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au contenu des bulles, sans qu'on soit tenu d'exhiber les procurations en vertu desquelles les resignations sont faictes, ou sans faire autre preuve valable de la procuration au préjudice du resignant, s'il denie ou contredit telle resignation.

Preuve. ] Sans cela on eût pu supposer impunément toute espèce de résignations. Art. 9 de l'édit de 1691. Au surplus, on m'assure qu'il n'y a plus de résignation aujourd'hui.

LIII.

Clauses dont le pape ne peut user.

Aussi ne se peut és collations et provisions de benefices mettre clause anteferri, ou autre semblable, au prejudice de ceux ausquels paravant et lors de telle provision seroit acquis droit pour obtenir le benefice.

Clause anteferri. ] Ces collations avec la clause anteferri eurent cours principalement pendant le grand schisme d'Occident, où les papes, pour favoriser les cardinaux qui étaient de leur obédience, cherchaient à les accabler de bénéfices, au préjudice même de ceux qui avaient déjà un droit acquis auxdits bénéfices; et pour cela inséraient dans leurs bulles la clause anteferri, voulant qu'ils fussent préférés à tous autres. » (LENGLET.) C'est ce que nous explique la grande Chronique de Saint-Denis, au tome III, en la vie de Charles VI, sur l'an 1384. « Le schisme entre Urbain et Clément pape, y est-il dit, fit de grands dommages à l'Église, au royaume de France, et autre part avec. Clément avoit bien trente-six cardinaux, lesquels, mus de grands avarices, soutinrent d'avoir à peine tous les bénéfices de ce royaume, par divers moyens; et envoyèrent

leurs serviteurs parmi le royaume, enquerrant à la valeur des prélatures, prieurés et autres bénéfices; et usoit Clément de réservations, donnoit grâces expectatives aux cardinaux et anteferri. Et fut la chose en ce point que nul homme de bien, tant de l'université que autres, ne pouvoit avoir bénéfices. » Aussi Louis XI se vit contraint de publier en 4464, le 10 septembre, un édit pour empêcher qu'à l'avenir on n'eût aucun égard à cette clause, si préjudiciable au bien de l'Église de France et aux sujets du royaume. Et cependant l'abus continua; car les États assemblés à Tours, en 1483, s'en plaignirent au roi, le priant d'y apporter prompt remède. « . . . Mais ( portent les cahiers des trois Ordres) l'on ne sceut si bien lier la plaie par concordats, que la subtilité romaine ne ouvrist ladite plaie par nonobstances et anteferri; tellement, qu'infinie somme d'or et d'argent alla en cour de Rome. »

LIV.

Des mandats et réserves condamnés. Mandats de providendo, graces, expectatives generales ou speciales, reservations, regrez, translations, mesmes de prelatures, dignitez, et autres benefices estans à la nomination du roy, ou presentation de patrons laïcs, et telles autres usances de cour de Rome declarées abusives par les edits du roy et arrests de son parlement, ne sont receues et n'ont lieu en France.

Mandats de providendo.] « On nomme mandat de providendo un rescrit du pape qui mande à l'évêque ou autre collateur de pourvoir de bénéfice celui qui est nommé par le pape, lorsque le bénéfice vaquera. Il n'y a pas plus de quatre cents ans que l'on en a usé. Voyez l'ordon→

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nance de Louis XII, de l'an 4500, notable contre les mandats, et la déclaration de François Ier de 1527. » Dupuy.

Graces expectatives. ] Ce sont lettres gracieuses, fondées en la seule grâce du pape, sans rigueur aucune de justice, avec condition, si l'impétrant est trouvé digne pour le bénéfice dont est question non encore vacant. Est votum captandæ mortis. » (Id.)

Les papes s'étaient aussi attribué le droit de donner à des chanoines des coadjuteurs, sub exspectatione futuræ prebendæ. (Voyez l'art. LXII ci-après.)

