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Ayres, et ne firent pas la moindre difficulté d'accepter les franciscains au lieu des jésuites comme guides de leur conscience.

Le pire de tout a été que les bons Pères ont fait école sur les bords du Paraguay. Le premier président du Paraguay, le docteur Francia, fils d'un Français naturalisé dans les Réductions et, dans son enfance, destiné lui-même à la prêtrise fit peser la plus dure des tyrannies sur les colons récemment séparés de leur métropole. Durant sa longue domination il n'y eut que deux édifices qui servissent à quelque chose: les casernes et les prisons. Mais plus avisé que ses prédécesseurs, il ne laissait pas voir ce qui se passait dans sa Chine américaine: quand il ne les faisait pas massacrer, il retenait prisonniers les quelques étrangers qui s'aventuraient dans ses limites, ainsi qu'il advint à notre illustre Bonpland et plus tard à Rengger et à Longchamps. Le senor don Antonio Lopez, qui remplaça Francia et qui avait été son secrétaire, était un homme du même bois, si l'on peut ainsi dire. « Mêlez,» écrit M. Mantegazza, qui l'a vu de très près et qui a souffert de ses caprices, « mêlez de l'astuce et un certain degré d'esprit, une grande activité et une avarice plus grande encore, de la luxure et de l'égoïsme; mettez le tout à l'exposant d'un pouvoir illimité, et vous aurez l'homme. » Il tenait lieu au Paraguay de constitution de codes, de tribunaux, et il répondit un jour à quelque naïf voyageur qui lui demandait comment la justice s'administrait chez lui: «Que le pacte constitutionnel n'était pas complet et qu'on s'occupait de le réviser. » Cette révision ne dura pas moins de dix-buit ans, c'est-à-dire pendant toute la dictature de Don Antonio Lopez, dix-huit ans pendant lesquels il put tout à son aise pressurer ses sujets, les emprisonner, les déporter et les réduire en esclavage.

Les jésuites, eux, les vendaient, et ce dernier trait achève de peindre leur république chrétienne. A la vérité, je trouve ici l'épithète fort mal appliquée, et je ne fais pas l'injure à cette grande communion qui, à diverses époques et dans ses diverses sectes, s'honore d'hommes tels que les Suger et les Gerson, les Arnauld et les Leibnitz, les Roger Williams et les Wilberforce, les Channing et les Lacordaire, je ne lui fais pas, dis-je, l'injure de lui imputer l'inspiration du communisme paraguayéen. Suum cuique. Veuillez agréer, avec mes remerciements, etc.

LOUIS KERRILIS.

BULLETIN

RECONSTITUTION DU CONSEIL SUPÉRIEUR DU COMMERCE.

DE L'AGRICULTURE ET DE L'INDUSTRIE.

I. Rapport au Président de la République française.

M. le Président, l'article 3 du sénatus-consulte du 23 décembre 1852 avait conféré au gouvernement de l'empereur le droit de modifier souverainement les tarifs de douane par voie de traités internationaux. Afin de donner aux décisions résultant de l'exercice de ce droit l'autorité qui leur manquait, un décret impérial, en date du 2 février 1853, a institué le conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie qui existe encore aujourd'hui.

Ce conseil, présidé par les ministres de l'intérieur, de l'agriculture et du commerce, était composé d'un vice-président, de deux membres du Sénat, de deux membres du Corps législatif; de deux conseillers d'Etat, et de six membres choisis parmi les notables les plus versés dans les matières agricoles, industrielles et commerciales; et en outre de cinq membres de droit, le directeur des douanes et des contributions indirectes, le directeur de l'agriculture et du commerce, le directeur des consulats et affaires commerciales, le directeur des colonies, le directeur des affaires de l'Algérie.

Un décret du 5 juin 1873 a modifié la composition de ce conseil et l'a divisé en trois sections correspondant aux intérêts du commerce, de l'industrie et de l'agriculture.

Le conseil était composé, sous la présidence du ministre, de deux vice-présidents, de onze fonctionnaires membres de droit, et de trois sections comprenant chacune quinze membres.

