Page images
PDF
EPUB

CHAP. 9.

SECT. 1.

SECT. 2.

SECT. 3.

ECT. 4.

ART. 1.
ART. 2.

SECT. 5.

CHAP.10.

DE LA COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE TRAVAUX PUBLICS
(n° 1105).

De la compétence administrative en général en matière
de travaux publics (no 1106).

De la compétence des conseils de préfecture quant à
l'interprétation et à l'exécution des marchés (no 1124).
De la compétence des conseils de préfecture en matière
de torts et dommages causés aux propriétés par l'exé-
cution des travaux publics (no 1138).

De la compétence des conseils de préfecture en cas de
terrains pris, fouillés, ou occupés pour l'exécution des
travaux publics (no 1204).

De la compétence en matière de terrains pris (no 1204).
De la compétence en matière de terrains fouillés ou
occupés (no 1210).

Compétence de l'autorité judiciaire en matière de tra-
vaux publics (no 1244).

[blocks in formation]

aux gages de la couronne; ainsi, une ordonnance du roi Charles V, du quatorzième siècle, disait déjà en propres termes : « Nos ingénieurs des ponts et chaussées. » Au reste, dans tous les temps, en France, les constructions publiques ont été extraordinairement développées.—Ainsi, pour les besoins du culte, le clergé posséda de grands artistes qui ont élevé nos magnifiques et nobles basiliques de Paris, de Rouen, de Caen, d'Amiens, de Saint-Denis et de Reims, pour ne citer que les plus célèbres. Relativement à la guerre, tant de forteresses gothiques et de beaux ouvrages de défense, qui protégeaient les villes du roi et des seigneurs, la célèbre Bastille, Vincennes, Montlhéry, et tant d'autres châteaux dont il reste, çà, et là, des vestiges, attestent qu'il y a eu de bons constructeurs militaires, durant l'âge de la barbarie. Le roi, au moyen âge, avait le maître de ses œuvres, qui était alors le directeur des places fortes de la Relativement à la marine, la conquête de l'Angleterre et les guerres portées durant plusieurs règnes dans la Palestine, puis, plus tard, en Italie, prouvent que la construction des vaisseaux n'était pas non plus négligée au moyen âge. 7. Il y a eu, dans l'ancienne France, trois sortes d'ingénieurs 1° d'abord, pour la construction des routes et chaussées : les ingénieurs des ponts et chaussées du roi, dirigés par les trésoriers de France, pour l'exécution et l'entretien des routes 2o Dans les pays d'Etat, et ponts à la charge du trésor; les ingénieurs des ponts et chaussées entretenus par l'administration de la province, principalement en Languedoc et en Bretagne; ces pays d'Etat ont eu, à Toulouse et à Rennes, des 3o Et enfin, il y avait une écoles des ponts et chaussées; LEGISLATION DES TRAVAUX CHAP. 1. HISTORIQUE. classe particulière d'ingénieurs pour les turcies et levées, charPUBLICS. DROIT COMPARÉ. gés spécialement de la construction et de l'entretien des levées, tout le long des rivières de la Loire et de ses affluents, l'Allier, la Nièvre, le Cher et autres. Il avait été formé des circonscriptions de communes, qui étaient mises à contribution pour réparer les levées, chaque fois que des débordements de la Loire les avaient dégradées, de manière à menacer les terres adjacentes au cours du fleuve. Ces travaux étaient dirigés par un intendant particulier qui avait pour ressources les contributions locales, son budget étant spécialement affecté à cette nature de dépense.

DES TRAVAUX DES DÉPARTEMENTS, DES COMMUNES, DES
ET ASSOCIATIONS AYANT LE
ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
CARACTÈRE DE TRAVAUX PUBLICS (no 1264).
SECT. 1. Travaux publics communaux (no 1265).
SECT. 2. Travaux publics départementaux (no 1290).
SECT. 3.

Travaux dépendant du service d'autres établissements
publics, tels qu'hospices, prisons, colléges, associations
de propriétaires et autres sociétés civiles (no 1293).

-

4. En remontant au moyen âge, on voit l'Europe entière livrée à la barbarie et au brigandage de mille tyrans, qui, sous les titres pompeux de grands barons, de comtes, de seigneurs justiciers, opprimaient le peuple comme de sauvages conquérants, se faisaient la guerre entre eux et empêchaient tout développement de l'agriculture, de l'industrie et des arts. L'humanité n'avait d'asile qu'au sein de l'Eglise et des couvents, qui, dominant ces barbares de toute l'influence des idées religieuses, domptaient leurs passions les plus violentes, et cherchaient à en réparer les funestes effets. Les couvents étaient alors les seuls dépositaires de la science et des arts: en Europe, quelques moines cultivaient silencieusement la science d'Archimède et ses applications à des constructions d'utilité publique. L'architecture, qui a tout d'abord élevé les églises, les couvents et les collèges du moyen âge, fut longtemps le monopole Dans le douzième siècle, un ordre militaire et des religieux. religieux, filiation de l'ordre des Templiers, s'établit sous le titre de Frères du pont, pour construire des ponts sur les rivières, et protéger, les armes à la main, les convois du commerce, qui étaient souvent attaqués sur les routes de terre et d'eau. Ce sont eux qui ont construit le pont Saint-Esprit, lequel a donné son nom à un bourg sur le Rhône. L'utilité des ponts `était si bien sentie à cette époque, que les lieux où ils se rencontraient leur ont emprunté leur nom, comme Pont-SaintMaxence, Pont-Audemer, Pont-l'Evêque (Calvados), Pont-l Evèque (Oise), Pont de l'Arche, Pont de Cé, Pont à Mousson, etc.

