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cessé toute réclamation pour la famille de France; depuis 1796 elle était en alliance avec la république. Qu'ont à faire les particuliers en face de pareilles autorités? De son côté, la France était rentrée dans l'ordre de la religion et des sociétés. Comment imposer à des hommes pensans, à des évêques, des devoirs semblables, dans des positions si différentes? Comment vouloir les enchaîner par des paroles, à des choses variables, comme si les choses étaient immuables et éternelles, et les juger dans un temps, par les choses d'un autre?

Ces évêques se sont conduits en citoyens et en prêtres éclairés et courageux. Ils ont fait passer avant tout, même leur renommée, la religion et la patrie. Leur conduite est un hommage véritable rendu aux principes sur lesquels reposent la sûreté et la tranquillité des sociétés.

Ces principes exigent invariablement de s'abstenir de toute attaque contre l'ordre établi dans l'État, de tout sacrifier plutôt que de consentir à le troubler, et même pour le défendre; ces évêques l'avaient fait. Nous l'avous tous fait comme eux: ce devoir accompli,

lorsque le changement est devenu irrévocable, lorsque tout espoir de retour est perdu, alors le devoir change, non pas de nature, mais d'objet. Il reste toujours la patrie pour le citoyen, et la religion pour le prêtre : c'est à cela qu'il doit s'attacher. Tout ce qu'il a fait sur cette ligne est parfaitement conforme à la raison et au devoir. Voyez ce qu'en pensait l'amiral Blake. Le contraire n'est plus qu'une ténacité aveugle, souvent intéressée, que des événemens inouïs peuvent faire prévaloir, mais ne justifient pas. Des hommes sensés ne prennent point pour base de leur conduite ce qui est hors de la nature, ce qui dépend des coups du sort ou des caprices d'un homme. Si la paix se fut faite, comme elle a pu l'être cent fois, que devenait cette pertinacité? Lorsque le fils de Napoléon naquit au milieu de la résignation de l'Europe, lorsque celui-ci marchait en Russie, les opposans ne passaient-ils point pour des insensés, et l'on sait où l'on aurait envoyé faire ses observations celui qui, en 1810, aurait, au bout de sa lunette, montré les événemens de 1814. Parce qu'un homme a rendu la sagesse folie, et la folie sa

gesse, il ne faut pas jouer ses actions au dez.

Le reproche adressé à M. de Boisgelin et autres, eût été fondé, s'ils avaient laissé échapper le moindre mot contre ceux envers qui ils avaient proclamé leur attachement, s'ils avaient foulé aux pieds ce qu'ils avaient adoré, et adoré ce qu'ils avaient foulé aux pieds; alors ils auraient ressemblé à ces hommes qui, après avoir servi Napoléon dans toutes sortes de postes, aujourd'hui ne parlent que d'usurpation et de légitimité, sans s'apercevoir que par-là ils montrent que la fidélité ou l'instruction leur sont venues un peu tard. Mais on n'a rien de pareil à objecter aux premiers; ils se sont bornés à être les serviteurs de la patrie et de la religion, sans être les détracteurs de leurs anciens maîtres.

Ce chapitre est une nouvelle et frappante preuve des inconvéniens du mélange du spirituel avec le temporel. Considérez - en les effets. Voyez où en étaient, en 1801, les auteurs des scènes qui ont été retracées, et où ils en étaient venus en 1808. Quelles peines ne se seraient - on pas épargné de part et d'autre en s'en tenant à la tolérance, comme

tout conviait à le faire; à cette source de paix et de droiture, parce qu'elle l'est de liberté; au lieu qu'avec toutes les religions officielles on court le risque de n'avoir que des visages d'hypocrites et des cœurs de révoltés!

CHAPITRE XXXII.

Faits relatifs à la querelle du pape avec Napoléon.

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Ce titre montre l'intention du récit qui va suivre.

Une querelle s'allume. Les combattans sont de nature différente. L'un a des armes, et l'autre des titres au respect, et les droits que donne la vertu. Tous les coeurs généreux vont être pour lui. L'un est très-faible et l'autre très-fort. A ce titre, l'intérêt ne peut appartenir à celui-ci : le cœur humain ne lui accorde que les droits à la justice. La politique agitseule et en liberté d'un côté. De l'autre, se trouve un bisarre assemblage de la politique avec la religion. Des mécontentemens antérieurs, des excitations étrangères, une grande ignorance du caractère de l'ennemi, que l'on sert en voulant le combattre, des conseils à contresens de tout ce qui existait et de tout ce qu'il

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