Reservations. ] « C'est quand le pape réservait à sa collation et entière disposition les évêchés et autres prélatures lorsqu'elles viendront à vaquer, en interdisant l'élection ou collation ordinaire à ceux à qui elle appartient. Ces bénéfices réservés étaient appelés consistoriaux, par un titre spécieux, pour donner à entendre que le pape seul ne les voulait conférer, mais lui avec les cardinaux en consistoire, comme si la suffisance et la capacité étaient mieux connues à Rome que sur les lieux où sont les prélatures. » (Dupuy.)

On voit par là, et par beaucoup d'autres entreprises de ce genre, que Rome avait aussi son système de centralisation.

L'abus des réserves avait été porté à l'excès. On en jugera par ce passage, que j'extrais encore de Dupuy : « Il y en a, dit-il, qui ont parlé de réservations mentales (ou in petto) dont les papes se sont servis, et qui furent fort blàmées au concile de Trente; car c'étaient de vraies fraudes indignes et intolerables. C'était vouloir donner de la vertu à une pensée non communiquée ni publiée, et dont même il y avait sujet de croire qu'elle n'est pas seulement conçue en l'esprit, mais forgée après que le fait est arrivé. »

Regrez. ] « La grace de regrez est quand un homme qui a résigné son bénéfice a la faculté de rentrer en la jouissance d'icelui venant en convalescence. » DUPUY. (Voyez D'HÉRICOURT, lettre F, chap. xiv, no 24.)

Translation. ] « Comme le pape ne peut eriger des archevèchés ou évêchés en ce royaume, sinon à la demande du roi et de son consentement, il ne peut aussi faire des translations de prélatures, dignités et autres bénéfices étant à lạ nomination du roi sans son consentement. » (LENGLET.)

LV.

De la prévention : jusqu'à quel point elle est tolérée.

Et quant à la prevention, le pape n'en use que par souffrance, au moyen du concordat publié du tres-expres commandement du roy contre plusieurs remontrances de sa cour de parlement, oppositions formées, protestations et appellations interjetées. Et depuis encores tous les trois Estats du royaume assemblez en firent plainte, sur laquelle furent envoyez ambassadeurs à Rome pour faire cesser ceste entreprise, qu'on a parfois dissimulée et tolérée en la personne du pape, mais non d'autre, quelque delegation, vicariat, ou faculté qu'il eust de sa saincteté; et si on l'a restraint tant qu'on a peu, jusques à juger que la collation nulle de l'ordinaire empesche telle prevention.

El quant à la prevention. ] On nomme prévention le droit que s'est attribué le pape de conférer les bénéfices vacants,

quand les provisions qu'il en accorde précèdent la collation de l'ordinairé ou la présentation du patron ecclésiastique au collateur. On conçoit alors l'empressement des solliciteurs à se pourvoir en cour de Rome; ils eussent employé même le télégraphe pour donner avis des vacances! Mais aussi, quelle source d'abus! On les trouve signalés dans les instructions données par Charles IX au président Du Ferrier, lorsqu'il l'envoya au pape pour traiter des annates et préventions, en 1564: « Et pour le regard des préventions, y est-il dit, il se trouve que plusieurs ignorans et malvivans étoient pourvus de bénéfices, pour être, par le moyen desdites préventions, conférés à ceux qui courent le mieux, et non pas à ceux qui le plus méri– tent et en sont dignes; qui est cause que plusieurs et divers scandales adviennent à l'Église, pour être administrée par gens non suffisans et capables, et là-dessus naissent et engendrent ordinairement les troubles en la religion, tels et si grands que nous les voyons aujourd'hui. » Cette instruction est aux Preuves, chap. xxII, no 34, ainsi que la harangue dudit sieur Du Ferrier au pape, en conséquence de ladite instruction, no 35.

Tres-expres commandement du roy.] Sans quoi il n'eût certainement pas été enregistré.

Plusieurs remontrances.] Pithou a eu raison d'énumérer tous ces actes de résistance, qui prouvent que le concordat n'a jamais été reçu avec l'assentiment libre et cordial qu'obtiennent ordinairement les bonnes lois; mais qu'il a été imposé par puissance absolue. Ce qui a inspiré à Pibrac ce quatrain si connu ;

Je hais ces mots de puissance absolue,
De plein pouvoir, de propre mouvement :
Aux saints décrets ils ont premièrement,
Puis à nos lois la puissance tollue.

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