5. Peu à peu l'autorité royale se relève de ses ruines; le roi, seigneur suzerain du royaume entier, se ligue avec plusieurs des grands vassaux pour y rétablir la paix intérieure; il institue des foires et marchés; il rétablit enfin l'activité du travail et l'autorité de la loi. Le territoire soumis au roi s'appelait son domaine, et ne différait guère des ficfs des autres barons du royaume. Le roi se prit à ouvrir de grands chemins, afin de faire reconnaître plus facilement son autorité, et de faire goûter aux peuples opprimés les bienfaits de sa justice. Les grands chemins formèrent, dans le langage de l'ancien droit, une partie du domaine royal et entrèrent dans le droit régalien. Les trésoriers de France furent chargés de la création et de l'entretien des routes, anciennement nommées chemins royaux. Ils adoptaient les plans, donnaient les alignements et maintenaient, par leur autorité, toute la police de la voirie.

6. Le peu d'hommes instruits dans la géométrie et dans la conduite des ouvrages d'art qui pussent se trouver alors étaient

[merged small][ocr errors]

S. Sous le règne de Louis XI, en vertu d'un édit de 1471, les propriétaires de terrains renfermant des mines métallurgiques étaient assujettis à les laisser exploiter, selon les règies de Part, par des entrepreneurs autorisés à cet effet par le grand maître des mines, sous la charge de payer à ces propriétaires des indemnités préalables, pour le dommage cansé à la surface, et à la couronne le dixième des produits de l'exploitation. Ainsi donc, les arts métallurgiques avaient dès lors un certain développement. V. Mines, no 8.

9. Regne de François Ier.—A la suite des folles guerres qui ont été portées durant plusieurs règnes, en Italie, par Charles VIII, Louis XII et François Ier, ce dernier prince attira en France les plus célèbres artistes de l'Italie, et mérita le surnom de restaurateur des lettres, des beaux-arts et des sciences.-Léonard de Vinci nous apportait la découverte de l'écluse à sas, déjà mise en pratique à Viterbe, en Italie. Le premier essai en fut fait, durant son séjour en France, sur la rivière de l'Ourcq, qu'on avait, dès cette époque, le projet do rendre navigable (Dutens, Hist. de la navig., t. 1, p. 81).-Le Primatice, Léonard de Vinci, et autres célèbres architectes et peintres, bâtirent le palais de Fontainebleau, le pavillon des Tuileries, les châteaux de Chambord, de Saint-Germain-en-Laye, et nombre de beaux édifices qui signalent dans l'art l'époque de la Renaissance.-Ce prince, non moins épuisé par sa magnificence à l'intérieur que par les frais de la guerre, et voulant parer au déficit du trésor, fit reparaître en France la fiscalité la plus regrettable, et vendit à profusion des offices créés pour satisfaire aux besoins d'argent du prince. -On vit les fonctions d'ingénieurs converties en offices vénaux, en propriétés de famille. Les offices d'ingénieurs des turcies et levées furent exploités, depuis lors, dans des vues sordides de gain, plutôt qu'avec intégrité et dévouement au bien public, et en exagérant les contributions des communes qui en étaient passibles pour la réparation des levées. — A Paris même, les ouvrages d'entretien des routes de la généralité ont été réglés, jusqu'en 1750, par un moine de Pontoise, dont la riche abbaya

était propriétaire de l'office d'ingénieur des ponts et chaussées de la généralité. Ce moine, du fond de sa cellule, réglait le décompte des ouvrages, sur les certificats incertains de réception, délivrés par les curés de campagne (Essai sur les ponts et chaussées, la voirie et les corvées, par Duclos, 1759, p. 403).

10. Sous le règne de François Ier, les Etats de Bretagne s'étaient fait autoriser, par un édit, en 1539, à rendre la Vilaine navigable, depuis Redon jusqu'à Rennes.-Ce prince a fait exécuter la première voie de navigation artificielle; c'est le canal partant de la Roche-Bernard, à l'embouchure de la Vilaine et finissant à Saint-Malo, à l'embouchure de la Rauce; au moyen d'un trajet de trente lieues, le commerce a pu s'épargner une navigation de cent-cinquante lieues, dans une mer orageuse et infestée par les pirates (Dutens, t. 1, p. 289).

11. Règne d'Henri II.-Sous ce règne on voit se distinguer un Ingénieur français, appartenant à une province qui avait son gouvernement propre, à la Provence, pays d'Etat, dont l'administration élective et confiée par ses habitants aux hommes les plus distingués n'admettait pas la vénalité des offices; Adam de Craponne, né dans la noblesse, s'est senti le cœur d'un citoyen et n'a pas cru déroger à sa naissance en travaillant pour le public; il a laissé de grands souvenirs, par son patriotisme, ses travaux et son désintéressement, ainsi que par ses lumières et la portée de ses vues.

Il a d'abord non-seulement conçu, mais mis à exécution le canal d'irrigation tracé à travers la plaine de la Craü, près d'Arles, qui a élevé au plus haut degré de fécondité des terres alors profondément pierreuses et tout à fait stériles, et qui existe encore; ce canal est connu sous le nom d'OEuvre de Craponne.

