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SECTION III.

DE L'EFFET DES DONATIONS.

795. [La donation entrevifs des biens présents dépouille le donateur, au moyen de l'acceptation, de la propriété de la chose donnée, et transfère cette propriété au donataire, comme dans la vente, sans qu'il soit besoin de tradition.]

796. La donation ne comporte par l'effet de la loi seule aucune obligation de garantie de la part du donateur, qui n'est censé donner la chose qu'autant qu'elle est à lui.

Néanmoins, si la cause d'éviction provient de la dette du donateur, ou de son fait, il est obligé, quoiqu'il ait agi de bonne foi, de rembourser le donataire qui a payé pour se libérer, à moins que celui-ci ne soit tenu du paiement en vertu de la donation, soit par la loi, soit par la convention.

Rien n'empêche que la garantie ne soit stipulée avec plus ou moins d'étendue dans une donation comme dans tout autre contrat.

2 Bourjon, 106, 137. Anc. Den., vo. Garantie, No. 17. Puthier, Don., 485-6. 7 N. Den., 22. 1 Dict. du Dig., 192.

797. Le donataire universel entrevifs des biens présents est tenu personnellement de la totalité des dettes que le donateur devait lors de la donation.

Le donataire entrevifs de ces biens à titre universel est tenu personnellement des mêmes dettes en proportion de ce qu'il reçoit.

Paris, 334.

Ricard, part. 1, Nos. 1514, 1063. Pothier, Don., 487-8-9. 2 Bourjon, 137. 7 N. Den., 11, 12, 13. Troplong, Don., 2415 in fine.

798. Cependant le donataire à quelque titre que ce soit, si les choses données sont suffisamment designees en detail par la donation, ou s'il a fait inventaire, peut se liberer des dettes du donateur en rendant compte et en abandonnant la totalité de ce qu'il a reçu.

S'il est poursuivi hypothécairement seulement, il peut, comme tout autre possesseur, se libérer en abandonnant

l'immeuble hypothéqué, sans préjudice aux droits du donateur, envers qui il peut être obligé au paiement.

Pothier, Don., 486. 2 Bourjon, 137-8.

799. Le donataire entrevifs à titre particulier n'est pas astreint personnellement aux dettes du donateur. Il peut, dans le cas de poursuite hypothécaire, abandonner f'immeuble affecté comme tout autre acquéreur.

Pothier, Don., 487. 2 Bourjon, 137-8.

800. L'obligation de payer les dettes du donateur peut être modifiée en plus ou en moins par l'acte de donation, pourvu qu'il ne contrevienne pas aux prohibitions de la loi quant aux dettes futures et incertaines.

L'action du créancier en ce cas, contre le donataire personnellement au-delà de ce qui est fixé par la loi, se règle d'après ce qui est établi au sujet de la délégation et de l'indication de paiement au titre Des Obligations. 1 Ricard, part. 1, No. 1028. 7 Nouv. Den., p. 12.

801. L'exception de choses particulières, quels qu'en soient le nombre et la valeur, dans une donation uniververselle ou à titre universel, ne dispense pas le donataire du paiement des dettes.

7 N. Den., 11.

802. Les créanciers du donateur ont droit à la séparation de son patrimoine d'avec celui du donataire, dans les cas où celui-ci est tenu de la dette, suivant les règles sur la séparation de patrimoines en matière de successions, exposées au titre précédent.

803. Si, au temps de la donation et distraction faite des choses données, le donateur n'était pas solvable, les créanciers antérieurs, hypothécaires ou non, peuvent la faire révoquer quand même l'insolvabilité n'aurait pas été connue du donataire.

Dans le cas de faillite, les donations faites par le failli dans les trois mois qui précèdent la cession ou le bref de saisie en liquidation forcée, sont annulables comme présumées faites en fraude.

1 Ricard, part. 1, Nos. 749 et suiv. Code Civil B. C., arts. 1032 et suiv.

SECTION IV.

DE L'ENREGISTREMENT QUANT AUX DONATIONS ENTREVIFS EN PARTICULIER.

804. L'enregistrement des donations entrevifs aux bureaux établis pour l'enregistrement des droits réels, remplace l'insinuation aux greffes des tribunaux, qui est abolie.

Les donations d'immeubles doivent être enregistrées au bureau de leur situation; celles des choses mobilières doivent l'être au bureau du domicile du donateur, à l'époque de la donation.

Ord. 1539, art. 132. Ord. 1566, (Moulins), art. 58. Ord. des Don., art. 23. S. R. B. C., c. 37, secs. 28, 29.

805. Les effets de l'enregistrement des donations entrevifs et du défaut de cet enregistrement, quant aux immeubles et aux droits réels, sont reglés par les lois générales sur l'enregistrement des droits réels.

En outre l'enregistrement des donations est requis particulièrement dans l'intérêt des héritiers et légataires du donateur, de ses créanciers et de tous autres intéressés, d'après les règles qui vont suivre.

