Page images
PDF
EPUB
[merged small][merged small][ocr errors]

Les traits de courage qui honorent l'armée, et qui ont distingué tant de soldats au combat de Smolensk, seront l'objet d'un rapport particulier. Jamais l'armée française n'a montré plus d'intrépidité que dans cette campagne, etc., etc., etc.

FRAGMENT

DU PROCÈS DU MARÉCHAL DE BIRON.

LIVRE V, PAGE 129, TOME II.

Pendant que S. M. fut à Poictiers, il eut beaucoup d'auis et de grande importance touchant son estat; qu'aucuns seigneurs taschoient d'esbransler, et luy donner des affaires, sous plusieurs et diuers prétextes; et estant en son cabinet, il parla de ces remuëmens au mareschal de Bouillon, ainsi qu'il luy demandoit congé d'aller voir ses terres de Gascongne, lesquelles il n'auoit veuës depuis huict ans. Enquis par S. M. s'il ne sçauoit pas bien ce qui se passoit, et s'il n'en estoit pas comme les autres le mareschal de Bouillon luy respondit librement, Qu'il y auoit grand subiect de mescontentement, de ce qu'vn seul commandoit à tous les Estats du royaume, et que donnant ordre à ce poinct là, toute la deliberation des seigneurs seroit aisee, au reste ne demandant tous que le seruice de S. M.; le Roy lors luy dit que s'il ne

[ocr errors]

tenoit qu'à cela il les rendroit tous contents; et l'ayant retenu encore quelques iours, finalement luy donna congé et s'en alla en Gascongne.

Durant ce voyage de Poictiers, qui dura prez de deux mois, la cour sembloit triste, le Roy pensif, nul conseil ny d'affaires aucunes de iustice, sinon vn à Blois.

Celuy qui aduertit le roy de la conspiration du mareschal de Biron estoit le sieur de la Fin, lequel auoit luy mesme trempé en ceste conspiration, pour quelque mescontentement qu'il disoit auoir, de ce qu'ayant hazardé plusieurs fois sa vie pour le seruice de S. M., il s'estoit endebté, tellement qu'il n'osoit plus paroistre; mais qu'ayant descouuert que l'on ne se contentoit pas de faire la guerre au roy et troubler le royaume, que mesmes il y auoit des des-: seins sur la vie de S. M. et de son dauphin, qu'il s'en estoit retiré.

Affin d'esclaircir mieux ceste conspiration, il faut la prendre à sa source, et la finir par la mort du conspirateur.

Au voyage que le mareschal de Biron fit à Bruxelles pour veoir iurer la paix à l'archiduc, il vit mettre sa valeur en telle estime par les Espagnols, qu'il ne trouua point mauuais qu'vn nommé Picoté, chassé d'Orléans et retiré en Flandres, luy dist Qu'il estoit en sa puissance de s'esleuer en vne souuerainé fortune auec les Espagnols qui admiroient ses merites (son orgueil receut du contentement de ces paroles); le ma

}

reschal luy respondit Que s'il venoit en France il seroit bien aise qu'il luy en parlast plus clairement. Picoté faict ce rapport aux Espagnols, qui deslors s'asseurerent de l'avoir de leur party, ou qu'ils le perdroient.

[ocr errors]

A son retour de Flandres le roy le voulut marier; il faict du difficile, et donne à cognoistre qu'il recherchoit vne princesse, où il pouuoit bien aspirer; mais estant promise à vn plus grand que luy, il luy estoit impossible d'y paruenir. Le cheualier Breton venant en France (ainsi que nous auons dit cy-dessus, pour traicter les af faires du marquisat de Saluces), luy proposa le mariage de la soeur bastarde du duc, auec deux cents mille escus...

Par la paix de Veruins il voyoit la guerre finie et les espees remises au fourreau: il iugea que sa valeur n'auroit plus de crédit, et qu'il estoit inutile en temps de paix.. Il commença deslors à se plaindre du peu de recompense qu'il auoit eu des seruices faicts à la couronne, quoy qu'il eust eu des recompenses si grandes, qu'il n'y auoit seigneur à la cour de sa qualité qu'il ne lui en portast enuic. Le roy l'auoit faict admiral, puis mareschal de France, lieutenant general au siege d'Amiens, quoy qu'il y eust des princes du sang, de baron qu'il estoit seulement, il le l'auoit faict duc et pair; mais son arrogance et son ambition luy firent tenir de propos des mespris contre

le roy son bien faicteur, et vser de beaucoup de paroles libres et desbordees contre S. M.

Chacun cherche son semblable. Le mareschal de Biron trouue le sieur de la Fin re-tiré en sa maison, mescontent de S. M., pour vne querelle qu'il auoit contre le sieur Desdiguieres, et aussi pour les raisons cy dessus dites. Il sçauoit bien que la Fin auoit négotié autrefois auec l'Espagnol et le duc de Sauoye; c'est pourquoy il le iugea propre pour lui fier ses desseins. Leurs volon tez furent bien tost vnies pour esleuer leur fortune à la ruine et au trouble de leur patrie.

La Fin donc est confident du mareschal; ils enuoyent au duc de Sauoye un curé et un religieux de l'ordre de Čisteaux à Milan, et Picoté, en Espagne, pour voir et proposer leurs intentions.

[ocr errors]

Le voyage que le duc de Sauoye fit à Paris déracina le peu de fleurs de lys que le mareschal auoit encores dans le cœur, sur l'offre que l'on luy fit du mariage de la troisiesme fille du duc de Sauoye; ce fut un grand contentement à son ambition, car deslors il se presuma d'estre un iour cousin de l'empereur et neveu du roy d'Espagne; aussi il fit dire au duc qu'il donneroit tant d'affaires au roy dans le royaume, qu'il ne songeroit pas au marquisat. Voilà pourquoy le duc de Sauoye ne se soucia de tenir les promesses du traicté de Paris.

La guerre declaree en Sauoye, le mares

« PreviousContinue »