Richelieu accepta l'offre d'entrepreneurs qui se chargèrent de l'a
chèvement du canal de Briare, moyennant un tarif de péage.
Cet homme d'Etat, qui a porté les derniers coups à la puissance
féodale, afin d'asseoir l'autorité du roi et la centralisation du
pouvoir sur ses ruines, fit des efforts persévérants pour abolir
les péages établis sur les grands chemins et sur les rivières au
profit des seigneurs hauts justiciers, ou pour les forcer, tout au
moins, à faire les dépenses d'entretien qu'exigeaient ces voies de
transport. Le génie de Richelieu se porta vers le développement
de nos forces navales; la France lui doit la création de nos pre-
miers ports et arsenaux maritimes, de Toulon, Brest et Rochefort.
14. Reyne de Louis XIV. L'œuvre importante d'éteindre
les péages abusifs ou de forcer les bénéficiaires à en employer
le produit pour l'utilité publique fut continuée par le grand mi-
nistre Colbert, sous le règne de Louis XIV; il établit un bu-
reau du commerce, composé d'administrateurs habiles et de
notables commerçants, et chargé de rechercher tous les moyens
de favoriser les arts et manufactures, et d'activer les relations
commerciales en dehors comme au dedans. La direction

Quel

des mines fut alors rattachée au bureau du commerce.
ques routes, conduisant de Paris aux frontières, furent entre-
prises avec la magnificence qui caractérisait toutes les œuvres
de ce règne. Mais le roi s'abandonna à un goût exagéré
pour les habitations de luxe. I institua une intendance des
bâtiments, dont l'architecte Mansard fut investi. Les ingé-
nieurs, encore institués à titre d'office, durent facilement être
effacés par le crédit du premier architecte de la cour; celui-ci
fut chargé de la construction d'un pont en pierres à Moulins, sur
l'Allier. L'illustre Mansard était étranger à toute étude de l'art
hydraulique; il ne sut ni prévoir, ni calculer le volume et la puis-
sance des eaux dans les crues; aussi, en peu d'années, son pont
s'écroula, et cet échec personnel fut favorable au corps des in-
génieurs. Ceux-ci firent connaître, en cette occasion, qu'à côté de
l'architecture des bâtiments civils, il y avait un ordre de con
struction plus savant et plus varié dans ses ressources, qui s'ap-

De plus, et ce qui fait son plus beau titre de gloire, de Craponne a conçu le premier le projet de joindre la Méditerranée à l'Océan, en faisant communiquer l'Aude avec la Garonne. Son projet a été exécuté plus tard par le célèbre Riquet, sans que ce dernier ingénieur ait suivi les mêmes plans et adopté les mêmes moyens d'exécution; mais la première pensée de ce canal fait toujours honneur à la mémoire de Craponne. Il fut, dit-on, victime de la jalousie des ingénieurs italiens, qui l'auraient empoi-pliquait aux grands ouvrages d'utilité publique, visant à la sonné, selon la mode introduite chez nous par les Médicis et leurs courtisans.

12. Règne d'Henri IV. Ce règne est une époque signalée dans l'histoire des travaux publics, par l'esprit d'organisation et de généralité qu'a su leur imprimer le ministre Sully, pour en étendre le bienfait par toute la France. Ce règne a laissé dans notre législation des monuments impérissables: l'édit de 1599 concernant le desséchement des marais; l'édit de 1601, réglant l'exploitation des richesses minérales de la France; enfin ceux de 1607, portant création de la charge de grand voyer, dont était revêtu le duc de Sully, sorte d'ébauche d'une direction générale des routes et autres voies de communication. Il y eut alors un grand maître de mines; la direction en était confiée au duc de Bourbon, parent du roi. Un Hollandais, riche et industrieux, Bradleï, fut admis à l'entreprise générale des desséchements de marais; et toutes les facilités que la législation pouvait donner à ses travaux lui furent accordées par le célèbre édit de 1599, dont le préambule respire des sentiments de philanthropie et des vues d'économie politique dignes d'un siècle plus éclairé. Sully, l'ami du roi et son premier ministre, fut, comme nous venons de le dire, élevé à la dignité de grand voyer de France. Il avait, à ce titre, la mission d'organiser nos routes et grands chemins et de diriger tous les travaux nécessaires à la libre circulation et à la sûreté du commerce. Ce fut un prélude du ministère des travaux publics, bien avant qu'aucune autre nation de l'Europe fut entrée dans cette voie.-Henri IV a entrepris le premier canal à point de partage qui ait été exécuté en Europe, le canal de Briare, auquel Sully appliqua, pendant plusieurs années, les bras des troupes. Ce canal, qui comDunique de Loire en Seine, était destiné à assurer les approvisionnements de Paris; c'était le premier tronçon de la grande ligne de navigation, dont le projet existait dès cette époque, de la Méditerranée à l'Océan, pour effectuer les transits des marchandises étrangères du nord au midi de la France, c'est-à-dire dans sa plus grande largeur (M. Poirson, Hist. du règne d'Henri IV, 1857, 3 vol. in-8°).

13. Regne de Louis XIII. Sous Louis XIII, le cardinal de

solidité plutôt qu'à la décoration monumentale, et qui est du ressort des ingénieurs des ponts et chaussées.

--

15. Sous le règne de Louis XIV, le génie des entreprises d'utilité publique, qui s'était mis en lumière dans les travaux de Craponne, de Bradleï, des concessionnaires du canal de Briare, surgit avec un nouvel éclat dans l'entreprise du canal de Languedoc, conçue et exécutée par Riquet. Ayant consacré toute sa fortune à cette œuvre, Riquet, encouragé et protégé par Colbert, reçut d'importants subsides des états du Languedoc et un appui encore plus généreux de la couronne. L'illustre Vauban suivait cette entreprise de tout son intérêt, et il éclairait Riquet des conseils de son expérience. Louis XIV avait accordé dix millions successivement pour les travaux du canal du Midi. Après son achèvement, il en fit don en toute propriété aux enfants Riquet, en récompense des services rendus à la France, par le principal auteur de ce bel ouvrage. - Riquet, l'auteur des premiers plans de ce canal, et qui en est devenu adjudicataire et concessionnaire en toute propriété, mourut avant la réception des travaux; Colbert plus heureux que lui, a jouí, sur la fin de sa carrière, de l'honneur d'en ordonner l'inauguration, sans qu'il aitassisté aux fêtes qui ont été célébrées à ce sujet avec éclat par les populations des villes et campagnes de tout le Languedoc.

