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Adrien II donna à l'empereur Charlemagne un epitome, afin d'inviter ce prince à le faire toujours observer dans ses états, comme ses prédécesseurs avaient fait, et il le pria de l'envoyer à toutes les églises d'Occident. (Voyez dans le Recueil de Durand, tome I, page 84, l'épître on vers latins qu'on suppose avoir été adressée à ce sujet par le pape Adrien à Charlemagne.)

Corpus canonum.] Les frères Pithou en ont laissé une très-bonne édition, qui a été exécutée avec luxe à l'Imprimerie royale en 1687. On lit en tête de l'avertissement au lecteur Corpus hoc canonicum primò Moguntiæ editum anno 1525, ut adversùs Lutherum Ecclesia eo se tueretur, posteà Parisiis anno 1609, à Francisco Pithæo, tibi repræsentamus, duabus partibus constans: canonibus iis qui dicuntur apostolorum et quorundam conciliorum; dein, decretis pontificum romanorum. Ex his compositus est Codex canonum vetus Ecclesiæ.

Epitres décrétales. ] Il importe de distinguer les vraies Décrétales des fausses Décrétales, qu'on a ainsi nommées parce qu'elles ne sont point des papes, auxquels leur titre les attribue, et que le fond même de ces pièces est un ouvrage supposé. L'ambition et la politique firent fabriquer ces décrétales: l'ignorance et la crédulité de ces temps les accréditèrent. Gratien les a rapportées dans son Décret comme pièces authentiques, ce qui est un grand défaut dont sa compilation n'a jamais été purgée. Les principaux objets de ces décrétales furent d'attribuer aux ecclésiastiques l'indépendance de toute juridiction séculière, d'étendre beaucoup l'autorité du pape, et de faire des plaintes sur l'usurpation du temporel des Églises. On y suppose d'anciens canons, portant qu'on ne tiendra jamais un seul concile provincial sans la permission du pape,

et que toutes les causes ecclésiastiques ressortiront à lui. On y fait parler les successeurs immédiats des apôtres; on leur suppose des écrits. Tout se ressent du mauvais style du vine siècle; tout est plein de fautes contre l'histoire et la géographie. Il a fallu toutes les lumières et toute la critique du XVIIe siècle pour en démêler la fausseté; et, quand l'erreur a été reconnue, plusieurs usages, auxquels ces pièces avaient donné lieu, n'ont pas laissé de subsister la longue possession a prévalu.

XLII.

Choses dont le pape ne peut dispenser.

Le pape ne peut dispenser, pour quelque cause que ce soit, de ce qui est de droit divin et naturel, ny de ce dont les saincts conciles ne lui permettent de faire grace.

Droit divin et naturel.] C'est le cas d'appliquer ici la maxime: Civilis ratio jura naturalia corrompere non potest. Dispenser de ce qui est à la fois de droit divin et naturel, ce serait autoriser le crime; car on ne nomme ainsi que ce qui est contre les lois, et des lois souvent moins respectables. « Aucun ecclésiastique, même le pape, ne peut donner de telles dispenses, même sous prétexte d'éviter un plus grand mal; puisqu'il n'est pas permis de faire un mal pour qu'il en arrive un bien. » D'HÉRICOURT, E. XVIII, 23.)—« Accorder des dispenses sans cause, dit le même auteur, c'est détruire la discipline ecclésiastique. » ( Ibid., no 24.) - En pareil cas, suivant saint Bernard, non planè fidelis dispensatio, sed crudelis dissipatio est. ( Lib. III, de Considerat. ad Eugen. papam.)

Les ultramontains (et surtout les ultramontains jésuites) professent d'autres maximes; ils prétendent que le pape a le pouvoir le plus indéfini de dispenser de l'exécution de toutes les lois, de l'observation de toutes les règles (M. de Pradt, du Jésuitisme, p. 156 en note); et c'est en faisant allusion à ce prétendu pouvoir que le poète a dit:

Est-il quelque serment dont Rome ne relève?

