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Ores que.] Encore que.

-De pareilles saisies, avec peines et amendes, seraient encore plus certainement encourues aujourd'hui que « tout » privilége portant exemption ou attribution de la juridic» tion épiscopale est aboli.» (Loi du 18 germinal an X, article 40.)

— Que « les mêmes délits sont punis des mêmes peines, sans aucune distinction des personnes. » (Loi du 14 septembre 1794, tit. Ier.)

Et que le Code pénal, notamment dans ses articles 199 et suivants, sévit directement contre tous ministres du culte qui commettraient les délits qui y sont spécifiés.

XVII.

La bulle In cœnâ Domini n'est point reçue en France.

Les clauses insérées en la bulle In cœnâ Domini, et notamment celles du temps du pape Jules II, et depuis, n'ont lieu en France pour ce qui concerne les libertés et privileges de l'Église gallicane, et droicts du roy ou du royaume.

En la bulle.] Une loi n'oblige pas tant qu'elle n'est pas promulguée dans le pays où il s'agit de l'exécuter. Peu importe qu'une bulle faite à Rome ait été publiée à Rome et en Italie, ou même en d'autres royaumes. Pour être exécutoire en France, il faudrait qu'elle y eût été reçue et publiée car les lois mêmes de France, et les ordonnances du roi ne sont exécutoires qu'après leur promulgation en la forme légale. Or, aucune bulle du pape ne peut être

reçue ni publiée en France qu'après l'autorisation du gouvernement (voyez art. XLVIII ci-après); et cette autorisation n'a jamais été accordée pour la bulle In cœnd Domini, << parce qu'elle est en bien des chefs contraire aux droits » du roi (et du royaume), aussi bien qu'aux libertés de » l'Église gallicane. » (LENGLET, adde DURAND DE MAILLANE, t. I, p. 304). «Elle contient presque autant d'atten>>tats contre la puissance des souverains, et contre nos » mœurs en particulier et nos maximes, qu'elle renferme » de dispositions. » (DISCOURS de l'avocat-général CAPPOT au conseil souverain du Roussillon, le 15 mars 1763.)

Jules II.] « Cet article porte particulièrement contre la bulle du pape Jules II, parce que ce pape avait voué une haine implacable à la France. Aussi avait-il été arrêté en assemblée du clergé, tenue à Tours en 1510, que le roi Louis XII pouvait se soustraire de l'obéissance du pape Jules II (que du Tillet, évêque de Meaux, appelle, en sa chronique, perfidiosus, sceleratus et vecors), et que les censures qu'il pourrait prononcer contre le roi étaient nulles et ne le pouvaient lier. Ce bon roi, quoiqu'il fît la guerre au pape, ne laissa pas que d'être tenu et réputé pour Père du peuple. »> (DUPUY.)

A propos de Jules II et de sa haine contre Louis XII, je rappellerai que Jules III ne détestait pas moins Henri II; je raconterai une anecdote honorable pour le barreau français, et qui servira d'autant à prouver (ce que d'ailleurs toute notre histoire atteste) que les jurisconsultes français, surtout dans ces temps de barbarie et d'ignorance, où les droits les plus certains étaient souvent obscurcis et révoqués en doute, ont puissamment concouru à la défense des droits de la monarchie et des libertés de l'Église gallicane.

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Le pape Jules III avait dénoncé la guerre au roi Henri II, et s'y portait avec tant d'animosité et de fureur, qu'il ne pouvait être surmonté ni par prière, ni par argent, ni par la force des armes; et cependant ce pontife fut tellement troublé et effrayé par un petit livret (le Commentaire sur l'édit des petites dates) que DUMOULIN fit contre lui, qu'il le contraignit non-seulement de mettre bas les armes, mais aussi, comme se reconnaissant vaincu, de donner la carte blanche, demander la paix et en accorder toutes les conditions, etc. C'est aussi le témoignage qu'en rendit au roi le connétable Anne de Montmorency, qui, en présentant notre jurisconsulte à la cour, dit : « Sire, ce que votre majesté n'a pu faire et exécuter avec trente mille hommes, de contraindre le pape Jules à lui demander la paix, ce petit homme (car Dumoulin était de petite stature) l'a achevé avec un petit livret.» (Vie de Dumoulin, livre II, chap. 11.) — Doit-on s'étonner après cela que les œuvres de ce jurisconsulte aient été mises à l'index?