16. A la fin du règne de Louis XIV, le ministre Desmarets, qui avait continué les travaux de Colbert, organisa, dans un esprit de centralisation, un service des ponts et chaussées, composé d'inspecteurs et de sous-ingénieurs, places, dans chaque généralité, sous les ordres de l'intendant et des trésoriers de France.-L'expropriation des terrains nécessaires pour les grands ouvrages avait lieu légalement en vertu d'édits enregistrés par les parlements dont dépendait chaque territoire, tels que ceux de 1638 et 1642, portant concession du canal de Briare, de mars 1679, pour le canal d'Orléans ; ces édits enjoignaient à tous propriétaires des terrains compris dans les plans reconnus par un arpentage exact, de les laisser et céder, à la charge, par les concessionnaires, d'en payer le prix; ils autorisaient ces derniers à détourner et diminuer les eaux, à supprimer les moulins, à passer sur les héritages, etc. (V. Expropr. publ.. no. 4 et suiv.).

[ocr errors]

concourant avec le canal de Briare au service des approvision nements de Paris. D'autres canaux furent entrepris sous les règnes suivants, par les Etats de Bourgogne, dans le Charolais, et dans la Picardie, par différents particuliers, encouragés el soutenus par les administrations locales (Delalande, Hist. des canaux, in-fo).-L'infortuné Zacharie, victime de sa passion pour le bien public, entreprit à ses frais le canal de Givors, afin d'offrir de nouveaux débouchés aux charbons des bassins de SaintEtienne et de Rive-de-Gier. Il y consomma sa ruine; mais Louis XVI, en 1784, accorda à sa veuve et à ses fils, à titre d'indemnité et de récompense nationale, la concession perpétuelle de ce canal, dont l'importance ne devait pas se mesurer sur son étendue.

17. Règne de Louis XV. Jaloux de réparer les effets désastreux des longues guerres du règne précédent, de rétablir en France l'agriculture, le commerce et les manufactures, vraies sources de la richesse publique, le gouvernement de la régence ne trouva rien de plus urgent pour en faciliter l'essor et les progrès, que d'ouvrir de toutes parts dans le royaume des voies nouvelles de communication, de terre et d'eau, et aussi de faire disparaître sur le cours de nos fleuves et rivières navigables les péages aussi abusifs que nombreux, qui entravaient la navigation en surchargeant le commerce de taxes exorbitantes. En 1722, le gouvernement de la régence créa, pour l'exécution des travaux publics à la charge de l'Etat, le corps de nos ingénieurs des ponts et chaussées. A la tête furent placés deux chefs avec des attributions différentes, mais devant sans cesse conférer entre eux pour la partie administrative et le règlement des crédits, c'était un intendant des finances, chargé du département des ponts et chaussées; pour la partie théorique et l'examen approfondi des projets et des plans, ce fut un premier ingénieur de France, ayant la haute direction pour l'exécution des travaux, la réception des ouvrages et le contrôle de la dépense.

18. En 1750, le cardinal de Fleury, premier ministre, institua à Paris deux écoles, l'une pour les ponts et chaussées, l'autre pour les mines, et à Mézières une école du génie et de l'artillerie. Le corps des ingénieurs des ponts et chaussées reçut alors une organisation définitive sous un intendant spécial, dont l'autorité s'étendait sur les intendants de nos pays de généralités; mais les pays d'Etat conservèrent, pour les ponts et chaussées, leur administration propre. L'intendant des turcies et levées de la Loire et de l'Allier, dont les ingénieurs étaient institués à titre d'office, continua de subsister à part; mais l'office de la généralité de Paris, racheté à l'abbaye qui le possédait, disparut. Ce fut le dernier coup porté à l'influence monacale dans les travaux publics.

23. Vers la fin de ce règne, la suppression de la corvée fut accueillie avec acclamations, comme brisant l'une des dernières chaînes qui tenaient le peuple asservi à la féodalité; il en fut de même de la suppression prononcée par l'assemblée constituante, au mois de mars 1790, de tous les péages établis sur les fleuves et rivières. Cependant, à cette dernière époque, M. de La Millière, intendant des ponts et chaussées, signalait à cette assemblée le déficit des anciennes ressources, résultant de l'abolition de la corvée et des péages, et l'urgence qu'il y avait d'y faire face au moyen de barrières qui seraient établies sur les routes et chemins, et sur les rivières; en même temps, il proposait de modérer les péages, dans les limites du produit nécessaire et suffi sant pour l'entretien des travaux (Mémoire, in-4o, 1790).

