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pas conseil

tant que l'enfer avare. La commission n'était point un parlement investi du droit de remontrance. C'était un simple conseil répondant sur un sujet donné, et rien de plus. S'ingérer à toucher des points délicats, était s'exposer à perdre le bien que l'on pourrait faire. Il fallait fonder la confiance sur la discrétion. On ne disposait pas plus de l'esprit de Napoléon que de celui du pape. Celui-ci lança dans ce temps, et ne lui demanda

pour cela, les brefs de Florence et de Paris, qui firent beaucoup de mal, d'abord à lui, ensuite à la chose elle-même, et puis à MM. D'Astroz, Fontana et Portalis, qu'ils firent emprisonner ou exiler. Car voilà tout ce que l'on y gagna. , La commission avait à agir sur l'esprit de Napoléon, terrain bien neuf pour cette semence, et pour les mains qui devaient l'y répandre. Elle avait à réparer le mal que

faisaient à chaque instant les opiniâtretés zélées de M. le cardinal Fesch, et les démarches inconsidérées d'un grand nombre de prêtres qui ne se contenaient plus. Pour surcroît de maux, la commission se trouvait entre Napoléon et les philosophes de son conseil-d'État, ainsi qu'il s'amusait à le dire, entre les prêtres

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anti-concordatistes et les prêtres plus catholiques que le pape : car le clergé offrait toutes ces nuances, et la voie au milieu d'elles se trouvait fort embarrassée. Mais ce qui était le pire de tout, c'est que chaque membre de la commission avait à veiller au maintien de sa considération personnelle dans son clergé propre, clergé déjà obsédé des terreurs et des préventions qui depuis ont formé l'esprit du clergé. On ne peut se dissimuler que le petit esprit ne s'en fût déjà emparé, et que

les

petits prêtres et la gent dévote n'y eussent obtenu beaucoup trop d'empire.

Une pareille position est une des plus délicates dans laquelle des hommes qui connaissent leurs devoirs puissent se trouver placés : c'était celle de la commission. Aussi, souvent nous est-il arrivé de dire, en songeant de combien d'envies nous étions l'objet :

Ailleurs on nous envie, ici nous gémissons.

Le bon esprit de la commission la conduisit à travailler sur l'esprit même de Napoléon; tont dépendait de là; à bannir tout préjugé défavorable à l'ordre religieux, à ramener sur lui des idées vraies, et à faire naître la de régu

confiance. Elle s'établit. La commission rapportait tout à deux objets principaux également conformes au devoir et à la raison :

19, La fin des contestations avec le pape, et le terme des souffrances de celui-ci. Elle savait que ce serait la fin des premières qui amènerait la fin des secondes; c'est pourquoi elle y tendait avec persévérance. Son intention n'était nullement d'élever le pape audessus du prince, non plus que faire perdre le pape, que déjà elle ne jugeait pas être trop fort. Elle n'avait

pour
but

que lariser l'action des deux pouvoirs l'un à l'égard de l'autre, et conformément au bien de la religion et de l'État : son travail aurait été aussi utile sous Louis XIV que sous Napoléon, dans un temps que dans un autre ; et cette généralité dans son application est le sûr garant de l'excellence de son principe. Aussi la commission ne voulut-elle jamais entrer dans les plans que Napoléon énonçait sur Rome, et sur lesquels ses instructions l'autorisaient à traiter. Elle a toujours voulu s'en tenir à la partie religieuse de l'accord proposé par Napoléon , lui abandonnant de débattre avec le pape toute la partie temporelle.

Ici je dois rendre justice au secours qui nous fut prêté par M. Regnault de Saint-Jean-d'Angély : sa position, loin de devoir l’en priver, est un motif de plus pour la publier. Connaissant l'influence qu'il avait dans les affaires, je crus devoir l'aboucher avec M. l'évêque de Nantes, pour lui faire bien entendre notre position. Nous le trouvâmes très-disposé à nous servir, et pénétré du même sentiment que nous sur les inconvéniens de toutes les querelles religieuses. M. l'évêque de Nantes produisit sur ce ministre-d'État l'effet qu'il obtenait partout. Deux hommes d'autant d'esprit ne pouvaient pas manquer de s'entendre. M. Regnault s'engagea à retarder par tous les moyens en son pouvoir, même par textes de maladie, l'émission des actes pour lesquels son ministère pourrait être requis, et il tint parole : il fit gagner du temps pour arrêter la publication d'un sénatus-consulte que Napoléon avait ordonné, d'après lequel toute espèce de communication avec le pape était interdite. Nous en sentions les redoutables conséquences. Un jour Napoléon, ignorant la cause de ce retard, qui le contrariait beaucoup, s'en prit à moi, et me dit : Vous

des prém'avez empêché de faire mon sénatus-consulte, tout serait fini. Il fallut lui montrer que tout aurait été perdu. Peu de jours après, il reçut un mémoire de la commission sur ce sujet, et se calma. C'était ainsi qu'il fallait procéder avec lui; et ceux qui, pour éviter des malheurs, usaient d'adresse, servaient mieux la religion et la France, que ceux qui ne savaient

que

l'enflammer avec leurs pieuses gaucheries.

Maintenant que ces préliminaires ont bien fait connaître la position des choses, on peut passer avec assurance à l'exposition des travaux de la première commission.

Elle eut à répondre, car il ne faut pas perdre de vue que son rôle se bornait là, et Napoléon n'était pas homme à l'en laisser sor. tir, à trois séries de questions :

La première, sur des objets qui intéressent toute la chrétienté ;

La deuxième, sur des objets relatifs à la France;

La troisième, sur la position actuelle des affaires.

Le lecteur trouvera les questions avec les réponses, à la fin de cet ouvrage On lui de

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