Un autre décret, du 13 juin 1873, a porté à seize le nombre des membres de chacune des sections.

Aucun de ces décrets n'a fixé de limite à la durée des fonctions dudit conseil, ni indiqué le mode de renouvellement de ses membres.

A plusieurs reprises, cependant, d'assez nombreux changements ont eu lieu, et il me paraît indispensable, aujourd'hui, d'en opérer de nouveaux pour mettre la composition du conseil en harmonie avec celle des assemblées législatives. En effet, un certain nombre des membres actuels, qui avaient été nommés en qualité de députés à l'Assemblée nationale, ne font plus partie du parlement.

D'un autre côté, les fonctionnaires qui de droit sont membres du con

seil, avec voix délibérative, me paraissent trop nombreux. Le conseil supérieur est institué pour éclairer le gouvernement sur les tarifs de douane, les traités de commerce, le régime des admissions temporaires, les tarifs des transports, les encouragements pour les grandes pêches maritimes, la législation commerciale, industrielle, agricole et coloniale, et en général sur toutes les questions qui, à un titre quelconque, intéressent directement le travail national. Or, pour que les délibérations soient fructueuses, il importe qu'elles aient un caractère d'indépendance absolue et que l'influence administrative ne se fasse pas trop sentir. Les fonctionnaires devront aider le conseil en lui fournissant tous les renseignements nécessaires et pourront au besoin être appelés à prendre part aux discussions, mais avec voix consultative seulement. Je ne ferai d'exception que pour le directeur général des douanes, les directeurs du commerce intérieur et extérieur, le directeur des consulats et affaires commerciales et le directeur de l'agriculture, dont les fonctions se rattachent directement à l'application des mesures proposées et qui doivent être mis à même de les discuter ave autorité.

Par contre, je suis d'avis de donner une plus large part à l'élément électif, en augmentant en fait le nombre des présidents de chambres de commerce qui font partie du conseil. Je ne propose pas d'en déterminer exactement le nombre, ni la désignation, car il peut y avoir avantage, par suite de la fluctuation des courants industriels et commerciaux, à conserver une certaine liberté dans les choix.

La difficulté de faire coincider la cessation des fonctions de membre du conseil supérieur avec le renouvellement des assemblées législatives et celui des chambre de commerce m'empêche de vous proposer de fixer la durée de ces fonctions; mais le ministre aura toujours le droit de vous faire des propositions pour remplacer les membres qui auront cessé de faire partie du parlement, de même qu'il pourra, en tout temps, vous proposer les changements qui lui paraîtront utiles parmi les autres membres du conseil.

Quant aux présidents des chambres de commerce, leur accession au conseil supérieur étant inhérente à leur titre de président, le renouvellement s'opérera tout naturellement par le choix des électeurs.

Si, comme je l'espère, vous voulez bien accueillir mes propositions, je vous prierai, monsieur le Président, de vouloir bien revêtir de votre signature les deux décrets ci-annexés, dont le premier porte l'organisation du conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie, et le second nomme les membres qui doivent le composer.

Veuillez agréer, etc.

Le ministre de l'agriculture et du commerce,

P. TIRARD.

II.

Décret organisant le Conseil et nommant les membres.

Le Président de la République française,

Vu le décret du 2 février 1853, portant institution d'un conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie;

Vu les décrets des 5 et 13 juin 1873, portant réorganisation dudit conseil ;

Sur le rapport du ministre de l'agriculture et du commerce, décrète : Art. 1or. Le conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie placé sous la présidence du ministre de l'agriculture et du commerce, est composé de deux vice-présidents et de trois sections, savoir: 1o la section du commerce; 2o la section d'agriculture; 3o la section de l'industrie.

Chacune de ces sections se composera de dix-huit membres choisis parmi les sénateurs, les députés, les présidents des principales chambres de commerce et les hommes les plus versés dans les matières commerciales, agricoles, industrielles et financières.