Mais cette doctrine a rencontré de puissants contradicteurs. « Quelques-uns (disait Geoffroy de Vendôme écrivant au cardinal Pierre Léon) croient que tout est permis à l'Église romaine, et qu'elle peut faire par dispense autrement que l'Écriture ne prescrit. Cette opinion est insensée. L'Église romaine n'a pas plus de pouvoir que saint Pierre ni que Jésus-Christ même, qui n'est pas venu abolir la loi, mais l'accomplir. Elle doit donc se servir de la puissance que Jésus-Christ lui a donnée, non selon sa volonté, mais selon la tradition de Jésus-Christ; et si le pape est averti par quelqu'un de corriger ce qu'il a fait excédant les bornes de la justice, il doit recevoir cet avis comme saint Pierre reçut celui de saint Paul. » Ces paroles, dit Fleury, dans son Hist. ecclés., liv. LXVII, no 26, sont d'autant plus remarquables, qu'elles sont d'un cardinal écrivant à un cardinal.

Le même historien, livre LII, no 46, in fin., fait remarquer la fermeté des anciens papes à refuser les dispenses, pour s'en tenir inviolablement aux lois de la véritable discipline.

La règle posée en cette matière par le concile de Trente, sess. XXIV, chap. V., est qu'on ne peut donner des dispenses que rarement, pour cause légitime et gratuitement : et cependant Dieu sait quel abus et quel trafic on en a faits, et quels maux en sont résultés ! Le compilateur des

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Mémoires du clergé, t. II, p. 808, remarque avec raison <«< qu'on a introduit plusieurs maximes dans le droit cano»nique romain, pour avoir lieu de multiplier les dispenses, >> qui ne sont pas suivies en France. »>

Faire grâce. ] Quand les conciles le permettent, alors le pape emprunte de la loi même le droit de dispenser de son exécution.

XLIII.

Quelles règles de chancellerie sont reçues en France.

Les reigles de chancellerie apostolique, durant mesme le pontificat du pape qui les a faictes ou authorisées, ne lient l'Eglise gallicane, sinon en tant que volontairement elle en reçoit la practique, comme elle a faict des trois qu'on appelle, de publicandis resignationibus in partibus, de verisimili notitia obitûs, et de infirmis resignantibus, authorisées par les edits du roy, et arrests de son parlement, ausquelles le pape ny son legat ne peuvent deroger, fors à celle de infirmis resignantibus, de laquelle on reçoit leur dispense, mesme au prejudice des graduez nommez en leur mois.

Comme elle a fait des trois. ] « Ces trois règles de chancellerie reçues en France sont observées comme les lois faites par nos rois, et non pas comme règles de la chancellerie de Rome, et sont tenues comme lois perpétuelles et fixes, sans que, par la mort du pape, elles puissent être révoquées ou autrement altérées. » DUPUY.

De publicandis resignationibus.] Cette règle porte que la résignation d'un bénéfice est sans effet, si le résigna

taire ne l'a publiée, et n'a pris possession dans les six mois, s'il est pourvu en cour de Rome.

De verisimili notitia. ] Suivant cette règle, les provisions sur vacance par mort sont nulles, si, du jour de la date, il n'y a assez de temps pour faire que du lieu où la personne est décédée, la vacance ait pu vraisemblablement venir à la connaissance du pape. Quoique l'on ait satisfait à cette règle, les provisions seront nulles, s'il est prouvé que l'on ait fait partir le courrier avant la vacance, ce qui s'appelle course ambitieuse.

De infirmis resignantibus.] Si un malade a résigné, et est décédé dans les vingt jours, la provision sur cette résignation est nulle, et le bénéfice réputé vacant par mort. C'est ainsi que d'après l'art. 1975 du Code civil, « tout contrat de rente viagère est nul lorsqu'il a été créé sur la tête d'une personne atteinte de la maladie dont elle est décédée dans les vingt jours de la date du contrat. » Cette troisième règle de chancellerie n'est plus d'usage en France, dit l'abbé Fleury. D'Héricourt, Lois ecclésiastiques, lettre F. XIV, no 29, indique les cas d'exception où elle conserve sa force, et où il n'est pas permis d'y déroger.

XLIV.

Bulles du pape ne s'exécutent en France sans pareatis de l'autorité temporelle.

Bulles ou lettres apostoliques de citation executoriales, fulminatoires ou autres, ne s'executent en France sans pareatis du roy ou de ses officiers; et l'execution qui s'en peut faire par le lay apres la permission, se faict par le juge royal ordinaire de l'authorité du roy, et non authoritate apostolicâ, pour eviter distraction et

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