24. L'assemblée constituante a maintenu et réorganisé le corps des ponts et chaussées, par le décret des 31 déc. 179019 janv. 1791, qui établit des conférences entre son comité des travaux publics et du commerce et l'assemblée qu'on a nom mée depuis conseil général (art. 3 et suiv.). Elle a aussi créé la commission mixte, pour concilier l'intérêt si grand de la défense de nos places et frontières avec l'établissement des routes et canaux (même décret, art. 6). — A l'époque si solennelle pour la France où toutes les lois furent mises au creuset d'une réforme complète, l'assemblée constituante abolit ce qui restait encore des péages établis anciennement sur nos fleuves et rivières, et des droits de barrière qui pouvaient encore exister sur les chemins publics. Mais les règlements concernant la grande voirie furent provisoirement maintenus par le décret des 19-22 juill. 1791; ils sont encore aujourd'hui en vigueur. La poursuite des contraventions et l'application des amendes édictées par ces règlements furent remises aux tribunaux de district (police correctionnelle). Cependant, le décret du 7 sept. 1790, additionnel à celui des 16-24 août 1790, concernant l'organisation judiciaire, confia aux directoires des dé

--

19 Sous Louis XIV, la route de Paris à Orléans avait été revêtue d'un pavage par les soins de Colbert (de 1670 à 1680); c'est la première route pavée qui ait été faite en France depuis les voies romaines. Durant la régence, il fut résolu de couvrir le sol entier de la France de 8 à 10,000 lieues de routes royales, pavées, garnies de fossés, plantées d'arbres sur leurs bords, pour relier la capitale aux chefs-lieux de nos provinces et établir de faciles communications entre nos villes et bourgs. Ce grand travail s'est poursuivi pendant un demi-siècle, sous la direction de MM. de Trudaine père et fils, qui se sont succédé dans l'intendance des ponts et chaussées, assistés du premier ingénieur de France, l'illustre Péronnet, à l'initiative duquel sont dues l'institution du conseil général et l'école des ponts et chaus-partements les attributions des anciens trésoriers de France et sées. La gloire d'artiste habile que cet ingénieur doit à ses plus belles œuvres, les ponts de Neuilly, de la Concorde, de Pont Maxence-sur-l'Oise, ont peut-être trop effacé le souvenir de ses longs services dans l'établissement de nos routes royales, aux travaux desquelles il a présidé pendant cinquante années, dans la dignité et les fonctions de premier ingénieur de France.

20. Sous le règne de Louis XV, l'arrêt du conseil de 1765, à l'instar de l'ord. des eaux et forêts de 1669 réglant la police des rivières navigables et flottables, a servi de base à un grand nombre de règlements, relatifs aux routes et à leurs dépendances et prononçant des amendes contre les contrevenants; règlements émanés, soit du conseil du roi, soit du bureau des trésoriers de France de la généralité de Paris. Ces mesures furent confirmées et complétées sous le règne suivant, par quelques arrêts du conseil encore usuels dans les travaux publics. 21. Règne de Louis XVI. · A l'avénement de Louis XVI, le ministre Turgot, affilié à l'Ecole des économistes, préparait l'abolition de la corvée; il ne songea pas à la remplacer par des barrières et des péages sur les routes. Son ami, de Trudaine, intendant des ponts et chaussées, accepta la devise du laissezfaire et laissez passer, et fut ennemi du système des péages, précédent peut-être regrettable dans la destinée des travaux publics de la France (M. de Fer de La Nouerre, de l'Economie dans les travaux publics, in-12, 1786).

[ocr errors]

22. Sous le règne de Louis XIV, le duc d'Orléans s'était chargé de la construction des canaux d'Orléans et du Loing,

le règlement des contestations relatives aux indemnités dues à des propriétaires pour terrains pris ou fouillés, pour torts et dommages causés par le fait personnel des entrepreneurs, et non par le fait de l'administration, et de celles nées entre l'administration et les entrepreneurs sur le sens et l'exécution des marchés de travaux publics.

25. Convention nationale.—A partir de 1793, les malheurs et les excès politiques qui devaient suivre l'écroulement d'une monarchie établie depuis huit siècles, et la tension nécessaire de toutes les forces sociales pour repousser l'invasion étrangère el étouffer la guerre civile au dedans, ne permirent plus au gouvernement de s'occuper des routes, qui avaient été si magnifiquement construites, plantées et entretenues sous les deux derniers règnes; aussi tombèrent-elles bientôt dans un état de dépérissement funeste pour tous les services, pour l'agriculture el le commerce. Cependant le comité de salut public, qui avait la guerre à soutenir contre toute l'Europe, voulut assurer l'exécution, soit des marchés pour fournitures de toute espèce, dans l'intérêt de nos armées, soit de ceux relatifs à l'entretier des routes; de là des lois importantes, concernant les fournis. seurs et les entrepreneurs de l'Etat; celle à la date du 14 mars 1793, relative à leurs cautions, a créé sur leurs biens immeubles une hypothèque légale, à la date du procès-verbal de l'adjudication et des marchés, et indépendamment du rang de l'inscription. Par un autre décret du 16 frim. an 2, il fut ordonné que tous les travaux publics, notamment les grands chemins,

ponts et levées, et même les chemins vicinaux, dans les cas où ils deviendraient nécessaires au service public, seraient faits et entretenus aux frais de la nation. Les auteurs de ce décret ont puissamment sauvegardé les intérêts du trésor, en ordonnant 1° que les marchés soient passés par adjudication, devant le directoire du district, en présence de l'ingénieur ordinaire de la partie de l'ouvrage qui sera l'objet de l'adjudication (art. 8);

[ocr errors]

