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femme homme, l'impudente Olympe de Gouges, qui, la première, institua des sociétés de femmes, voulut politiquer, et commit des crimes. Tous ces êtres immoraux ont été anéantis sous le fer des lois, et vous voudriez les imiter Nous voulons que les femmes soient respectées, c'est pourquoi nous les forcerons à se respecter elles-mêmes. Que diraient des magistrats à une femme qui se plaindrait des atteintes d'un jeune étourdi, lorsqu'il alléguerait pour sa défense: J'ai vu une femme avec les allures d'un homme; je n'ai plus en elle respecté son sexe, j'en ai agi librement ? Sentez-vous où nous mènerait un pareil bouleversement dans les mœurs et les habitudes? Et nous, magistrats du peuple, nous, qui n'avons cessé de travailler à l'établissement de la république, ne lâchons pas le gouvernement des mains. Sous le règne de la monarchie, les femmes étaient tout, parce que les hommes n'étaient rien : témoin Jeanne d'Arc, qui ne fut quelque chose que parce que Charles VII n'était pas un homme, et que ses sujets étaient au-dessous de rien. Autant nous vénérons la mère de famille qui met son bonheur à élever, à soigner ses enfans, à filer les habits de son mari et alléger ses fatigues par l'accomplissement des devoirs domestiques, autant nous devons mépriser, conspuer la femme sans vergogne qui endosse la tunique virile, et fait le dégoûtant échange des charmes que lui donne la na

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ture contre une pique et un bonnet rouge. Je requiers que le conseil ne reçoive plus de députation de femmes, qu'après un arrêté pris à cet effet, sans préjudice aux droits qu'ont les citoyennes d'apporter aux magistrats leurs demandes et leurs plaintes individuelles. »

La proposition de Chaumette est adoptée.

Il est facile de voir qu'en invoquant ces lieux communs, où règne toutefois une rare vigueur et une singulière intelligence des sympathies populaires, le moderne Anaxogoras n'envisageait que la moitié de la question. Changer complètement le rôle des femmes, les faire tout quitter pour absorber leur existence dans les intérêts de l'état, serait absurde; mais le serait-il qu'elles y prissent la part que leur permettent les soins de la famille? Le serait-il qu'elles recueillissent au moins une légère teinture des affaires du pays, pour s'en pénétrer et en communiquer les premiers reflets à leurs enfans? Chaumette leur donne l'empire des grâces, de la jeunesse et de la beauté. Bagatelles! et si tous ces avantages leur manquent? que devient l'argument?

Rose Lacombe avait semblé prendre le rôle de la Praxagora des harangueuses d'Aristophane, de cette assembleuse de femmes, qui veut faire passer dans leurs mains le gouvernement de la république, sous prétexte qu'il marche aussi mal que le Boiteux Esimus, et que les hommes n'entendent rien à le

conduire. Chaque jour elle excitait quelque tumulte, soit au Palais-Royal, soit au Charnier des Innocens. La plupart du temps, c'était à l'occasion de quelque partie de costume. Des femmes en pantalon rouge et en cocarde frappaient celles qui n'en avaient pas, ou leur infligeaient un châtiment honteux. Enfin un dernier attroupement féminin parut si nombreux, si pétulant et si effréné, qu'il éveilla l'attention du comité de sûreté générale. A la convention, Amar prit la parole au nom de ce comité: « Je vous dénonce, dit-il, un rassemblement de plus de six mille femmes, soi-disant jacobines et d'une prétendue société révolutionnaire. Plusieurs d'elles, sans doute, n'ont été égarées que par un excès de patriotisme; mais d'autres ne sont que les instrumens des ennemis de la chose publique, et n'ont pris le masque d'un patriotisme exagéré que pour exciter un mouvement sectionnaire et une espèce de contre-révolution.

>> Les femmes, continue l'orateur, doivent-elles exercer les droits politiques et s'immiscer dans les affaires du gouvernement? » Il décide qu'elles n'ont ni l'étendue ni l'application d'esprit nécessaires : « Les droits politiques du citoyen sont de discerner et de faire prendre des résolutions relatives aux intérêts de l'état, par des délibérations comparées, et de résister à l'oppression. Les femmes ont-elles la force morale et physique qu'exige l'exercice de

l'un et de l'autre de ces droits? L'opinion universelle repousse cette idée. Les femmes doiventelles se réunir en association politique? Le but des associations populaires est celui-ci : Dévoiler les manœuvres des ennemis de la chose publique; surveiller et les citoyens comme individus et les fonctionnaires publics, même le corps législatif; exciter le zèle des uns et des autres par l'exemple des vertus républicaines; l'éclairer par des discussions publiques ou approfondies sur le défaut ou la réformation des lois politiques. Les femmes peuventelles se dévouer à ces utiles et pénibles fonctions ? » - Décidé que non, attendu la différence de force et de conformation, et par conséquent de destination. « Sans doute, il est nécessaire qu'elles s'instruisent elles-mêmes dans les principes de la liberté, pour la faire chérir à leurs enfans; elles peuvent assister aux délibérations des sections, aux discussions des assemblées populaires; mais, faites pour adoucir les mœurs de l'homme, doivent-elles prendre une part active à des discussions dont la chaleur est incompatible avec la douceur et la modération qui font le charme de leur sexe? »

<< Et puis la pudeur des femmes, continue Amar, leur permet-elle de se montrer en public, de lutter avec les hommes, et de discuter à la face du peuple sur des questions d'où dépend le salut de la république? Si chez les anciens peuples leur timidité

naturelle leur défendait de paraître hors de leur famille, voulez-vous que dans la république française on les voie venir au barreau, à la tribune, aux assemblées politiques, comme l'homme, abandonnant et la retenue, source des vertus de ce sexe, et le soin de leur famille? Elles ont plus d'un autre moyen de rendre des services à la patrie: elles peuvent éclairer leurs époux, leur communiquer des réflexions précieuses, fruit du calme d'une vie sédentaire; employer à fortifier en eux l'amour de la patrie, tout ce que l'amour privé leur donne d'empire; et l'homme, édifié par des discussions familières et paisibles au milieu de son ménage, rapportera dans la société les idées utiles que lui aura données une femme honnête... En outre, si nous considérons que l'éducation politique des hommes est à son aurore, que tous les principes ne sont pas développés, et que nous balbutions encore le mot liberté, à plus forte raison les femmes, dont l'éducation morale est presque nulle, sontelles moins éclairées dans les principes. Ajoutons que les femmes sont disposées, par leur organisation, à une exaltation qui serait funeste dans les affaires publiques', et que les intérêts de l'état seraient bientôt sacrifiés à tout ce que la vivacité des passions peut produire d'égarement et de désordre. Livrées à la chaleur des débats publics, elles inculqueraient à leurs enfans, non l'amour

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