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regardait comme la suite d'un plan dirigé dans l'intention de faire naître des doutes sur la validité de l'union qu'il venait de contracter; intention qui, dans une matière aussi entraînait suivant lui les plus graves grave, conséquences pour lui et pour l'État. Napoléon n'était pas homme à mettre en balance la légitimité de sa descendance avec celle des prétentions de la chancellerie romaine; et, dans le fait, d'après la place qu'il occupait alors, il faut convenir que l'une était plus importante que l'autre. Mais il paraît aussi qu'il s'était fait une trop haute idée de l'importance de la démarche des cardinaux; que lui seul s'était aperçu de leur absence; et que dans l'état des choses de ce temps, avec la mince considération que le public leur accordait, tout ce qui venait de leur côté étant sans vertu, n'était bon qu'à être négligé. Tout le monde ne s'expliquait pas non plus comment les mêmes hommes qui n'avaient pas trouvé d'obstacles à leur présence daus la cérémonie du mariage civil, pouvaient en trouver à cette même présence dans la cérémonie religieuse, qui était la conséquence de l'autre ; comment on pouvait séparer deux actes aussi étroitement liés en

semble, et qui dans le fait n'en font qu'un; comment ils avaient pu prendre sur eux, en vertu d'on ne sait quelle subtilité scholastique, sujets et dignitaires dans les États de Napoléon, de déposer sur un acte aussi important, une tache de réprobation propre à produire, dans un temps ou dans l'autre, les conséquences les plus dangereuses, et le tout en vertu de prétentions qui n'ont d'existence légale que dans la chancellerie romaine, qu'aucun code de droit public ou privé, sécuJier ou ecclésiastique, n'a admis. C'était une grande entreprise et à-la-fois une insigne maladresse, que cette séparation tranchante d'une partie des cardinaux avec leurs confrères, dans une circonstance aussi grave. La séparation, en rendant leur droit problématique, mettait tout sur le compte de leur volonté ; car un droit certain aurait entraîné l'unanimité du collège sacré. On devait savoir à qui l'on avait à faire, et ne pas le blesser là précisément où le coup devait se faire ressentir plus vivement. Lorsque l'imprudence eut amené la vengeance, et elle fut sévère, alors de crier au martyre, au persécuteur, à l'héroïsme, à l'atrocité, dans le temps qu'il

n'y avait pas plus d'héroïsme d'un côté que de persécution de l'autre ; qu'il ne se trouvait aucune étoffe de martyre, qui est la religion, mais seulement grande imprudence d'une part, et violent ressentiment de l'autre, pour une injure faite dans une cause purement temporelle: car ce n'était pas le sacrement de mariage que Napoléon défendait, mais la tranquillité de sa descendance, présumée. Il serait curieux de savoir ce qui se passerait dans un pays où des grands de l'État se conduiraient de manière à désapprouver publiquement les actes du prince, dans la circons tance la plus solennelle, jusqu'au point de jetter des lueurs défavorables à la légitimité des droits de sa descendance au trône; et cela en vertu d'un code reconnu par eux seuls. Dans le cas actuel, le manquement était d'attant plus grave aux yeux de Napoléon, qu'il s'agissait de l'établissement d'une nouvelle dynastie, ce qui comporte des précautions dont les anciennes peuvent se passer. Si les

'cardinaux ont eu des intentions contraires à l'établissement de celle-là, si l'épée de la coalition a justifié la prose qu'ils faisaient sans le savoir, on peut les féliciter des récompenses

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que le temps actuel a dû leur procurer; mais du moins faudra-t-il convenir que ce n'était pas à Napoléon à les leur distribuer.

Cet événement, comme mille autres, est déjà loin de nous : il n'en reste qu'une seule chose, la preuve de la nécessité de connaître enfin les droits de la cour de Rome, et d'en convenir une fois pour toutes. Fut-il jamais chose plus singulière, qu'une puissance établie au milieu du Monde, sans droits reconnus et limités d'un accord commun', en possession de pouvoir tirer de ses arsenaux, au moment où l'on s'y attend le moins, quelque arme toute neuve à force de vétusté, et dont l'usage embarrassant pour tous entrave les uns, surpris de son apparition, et fait blesser les autres par les moyens que le ressentiment sait employer. La chancellerie romaine est un phénomène au milieu de l'Europe; elle voudrait diriger le Monde avec ses rubriques, comme la vraie Rome le dirigea avec son épée.

y a pourtant quelque différence entre ces deux instrumens.

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CHAPITRE XXXVII.

Commissions ecclésiastiques. -Première députation à

Savone.

Il y a eu deux commissious ecclésiastiques; 1o. En 1809 et 1810.

2o. En 181I.

La première fut creée au fort des querelles de Napoléon avec le pape: alors la captivité de Savone avait lieu. Le pape par sa lettre du 26 août 1809 avait témoigné à M. le cardinal Caprara son éloignement pour accepter l'arrangement proposé par Napoléon, d'après lequel les bulles devaient être délivrées sans la mention de son nom, adressées soit au conseil d'État, soit au ministre des cultes, qui par le consentement tacite des parties, auraient eu l'air d'avoir nommé; cette pièce a été rapportée plus haut: il faut convenir que c'était en soi-même un pauvre expédient, et fort dépourvu de dignité. Napoléon tout en montrant le desir de tout pacifier, cependant dérogeait beaucoup comme chef de l'État. Lorsqu'il s'agit des droits de celui-ci, il n'y a

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