2o Que les adjudicataires donneront caution solvable et certifiée (art. 9);-5° Que les approvisionnements et les travaux seront vérifiés tous les mois par les ingénieurs ordinaires (art. 10); 4° Qu'ils seront payés par les receveurs de district au fur et à mesure des ouvrages et des fournitures, d'après les états de situation dressés par les ingénieurs ordinaires, sur le certificat de l'ingénieur en chef du département (art. 11); · 5° Que les ingénieurs en chef feront de fréquentes tournées sur les routes et les ateliers pour accélérer les travaux (art. 12). Poussant encore plus loin les précautions dans l'intérêt du trésor public, en fait de marchés, le décret du 26 du même mois, a prononcé contre les fournisseurs, entrepreneurs ou régisseurs, pour le service de la République, qui seraient convaincus d'avoir obtenu, soit par eux-mêmes, soit par leurs agents, des sommes au delà de celles qui leur revenaient pour leurs marchés, ou des besoins constatés de leur service, la peine de six ans de fer et l'amende d'une somme égale à celle qu'ils auraient indûment touchée. Des fonds avaient été mis à la disposition du conseil exécutif par le décret du 16 frim. pour la réparation des routes; il fut décidé par le décret du 4 pluviôse même année, que ces fonds seraient spécialement affectés « au payement des matériaux, des ouvriers conducteurs et piqueurs immédiatement attachés sur ces travaux. >> - Enfin, le décret du 26 pluv. an 2 a déclaré nulles les oppositions faites sur les sommes dues par l'Etat à ses entrepreneurs en cours d'exécution des travaux, sauf celles qui auraient pour cause les salaires des ouvriers, et le prix des fournitures à solder pour les mêmes travaux. Ce dernier décret est toujours en vigueur (V. infrà, nos 634 et s.).

26. Déjà, dès 1793, la Convention avait institué successivement d'abord les écoles normales, premier foyer de l'enseignemant des sciences; puis l'école des travaux publics, qui les remplaça; puis enfin l'école Polytechnique, qui, substituée à la précédente, a régénéré tous nos services fondés sur l'étude des sciences mathématiques et physiques. La même assemblée a rétabli à Paris les anciennes écoles des ponts et chaussées et des mines, et a reformé, à Metz, l'école du génie militaire et de l'artillerie.

27. C'est sous la Convention que l'architecte Rondelet a fait établir le conseil des bâtiments civils auprès du ministère de l'intérieur, pour soumettre au système de la centralisation, c'est-à-dire au contrôle des hommes les plus compétents, des artistes et maîtres les plus indépendants de caractère et les moins exposés à l'influence de l'esprit de localité, tous les plans et projets des bâtiments destinés à des services publics et exécutés aux frais de l'Etat, des départements, des communes, des hospices et autres établissements publics. Rondelet, savant théoricien, habile architecte et homme d'un grand sens, a lui-même rendu d'immenses services dans ce conseil, où il a siégé pendant longtemps; il appréciait l'importance d'un corps organisé, le stimulant de l'émulation que donnent aux bons esprits un avancement assuré, quoique lent, et la sécurité de l'avenir, enfin la rectitude de jugement, qui naît de l'habitude de prononcer toujours en vue du bien public, suivant les règles de son service, au lieu d'être soumis à l'influence irrésistible de clients dont on est trop ordinairement forcé de ménager l'amitié, les caprices, et souvent même les travers et les intérêts.— Aussi, bien loin de se montrer détracteur du corps des ponts et chausées, Rondelet aurait mis son bonheur et sa gloire à voir fonder un service analogue pour les bâtiments civils; dans ses écrits, comme dans l'épanchement de ses entretiens, il ne cessait de réclamer la création d'une école d'architecture, dans laquelle les études de mécanique et de calcul auraient pu obtenir la prépondérance sur l'amour du dessin et de l'ornement. Le régime de P'école actuelle des beaux-arts était bien loin de répondre à ses faces; elle lui paraissait n'ètre que l'anarchie mène et une vaine décoration faite pour flatter la vanité nationale, mais déguisant

l'absence de toute instruction sérieuse dans les arts (de l'Administr. des constr. civ., par Desar, architecte; in-8°, 1832). La reconstitution des professions tenant au bâtiment, sur les bases d'une école publique et de degrés à acquérir pour se recommander à la confiance du public, dans les fonctions d'architecte et de vérificateur, est un besoin senti que nous avons vu exprimer jusque dans les dernières classes d'entrepreneurs. On ne saurait protéger plus réellement le travail qu'en excitant l'émulation, et en offrant un prix à des efforts longtemps soutenus.

23. Directoire exécutif. Durant les guerres de la révolution, l'intérêt de la défense du pays absorba toutes les ressources financières et matérielles de la France; nos anciennes routes royales, seule création de quelque importance, qui aurait signalé les règnes de Louis XV et de Louis XVI avec un certain éclat, si le travail d'exécution eût été moins éparpillé et moins lent, durent éprouver une dégradation profonde par le transport de tant de convois et munitions, par tant de passages de troupes sans recevoir aucun travail de réparation.-Dans les intentions les plus éclairées et les plus louables, le directoire exécutif, pour les ramener à un état moins fâcheux et suppléer à la pénurie absolue des finances, conçut un plan nouveau et des plus hardis: ce fut de marcher sur les traces de la législation anglaise, en établissant sur toutes nos routes des barrières à péages dont le produit était affecté spécialement et limitativement à leur entretien, sous le titre de taxe d'entretien des routes.-Sur une declaration d'urgence du conseil des Anciens, l'établissement en fut ordonné en principe par la loi du 24 fruct. an 5 (V. Voirie). 29. La loi de finances du 9 vend. an 6 portait, art. 89: « L'ouverture, le perfectionnement et l'entretien des chemins de communication autres que les grandes routes, pourront être entrepris par des citoyens, sous l'autorisation du corps législatif, suivant les règles qui seront décrétées par la suite, et au moyen de la concession du droit de percevoir pendant un temps une taxe aux barrières particulières qui seraient établies par eux. » -C'est par cette même loi qu'a été établi l'impôt du dixième du prix des places des voyageurs, pour toutes voitures publiques, de terre ou d'eau, ayant leurs départs à jour fixe; le profit de cet impôt était aussi affecté spécialement et limitativement à l'entretien des routes (V. Voirie, Voitures publiques).