XVIII.

Le pape ne peut connaître des droits de la

couronne.

Ne peut le pape juger ni deleguer pour cognoistre de ce qui concerne les droicts, preeminences et privileges de la couronne de France et ses appartenances; et ne plaide jamais le roy de ses droicts et pretentions qu'en sa cour propre.

Juger.] En France, toute justice émane du roi.

Priviléges de la couronne.] Le premier de ces privi

léges est l'indépendance. Voyez ce que nous avons dit sur l'art. IV.

Qu'en sa propre cour.] C'est la suite de la règle que le roi n'a point de supérieur en son royaume; et cependant, comme il veut que justice soit faite, lorsqu'il y a lieu de plaider contre lui, on le peut librement; et l'on tient même pour maxime qu'il faut qu'il ait deux fois raison pour gagner son procès.

Du Tillet, dans son Recueil des rois de France, édit. de 4618, p. 252, a là-dessus un passage remarquable. « La justice de France, gardant la droiture és procès des rois, qui le veulent et endurent ou plutôt le commandent, rend à toute la terre très-grande preuve de la bonté et équité. desdits rois, auxquels ne peut advenir plus grand honneur, puisque justice est fermeté du trône royal. Les arrêts et jugemens ès causes du roi sont en son nom; et, par ses juges, il se condamne quand il a tort.» (Adde BRILLON, au mot Plaider, no 10.)

Ceci, néanmoins, ne s'entend que des matières civiles; car, pour sa personne et les droits de la couronne, le roi n'est justiciable de qui que ce soit ; ou, comme il est dit au Trésor des chartes, régale II, no 46: « Le roy, en sa

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>> personne, est fontaine et mer de droit commun, quand >> aux choses qui lui appartiennent de son droit royal. » Ce qu'il ne faut pas pour cela entendre en ce sens, qu'il ait un pouvoir arbitraire et despotique, auquel il ne prétend rien, et qu'aucun bon Français ne lui souhaite; mais en ce sens, qu'il est inviolable, qu'il ne reconnaît pas de supérieur étranger, qu'il n'est sous la juridiction de personne, et qu'il trouve en lui-même tout le pouvoir nécessaire pour défendre les droits qui lui appartiennent légitimement, d'après les lois fondamentales de l'État.

XIX.

Comtes palatins ne sont reconnus en Françe.

Les comtes qui s'appellent palatins, créés par le pape, ne sont recogneus en France pour y user de leurs pouvoirs ou privileges, non plus que ceux créés par l'empereur.

Comles palatins. ] Je ne sais s'il y a encore des comtes palatins, du moins on n'en voit point en France; et s'il en venait quelqu'un nous visiter, on ne lui permettrait certainement pas plus aujourd'hui qu'autrefois de se prévaloir en France de sa dignité, pour y exercer le moindre pouvoir. Chacun chez soi.

XX.

Des notaires apostoliques.

Les notaires apostoliques ne peuvent recevoir contrats de choses temporelles et profanes entre les sujets du roy; et ne portent les contracts par eux receus comme ventes, eschanges, donations, et tels autres, aucune hypotheque sur les biens assis en ce royaume, mais sont reputez sans effet pour ce regard.

Aucune hypothèque. ] Cet article, qui est toujours une conséquence de l'indépendance des souverainetés, était consacré dans l'ancien droit par la jurisprudence des cours souveraines, attestée par Dumoulin dans son Commentaire sur l'édit des petites dates, p. 27, 23 et 45; et par l'ordonnance de 4629, art. 121. Au reste, il n'y a plus en

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