Ord. des Don., art. 27. `S. R. B. G., c. 37, sec. 1.3

806. Toutes donations entrevifs, mobilières ou immobilières, même celles rémunératoires, doivent être enregistrées, sauf les exceptions contenues aux deux articles qui suivent. Le donateur personnellement non plus que le donataire ou ses héritiers, ne sont pas recevables à invoquer le défaut d'enregistrement; ce defaut peut être invoqué par ceux qui y ont droit en vertu des lois genérales d'enregistrement, par l'héritier du donateur, par ses légataires universels ou particuliers, par ses créanciers quoique non hypothécaires et n.êne postérieurs, et par tous autres qui ont un intérêt à ce que la donation soit nulle.

Ord. Moulins, art. 58. 1 Ricard, part. 1, Nos. 1231 et suiv. Ord. des Don., arts. 20, 27. 2 Bourjon, 128. Guyot, Don., 187.

807. Les donations faites en ligne directe par contrat de mariage ne sont pas affectées faute d'enregistre

ment, quant à ce qui excède les effets des lois générales d'enregistrement.

Toutes autres donations en contrat de mariage, même entre futurs époux, et mê.ne à cause de mort, et aussi toutes autres donations en ligne directe, demeurent sujettes à être enregistrées comme les donations en general.

1 Ricard, part. 1, No. 1107, 1123. 2 Bourjon, 132. Ord des Don., arts. 19, 22, 28.

808. Les donations d'effets mobiliers, soit universelles, soit particulières, sont exemptées de l'enregistrement lorsqu'il y a tradition réelle et possession publique par le donataire.

1 Ricard, part. 1, Nos. 1151-2. 2 Bourjon, 134.

809. Les donations sont sujettes aux règles concernant l'enregistrement des droits réels contenues au titre dix-huit de ce livre, et ne sont plus soumises aux règles de l'insinuation.

810. Le donateur n'est pas tenu des conséquences du defaut d'enregistrement quoiqu'il se soit obligé à Peffectuer.

La femme mariée, les mineurs et les interdits ne sont pas restituables contre le défaut d'enregistrement de la donation, sauf leur recours contre ceux qui ont négligé de la faire enregistrer.

Le mari, les tuteurs et administrateurs et autres qui sont tenus de veiller à ce que l'enregistrement ait lieu, ne sont pas recevables à en opposer le défaut.

1 Ricard, part. 1, Nos. 1172, 1238, 1239 et suiv. 2 Bourjon, 128-9. Ord. des Don., art, 18, 30, 31, 32. Guyot, Don., 188.

SECTION V.

DE LA RÉVOCATION DES DONATIONS.

811. Les donations entrevifs acceptées sont sujettes à revocation :

1. Pour cause d'ingratitude de la part du donataire; 2. Par l'effet de la condition résolutoire dans les cas où elle peut être validement stipulée;

3. Pour les autres causes de droit qui peuvent faire

T

> annuler les contrats, à moins d'une exception particulière applicable.

812. [Dans les donations, la survenance d'enfants au donateur ne forme une condition résolutoire que moyennant la stipulation qui en est faite.]

813. La donation peut être révoquée pour cause d'ingratitude, sans qu'il soit besoin de stipulation à cet effet:

1. Si le donataire a attenté à la vie du donateur;

2. S'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits majeurs ou injures graves;

3. S'il lui refuse des aliments, ayant égard à la nature de la donation et aux circonstances des parties

Les donations par contrat de mariage sont sujettes à cette révocation, ainsi que celles rémunératoires ou onéreuses jusqu'à concurrence de ce qu'elles excèdent le prix des services ou des charges.

Cod., L. 10, de revocandis donationibus. Pothier, Don., 502 et suiv. 2 Bourjon, 138-9. Guyot, Ingratitude, 228. C. N. 955, 956; contrà 959.

814. La demande en révocation pour cause d'ingratitude doit être formée dans l'année du délit imputé au donataire, ou dans l'année à compter du jour où ce délit a pu être connu du donateur.

Cette révocation ne peut être demandée par le donateur contre les héritiers du donataire, ni par les héritiers du donateur contre le donataire ou ses héritiers, à moins que l'action n'ait été intentée par le donateur contre le donataire lui-même, ou, dans le second cas, que le donateur ne soit décédé dans l'année qui a suivi la commission ou la connaissance du délit.

Cod., L. 10, de revocandis donat. 704 et suiv. 730. 2 Bourjon, 140. 509. C. N. 955, 956, 957.

Ricard, part. 1, No. Pothier, Don., 502 à

815. La révocation pour cause d'ingratitude ne préjudicie ni aux alienations faites par le donataire, ni aux hypothèques et autres charges par lui imposées, antérieurement à lenregistrement de la sentence de révocation, lorsque l'acquéreur ou le créancier a agi de bonne foi.

Dans le cas de révocation pour cause d'ingratitude, le donataire est condamné à restituer la chose donnée, s'il

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