30. En attendant que la taxe qui allait être établie sur les routes eût pu donner des produits pour leur entretien, le directoire exécutif, par sa proclamation du 22 frim. an 6, fit un appel au patriotisme et ouvrit une souscription, en promettant une indemnité à ceux qui auraient fait une avance du droit de passe d'une certaine importance. - «Un enthousiasme éclairé pour le bien public, y est-il dit, doit porter tous les vœux, tourner tous les moyens, consacrer tous les bras à des monuments utiles.-La gloire du gouvernement sera d'indiquer ceux qui peuvent servir avec le plus d'avantage à la prospérité publique. Au moment de la paix, ceux qu'on doit préférer d'abord sont les chemins et les canaux, moyens puissants de rapprocher les hommes et les contrées, de faire circuler le mouvement et l'abondance, et de répandre au loin, dans toutes les parties d'un grand corps politique, le chyle nourricier de la culture et du commerce. » — Le tarif du passage des voitures aux barrières fut fixé, à raison des distances à parcourir, par la loi additionnelle du 14 brum. an 7. V. Voirie.

31. Sur une autre déclaration d'urgence du conseil des Anciens, la loi du 21 vend. an 5, et des arrêtés du gouvernement des 23 frim. an 5 et 9 brum. an 6, ont eu pour objet de remettre en vigueur les tarifs des canaux du Midi et de Briare, dont le service était interrompu à cause du mauvais état des ouvrages, à défaut de réparation de leurs écluses (Ravinet, C. des ponts et chaussés, t. 4, p. 214, et t. 6, p. 10).

32. Consulat. - Un autre gouvernement, doué de plus de vigueur et d'avenir, appelé à faire revivre en France les principes monarchiques accommodés avec l'esprit du temps et les nouveaux besoins de la société, entreprit d'abord la réforme complète de nos institutions centrales, départementales et municipales. L'action administrative fut séparée de la délibération, et celle-ci du jugement. Le contentieux des travaux publics dont avait été investi le directoire du département, fal attribué

[ocr errors]

aux conseils de préfecture par la loi du 28 pluv. an 8, art. 4. 33. Par la loi du 30 flor. an 10, un droit de navigation intérieure fut établi sur le cours de nos fleuves et rivières navigables et flottables; on subordonna l'adoption des tarifs à une enquête dans laquelle seraient entendus les principaux négo. tiants, marchands et mariniers, en un mot ceux qui avaient e plus d'intérêt à ce que la navigation fluviale fût replacée dans es meilleures conditions possibles. Le produit du nouvel octroi était encore affecté spécialement et limitativement par cette loi à l'entretien et à l'amélioration des ouvrages d'art établis pour l'avantage de la navigation.- La même loi établissait que les contestations qui pourraient s'élever sur les droits de navigation à établir seraient décidées administrativement par les conseils de préfecture. V. Voirie par eau. 34. Empire français. · En 1806, Napoléon, frappé de l'impopularité insurmontable de la taxe d'entretien des routes. contre laquelle depuis déjà huit ans les rouliers et les cultivateurs étaient dans un état incessant d'irritation, de lutte et de révolte, en fit prononcer la suppression par une loi, en remplaçant son produit par un taxe sur le sel à percevoir aux marais salans, dont le produit serait affecté limitativement à l'entretien des routes (V. Sel, no 13). A la même époque, l'empereur Napoléon méditait de faire suivre les nouveaux lauriers de Tilsitt et de Wagram du plus grand triomphe pour les arts de la paix; il se préoccupa de donner plus de garanties à la propriété contre les mesures administratives nécessitées par les travaux publics, et d'établir entre les lois et règlements qui les concernent et les dispositions de l'art. 545 c. nap. une harmonie plus parfaite. En diclant la loi du 8 mars 1810, l'empereur a voulu que l'expropriation pour cause d'utilité publique ne pût être prononcée que par autorité de justice, et après que les propriétaires auraient été entendus dans leurs observations (V. Expropr. publ., no 11). En outre, pour le règlement des indemnités d'expropriation, il substitua les tribunaux aux conseils de préfecture; mais il n'enleva pas à ceux-ci la connaissance des simples torts et dommages, ni de l'indemnité pour occupation temporaire (V. nos 1174 et s.). 35. Lorsque le gouvernement impérial fut arrivé à l'apogée de sa puissance, il chercha des moyens directs et sûrs pour ramener les routes impériales à un bon état d'entretien sans trop charger le trésor, et pour en étendre partout le réseau par de nouvelles créations. En vertu de la loi du 16 sept. 1807, un système de contributions spéciales, votées par les conseils généraux et les conseils municipaux, devait faire supporter par moitié la dépense des travaux des nouvelles routes aux localités qu'elles traverseraient, en proportion de l'utilité qu'elles devaient en retirer respectivement. Une loi du 27 déc. 1809 a offert un exemple de l'application de ces nouvelles vues financières. Le décret du 16 déc. 1811 a concilié les deux grands intérêts du développement des routes et de l'allégement des charges du trésor, en rangeant les routes sous trois catégories, savoir les routes impériales, qui resteraient entièrement à la charge de l'Etat; d'autres routes, dont la dépense d'entretien se ferait pour moitié à la charge de l'Etat et pour l'autre moitié à la charge du département; enfin les routes dites départementales, dont les fravaux neufs ou d'entretien seraient intégralement à la charge du département, et ne regarderaient plus en rien le trésor public (V. Voirie).