Sont en outre membres de droit du conseil supérieur :

Les ministres; le sous-secrétaire d'Etat au ministère de l'agriculture et du commerce; le directeur général des douanes; le directeur du commerce extérieur; le directeur du commerce intérieur; le directeur de l'agriculture; le directeur des consulats et affaires commerciales. Art. 2. Les membres de droit du conseil supérieur prennent part indistinctement aux délibérations de chacune des sections.

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Art. 3. Les fonctionnaires appelés par le conseil supérieur ou délégués par les ministres peuvent prendre part aux délibérations, mais avec voix consultative seulement.

Art. 4. Sont et demeurent abrogées les dispositions des décrets des 2 février 1853, 5 et 13 juin 1873, en ce qu'elles ont de contraire au présent décret.

Fait à Mont-sous-Vaudrey, le 1er octobre 1879,

JULES GRÉVY.

Par le Président de la République :

Le ministre de l'agriculture et du commerce,

P. TIRARD.

Le Président de la République française,

Vu le décret en date de ce jour, portant réorganisation du conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie;

Sur le rapport du ministre de l'agriculture et du commerce, décrète: Art. 1er. Sont nommés membres du conseil supérieur du commerce, de l'agriculture et de l'industrie :

4 SÉRIE, T. VIII.

15 octobre 1879.

9

Le ministre de l'agriculture et du commerce, président.

M. Léonce de Lavergne, sénateur, premier vice-président.
M. Feray, sénateur, deuxième vice-président.

:

PREMIÈRE SECTION. Commerce MM. Denormandie, sénateur, gouverneur de la Banque de France; Scheurer-Kestner, sénateur; Labadié, député; Lebaudy, député; de Mahy, député; Alfred André, banquier; Giraud, directeur du Comptoir d'escompte; Alexandre Léon, armateur; Fould (Henri), exportateur; d'Eichthal, ancien banquier; le président de la chambre de commerce de Paris; le président de la chambre de commerce du Havre; le président de la chambre de commerce de Marseille; le président de la chambre de commerce de Nantes; le président de la chambre de commerce de Bordeaux; le président de la chambre de commerce de Nice; le président de la chambre de commerce de Reims; le président de la chambre de commerce de Nancy.

20 SECTION. Agriculture MM. Teisserenc de Bort, sénateur; Gaston Bazille, sénateur; Pomel, sénateur; Foucher de Careil, sénateur; Jobard, sénateur; Fourot, député; Caze, député; Fouquet, député; Guichard, député; de Pompery, député; Decrombecque, agriculteur; Risler, agronome; Hervé-Mangon, agronome; Lecouteux, agronome; Grandcau, agronome; Barral, secrétaire perpétuel de la Société nationale d'agriculture.

30 SECTION.

Industrie MM. Magnin, sénateur; Pouyer-Quertier, sénateur; Cordier, sénateur; Dauphinot, sénateur; Gailly, député; Binachon, député; Richarme, député; Chiris, député; Trystram, député; Sieber, manufacturier; d'Adelswardt, métallurgiste; Tezénas du Montcel, manufacturier; Sévène, manufacturier; Duplan, manufacturier; le président de la chambre de commerce de Lyon; le président de la chambre de commerce d'Elbeuf; le président de la chambre de commerce de Saint-Etienne; le président de la chambre de commerce de Roubaix.

Membres de droit MM. le sous-secrétaire d'Etat au ministère de l'agriculture et du commerce; le conseiller d'Etat directeur général des douanes; le directeur des consulats et affaires commerciales; le directeur du commerce extérieur; le directeur du commerce intérieur; le directeur de l'agriculture.

Art. 2.

M. Fréauff-Ozenne, chef du bureau de la législation des douanes de France, est nommé secrétaire du conseil supérieur. Le ministre de l'agriculture et du commerce est chargé de l'exécution du présent décret.

Art. 3.

Fait à Mont-sous-Vaudrey, le 1er octobre 1879,

Par le Président de la République :

JULES GRÉVY.

Le ministre de l'agriculture et du commerce,

P. TIRARD.

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