectives de l'autorité judiciaire et de l'autorité

l'avons dit no 537, la nécessité pour le créancier de subir la Dom. de l'État, nes 201 et suiv.), et sauf encore, comme nous liquidation administrative, après même qu'il a obtenu jugement de condamnation contre l'État. Il a été décidé en conséquence que l'autorité judiciaire est seule compétente pour statuer: 1° sur une demande ayant pour objet le payement de travaux faits dans un immeuble appartenant à l'État (cons. d'El. 28 mars 1838, aff. Barrau, V. Dom. de l'État, no 202-2o); — propriété indivis avec des particuliers, et sur la liquidation des actions en partage des bois dans lesquels l'État a des droits de 2o Sur les sommes que les copropriétaires peuvent se devoir respectivement à raison des produits des bois et dépenses auxquelles ils ont donné lieu pendant la durée de l'indivision (cons. d'Et. 14 sept. 1852 (2);- 3o Sur la demande en indemnité formée contre l'État par le propriétaire d'une usine à raison de l'avantage que l'État peut retirer, pour l'alimentation des abreuvoirs d'un (cons. d'Et. 4 juin 1837) (3). quartier de cavalerie, d'un barrage exécuté par le propriétaire 1841, aff. de Bavre, no 569-5o; 4 fév. 1824, aff. Bourbon-Conti, - V. cependant cons. d'Et. 9 mai n° 569-1°.

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plication des règles du droit commun, sans mélange d'aucun 583. De même, si l'action formée par l'État nécessite l'apacte administratif à apprécier ou à interpréter, les tribunaux ordinaires seront compétents à l'exclusion de l'autorité administrative. Il en est ainsi notamment lorsqu'il s'agit de l'exécution de contrats du droit civil passés amiablement entre des particuliers et l'Etat.-Ce point de doctrine paraît admis sans contestation par la jurisprudence.-En conséquence, doivent être portées devant les tribunaux civils et non devant l'autorité administrative: 1° l'action en résolution pour défaut de payement du prix de la vente d'une mine, dont l'État est détenteur, comme étant aux droits de l'acquéreur (cons. d'Ét. 10 fév. 1816, aff. Reversat, V. Frais et dépens, no 1206); · en restitution de fruits, formée par le vendeur non payé contre 2o La demande l'Etat, comme tiers détenteur de l'immeuble, même en ce qui (cons. d'Ét. 16 mai 1839) (4); -3° La demande tendant à faire concerne la liquidation des fruits qui doivent être restitués condamner l'État à contribuer aux sommes payées pour parer à une éviction, à laquelle l'Etat opposait que l'immeuble acquis par lui ayant été affecté à une destination publique, aucune Art. 1. L'arrêté de conflit, pris le 17 mai 1852 par le préfet des Hautes-Pyrénées, est annulé. Du 14 sept.1852.-Décr. cons. d'Et.-M. Boulatignier, rap. (3) (Lemosy.) — NAPOLÉON, etc.; 16 sept. 1807; Vu les lois des 28 pluv. an 8 et En ce qui touche la réclamation du sieur Lemosy, tendant à ce que l'Etat, à raison de l'utilité que l'administration de la guerre retirera, pour l'alimentation des abreuvoirs du quartier de cavalerie, de l'élévation donnée aux eaux par le barrage de l'exposant, lui ren bourse une part tant des dépenses de construction dudit barrage que du prix qu'il a payé pour obtenir le droit d'appuyer ce barrage sur la rive opposée, et à ce que cette part contributive soit fixée à 1,600 fr.: - Considérant que, parmi les réclamations formées par le sieur Lemosy contre notre ministre de la guerre, la seule dont il appartienne à la juridiction administrative de connaître est celle qui a pour objet d'obtenir une indemnité pour la réparation du dommage direct et matériel que les travaux exécutés par l'administration de la guerre ont causé audit usinier; Considérant que le seul dommage direct et matériel dont se plaigne le sieur Lemosy est la diminution causée à la force motrice de son usine par la prise d'eau destinée à alimenter les abreuvoirs susmen.. tionnés; que pour ce préjudice une indemnité de 2,100 fr. lui a ete accordée par l'arrêté attaqué, et que cette indemnité est acceptée par lui;

administrative en cette matière;

En ce qui touche l'indemnité de 300 fr. réclamée pour la submersion de la partie d'un ilot situé au milieu de la Durrenque, par suite de la construction du quai de la caserne de cavalerie, qui aurait rétréci sur ce point le lit de la rivière : Considérant qu'il résulte de l'expertise

et qu'il est reconnu par le sieur Lemosy que la propriété dudit flot est contestée entre la ville de Castres et lui; qu'ainsi, en l'etat, il ne peut être statué sur sa réclamation;

propriétaire de la partie d'ilot qu'il prétend être submergée par suite des Art. 1. La requête du sieur Lemosy est rejetée, sous la réserve des droits qu'il pourra faire valoir, s'il est reconnu par l'autorité compétente travaux exécutés par l'administration de la guerre.

vente par Reversat à la compagnie Slack des mines d'Alun de Pataynes (4) Espèce : · (Hérit. Reversat C. trésor publ.)—Le 20 niv. an 12,

Du 4 juin 1857.-Décr. cons. d'Et.-M. Pascalis, rap.

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