[ocr errors]

36. Par le décret du 7 fruct. an 12 (25 août 1804), Napoléon, méditant d'imprimer le plus grand essort aux travaux publics de la France, avait donné une nouvelle et splendide organisation au corps impérial des ponts et chaussées. C'est dans des assemblées convoquées par l'empereur aux Tuileries, en sa présence même, qu'ont été souvent arrêtés les projets de grands travaux, tels que ceux de la célèbre route du Simplon, de la digue de Cherbourg, du port d'Anvers, des canaux de Saint-Quentin, de Saint-Denis, de l'Ourcq et de Saint-Martin.-En 1810, une organisation toute semblable fut donnée par l'empereur au corps de nos ingénieurs des mines, qui devait avoir pour pépinières trois écoles pratiques celle de Paris, une autre dans le département de la Sarre, et la troisième à Pesey, dans l'ancien département du mont Blanc. L'école de Saint-Etienne fut établie pour former les conducteurs des mines. Sous le règne de Napoléon, il a été donné aux ingénieurs des ponts et chaussées de commen

cer et de terminer en quelques années des travaux bien plus considérables et plus nombreux que ceux accomplis dans le cours de chacun des règnes précédents. Mais ses plus grands ouvrages ont eu pour résultat de doter les contrées formant alors des départements de la France, et qui en ont été séparées par le résultat des guerres et des traités de 1814 et 1815. Telles sont les routes magnifiques ouvertes sur le Simplon et lo mont Saint-Bernard, le port d'Anvers, et d'autres ouvrages importants exécutés en Belgique, en Prusse et en Italie.

37. Gouvernement de la restauration.-Si, à la suite des événements de 1815, la France a pu revoir avec répugnance des exilés pleins de ressentiment contre la révolution et trop aigris par le malheur, disposés enfin à faire renaître des prétentions surannées et à réclamer des compensations territoriales ou pécuniaires, elle vit aussi rentrer dans son sein des enfants chers à la patrie, des prisonniers de guerre et des voyageurs, hommes industrieux et éclairés, qui nous apportaient une connaissance exacte des sources de la prospérité industrielle et commerciale de l'Angleterre et de l'Amérique (1). — Une nouvelle école de publicistes et d'économistes nous apprit jusqu'à quel point le temps des guerres de la révolution, si désastreuses pour les peuples du continent, avait été bien employé par nos voisins d'outre-mer, qui, en un quart de siècle, nous avaient dépassé d'une distance que nous ne devions pas franchir de longtemps, à raison de la multitude des routes et des canaux qu'ils avaient créés dans toute l'étendue de leur territoire, et qu'ils maintenaient dans le meilleur état d'entretien. Sous l'influence de ces nouvelles lumières et de l'école régnante de J. B. Say, la restauration se décida à doter à tout prix la France d'un vaste système de canaux navigables et, s'il dut lui coûter cher, il eut du moins le mérite d'être entrepris à une époque où la France était loin d'être libérée des charges de nos dernières campagnes et de l'occupation étrangère. Ayant à occuper les bras de cent mille soldats licenciés, sans profession ni travail, le gouvernement adopta le projet d'un système de canaux de navigation préconçu dès longtemps, et qui devait, par plusieurs grandes lignes, d'un parcours de 1,000 lieues, relier les ports de Marseille et du Havre, et mettre en communication la ville de Strasbourg avec le port de Bayonne. Des traités d'emprunt onéreux, approuvés pár les lois financières de 1821 et 1822, chargèrent le trésor d'une dette considérable envers des compagnies qui prêtèrent leurs fonds à gros intérêts, et reçurent encore pour prime des actions de jouissance, à l'effet de participer aux produits des péages des canaux pendant quarante ou cinquante années, à partir de la mise en activité de la navigation. L'Etat s'interdisait même la faculté de réduire les tarifs annexés aux devis des travaux, autrement que d'un commun accord avec les propriétaires de ces actions de jouissance (V.. n° 48 et vo Voirie par eau).

8. Dès que le gouvernement de la restauration vit les charges du trésor s'alléger et un nouvel horizon s'ouvrir devant lui, il ordonna de grandes enquêtes concernant les travaux nécessaires pour améliorer la navigation fluviale dans tout le cours de nos rivières les plus importantes, et le perfectionnement de nos ports maritimes de commerce, qui étaient la plupart ensablés, ainsi que les travaux nécessaires pour ramener partout nos routes royales, la plupart encore inachevées ou profondément dégradées, à un état qui n'offrirait plus de lacune et serait d'un entretien désormais facile et moins dispendieux (sess. de 1828; deux rapports de M. Pasquier à la chambre des pairs, sur l'état de la navigation fluviale, ainsi que sur l'état des routes en France). — Le même gouvernement s'est assez vivement préoccupé du mauvais état de celles des voies de communication qui intéressent le plus l'agriculture, des chemins vicinaux. - La loi du 28 juill. 1824 a créé des ressources nouvelles pour leur entretien, afin de les régénérer par des moyens à la disposition des autorités locales; cette loi a établi la prestation en nature et les subventions en argent (V. Voirie par terre).

39. L'ordonnance du 10 mai 1829 a établi diverses dispositions relatives aux travaux dépendant de l'administration des

(1) Il n'est pas d'ouvrages qui aient produit plus d'impression, en France, sur l'esprit public, que celui de M. Ch. Dupin, concernant les forces commerciales et industrielles de l'Angleterre."

« PreviousContinue »