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chal qu'on lui accordât un délai suffisant pour faire venir les personnes dont le témoignage devait lui être favorable.

La chambre, après une courte délibération, prit la décision suivante :

« La chambre des pairs, faisant droit à la demande de l'accusé pour obtenir un délai qui lui donne le tems de faire entendre les témoins dont il a signifié la liste au commissaire du Roi, par exploit du 19 de ce mois; après avoir entendu les conclusions du procureur du Roi, ajourne au 4 décembre prochain, dix heures du matin, pour tout délai, l'examen' des pièces, l'ouverture des débats et le jugement, toute assignation donnée, te

nant. »

Après ce jugement, le maréchal fut reconduit à la Conciergerie.

Le 4 décembre suivant, jour fixé pour la reprise de la procédure, la séance ayant été ouverte, le procureur-général prit la parole, et dit :

<< La lecture donnée à la chambre de l'acte d'accusation, expose tous les griefs contre le maréchal Ney. Les retracer en détail, après qu'ils ont été déjà mis sous les yeux, ce serait et faire un double emploi et perpétuer les sentimens de dou

.

leur qu'ils ont déjà excités en vous: je crois devoir faire, à la rapidité de la marche de l'affaire, et pour l'intérêt de la justification et de l'accusation, le sacrifice du développement que je pourrais donner' à ces imputations. Je vais donc me borner à faire donner, par le secrétaire-archiviste, lecture de la liste des témoins. »

Le greffier en chef a donné lecture de: la liste des témoins appelés à la requête du ministère public et de l'accusé.

Les premiers étaient au nombre de 37% voici leurs noms.

MM. le duc de Duras, Magin, Pantin, Perrache, le chevalier de Richemont, de: Beausire, le duc de Reggio, le baron Clouet, le comte de Faverney, le prince de Poix, le comte de Scey, le comte de la Genetière, le comte de Grivel, le comte de Bourmont, de Balliencourt, Charmoille de Fresnoy, le chevalier Grison, Tumeril de Lecourt, Batardy, le duc de Mailhé, le. baron Passinges de Préchamp, le baron Mermet, le baron Gauthier, le marquis de Sauran, Régnault de Saint-Amour, Cayrol, le duc d'Albufera, de Langue de Bourcin, le baron de Montgenet, Boulouze le baron Capelle, le marquis de Vaukchier,

Bessières, Guy, le chevalier Durand, le comte Heudelet, Mad. Maury.

Les témoins assignés à la requête du maréchal étaient au nombre de quatre, savoir :

MM. le prince d'Eckmuhl, le comte de Bondy, le général Guilleminot, Bignon.

Après la lecture de cette liste, le maréchal prit la parole: « Je vais répondre, dit-il, à toutes les inculpations, sauf la réserve de faire valoir, par mes défenseurs, les moyens tirés de l'art. 12 de la convention du 3 juillet, et des dispositions de celle du 20 novembre 1815. »

Le chancelier fit ensuite subir au maréchal l'interrogatoire suivant :

D. Où étiez-vous à l'époque du débarquement de Bonaparte ?

R. A ma terre des Coudreaux..

D. Pourquoi l'avez-vous quittée ?

d'a

R. Pour me rendre à mon gouvernement, près un ordre du ministre de la guerre, qui est ici dans mes papiers ou qui été remis à V.Exc.. D. Quel est l'officier qui vous l'a transmis ? R. Je ne me le rappelle pas; il doit être ici ? D. Ne vous a-t-il rien appris du débarquement de Bonaparte ?

R. Non: Il m'a remis la lettre, et ne m'a rien dit autre chose. Il était parti de Paris le 5 mars en sortant d'un bal. Je lui ai proposé à dîner chez moi; il a dîné, il a fait ses préparatifs et est

D. Il ne vous a donc rien dit du débarquement de Bonaparte?

R. Rien. Il ne le savait pas. Demandez-le à M. le duc de Montmorenci : personne ne le savait, pas même à Paris.

D. Quand êtes-vous arrivé à Paris?

R. Le 7 au soir. J'étais parti dans la nuit du 6. Il y a treize heures de poste.

D. Comment l'avez-vous appris à Paris? R. Je l'ai su par mon notaire; étant chez lui pour mes affaires particulières, il me dit: Savez-vous la grande nouvelle ? — Quelle Celle du débarquement de Bo

nouvelle ?

naparte. »

D. Avez-vous vu le ministre de la guerre ? R. Oui, après avoir fait ma visite au duc de Berri.

D. Que vous a dit le ministre ?

R. Il n'a pas voulu s'expliquer sur ma mission. Il m'a dit : « Vous trouverez à Besançon des ordres. D'ailleurs Bourmont est instruit. >>

D. Avez-vous vu le Roi ?

R. Je l'ai vu. On m'a dit d'abord que S. M. était souffrante, que je ne pouvais pas la voir. J'ai insisté; enfin je lui ai été présenté. Je lui ai demandé si elle n'avait rien de particulier à m'ordonner; elle ne se rappelait en aucune manière d'aucune disposition militaire. Sur ce que je suis censé lui avoir dit que je ramenerais Bonaparte dans une cage de fer, dussé-je être fusillé, lacéré en mille morceaux, je ne me rappelle pas l'avoir dit. J'ai dit que son entreprise était sí extravagante que, si on le prenait, il méritait d'être mis dans une cage de fer. Cependant, si je l'avais dit, ce serait une sottise impardonnable; mais ce serait une preuve que j'avais le désir de servir le Roi.

D. Quand êtes-vous parti de Paris?
R. Le 8 mars.

D. Par quel ordre ?

R. Sur la lettre du ministre de la guerre. D. Reconnaissez-vous les ordres?

R. Oui...... la lettre du 5 mars.

(Le greffier donne lecture de cette lettre.) D. Avez-vous fait exécuter ces ordres ?

R. On peut voir, à la simple lecture, qu'il n'y avait rien à faire. Je ne commandais que des dépôts. Bourmont avait le commandement. D. Quel jour arrivâtes-vous à Lons-le-Saulnier ?

R. Le 12.

D. Qu'avez-vous fait le 12?

R. J'ai réuni les officiers et les ai rappelés à leurs devoirs et à leur serment. A mesure que je trouvais des soldats, je les réunissais et leur parlais de leurs devoirs et de leurs sermens.

D. Qu'avez-vous fait dans la nuit du 13 au 14?
R. J'ai reçu plusieurs agens de Bonaparte ?
D. A quelle heure les avez-vous reçus ?
R. A une heure, deux heures ou trois heures.
D. Quels étaient ces émissaires ?

R. Plusieurs individus des officiers de la garde déguisés; un d'eux blessé à la main. Dans le premier interrogatoire du ministre de la police, je m'en suis expliqué.

On a dit que lorsque S. M. m'avait tendu la main, j'avais hésité à la baiser; je n'ai jamais hésité.

D. Que vous ont dit ces émissaires?

R. Ils m'apportaient une lettre de Bertrand, qui me disait que tout était arrangé; qu'un envoyé d'Autriche était allé à l'île d'Elbe; que le Roi devait quitter la France; que c'était

* Voyez livre a tome Ier, page 124.

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