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cette journée. Peu de tems après il força Tennemi dans Giessen, et le poursuivit jusqu'à Steinberg; mais ayant été repoussé à son tour et obligé de fuir devant des forces supérieures, son cheval s'abattit au moment où il s'exposait, comme simple soldat, pour sauver une pièce d'artillerie volante; et il fut fait prisonnier par les Autrichiens le 20 avril 1797.

Le général Hoche, qui commandait alors l'armée de Sambre-et-Meuse, demanda et obtint son échange. En rentrant à l'armée il fut promu au grade de général de division.

A l'époque du 18 fructidor an 5 (4 septembre 1797), le général Ney se prononça contre le parti de Clichy, qui dominait alors dans le Conseil : c'est la seule fois qu'on trouve son nom inscrit dans les annales politiques de la révolution..

En 1799 il passa à l'armée du Rhin, et commandait la cavalerie à la bataille de la Thur, le 26 mai.

Le 3 novembre suivant fut signalé par une action extraordinaire de ce général, à laquelle nous donnerons quelque développement, parce qu'elle peut jeter un grand jour sur son caractère.

La ville de Manheim, que le Rhin séparait de l'armée française, était défendue par une nombreuse garnison : cette place était en quelque sorte la clef de l'Allemagne de ce côté. Grande et située dans un pays fertile, il était extrêmement important pour les Français de s'en rendre maîtres, parce qu'elle assurait leur établis sement de l'autre côté du fleuve. Mais cette entreprise était pour ainsi dire im-. praticable avec les moyens ordinaires. Le passage du Rhin par des forces suffisantes n'aurait pu s'effectuer sans des préparatifs qui auraient donné l'éveil aux ennemis, et ils étaient en mesure de repousser toute attaque de vive force. Le général Ney résolut d'employer la ruse. Il savait qu'une partie des troupes de la garnison était cantonnée dans les villages entre le fleuve et la ville, attendant, pour rentrer dans la place, que le passage du Rhin eût été forcé. Dans cet état de choses, un coup de main pouvait être tenté, mais il pré. sentait les plus grands périls; il fallait passer le Rhin sans être vu, traverser tous les cantonnemens ennemis, arriver sous les murs de la ville, et s'en emparer avant que les troupes logées à l'extérieur eus

sent pu se réunir; il fallait que cette expédition s'exécutât avec très-peu de monde, pour que le débarquement et la marche du détachement ne fussent point aperçus; enfin, il fallait des guides sûrs pour éviter les postes ennemis, et une connaissance exacte de la ville, afin d'agir avec précision, suivant les circonstances. Dans tous les cas, la réussite était douteuse, la retraite impossible, et c'était un de ces coups de témérité qui excèdent les devoirs d'un général en chef, et exigent dans le soldat qui les entreprend sans obligation un sentiment plus exalté que le courage.

Comme dans cette expédition le point le plus important était la connaissance des lieux et des forces de l'ennemi, le général Ney ne crut pas devoir se fier, à cet égard, au rapport de ses espions; il voulut s'en assurer par lui-même. Général de division, il se couvre d'un travestissement prussien, passe le Rhin pendant la nuit, s'introduit dans la ville le lendemain, observe les postés, s'informe de tout, et s'expose ainsi, dans un rôle qui compromettait sa franchise et la dignité de son grade, à une mort, qui n'était pas celle des braves.

A l'aide de la langue allemande, qui,

comme on sait, était celle de son pays, il ne fut point reconnu; il retourna à son armée, choisit 150 soldats audacieux comme lui, et déterminés à risquer leur vie dans cette entreprise extraordinaire : avec ce faible détachement, il effectua sans obstacle le passage du Rhin à huit heures du soir. Il parvient à onze heures sous les murs de la ville, attaque et enlève successivement à la baïonnette tous les ouvrages avancés. Par un bonheur qu'il n'avait pu prévoir, parce qu'il fut le résultat d'une faute du commandant ennemi, la garnison fait une sortie: il se précipite sur elle, la repousse, entre avec elle dans la place, et, favorisé par les ténèbres, qui dérobaient à l'ennemi la faiblesse de son détachement, aidé sur-tout par l'épouvante que l'impétuosité de son attaque avait rés pandue, il parvient à se rendre maître de la ville. Quelques jours après, l'avant-garde de l'armée ayant été enveloppée près de Lauffen, Ney accourut, la dégagea, et poursuivit l'ennemi jusqu'a Moeskirch, où il lui fit 1500 prisonniers.

En 1800, il commandait à Worms et Frankenthal la 4e division, qui formait la gauche de l'armée du Rhin; le 5 juin

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il livra la bataille de l'Iller où il culbuta l'ennemi, lui prit toute son artillerie, et le poursuivit depuis Lauershausen jusqu'à Weissenhorn.

Forcé de prendre le commandement des troupes dispersées de Huningue à Dusseldorf, en moins de huit jours il organisa, treize fausses attaques et passages du Rhin qui réussirent tous le même jour; de suite, à la tête de 9,000 hommes, il fut jusque sous les murs de Francfort attaquer et détruire 20,000 Mayençais soldés par l'Angleterre et soutenus par 2,000 Autrichiens. Il revint le lendemain passer le Mein près de Mayence, culbuta tout ce qui se trouvait sur son passage, traversa a marches forcées tout le pays de Hesse-Darmstad, passa le Neker à Ladenbourg, au gué du maréchal de Turenne, s'empara de nouveau de Manheim, Heidelberg, Brucksal, Heilbronn, et parvint jusqu'aux portes de Stuttgard.

Le prince Charles, qui était alors en Suisse, voyant Ulm menacé d'une irruption qui aurait découvert son aile droite, fut obligé d'envoyer sur ce point de forts détachemens qui affaiblirent son centre. Les Français profitèrent de cette diversion

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